Erythree

Le service national, obligatoire, se prolongeait souvent pour une durée indéterminée. L’entraînement militaire pour les enfants était lui aussi obligatoire. Des conscrits étaient soumis au travail forcé. Plusieurs milliers de prisonniers d’opinion et de prisonniers politiques étaient maintenus en détention arbitraire dans des conditions déplorables. Le recours à la torture et à d’autres formes de mauvais traitements était fréquent. Les partis d’opposition étaient interdits, tout comme les médias indépendants et les organisations de la société civile. Seules quatre confessions religieuses étaient autorisées par les autorités ; toutes les autres étaient interdites et leurs membres étaient arrêtés et emprisonnés. De nombreux Érythréens ont fui leur pays cette année encore.

ÉTAT D’ÉRYTHRÉE
Chef de l’État et du gouvernement : Issayas Afeworki

Contexte

La situation humanitaire était grave et l’économie était en stagnation. Le secteur minier continuait toutefois de se développer, des gouvernements étrangers et des entreprises privées s’intéressant aux importants gisements d’or, de potasse et de cuivre du pays malgré le risque de se rendre complices d’atteintes aux droits humains du fait du recours au travail forcé dans les mines.
En mars, l’armée éthiopienne a lancé à deux reprises des incursions en Érythrée et annoncé qu’elle avait mené des attaques couronnées de succès contre ce qu’elle décrivait comme des camps d’entraînement de groupes rebelles éthiopiens. L’Éthiopie a reproché à l’Érythrée de soutenir un groupe rebelle qui avait attaqué des touristes européens en Éthiopie en janvier (voir Éthiopie). Le groupe qui avait revendiqué cette opération a affirmé qu’il ne disposait pas de camps en Érythrée.
En juillet, le Conseil des droits de l’homme de l’ONU a nommé un rapporteur spécial sur l’Érythrée en raison de « la poursuite des violations généralisées et systématiques des droits de l’homme […] commises par les autorités érythréennes ». Le gouvernement érythréen a affirmé que cette initiative était motivée par des considérations politiques.
En juillet, le Groupe de contrôle sur la Somalie et l’Érythrée [ONU] a indiqué dans un rapport que le soutien de l’Érythrée à Al Shabab en Somalie avait diminué, mais que le pays continuait d’accueillir des groupes d’opposition armés actifs dans les pays voisins, en particulier en Éthiopie. Le rapport du Groupe de contrôle a également signalé l’implication de responsables érythréens dans un trafic d’armes et d’êtres humains.
D’après certaines informations, vers le milieu de l’année les autorités auraient distribué des armes à la population civile, pour des raisons inconnues.

Prisonniers d’opinion et prisonniers politiques

Des milliers de prisonniers d’opinion et de prisonniers politiques étaient maintenus en détention arbitraire dans des conditions déplorables. Parmi eux figuraient des militants politiques, des journalistes et des pratiquants de certaines religions, ainsi que des jeunes gens qui s’étaient dérobés au service national ou qui avaient tenté de fuir le pays ou de se déplacer sans permis. Certains prisonniers d’opinion étaient incarcérés sans inculpation depuis plus de 10 ans.
Les prisonniers très en vue n’étaient pas autorisés à recevoir de visites et, dans la plupart des cas, leur famille ignorait tout de l’endroit où ils se trouvaient et de leur état de santé. Le gouvernement continuait de refuser de confirmer ou d’infirmer des informations selon lesquelles un certain nombre de prisonniers étaient morts en détention.
 Selon certaines sources, trois journalistes – Dawit Habtemichael, Mattewos Habteab et Saleh Tsegazab – détenus arbitrairement depuis leur arrestation en 2001 seraient morts en détention au cours des dernières années. Le gouvernement n’a pas confirmé ces allégations.

Liberté de religion et de conviction

Seuls les fidèles des confessions autorisées par les autorités, à savoir l’Église orthodoxe érythréenne, l’Église catholique, l’Église luthérienne et l’islam, étaient autorisés à pratiquer leur foi. Des membres de groupes religieux interdits ont, cette année encore, été arrêtés, détenus arbitrairement et maltraités.
 En avril, 10 témoins de Jéhovah ont été arrêtés à Keren après avoir assisté à des funérailles. À la fin de l’année, on estimait que 56 témoins de Jéhovah étaient détenus pour avoir pratiqué leur foi.

