RÉPUBLIQUE DU CAMEROUN
CAPITALE : Yaoundé
SUPERFICIE : 475 442 km_
POPULATION : 16 millions
CHEF DE L’ÉTAT : Paul Biya
CHEF DU GOUVERNEMENT : Peter Mafany Musonge
PEINE DE MORT : maintenue
CONVENTION SUR L’ÉLIMINATION DE TOUTES LES FORMES DE DISCRIMINATION À L’ÉGARD DES FEMMES : ratifiée
PROTOCOLE FACULTATIF À LA CONVENTION SUR L’ÉLIMINATION DE TOUTES LES FORMES DE DISCRIMINATION À L’ÉGARD DES FEMMES : non signé
L’armée et la police ont eu recours à la force contre des manifestants, occasionnant la mort de plusieurs d’entre eux. Les autorités ont empêché des militants politiques d’organiser des réunions et ont arrêté et placé en détention certains d’entre eux durant de courtes périodes. Des journalistes et des syndicalistes ont été arrêtés pour avoir exercé leur droit à la liberté d’expression. Des stations de radio et des chaînes de télévision indépendantes ont été fermées sur ordre des autorités. Des membres du Southern Cameroons National Council (SCNC, Conseil national du Cameroun méridional) condamnés à de lourdes peines d’emprisonnement étaient privés de leur droit d’interjeter appel ; l’un d’eux est mort en détention. Le recours à la torture constituait une pratique systématique. L’État n’a pas pris de mesure pour protéger les femmes contre les violences. Huit condamnations à mort ont été prononcées, mais aucune exécution n’a été signalée.
Contexte
L’activité politique des partis d’opposition et la répression menée par les autorités et les forces de sécurité se sont accrues à l’approche de l’élection présidentielle de 2004. Comme au cours de l’année 2002, les pouvoirs publics ont interdit des réunions organisées par l’opposition et ont arrêté ceux qui adoptaient des positions critiques à l’égard du gouvernement, notamment des militants politiques et des journalistes. Au mois de juin, le Nigéria a accepté d’appliquer un arrêt rendu en 2002 par la Cour internationale de justice et de restituer au Cameroun, en mai 2004, la presqu’île de Bakassi ainsi que 33 villages frontaliers. Le Nigéria s’est engagé à retirer de la région ses fonctionnaires et ses forces de sécurité avant le transfert de souveraineté.
Impunité
Aucune évolution n’a été constatée dans les enquêtes menées au sujet d’exécutions extrajudiciaires qui auraient eu lieu au cours des années précédentes, ni au sujet de la « disparition » de neuf adolescents, au mois de février 2001, à Bépanda Omnisports, un quartier de Douala. En avril, Patrick Mbuwe, un ancien secrétaire du SCNC (mouvement militant en faveur de l’indépendance des provinces anglophones), a été blessé par balle par des hommes en civil et est mort peu après à l’hôpital. Des sources locales soupçonnaient ses agresseurs d’appartenir aux forces de sécurité. En juillet, des policiers ont abattu cinq hommes et blessé plus d’une trentaine d’autres personnes au cours de manifestations qui se déroulaient à Douala.
Les manifestants protestaient contre des actes de corruption et de chantage imputables à la police, mais aussi contre la mort, sous les coups de policiers, d’un conducteur de mototaxi qui aurait omis de s’arrêter à un barrage routier. D’après les informations reçues, aucune action n’a été engagée contre les policiers qui auraient eu recours à la force meurtrière et provoqué la mort de manifestants.
Menaces contre des défenseurs des droits humains
En novembre, les autorités ont harcelé et menacé des défenseurs des droits humains soupçonnés d’avoir aidé la Fédération internationale des droits de l’homme, dont les bureaux sont à Paris, à élaborer un rapport sur la torture au Cameroun qui a été publié au mois d’octobre. Franka Nzounkekang, directrice du Human Rights Defence Group (Groupe de défense des droits de l’homme) a été suivie par des membres des forces de sécurité et a reçu un appel téléphonique anonyme la menaçant d’assassinat. Des agents des forces de sécurité ont perquisitionné au domicile d’Alh Wakil, membre du Mouvement pour la défense des droits de l’homme et des libertés (MDDHL), alors qu’ils ne disposaient d’aucun mandat. Bouba Dirva, qui appartient lui aussi au MDDHL, a reçu la visite de deux gendarmes armés qui lui ont déclaré qu’il allait être arrêté, puis l’ont contraint à leur verser une forte somme d’argent. Les locaux de Douala de l’Action des chrétiens pour l’abolition de la torture et des exécutions capitales ont été placés sous surveillance. La directrice de l’organisation, Madeleine Afité, a reçu des appels téléphoniques émanant de correspondants anonymes.
