Burundi

L’impunité continuait de régner dans le pays et les exécutions extrajudiciaires commises les années précédentes ne faisaient pas systématiquement l’objet d’enquêtes et de poursuites approfondies. Les signes encourageants laissant espérer que le gouvernement pourrait créer en 2012 une commission de vérité et de réconciliation se sont estompés au fil des mois. Les défenseurs des droits humains et les journalistes étaient en butte à la répression en raison de leurs activités.

RÉPUBLIQUE DU BURUNDI
Chef de l’État et du gouvernement : Pierre Nkurunziza

Contexte

Le parti au pouvoir, le Conseil national pour la défense de la démocratie – Forces pour la défense de la démocratie (CNDD-FDD), a pu gouverner sans être confronté à une réelle opposition. Aucun dialogue véritable n’a été engagé entre ce parti et l’ADC-Ikibiri, une coalition regroupant des formations d’opposition qui s’étaient retirées des élections en 2010.

En réaction à l’augmentation du coût de la vie, la société civile burundaise a organisé une campagne nationale pour demander au gouvernement de rendre des comptes sur sa politique économique.

Impunité

Les observateurs des droits humains des Nations unies ont eu connaissance de 30 exécutions extrajudiciaires en 2012, un chiffre en baisse par rapport à ceux de 2010 et 2011. Au total, 101 exécutions extrajudiciaires avaient été recensées durant ces deux années. La plupart des homicides perpétrés en 2012 ne semblaient pas avoir été motivés par des considérations politiques. L’impunité est toutefois restée la norme.

Une commission d’enquête a été mise en place par le procureur général en juin pour enquêter sur les possibles exécutions extrajudiciaires et actes de torture signalés par l’ONU et par des organisations burundaises et internationales de défense des droits humains. Dans son rapport, rendu public en août, la commission reconnaissait que des homicides avaient été commis mais niait qu’il s’agissait d’exécutions extrajudiciaires. Elle indiquait toutefois que des enquêtes judiciaires avaient été ouvertes concernant certains cas signalés par les organisations de défense des droits humains. À la suite de la publication du rapport, deux policiers, un commandant de l’armée, un administrateur local et plusieurs Imbonerakure (membres de la ligue de jeunesse du parti au pouvoir) ont été arrêtés ; aucun d’eux n’a cependant été jugé. Les préoccupations quant au fait que tous les auteurs présumés de ces actes n’avaient pas été amenés à rendre des comptes persistaient.

Vérité et réconciliation

Aucun progrès n’a été fait pour enquêter et établir la vérité sur les graves violations des droits humains commises entre 1962 et 2008. Un projet de loi révisé portant création d’une commission vérité et réconciliation (CVR) a été soumis au Parlement mais n’a pas été discuté.

Ce texte laissait ouverte la possibilité d’amnisties, y compris pour les personnes accusées de génocide, de crimes contre l’humanité, de crimes de guerre, d’actes de torture, de disparitions forcées et d’exécutions extrajudiciaires. Il ne prévoyait pas que le tribunal spécial, mécanisme judiciaire censé prendre le relais de la CVR, soit doté d’un procureur indépendant habilité à enquêter et à engager des poursuites aussi bien sur les affaires transmises par la CVR que sur de nouvelles affaires.

Justice

Le recrutement des juges par le ministère de la Justice ne se déroulait pas de manière publique et transparente, laissant la porte ouverte aux accusations de corruption et de parti pris politique. Le ministre de la Justice est tenu par la loi d’organiser un concours de sélection des candidats.

Le système judiciaire demeurait fragile et politisé et certains responsables présumés d’atteintes aux droits humains n’ont pas été déférés à la justice par les autorités burundaises.
 Le procès des assassins présumés du militant anticorruption Ernest Manirumva, tué en 2009, s’est achevé sans que justice soit rendue. Le parquet n’a pas tenu compte des recommandations du Bureau fédéral d’enquêtes (FBI) des États-Unis, qui demandait que de hauts responsables des services de police et du renseignement cités par des témoins soient interrogés et soumis à des analyses ADN. L’affaire était en instance devant la cour d’appel de Bujumbura à la fin de l’année.

Liberté d’expression – journalistes et défenseurs des droits humains
Des journalistes et des défenseurs des droits humains ont indiqué avoir été la cible de mesures d’intimidation et de harcèlement de la part des autorités.
 En février, Faustin Ndikumana, président de l’organisation Parole et action pour le réveil des consciences et l’évolution des mentalités, a passé deux semaines en détention pour le seul fait d’avoir exercé son droit à la liberté d’expression. Il a ensuite été remis en liberté sous caution. Après avoir écrit au ministre de la Justice pour lui demander d’enquêter sur la corruption dans le processus de recrutement des juges, et de mettre fin à ces pratiques, il avait fait publiquement des commentaires à l’adresse des médias. En juillet, la Cour anticorruption l’a déclaré coupable de fausses déclarations et l’a condamné à une peine de cinq ans d’emprisonnement et à une amende de 500 000 francs burundais (environ 333 dollars des États-Unis). La décision n’avait pas été appliquée à la fin de l’année.

Certains projets législatifs pourraient, s’ils étaient adoptés en l’état, menacer la liberté d’expression et d’association. Ainsi, un projet de loi sur les manifestations et les rassemblements publics permettrait aux autorités d’user de moyens disproportionnés pour dissoudre de telles réunions. Un projet portant révision de la loi sur la presse prévoyait de nouvelles dispositions contraignant les journalistes à révéler leurs sources dans certaines circonstances, ainsi qu’une augmentation du nombre des infractions pouvant être qualifiées de délits de presse, une réglementation excessive de la presse et des amendes exorbitantes pour les journalistes qui violeraient les dispositions de la loi et du Code pénal.

Conditions carcérales

Les détenus vivaient dans des conditions extrêmement insalubres. Plusieurs milliers d’entre eux se trouvaient en détention provisoire.

Le président Nkurunziza a promulgué le 25 juin un décret de grâce pour certaines catégories de détenus : ceux purgeant une peine inférieure ou égale à cinq ans d’emprisonnement (à l’exception des personnes condamnées pour viol, vol à main armée ou en bande organisée, détention illégale d’armes à feu ou atteinte à la sûreté de l’État), les femmes enceintes ou allaitantes, les détenus âgés de 60 ans et plus, les mineurs de moins de 18 ans n’ayant pas encore été jugés et les malades en phase terminale. Toutes les autres peines d’emprisonnement ont été réduites de moitié. En avril, il y avait au Burundi 10 567 personnes incarcérées dans 11 prisons, d’une capacité totale de seulement 4 050 places. Fin décembre, le nombre de détenus était descendu à 6 581 personnes.

Visites et documents d’Amnesty International

 Des délégués d’Amnesty International se sont rendus au Burundi au mois de mai.
 Burundi. Demandez la libération d’un militant. Faustin Ndikumana (AFR 16/001/2012).
 Burundi. Un militant libéré. Faustin Ndikumana (AFR 16/002/2012).
 Burundi. L’heure du changement : le point sur les droits humains. Communication présentée à l’Examen périodique universel de l’ONU de janvier-février 2013 (AFR 16/003/2012).
 Burundi. Justice n’a pas été rendue à l’issue du procès du meurtre d’un militant (PRE01/262/2012).

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