CHILI

Les peuples indigènes ont continué de faire campagne pour le respect de leurs droits. Le processus visant à traduire en justice les responsables présumés des atteintes aux droits humains commises dans le passé a enregistré quelques progrès. Il subsistait des obstacles juridiques à l’exercice des droits en matière de sexualité et de procréation.

RÉPUBLIQUE DU CHILI
CHEF DE L’ÉTAT ET DU GOUVERNEMENT : Michelle Bachelet, remplacée par Sebastián Piñera le 11 mars
PEINE DE MORT : abolie sauf pour crimes exceptionnels
POPULATION : 17,1 millions
ESPÉRANCE DE VIE : 78,8 ans
MORTALITÉ DES MOINS DE CINQ ANS (M/F) : 10 / 8 ‰
TAUX D’ALPHABÉTISATION DES ADULTES : 98,6 %

Contexte

En février, un séisme et un raz de marée dévastateurs ont ravagé le sud du pays, faisant jusqu’à 500 victimes et provoquant des dommages très étendus.
En août, à la suite d’un effondrement dans une mine d’or et de cuivre du désert d’Atacama, 33 mineurs se sont retrouvés prisonniers à 700 mètres sous terre. L’opération de sauvetage, qui a pris fin au bout de 69 jours, a été couronnée de succès, mais cet accident a mis en lumière les problèmes de sécurité dans les industries extractives. Au mois de décembre, un incendie qui s’était déclaré dans la prison surpeuplée de San Miguel a provoqué la mort de 83 personnes, attirant une fois encore l’attention sur les conditions de vie déplorables qui règnent dans beaucoup de centres pénitentiaires du pays.
Le Musée de la mémoire – établissement destiné à porter témoignage des violations des droits humains commises entre 1973 et 1990 – a ouvert ses portes au public en janvier. Le processus de mise en place d’une institution nationale des droits humains a débuté en juillet, malgré les réserves persistantes de certains observateurs qui craignaient que son autonomie ne soit pas reconnue dans la Constitution.
Les carabiniers ont reconnu avoir commis des « erreurs » à Santiago, au mois d’août, lorsqu’ils avaient utilisé des gaz lacrymogènes et des canons à eau pour disperser une manifestation pacifique d’étudiants.
En octobre, le Congrès a examiné le projet de modification des dispositions légales en vigueur permettant de traduire des civils devant des tribunaux militaires.

Droits des peuples indigènes

En juillet, 23 prisonniers mapuches ont entamé une grève de la faim pour dénoncer, entre autres, le recours à la législation antiterroriste dans les affaires les concernant et le fait que les procédures légales n’auraient pas été scrupuleusement respectées. Au plus fort de l’action, jusqu’à 34 prisonniers participaient à la grève. Celle-ci a pris fin en octobre, à l’issue de négociations entre représentants des détenus et du gouvernement et de la médiation de l’archevêque Ricardo Ezzati. Un accord a été signé par toutes les parties, précisant que les dossiers ouverts au titre de la loi antiterroriste seraient traités selon les dispositions du droit pénal ordinaire, que des réformes du Code de justice militaire seraient promues par le gouvernement et que d’autres mesures seraient prises en faveur des revendications mapuches, dans le respect des normes internationales relatives aux droits humains.
En août, des groupes indigènes de Rapa Nui (l’Île de Pâques) ont commencé à manifester pour protester contre le fait que leurs terres ancestrales ne leur avaient toujours pas été restituées. En septembre, le gouvernement a instauré des groupes de discussion consacrés à cette question mais de nombreux membres de clans ont refusé les modalités du débat. En décembre, plus de 20 personnes ont été blessées lors d’affrontements violents ayant opposé des agents de sécurité et des membres de clans qui occupaient divers bâtiments et terrains.
Un avant-projet de loi proposant que les peuples indigènes soient reconnus dans la Constitution s’est vu accorder en septembre un statut prioritaire, qui a néanmoins été annulé le mois suivant. À la fin de l’année, le Congrès n’avait toujours pas examiné le texte.

Impunité

En vertu d’un décret signé en janvier par la présidente Michelle Bachelet, une commission a été créée pour permettre aux personnes emprisonnées, torturées ou victimes de disparitions forcées pour des raisons politiques entre 1973 et 1990, mais qui n’ont pas encore été identifiées par les commissions Rettig et Valech, de présenter un dossier. Ces dossiers devaient être déposés dans un délai de six mois par les victimes ou leurs proches ; la commission était ensuite chargée d’instruire les différentes affaires et d’établir la liste des personnes pouvant prétendre aux mêmes indemnités que celles accordées par les commissions Rettig et Valech.
En juillet, la Conférence épiscopale chilienne et des représentants d’Églises évangéliques ont présenté deux propositions visant à accorder des grâces à l’occasion des célébrations du bicentenaire du pays. Le président Piñera a exclu qu’une telle mesure puisse bénéficier à des auteurs de crimes contre l’humanité et a déclaré que l’octroi de grâces pour raisons humanitaires serait décidé au cas par cas.
Des groupes de victimes ont continué d’intenter des actions en justice.

  • En août, un groupe d’anciens conscrits a présenté 438 dossiers accusant l’armée chilienne d’avoir violé les droits fondamentaux de certaines recrues entre 1973 et 1990.
  • En octobre, un groupe représentant les familles de personnes exécutées pour des motifs politiques a annoncé que 300 dossiers avaient été transmis à la justice.
  • En avril, la Cour suprême a confirmé la décision approuvant l’application de la loi d’amnistie dans l’affaire Carmelo Soria, un diplomate espagnol tué en 1976 par les forces de sécurité.
  • En juillet, Manuel Contreras, l’ancien chef de la Direction des services nationaux du renseignement (DINA), a été condamné à 17 années de prison pour sa participation au meurtre du général Carlos Prats et de son épouse, Sofia Cuthbert, assassinés en 1974 à Buenos Aires (Argentine).

Discrimination

En septembre, la Commission interaméricaine des droits de l’homme a introduit une requête auprès de la Cour interaméricaine des droits de l’homme au sujet de l’affaire Karen Atala, une magistrate chilienne qui s’était vu refuser la garde de ses trois filles en raison de son orientation sexuelle. La Commission a également considéré que la justice chilienne ne tenait pas compte de l’intérêt supérieur des enfants en les confiant à leur père.
Des ONG ont dénoncé une campagne visant à faire suspendre un festival de films sur la diversité sexuelle qui devait se tenir en octobre. Les tracts distribués et les courriers envoyés aux salles de projection et aux défenseurs de cette manifestation déploraient que le festival fasse la « promotion » des relations homosexuelles.

Droits sexuels et reproductifs

Au regard du droit, l’avortement demeurait un crime quelles que soient les circonstances. En décembre, deux projets de loi visant à limiter la portée des dispositions pénales applicables à l’avortement ont été soumis au Congrès.
Une ONG a signalé les discriminations dont étaient victimes les femmes séropositives au VIH dans l’accès aux services de santé et la violation systématique de leur droit au respect du secret médical ; la même ONG a identifié plusieurs cas de stérilisations pratiquées sous la contrainte, morale ou physique.

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