REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE

La République centrafricaine était toujours en proie à un conflit impliquant de nombreux groupes armés et la situation des droits humains restait très préoccupante. La population civile était victime d’atteintes aux droits humains généralisées – homicides illégaux, enlèvements, actes de torture et violences sexuelles (y compris viols), notamment.

République centrafricaine
Chef de l’État : François Bozizé
Chef du gouvernement : Faustin Archange Touadéra
Peine de mort : abolie en pratique
Population : 4,5 millions
Espérance de vie : 48,4 ans
Mortalité des moins de cinq ans : 170,8 ‰
Taux d’alphabétisation des adultes : 55,2 %

Contexte

Le président Bozizé a été réélu en janvier avec plus de 60 % des suffrages. L’ancien chef de l’État Ange-Félix Patassé est arrivé en seconde position. Les résultats provisoires publiés par la commission électorale indépendante ont été confirmés par la Cour constitutionnelle en février.
Une grande partie du territoire centrafricain se trouvait en dehors du contrôle du gouvernement. Au moins 200 000 personnes ont été contraintes de fuir de chez elles en raison d’attaques et étaient déplacées à l’intérieur du pays. On comptait quelque 200 000 réfugiés dans les États voisins.
Le nord-ouest du pays était sous la coupe de l’Armée populaire pour la restauration de la démocratie (APRD), un groupe armé qui avait signé un accord de paix avec le gouvernement. Les attaques de l’Armée de résistance du Seigneur (LRA) se sont multipliées et intensifiées dans le sud-est et l’est du pays.
À la mi-juillet, des membres de l’Union des forces démocratiques pour le rassemblement (UFDR) ont attaqué et occupé la ville de Sam Ouandja, dans le nord-est du pays. Ce groupe armé basé dans la préfecture de la Haute Kotto a déclaré qu’il n’avait fait que répondre aux attaques menées contre lui par la Convention des patriotes pour la justice et la paix (CPJP). Plusieurs centaines de personnes ont été déplacées par les combats entre ces deux groupes armés en septembre.
Entre juin et août, trois factions de la CPJP ont signé des accords de paix avec le gouvernement, sans toutefois que leurs combattants soient désarmés.

Maintien de la paix

Le président des États-Unis, Barack Obama, a annoncé en octobre qu’il avait envoyé une centaine d’hommes en Afrique centrale, notamment en République centrafricaine, dans le cadre d’une mission d’aide et de conseil aux forces gouvernementales combattant la LRA.
Quelque 200 soldats français étaient toujours stationnés dans le pays pour participer à la restructuration et à l’entraînement des forces régulières.
Sous l’égide de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC), la Mission de consolidation de la paix en Centrafrique (MICOPAX) a été déployée en février à Ndélé, dans le nord-est du pays. Les soldats de la MICOPAX étaient originaires du Cameroun, du Gabon, de la République du Congo, de la République démocratique du Congo et du Tchad.
Plusieurs milliers de militaires ougandais restaient déployés dans l’est du pays. En août, un tribunal militaire ougandais a condamné à mort un soldat ougandais pour le meurtre d’un civil à Obo.

Désarmement, démobilisation et réinsertion

En janvier, le président Bozizé a nommé six dirigeants de différents groupes armés pour le conseiller sur le désarmement, la démobilisation et la réinsertion. On ne savait pas toutefois s’ils avaient accepté le poste qui leur avait été offert. À la fin du mois de juillet, le ministre chargé du désarmement, de la démobilisation et de la réinsertion a déclaré que la démobilisation des membres de l’APRD était en cours dans la préfecture de l’Ouham Pendé. Il aurait ajouté qu’une opération similaire allait bientôt démarrer dans le nord-est du pays. Des factions de la CPJP ont signé des accords de paix avec le gouvernement au cours de l’année.

Justice internationale

Le procès de Jean-Pierre Bemba, ancien vice-président de la République démocratique du Congo, s’est poursuivi devant la Cour pénale internationale (CPI) à La Haye. Accusé d’avoir dirigé des milices ayant perpétré des homicides et des viols parmi la population civile en République centrafricaine en 2002 et 2003, il devait répondre de deux chefs d’accusation pour crimes contre l’humanité et de trois autres pour crimes de guerre.
Aucun autre représentant de l’État ou dirigeant d’un groupe armé ayant pu commettre des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité dans le pays n’a fait l’objet d’un mandat d’arrêt de la CPI ni n’a été poursuivi par l’appareil judiciaire national.