Torture et autres mauvais traitements

Les détenus étaient souvent torturés et maltraités. Des prisonniers ont été battus, attachés dans des positions douloureuses et exposés à des températures extrêmes, et maintenus à l’isolement de façon prolongée. Les conditions de détention s’apparentaient à une forme de traitement cruel, inhumain ou dégradant. Un grand nombre de prisonniers étaient enfermés dans des cellules souterraines ou des conteneurs métalliques, souvent installés en plein désert, où ils subissaient des températures extrêmes. Les détenus ne recevaient pas de nourriture ni d’eau potable en quantité suffisante. Ils étaient souvent totalement privés de soins, ou ceux qu’ils recevaient étaient insuffisants.
 Yirgalem Fisseha Mebrahtu, une journaliste arrêtée en février 2009, aurait été hospitalisée en janvier ; elle était placée sous surveillance permanente et n’était pas autorisée à recevoir de visites. Sa famille n’a pas été informée du motif de son hospitalisation.
 Petros Solomon, ancien ministre des Affaires étrangères et membre du « Groupe des 15 » – 11 personnalités politiques détenues arbitrairement depuis 2001 – aurait été hospitalisé en juillet car il était gravement malade. Le traitement dont il avait besoin n’était toutefois pas disponible en Érythrée. On ignorait tout de son sort à la fin de l’année.
Un certain nombre de cas de mort en détention ont été signalés.

 Yohannes Haile, un témoin de Jéhovah détenu depuis septembre 2008, serait mort en août dans la prison de Me’eter en raison de la chaleur extrême qui régnait dans la cellule souterraine où il était enfermé depuis octobre 2011. Trois autres personnes incarcérées avec lui étaient semble-t-il dans un état critique. On ignorait tout de leur sort à la fin de l’année.

Conscription militaire

Le service national était toujours obligatoire pour tous les hommes et toutes les femmes adultes. Tous les lycéens devaient effectuer leur dernière année d’études secondaires au camp d’entraînement militaire de Sawa ; certains de ces enfants n’avaient que 15 ans. Les conditions de vie dans ce camp étaient éprouvantes et les enfants étaient soumis à des châtiments sévères en cas d’infraction.
La période initiale de service militaire (18 mois) se prolongeait souvent pour une durée indéterminée. Les conscrits ne percevaient que de faibles soldes, qui ne leur permettaient pas de répondre aux besoins élémentaires de leur famille. Cette année encore, ils devaient souvent effectuer des travaux forcés pour des projets publics, notamment dans le domaine de la production agricole, ou des tâches pour des entreprises privées appartenant à l’armée ou aux élites du parti au pouvoir. Ceux qui désertaient s’exposaient à de lourdes sanctions, telles que la détention arbitraire et des mauvais traitements.

Réfugiés et demandeurs d’asile

Des milliers d’Érythréens ont fui leur pays au cours de l’année, dans la plupart des cas pour échapper à la conscription obligatoire qui se prolongeait pour une durée indéterminée. La stratégie consistant à « tirer pour tuer » sur toute personne surprise en train d’essayer de franchir la frontière éthiopienne était toujours appliquée. Des personnes qui tentaient de fuir au Soudan ont été arrêtées arbitrairement et passées à tabac. Les familles de ceux qui réussissaient à quitter le pays étaient contraintes de payer une amende ou risquaient l’emprisonnement.
Les demandeurs d’asile érythréens renvoyés de force dans leur pays risquaient fortement d’être torturés et placés arbitrairement en détention. Plusieurs pays, parmi lesquels l’Égypte, le Royaume-Uni, le Soudan, la Suède et l’Ukraine, ont malgré tout planifié des renvois forcés d’Érythréens dans leur pays ou procédé à de tels renvois.
 Le 24 juillet, le Soudan a renvoyé de force en Érythrée neuf demandeurs d’asile et un réfugié qui avaient été déclarés coupables par un tribunal soudanais d’entrée illégale dans le pays.

Trafic d’êtres humains

Dans son rapport présenté en juillet, le Groupe de contrôle sur la Somalie et l’Érythrée indiquait que des responsables érythréens, dont des officiers supérieurs de l’armée, dirigeaient une contrebande d’armes et un trafic d’êtres humains par l’intermédiaire de réseaux criminels au Soudan et dans le Sinaï, en Égypte. Selon le rapport, l’ampleur de ces activités laissait à penser que le gouvernement érythréen en était complice.

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