Algérie

RÉPUBLIQUE ALGÉRIENNE DÉMOCRATIQUE ET POPULAIRE
Chef de l’État : Abdelaziz Bouteflika
Chef du gouvernement : Ahmed Ouyahia, remplacé par Abdelmalek Sellal le 3 septembre

Contexte

Des syndicalistes, entre autres, ont organisé des manifestations pour dénoncer le chômage, la pauvreté et la corruption. Les rassemblements ont été dispersés par les forces de sécurité, qui ont également empêché des manifestations en bloquant l’accès ou en arrêtant des protestataires.
La situation des droits humains dans le pays a été examinée en mai dans le cadre de l’Examen périodique universel de l’ONU. Le gouvernement n’a pas tenu compte des recommandations qui l’appelaient à abroger les lois promulguées sous l’état d’urgence en vigueur de 1992 à 2011, à lever les restrictions pesant sur la liberté d’expression, d’association et de réunion et à reconnaître le droit à la vérité des familles de victimes de disparitions forcées qui ont eu lieu dans les années 1990.
La haut-commissaire aux droits de l’homme des Nations unies s’est rendue en Algérie en septembre. Elle a évoqué avec les autorités une visite (sollicitée de longue date) du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires.

Liberté d’expression et d’association

La loi sur l’information adoptée en décembre 2011 restreignait les activités des journalistes dans des domaines tels que la sûreté de l’État, la souveraineté nationale et les intérêts économiques du pays ; également votée en décembre 2011, une nouvelle loi sur les associations renforçait les contrôles sur les ONG, conférant aux autorités des pouvoirs de suspension et de dissolution et leur permettant de refuser l’enregistrement ou le financement de celles-ci. Des journalistes ont été poursuivis pour diffamation en vertu du Code pénal.
 Manseur Si Mohamed, journaliste de La Nouvelle République à Mascara, a été condamné en juin à deux mois d’emprisonnement assortis d’une amende pour avoir tenu des propos « diffamatoires ». Il avait écrit dans un article qu’une haute fonctionnaire n’avait pas appliqué une décision de justice. Il a été maintenu en liberté en attendant qu’il soit statué sur son appel.
 En octobre, les autorités ont rejeté la demande d’enregistrement de l’Association nationale de lutte contre la corruption (ANLC), sans motiver leur décision.

Liberté de réunion

Bien que l’état d’urgence ait été levé en 2011, les autorités continuaient d’interdire les manifestations à Alger, en vertu d’un décret promulgué en 2001. Dans la capitale et dans d’autres villes, les forces de sécurité empêchaient les manifestations en bloquant les accès et en procédant à l’interpellation des protestataires, ou bien les dispersaient par la force ou la menace de recours à la force.
 Le 24 avril, les forces de sécurité auraient battu et arrêté des greffiers qui observaient un sit-in pour protester contre leurs conditions de travail.

Défenseurs des droits humains

Les autorités continuaient de harceler les défenseurs des droits humains, notamment en entamant des poursuites judiciaires contre eux.
 Abdelkader Kherba, membre de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’homme (LADDH) et du Comité national pour la défense des droits des chômeurs (CNDDC), a été condamné en mai à une peine d’un an d’emprisonnement avec sursis et à une amende pour « incitation directe à un attroupement ». Il avait participé à un sit-in de protestation des greffiers et filmé le rassemblement. Détenu du 19 avril au 3 mai, il a de nouveau été arrêté, placé en détention et poursuivi pour avoir tenté de filmer une manifestation contre les coupures d’eau à Ksar el Boukhari, dans la wilaya (préfecture) de Médéa, en août. Inculpé d’outrage et violences à fonctionnaire, il a été relaxé et remis en liberté le 11 septembre.
 Le syndicaliste Yacine Zaïd, président de la section de Laghouat de la LADDH, a été arrêté et frappé par des policiers en octobre. Il a été condamné à six mois d’emprisonnement avec sursis assortis d’une amende pour violences contre un agent de l’État. Il s’est plaint d’avoir été frappé par les policiers mais le tribunal n’en a pas tenu compte, en dépit des éléments médicaux qui corroboraient ses allégations.
 Yacine Zaïd et trois autres défenseurs des droits humains qui avaient participé en avril à un sit-in devant le tribunal qui jugeait Abdelkader Kherba ont été inculpés d’« incitation à attroupement non armé », une infraction passible d’un an d’emprisonnement. Le 25 septembre, le tribunal s’est déclaré incompétent pour les juger ; les militants restaient néanmoins inculpés à la fin de l’année.