Exactions perpétrées par des groupes armés

Des groupes armés ont perpétré en toute impunité des exactions à l’encontre de la population civile dans une grande partie des zones en proie au conflit. Des civils ont été tués et blessés, des femmes et des jeunes filles violées, et des maisons, des réserves de nourriture et des commerces pillés et détruits. En raison du niveau élevé d’insécurité, il était très difficile pour les organisations humanitaires et de défense des droits humains de recueillir des informations sur ces exactions.
Le nord-ouest du pays restait sous le contrôle de l’APRD. En janvier, le représentant du secrétaire général de l’ONU pour les droits de l’homme des personnes déplacées dans leur propre pays s’est dit préoccupé par le fait que l’APRD avait mis en place un système de justice sommaire et que les procès se déroulaient de manière arbitraire. Il a indiqué que, en mai 2010, l’APRD avait exécuté cinq personnes déclarées coupables de sorcellerie par des tribunaux populaires (des juridictions informelles gérées par le groupe armé).
*Le 30 janvier, des membres présumés de l’APRD ont kidnappé huit employés de la branche espagnole de Médecins sans frontières qui faisaient route à bord d’un véhicule à proximité de la frontière entre la République centrafricaine et le Tchad. Six d’entre eux ont été retrouvés et relâchés deux jours plus tard, mais les deux autres, de nationalité espagnole, ont été retenus par les ravisseurs jusqu’au 10 février.
Plusieurs centaines d’attaques ont été perpétrées en République centrafricaine par la LRA, qui s’est rendue coupable d’enlèvements – notamment de jeunes filles –, de saccages, de pillages et de plusieurs centaines de meurtres de civils.
*En mars, des membres de la LRA auraient tué au moins deux civils et quatre soldats de l’armée régulière, et kidnappé une cinquantaine de personnes dans la région de Nzako (préfecture du Mbomou). Selon les informations reçues, des combattants ont aussi pillé des biens privés et réduit en cendres un grand nombre d’habitations. Une attaque de la LRA contre Nzako avait déjà été signalée en février. Les rebelles avaient occupé la ville pendant plusieurs heures avant de quitter les lieux avec le butin des pillages et au moins une dizaine de captifs civils.
*En juin, au cours d’une embuscade, des combattants de la LRA auraient tué un médecin et son chauffeur qui convoyaient des vaccins contre la poliomyélite. L’attaque a eu lieu sur la route reliant Zémio à Rafaï, dans la préfecture du Haut-Mbomou. Selon Radio Ndeke Luka, les assaillants ont incendié le véhicule et toute sa cargaison.
La CPJP a été accusée de viols, de meurtres, de pillages et d’extorsion dans le nord-est de la République centrafricaine.
*En septembre, des combattants de la CPJP ont tué sept personnes, parmi lesquelles un représentant de l’État, à proximité de Bria.

Enfants soldats

Dans un rapport publié en avril, le secrétaire général de l’ONU a exprimé sa vive préoccupation à propos du recrutement et de l’utilisation d’enfants comme combattants par des groupes armés entre juin 2008 et décembre 2010.
Parmi ceux qui continuaient d’enrôler des enfants et qui ont été identifiés dans ce rapport figuraient l’UFDR, la CPJP, le Front démocratique du peuple centrafricain (FDPC), le Mouvement des libérateurs centrafricains pour la justice (MLCJ) et des milices locales d’autodéfense liées au gouvernement. Le rapport faisait aussi état de l’enlèvement et du recrutement forcé d’enfants par la LRA en République centrafricaine et dans les États voisins, et de l’utilisation de ces enfants dans le pays. Les enfants enrôlés par ce groupe armé servaient de combattants, d’espions, de domestiques, d’esclaves sexuels et de porteurs.
Le secrétaire général de l’ONU a salué la démobilisation de 1 300 enfants des rangs de l’APRD entre 2008 et 2010. La représentante spéciale du secrétaire général de l’ONU pour les enfants et les conflits armés a effectué une visite en République centrafricaine en novembre.

Prisonniers d’opinion

Des détracteurs présumés du gouvernement, ainsi que des collègues et des proches de ces personnes, ont été emprisonnés sur la base de fausses accusations.
*Onze personnes étaient maintenues en détention alors que la justice avait ordonné leur libération en juillet. Elles avaient été arrêtées en juin 2010 en raison de leurs liens avec un avocat et un homme d’affaires recherchés par les autorités. Le bâtonnier de l’ordre des avocats, Symphorien Balemby, et l’homme d’affaires Jean-Daniel Ndengou ont fui le pays en juin 2010. Parmi les 11 détenus se trouvaient Albertine Kalayen Balemby, épouse et secrétaire de Symphorien Balemby, et Gabin Ndengou, frère de Jean-Daniel Ndengou et chauffeur pour l’Organisation mondiale de la santé. Ils auraient été inculpés d’incendie volontaire, d’incitation à la haine et d’association de malfaiteurs. Amnesty International les considérait comme des prisonniers d’opinion.

Liberté d’expression – journalistes

Une tendance à l’autocensure prévalait dans les médias.
*Après plusieurs semaines de détention, Faustin Bambou, directeur de l’hebdomadaire Les Collines de l’Oubangui, et Cyrus Emmanuel Sandy, directeur du quotidien Médias, ont été remis en liberté en juillet et se sont vu infliger une amende pour avoir publié des articles sur des manifestations organisées par des militaires retraités qui affirmaient que le gouvernement les avait privés de fonds octroyés par l’Union européenne. Le ministère public avait requis des peines de trois ans d’emprisonnement et des amendes plus lourdes pour incitation à la haine et atteinte à la sûreté de l’État.
Plusieurs membres de l’opposition et au moins un journaliste se sont vu interdire de voyager à l’étranger, sans que la moindre explication ne leur soit fournie.

Torture et autres mauvais traitements

Des membres des forces de sécurité ont été accusés de torture. Le gouvernement n’a pris aucune mesure contre ceux qui avaient été visés par de telles accusations au cours des années précédentes.
*En août, un homme employé dans un supermarché de la capitale qui avait été accusé de vol a eu le bras droit cassé après avoir été passé à tabac par des membres de l’Office centrafricain pour la répression contre le banditisme, à Bangui.

Visites et documents d’Amnesty International

  • République centrafricaine. Après des décennies de violence, il est temps d’agir (AFR 19/001/2011).
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