Bolivie

Un certain nombre de mesures dans le domaine des droits économiques, sociaux et culturels ont permis des améliorations dans l’éducation et les services de santé, ainsi que la reconnaissance des droits fonciers des peuples indigènes et des petits paysans. L’affaiblissement de l’appareil judiciaire s’est poursuivi, compromettant les garanties d’équité des procès.

ÉTAT PLURINATIONAL DE BOLIVIE
CHEF DE L’ÉTAT ET DU GOUVERNEMENT : Evo Morales Ayma
PEINE DE MORT : abolie sauf pour crimes exceptionnels
POPULATION : 9,9 millions
ESPÉRANCE DE VIE : 65,4 ans
MORTALITÉ DES MOINS DE CINQ ANS (M/F) : 65 / 56 ‰
TAUX D’ALPHABÉTISATION DES ADULTES : 90,7 %

Contexte

En décembre, le président sortant Evo Morales a été reconduit pour un second mandat à la tête de l’État, son parti ayant remporté la majorité des deux tiers au Congrès. Approuvée en janvier par les électeurs au terme de plus de deux ans de négociations politiques, une nouvelle Constitution a été promulguée en février. Elle fait valoir le rôle central de la majorité indigène « plurinationale » et comporte des dispositions destinées à promouvoir les droits économiques, sociaux et culturels.
Les violences à caractère politique ont diminué, mais les clivages continuaient de peser sur la vie publique. Dans la ville de Santa Cruz, bastion de l’opposition, une unité d’élite de la police a tué en avril trois hommes soupçonnés de fomenter un complot armé contre le gouvernement central. Le déroulement de l’enquête sur cette affaire a soulevé des inquiétudes chez certains.
Des informations judiciaires ont été ouvertes sur quelque 140 cas de viol signalés dans des communautés mennonites de Manitoba. De très jeunes filles figuraient parmi les victimes, selon certaines informations.

Système judiciaire

L’indépendance de la justice demeurait un motif de préoccupation. Les tensions politiques compromettaient la capacité d’institutions charnières à examiner de façon coordonnée les propositions de réforme de l’appareil judiciaire.
Le dernier juge de la Cour constitutionnelle encore en fonction a démissionné en juin, laissant plus de 4 000 affaires en suspens. Le pays se trouvait désormais dépourvu de mécanisme de surveillance des garanties constitutionnelles.
Il était à craindre que l’instabilité constante de l’appareil judiciaire et sa politisation n’affaiblissent le respect des normes internationales en matière d’équité des procès. En 2009, de nombreux juges et auxiliaires de justice, dont plusieurs juges de la Cour suprême, ont été interdits d’exercice et inculpés d’irrégularités de procédure. Parmi eux figurait le président de la Cour suprême, Eddy Fernández, relevé de ses fonctions en mai au motif qu’il aurait intentionnellement retardé l’affaire dite d’« Octobre noir » (voir ci-après).
Dans plusieurs affaires, la marche de la justice a été entravée par une série de recours qui ont donné lieu à des accusations d’ingérence du pouvoir politique. Dans l’affaire des violences qui avaient éclaté en septembre 2008 dans le département de Pando et causé la mort de 19 personnes, des petits paysans pour la plupart, des problèmes de compétence juridictionnelle ralentissaient ainsi la progression du dossier. La mise en cause de certains juges, accusés de partialité, a donné lieu à de nouvelles contestations sur la régularité des procédures.
Deux commissions spéciales établies en 2008 par la Chambre des députés, l’une sur les violences à caractère raciste survenues à Sucre en mai 2008, l’autre sur le massacre de Pando, ont remis leurs conclusions. Plusieurs fonctionnaires et dirigeants locaux inculpés d’actes de torture et de trouble à l’ordre public lors des événements de Sucre étaient en cours de jugement à la fin de l’année. Les députés ont recommandé l’inculpation de plus de 70 personnes, dont l’ancien préfet de Pando, Leopoldo Fernández, pour leur rôle dans le massacre. Un procès devait ouvrir au début de 2010.

