BANGLADESH

Des exécutions extrajudiciaires ont été signalées cette année encore, alors que le gouvernement avait promis de mettre un terme à de tels agissements. Aucun membre du Bataillon d’action rapide (RAB), soupçonné d’au moins 54 homicides illégaux en 2011, n’a fait l’objet d’une enquête indépendante ou de poursuites judiciaires. Le gouvernement n’a pas mis en œuvre sa nouvelle politique de soutien aux femmes victimes de violence. Les règles régissant le Tribunal pour les crimes internationaux ont été modifiées dans un sens qui réduisait, sans toutefois l’éliminer, le risque pour les personnes accusées de crimes de guerre commis en 1971 de ne pas bénéficier d’un procès équitable. Le gouvernement n’a pas garanti le droit à la terre et à des moyens de subsistance des populations autochtones des Chittagong Hill Tracts. Au moins 49 personnes ont été condamnées à mort et cinq hommes, peut-être plus, ont été exécutés.

RÉPUBLIQUE POPULAIRE DU BANGLADESH
Chef de l’État : Zillur Rahman
Chef du gouvernement : Sheikh Hasina
Peine de mort : maintenue
Population : 150,5 millions
Espérance de vie : 68,9 ans
Mortalité des moins de cinq ans : 52 ‰
Taux d’alphabétisation des adultes : 55,9 %

Contexte

En juin, le gouvernement a adopté le 15e amendement à la Constitution, qui a supprimé les dispositions permettant à un gouvernement intérimaire non partisan d’organiser des élections. Il interdisait également l’exercice du pouvoir par l’armée. Au cours du même mois, la Banque mondiale a annoncé que le Bangladesh avait réduit le niveau de pauvreté et amélioré les conditions de vie. Toutefois, plus de 35 % de la population rurale et 21 % de la population urbaine vivaient encore sous le seuil de pauvreté. Le Parlement a adopté, en novembre, la Loi (amendement) sur les biens réservés. Ce texte mettait fin aux violations, autorisées par la loi, des droits économiques et sociaux des hindous en permettant à ceux-ci de récupérer les biens qui leur avaient été confisqués au titre de la Loi sur les biens réservés, en vigueur depuis des décennies.

Exécutions extrajudiciaires

Les agents du RAB auraient tué au moins 54 personnes au cours de l’année, ce qui portait à plus de 700 le nombre de morts imputées à cette force de police depuis sa création, en 2004. Beaucoup d’autres personnes ont été blessées ou torturées. Dans bien des cas, les familles des victimes ont déclaré à Amnesty International que leurs proches étaient morts après avoir été arrêtés par des agents du RAB et non dans une fusillade, comme le prétendait le RAB. Les autorités n’ont mené aucune enquête crédible sur ces faits.
*Limon Hossain, 16 ans, a reçu dans la jambe une balle tirée par des agents du RAB, le 23 mars à Jhalakathi. Le RAB a affirmé que cet adolescent faisait partie d’un gang de malfaiteurs et qu’il avait été blessé dans un échange de tirs : des agents du RAB auraient riposté après avoir été pris pour cible par des membres du gang. Limon Hossain a pour sa part déclaré qu’il était seul et ramenait du bétail chez lui quand des membres du RAB l’avaient interpellé et avaient tiré sur lui. Sa version aurait été confirmée par les conclusions – qui n’ont pas été rendues publiques – d’une enquête distincte diligentée par les autorités. La police a accusé Limon Hossain d’avoir tenté de tuer des agents du RAB.

Violences faites aux femmes

Dans le cadre d’une nouvelle Politique nationale pour la promotion de la femme, rendue publique en mars, le ministère des Affaires féminines et de l’enfance a annoncé son intention, entre autres, de « venir à bout de la violence et de l’oppression exercées contre les femmes et les enfants en permettant aux victimes d’avoir accès à des soins médicaux, à une assistance juridique et à un soutien ». Des organisations de défense des droits humains ont affirmé que les autorités n’avaient pas mis ce programme en application et que beaucoup de femmes et d’enfants victimes de violences, notamment sexuelles, ne recevaient aucune aide des institutions étatiques.
*Après avoir incité une femme victime de viol en réunion à effectuer une déclaration auprès de la police, la militante des droits humains Shampa Goswami a été enlevée en octobre et retenue pendant plusieurs heures par un groupe d’hommes à Satkhira. Ses ravisseurs l’ont menacée et lui ont dit qu’ils s’en prendraient à elle si elle continuait à soutenir la victime. Elle a déclaré aux délégués d’Amnesty International qui lui ont rendu visite en novembre à Satkhira que la police n’avait pas, dans un premier temps, répondu à sa demande de protection. Les autorités se sont engagées à la protéger après une campagne énergique menée par des organisations locales et internationales de défense des droits humains.

