BULGARIE

Les Roms étaient très fréquemment victimes de discriminations. Ils ont cette année encore été touchés par des démolitions de logements et des expulsions. Selon une enquête menée par une ONG, un certain nombre d’enfants seraient morts dans des foyers d’accueil, entre 2000 et 2010, de causes qui auraient pu être évitées dont la sous-alimentation, les négligences ou le froid.

RÉPUBLIQUE DE BULGARIE
CHEF DE L’ÉTAT : Gueorgui Parvanov
CHEF DU GOUVERNEMENT : Boïko Borissov
PEINE DE MORT : abolie
POPULATION : 7,5 millions
ESPÉRANCE DE VIE : 73,7 ans
MORTALITÉ DES MOINS DE CINQ ANS (M/F) : 17 / 13 ‰
TAUX D’ALPHABÉTISATION DES ADULTES : 98,3 %

Discriminations - les Roms

Les Roms étaient toujours confrontés à des discriminations généralisées, et le cadre juridique censé assurer la protection des minorités ethniques contre les discriminations était insuffisant. Le Conseil des ministres a soumis en avril au Parlement un projet de modification de la Loi sur la protection contre les discriminations. Ce texte proposait de réduire de neuf à cinq le nombre de membres siégeant au sein de l’organe chargé de veiller à l’application de la législation antidiscrimination et d’examiner les plaintes des particuliers. Plusieurs ONG ont estimé qu’une telle mesure serait fortement préjudiciable à la lutte contre les discriminations.

  • En mars, la Cour européenne des droits de l’homme a conclu que la Bulgarie avait violé la prohibition de la discrimination et le droit de toute personne à bénéficier d’un procès équitable. Un tribunal de district bulgare avait en effet condamné en 2005 une femme rom, déclarée coupable d’escroquerie, à une peine d’emprisonnement ferme, malgré la recommandation du parquet de lui accorder le bénéfice d’un sursis. Le tribunal avait considéré que, notamment « parmi les membres des groupes minoritaires », une peine avec sursis n’était pas perçue comme une condamnation. La Cour européenne a constaté que ce raisonnement traduisait une différence de traitement fondée sur l’appartenance ethnique de la requérante.
  • Après l’expulsion forcée de quelque 200 Roms et la destruction de leurs maisons, en 2009, les autorités municipales de Burgas auraient ordonné en janvier la démolition au bulldozer de 20 logements. Selon la presse locale, le maire de la ville aurait déclaré que la municipalité n’admettrait pas la présence de « Roms errant dans les rues » et « souhaitait faire passer le message » selon lequel toute construction illégale serait immédiatement rasée.
  • Au mois d’avril, un camp de Roms de Vroubnitsa, un quartier de Sofia, a été détruit dans le cadre d’une opération qualifiée par la municipalité de « nettoyage de printemps ». Cette action aurait été menée à la suite d’une pétition déposée en janvier par des habitants du quartier, qui exigeaient l’expulsion des Roms vivant dans ce camp.

Torture et autres mauvais traitements

La manière dont étaient traités les enfants vivant dans des foyers d’accueil suscitait de vives inquiétudes. Les enquêtes menées jusqu’à présent sur des cas de recours à une force excessive posaient également problème.

Les enfants pensionnaires de foyers d’accueil

  • En septembre, le Comité Helsinki de Bulgarie a publié les résultats de son enquête sur les décès d’enfants handicapés mentaux dans des foyers d’accueil, qu’il avait menée avec la collaboration des services du parquet. Les investigations portaient sur 238 décès survenus entre 2000 et 2010. Les causes identifiées par les enquêteurs allaient de la sous-alimentation chronique aux violences, en passant par la négligence, la dégradation générale de l’état physique, les infections, le froid ou encore la pneumonie. L’ONG a laissé entendre que les trois quarts au moins de ces morts auraient pu être évitées et que nombre de ces affaires n’avaient donné lieu à aucune enquête. Après la publication du rapport, une information aurait été ouverte sur 166 de ces cas.