Impunité

En mai s’est ouvert le procès de 17 hauts représentants de l’État, dont l’ancien président Gonzalo Sánchez de Lozada, poursuivis pour leur implication dans les événements d’« Octobre noir ». Au moins 67 personnes avaient été tuées et plus de 400 autres blessées lors de ces affrontements survenus en octobre 2003 entre les forces de sécurité et des manifestants, qui protestaient contre le projet des pouvoirs publics de vendre les ressources nationales de gaz. À la fin de l’année, l’ex-chef de l’État se trouvait toujours aux États-Unis, où il était sous le coup d’une demande d’extradition. Plusieurs anciens ministres inculpés dans cette affaire ont quitté la Bolivie dans le courant de l’année, échappant ainsi aux poursuites judiciaires.
En novembre, un tribunal des États-Unis a conclu qu’il existait des motifs suffisants pour juger Gonzalo Sánchez de Lozada et l’ancien ministre de la Défense Carlos Sánchez Berzaín devant une juridiction civile américaine, pour les chefs de crimes contre l’humanité et d’exécutions extrajudiciaires.
Les États-Unis ont extradé l’ex-ministre de l’Intérieur Arce Gómez vers la Bolivie. À son arrivée sur le territoire bolivien, l’ancien ministre, reconnu coupable en 1993 de disparitions forcées, d’actes de torture, de génocide et d’assassinats perpétrés en 1980 et 1981, s’est vu infliger une peine de 30 années d’emprisonnement.
Des travaux médicolégaux destinés à localiser les cadavres des membres d’un mouvement d’opposition armé qui avaient été victimes de disparition forcée en 1970 ont débuté en juillet dans la région rurale de Teoponte, à 300 kilomètres de La Paz. Neuf corps avaient été retrouvés à la fin de l’année. Les recherches concernant les restes d’une cinquantaine d’autres personnes qui seraient mortes dans le secteur se poursuivaient.
Le ministère de la Défense a donné son accord à la mise en place d’une procédure permettant de réclamer auprès des forces armées des documents relatifs à des violations des droits humains commises dans le passé. Dans un premier temps, le président Evo Morales avait affirmé qu’il n’existait aucun dossier sur les personnes victimes de disparition forcée sous les gouvernements précédents.

Droits des peuples indigènes

En mai, l’Instance permanente sur les questions autochtones [ONU] a publié un rapport qui prenait acte des mesures adoptées par les autorités boliviennes pour identifier les pratiques d’asservissement, de travail forcé, de travail non rémunéré et de réduction en esclavage de familles dites « captives ». Le document dénonçait les intérêts bien établis dans les préfectures et les comités civiques des basses terres, qui autorisaient la poursuite de tels abus.
 ?En juillet, le vice-ministre des Terres a annoncé la mise en place d’un nouveau programme visant à installer quelque 2 000 familles originaires des départements de Cochabamba et de La Paz sur 200 000 hectares de terres du département de Pando considérées comme publiques. Les premières familles ont été transférées en août. Devant les inquiétudes soulevées par l’absence d’infrastructures et de services, le programme a toutefois été annulé.

Droits des femmes

Dans le cadre d’une action destinée à réduire la mortalité maternelle, les pouvoirs publics ont mis en place en mai une prime financière à l’intention des femmes enceintes et des jeunes mères effectuant les bilans de santé prénataux et postnataux, par ailleurs gratuits. Le taux de participation était élevé mais, selon certaines informations, les femmes ne possédant pas d’acte de naissance se heurtaient à des obstacles lorsqu’elles tentaient de bénéficier de ces mesures. Les professionnels de la santé ont signalé une augmentation du nombre d’avortements clandestins et du taux de grossesse chez les adolescentes au cours de l’année. Aucune statistique globale fiable susceptible d’étayer ce constat n‘était cependant disponible.

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