Justice internationale

En mai, le Tribunal pour les crimes internationaux, une juridiction bangladaise instaurée en 2010 pour juger les personnes accusées d’atteintes massives aux droits humains commises durant la guerre de libération en 1971, a commencé à se pencher sur les lacunes procédurales qui rendaient les procès inéquitables. Ses Règles de procédure, modifiées, prévoyaient la libération sous caution, la présomption d’innocence tant que la culpabilité n’a pas été prouvée, et des mesures visant à garantir la protection des témoins et des victimes. Toutefois, l’interdiction constitutionnelle du droit de contester la compétence du Tribunal est restée en vigueur.
*Motiur Rahman Nizami, Ali Ahsan Muhammad Mojahid, Muhammad Kamaruzzaman, Abdul Quader Molla et Delwar Hossain Sayeedi, membres de la Jamaat-e Islami (Société de l’islam), ainsi que Salauddin Quader Chowdhury et Abdul Alim, membres du Parti nationaliste du Bangladesh (BNP), ont été mis en accusation pour crimes de guerre. Tous, à l’exception d’Abdul Alim, qui a été remis en liberté sous caution, ont été maintenus en détention. Cinq des accusés ont été détenus pendant plus de 18 mois sans avoir été inculpés. Delwar Hossain Sayeedi a été inculpé en octobre pour avoir aidé l’armée pakistanaise à commettre un génocide et pour avoir tué, torturé et violé des civils non armés, incendié des habitations appartenant à des hindous et contraint des hindous à se convertir à l’islam. Aucun individu n’a été mis en accusation pour des crimes commis immédiatement après la victoire des forces de libération, à la fin de 1971.

Droits des peuples autochtones

Le gouvernement n’a rien fait pour empêcher les colons bengalis de s’emparer des terres des populations autochtones des Chittagong Hill Tracts.
Cela a provoqué des affrontements violents entre les deux communautés, qui ont entraîné des destructions de biens et, dans certains cas, coûté la vie à des personnes. Le plus souvent les colons bengalis pénétraient sur les terres des populations autochtones et s’y installaient pour les cultiver. Des autochtones ont affirmé aux délégués de l’organisation qui se sont rendus dans la région en mars qu’un certain nombre de colons bengalis, enhardis par la tolérance de l’armée pour leurs actes, avaient mis le feu à leurs habitations, le plus souvent sous les yeux de soldats ou d’autres responsables de l’application des lois qui n’étaient pas intervenus pour les en empêcher.
*En mars, des autochtones de Langadu, dans le district montagneux de Rangamati, ont déclaré à Amnesty International que des responsables locaux et des soldats appartenant à l’unité locale des gardes-frontières n’avaient rien fait pour empêcher une attaque imminente de colons bengalis contre leur village de Rangipara. Ils ont ajouté que les soldats n’avaient pas réagi quand les colons avaient mis le feu à leurs habitations, le 17 février.

Torture et autres mauvais traitements

Au moins trois personnes détenues par la police seraient mortes des suites de torture. Le gouvernement a annoncé que tout policier considéré comme responsable de ces décès serait inculpé ; personne n’avait toutefois été inculpé ni traduit en justice à la fin de l’année. Les autorités n’ont pas pris l’engagement de déférer devant les tribunaux les membres de la police, du RAB ou d’autres branches des services de sécurité soupçonnés d’avoir torturé des milliers de détenus tout au long de l’année.
*Mahmudur Rahman, rédacteur en chef d’un journal, a déclaré à Amnesty International en mars, après sa remise en liberté, qu’il avait été violemment frappé dans le dos pendant toute une nuit dans un poste de police situé à l’intérieur d’un cantonnement militaire. Cet homme avait été arrêté à la mi-2010 après avoir publié des articles dénonçant la corruption présumée des autorités. Les coups qui lui avaient été portés étaient si violents qu’il avait perdu connaissance pendant plusieurs heures. Il a expliqué qu’il ne voyait pas l’utilité de déposer une plainte car il savait que les autorités ne prendraient aucune initiative.

Peine de mort

Au moins 49 personnes ont été condamnées à mort et cinq hommes, peut-être plus, ont été exécutés.

Visites et documents d’Amnesty International

 Des délégués d’Amnesty International se sont rendus au Bangladesh en mars, juin et novembre.
 Crimes unseen : Extrajudicial executions in Bangladesh (ASA 13/005/2011).

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