Lutte contre le terrorisme et sécurité

Des groupes armés, dont Al Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), ont perpétré des attentats à l’explosif, entre autres attaques, visant dans la plupart des cas des cibles militaires. Les autorités ont annoncé que des membres de groupes armés avaient été tués par les forces de sécurité, sans donner beaucoup de détails, ce qui faisait craindre que certains de ces homicides n’aient été des exécutions extrajudiciaires. Quatre civils au moins auraient trouvé la mort dans l’explosion de bombes ou sous les tirs des forces de sécurité. Le Département du renseignement et de la sécurité (DRS) disposait toujours de vastes pouvoirs en matière d’arrestation et de détention. Ses agents pouvaient notamment maintenir au secret des personnes soupçonnées d’actes de terrorisme, ce qui favorisait le recours à la torture et aux mauvais traitements.
 Abdelhakim Chenoui et Malik Medjnoun, condamnés en 2011 à 12 ans d’emprisonnement pour le meurtre du chanteur kabyle Lounès Matoub, ont été remis en liberté respectivement en mars et en mai. Les deux hommes étaient incarcérés depuis 1999. Abdelhakim Chenoui a affirmé avoir fait des « aveux » sous la contrainte et Malik Medjnoun s’est plaint d’avoir été torturé pendant sa détention par les services de sécurité, en 1999.

Impunité pour les atteintes aux droits humains commises dans le passé

Les autorités n’ont pris aucune mesure pour enquêter sur les milliers de disparitions forcées et autres atteintes graves aux droits humains qui ont eu lieu au cours du conflit interne des années 1990. La Charte pour la paix et la réconciliation nationale (Ordonnance n°06-01), en vigueur depuis 2006, accordait l’impunité aux forces de sécurité et rendait passibles de poursuites les personnes qui critiquent le comportement de ces forces. Les familles des disparus devaient accepter des certificats de décès comme condition pour pouvoir prétendre à une indemnisation, mais aucune information ne leur était fournie sur le sort qu’avaient subi leurs proches. Celles qui continuaient de réclamer justice et vérité étaient la cible de harcèlement.
 Mohamed Smaïn, un ancien président de la section de Relizane de la LADDH, qui réclame justice et vérité pour les familles des disparus, a été arrêté en juin parce qu’il n’avait pas déféré à une citation à comparaître délivrée par le parquet de Relizane. Cette citation était liée à une peine de deux mois d’emprisonnement assortie d’amendes qui avait été prononcée à son encontre car il avait reproché aux autorités d’avoir déplacé en 2001 des corps enterrés dans une fosse commune à Relizane. Sa peine avait été confirmée par la Cour suprême en 2011. Il a bénéficié en juillet d’une grâce présidentielle pour raisons de santé et a été remis en liberté.

Droits des femmes

Les femmes continuaient de subir des discriminations dans la législation et dans la pratique. Toutefois, à la suite d’une loi de 2011 visant à améliorer la représentation des femmes au Parlement, celles-ci ont remporté près d’un tiers des sièges aux élections législatives de mai.
En mars, le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes [ONU] a exhorté le gouvernement à réformer le Code de la famille afin de garantir l’égalité entre les hommes et les femmes en matière de mariage, de divorce, de garde d’enfants et d’héritage. Le Comité a également prié le gouvernement de lever les réserves émises lors de la ratification de la Convention sur les femmes [ONU] et de ratifier le protocole facultatif à la Convention. Il l’a appelé à promulguer des lois en vue de protéger les femmes contre les violences dans la famille, entre autres formes de violence, et à lutter contre l’inégalité entre les hommes et les femmes dans le domaine de l’éducation et de l’emploi.

Peine de mort

Les tribunaux ont prononcé au moins 153 condamnations à mort, dans la plupart des cas contre des personnes jugées par contumace pour des infractions liées au terrorisme. Aucune exécution n’a eu lieu. L’Algérie maintenait un moratoire de facto sur les exécutions depuis 1993.
 Huit hommes reconnus coupables d’enlèvement et de meurtre ont été condamnés à mort le 25 octobre. Deux d’entre eux au moins ont affirmé qu’ils avaient été torturés en détention avant leur procès, en 2011.

Visites et documents d’Amnesty International

 Algérie. La suspension d’un avocat stagiaire et militant des droits humains doit être immédiatement levée (MDE 28/001/2012).
 Algérie. Des militants pris pour cibles en Algérie (MDE 28/002/2012).

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