Madagascar

De graves violations des droits humains – dont des centaines d’homicides illégaux commis par les forces de sécurité, ainsi que des arrestations et des détentions illégales – ont continué d’être perpétrées dans une impunité quasi totale. Des dirigeants politiques, des journalistes, des pasteurs, des avocats, ainsi que d’autres personnes ayant critiqué les autorités ont été victimes d’actes d’intimidation. Certaines ont été incarcérées à l’issue de procès non conformes aux normes d’équité.

RÉPUBLIQUE DE MADAGASCAR
Chef de l’État : Andry Nirina Rajoelina
Chef du gouvernement : Jean Omer Beriziky

Contexte

La situation politique et sociale restait tendue et les conditions de sécurité demeuraient très précaires dans certaines régions, en particulier dans le sud du pays. Des dispositions importantes de la Feuille de route pour la sortie de crise à Madagascar, signée en septembre 2011 par une majorité d’acteurs politiques malgaches sous l’égide de la Communauté de développement de l’Afrique australe, n’ont pas été mises en œuvre. C’était notamment le cas des dispositions concernant l’abandon des procédures judiciaires motivées par des considérations politiques, la protection et la promotion des droits humains et le respect des libertés fondamentales, ainsi que le retour au pays des exilés politiques. Des membres de la communauté internationale et le gouvernement malgache ont confirmé que l’élection présidentielle se déroulerait en mai 2013. À la mi-avril 2012, une loi d’amnistie couvrant la période du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2009 a été adoptée par les deux chambres du Parlement.
En septembre, Madagascar a signé le Deuxième Protocole facultatif se rapportant au PIDCP, qui vise à abolir la peine de mort, et le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant [ONU].
À la suite d’un communiqué de presse publié par Amnesty International le 20 novembre, dans lequel l’organisation dénonçait les graves atteintes aux droits humains commises par les forces de sécurité dans le sud du pays et demandait l’ouverture d’une enquête indépendante, le Premier ministre a décidé l’instauration d’une commission d’enquête, pilotée par les Nations unies. Les travaux préparatoires de l’enquête se poursuivaient à la fin de l’année.

Homicides illégaux

De nombreux civils ont été tués par des agents de l’État pour des vols de bétail. Des centaines de personnes sont restées sans protection lors de violences intercommunautaires et de massacres, en particulier dans la région de l’Anosy (sud du pays). D’après des témoignages recueillis par Amnesty International, des personnes se trouvant dans l’incapacité de fuir leur domicile ont été brûlées vives quand les forces de sécurité ont incendié des villages sans aucun discernement dans le cadre de l’opération militaire Tandroka, lancée en septembre.
 En septembre, les unités impliquées dans cette opération auraient tué au moins 11 personnes, dont une fillette âgée de six ans, et brûlé 95 maisons dans la commune d’Elonty. Des récoltes ont été réduites à néant et au moins une école a été rasée pendant ces attaques. Des représentants des autorités ont affirmé que seules des exploitations cultivant du cannabis avaient été détruites par les forces publiques.
 Les forces de sécurité ont exécuté sommairement des voleurs de bétail (dahalos) présumés, dont une personne souffrant de handicap physique, dans le village de Numbi, en septembre. Dans la commune de Mahaly, les parents et l’épouse d’un suspect bien connu ont été victimes de ce type d’exécution en octobre.
 Au moins 250 personnes ont été tuées cette année aux alentours de la ville de Fort-Dauphin, dans le sud du pays, dans le cadre de ce que les autorités ont décrit comme des affrontements entre communautés déclenchés par des vols de bétail. Amnesty International craignait que ce chiffre ne soit bien en deçà de la réalité. Des témoins ont expliqué que les autorités avaient été informées de l’imminence d’une attaque contre un village par des personnes vivant à proximité ; elles n’ont pris aucune mesure, et au moins 86 personnes ont été tuées à coups de machette.

Impunité

Des agents des forces de sécurité et des membres de groupes armés responsables de graves violations des droits humains, dont des homicides illégaux, ont continué d’agir dans l’impunité.
 La plainte déposée à la suite de la mort de Michel Rahavana, substitut du procureur à Toliara, faisait toujours l’objet d’une enquête un an après les faits. Michel Rahavana avait été tué en décembre 2011 par un groupe de policiers qui cherchaient à obtenir la remise en liberté d’un de leurs collègues, placé en détention par le magistrat dans le cadre d’une affaire de vol. Présent à Toliara au moment du meurtre, le ministre de la Sécurité intérieure, autorité de tutelle de la police, aurait été informé de l’attaque imminente visant le substitut mais n’aurait rien fait pour l’empêcher. La ministre de la Justice avait annoncé fin 2011 qu’une enquête serait ouverte.
 L’homicide de Hajaharimananirainy Zenon, un chauffeur de taxi connu sous le nom de « Bota », n’a fait l’objet d’aucune enquête officielle, malgré les engagements pris dans ce sens par la ministre de la Justice. Bota avait été arrêté, torturé puis tué par des membres de la Force d’intervention de la police (FIP) le 17 juillet 2011, dans le quartier des 67 ha à Antananarivo ; sa famille avait porté plainte le 30 août 2011.

Liberté d’expression – journalistes

Plusieurs médias, dont Radio Fahazavana, demeuraient fermés. Au moins cinq autres stations de radio ont été suspendues en février. Les autorités ont continué d’utiliser l’appareil judiciaire pour intimider et harceler des journalistes.

 Le 13 novembre, Lalatiana Rakotondrazafy et Fidèle Razara Pierre, journalistes à la radio Free FM, ont été condamnés par le tribunal d’Antananarivo à une peine d’emprisonnement de trois mois avec sursis et à une amende d’un million d’ariarys (environ 500 dollars des États-Unis). Ils avaient tous deux été remis en liberté le 3 mai après une période de détention de 24 heures. En juin, les autorités les ont empêchés de quitter le territoire. Ils ont été condamnés pour diffamation et diffusion de fausses informations à la suite d’une plainte déposée par Ravatomanga Mamy, homme d’affaires et conseiller officiel du président. Craignant pour leur sécurité, les deux journalistes et un technicien de la radio s’étaient réfugiés le 1er août à l’ambassade d’Afrique du Sud à Antananarivo, où ils avaient passé plus de deux mois.
 Les 8 et 9 novembre, quatre journalistes de la presse écrite – Zo Rakotoseheno, directeur de publication de Midi Madagasikara ; Rocco Rasoanaivo, directeur de publication de La Nation et président du Syndicat des journalistes malgaches ; Fidy Robson et Herivonjy Rajaonah, respectivement directeur de la publication et rédacteur en chef de Gazetiko – ont été entendus à la gendarmerie de Betongolo, dans la province d’Antananarivo. L’homme d’affaires Ravatomanga Mamy, conseiller officiel du président, avait porté plainte contre eux après que leurs journaux eurent publié des extraits d’une déclaration d’un dirigeant local l’accusant d’être impliqué dans un trafic de bois de rose. Les journalistes ont été envoyés au bureau du procureur le 12 novembre. Ils n’ont pas été placés en détention mais une information a été ouverte contre eux. Elle était en cours à la fin de l’année.

Visites et documents d’Amnesty International

 Un délégué d’Amnesty International s’est rendu à Madagascar en novembre.
 Madagascar doit mettre fin aux massacres et enquêter sur les forces de sécurité (PRE01/570/212).

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