Utilisation excessive de la force
Le Comité Helsinki de Bulgarie a indiqué en juillet que l’usage abusif de la force et des armes à feu par des responsables de l’application des lois restait une pratique courante et largement impunie.

  • En janvier, la Cour suprême de cassation a annulé les peines prononcées à l’encontre de cinq policiers, initialement condamnés à un total de 82 années d’emprisonnement pour avoir battu à mort Angel Dimitrov, en 2005. La Cour a renvoyé l’affaire devant la Cour d’appel militaire, en raison, apparemment, de vices de procédure et en particulier parce que la cause exacte de la mort n’avait pas été correctement établie. En novembre, la Cour d’appel militaire a réduit de moitié les peines de prison initiales.
  • En juillet, la Cour européenne des droits de l’homme a estimé que le droit à la vie de Gancho Vachkov, mortellement blessé d’une balle dans la tête alors que la police tentait de l’arrêter, le 6 juillet 1999, à Sofia, avait été violé. La Cour a conclu que l’usage d’une arme à feu « n’était pas absolument nécessaire » et que l’enquête qui avait suivi n’avait pas été approfondie, impartiale et efficace.
  • La même Cour européenne a jugé en octobre, dans le cadre de l’affaire Karandja c. Bulgarie, que l’État avait violé le droit à la vie de Peter Karandja en juin 1997. La loi bulgare autorise l’usage des armes à feu lors de l’arrestation d’un suspect, quelle que soit la gravité de l’infraction présumée ou la menace que ce dernier constitue pour des tiers. Toutefois, dans le cas de Peter Karandja, cet usage, qui avait entraîné la mort de la victime, a été considéré illégal. La Cour a établi l’existence de carences dans la collecte des éléments de preuve et des dépositions de témoins, ainsi qu’au niveau de l’évaluation des faits. L’État a en outre omis d’informer les proches de la victime des résultats de l’enquête.

Racisme

Plusieurs ONG ont signalé en juin une recrudescence des agressions de la part de groupes d’extrême droite, sans que la police ni le gouvernement ne réagissent en conséquence. Des violences ont notamment été signalées sur des Roms, des étrangers, des musulmans et des gays, lesbiennes, personnes bisexuelles ou trangenres.

  • Le 6 juin, à Sofia, quatre jeunes gens auraient été roués de coups dans un tramway par une vingtaine d’hommes masqués – qui se seraient eux-mêmes présentés comme étant des néo-nazis. Armés de poings américains et de couteaux, leurs agresseurs les ont attaqués alors qu’ils se rendaient à une manifestation organisée devant un centre d’accueil temporaire à Bousmantsi pour dénoncer la détention de ressortissants étrangers. Six des agresseurs présumés ont été arrêtés.

Réfugiés, demandeurs d’asile et migrants

Plusieurs ONG locales ont dénoncé la tendance qu’avaient les autorités à se livrer à des abus de pouvoir lors des expulsions d’étrangers.

  • En février, la Cour européenne des droits de l’homme a estimé que si la Bulgarie procédait à l’expulsion vers le Pakistan d’Ali Raza, un homme de nationalité pakistanaise, elle violerait le droit de ce dernier à une vie de famille, ainsi que son droit à bénéficier d’un recours effectif. Ali Raza, qui a épousé une Bulgare en 2000, avait été placé dans un centre de détention de 2005 à 2008, dans l’attente de son expulsion. Selon un arrêté d’expulsion pris en 2005, Ali Raza constituerait une menace grave pour la sécurité nationale. Cet arrêté ne fournit toutefois aucun élément concret susceptible d’étayer cette accusation. Tout en reconnaissant que le recours à des documents confidentiels pouvait s’avérer indispensable lorsque la sécurité nationale était en jeu, la Cour a estimé que soustraire totalement la décision judiciaire de la connaissance du public ne se justifiait pas. La seule allégation connue formulée à l’encontre d’Ali Raza étant qu’il aurait été impliqué dans une affaire de traite d’êtres humains, la Cour a conclu que la notion de sécurité nationale avait été ici élargie « au-delà de son sens naturel », constatant que les autorités n’avaient rien précisé d’autre concernant la menace présumée.
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