Censure des médias indépendants et des opposants au gouvernement
Les autorités ont fermé plusieurs stations de radio et chaînes de télévision indépendantes, ou ont refusé de leur accorder une autorisation. En février, les chaînes de télévision RTA et Canal 2 ont été fermées sur ordre des pouvoirs publics, qui les accusaient de fonctionner de manière illégale. En mai, la radio Freedom FM a été interdite la veille même de son inauguration. Au mois de novembre, le ministre de la Communication a ordonné que la station de radio Veritas, appartenant à l’Église catholique, cesse d’émettre. Son fondateur, le cardinal Christian Tumi, est connu pour ses prises de position critiques à l’égard de la politique gouvernementale en matière de droits humains. Début décembre, Veritas a obtenu l’autorisation de reprendre ses émissions.
Le 14 avril, les forces de sécurité ont empêché la publication du journal Mutations et ont saisi le disque informatique contenant l’édition du jour du quotidien. Il semble que ce numéro comportait un article au sujet de la succession du président Paul Biya. Le directeur de publication et plusieurs journalistes ont été arrêtés et placés en détention durant une courte période. Deux jours plus tard, des membres des forces de l’ordre habillés en civil ont retiré des kiosques des exemplaires de Mutations.
Les autorités ont, à diverses reprises, empêché des partis d’opposition et des militants politiques de se réunir, qu’il se soit agi de rassemblements publics ou privés. Parmi les partis visés figuraient notamment le Front des forces alternatives, dont certains dirigeants ont été détenus pendant de courtes périodes en octobre, l’Alliance des forces progressistes et le Social Democratic Front (SDF, Front social démocratique).
Détention de syndicalistes
Aux mois de janvier et de février, Benoît Essiga, président de la Confédération syndicale des travailleurs du Cameroun (CSTC), et 13 autres syndicalistes au moins ont été arrêtés et maintenus en détention durant plusieurs jours à chaque fois. Les autorités les ont accusés d’être responsables de déraillements de trains qui s’étaient produits dans la province du Centre. Ils ont de nouveau été arrêtés mi-avril, avant d’être remis en liberté au mois de mai. Il s’agissait de prisonniers d’opinion, pris pour cibles en raison de leurs activités syndicalistes non violentes.
Prisonniers politiques
Des membres du SCNC condamnés à de lourdes peines d’emprisonnement en 1999 attendaient toujours que le ministre de la Défense se prononce à propos de leur droit d’interjeter appel de leur déclaration de culpabilité et de leur peine. L’un des 18 prisonniers, Daniel Ntanen, est mort en détention au mois d’avril, des suites d’une maladie foudroyante. Un autre détenu, Ebenezer Akwanga, qui purgeait une peine de vingt années d’emprisonnement, s’est évadé alors qu’il était soigné à l’hôpital général de Yaoundé. D’autres prisonniers se trouvaient dans un état de santé précaire et ne recevaient que les soins médicaux fournis par les organisations humanitaires.
Torture et mauvais traitements
En novembre, le Comité contre la torture (ONU) s’est déclaré extrêmement préoccupé par l’usage systématique de la torture par les policiers et les gendarmes après l’arrestation de suspects, et par le fait que les auteurs de ces actes bénéficiaient de l’impunité dans la grande majorité des cas. Le Comité a attiré l’attention sur les informations faisant état d’une surpopulation extrême dans les prisons, où les conditions d’incarcération mettraient en danger la santé et la vie des détenus et s’apparenteraient à des traitements cruels, inhumains ou dégradants. Pas moins de 72 prisonniers auraient trouvé la mort dans la seule prison centrale de Douala. Les soins médicaux seraient payants et la séparation des hommes et des femmes serait rarement assurée. Les procureurs et le Comité national des droits de l’homme et des libertés n’ont que rarement été autorisés à se rendre dans les lieux de détention.
Violence contre les femmes
Le Comité contre la torture a fait part de sa préoccupation quant au fait que le Cameroun n’a adopté aucune législation relative à l’interdiction des mutilations génitales féminines.
Les dispositions du Code pénal prévoyant l’exemption de peine de l’auteur d’un viol si celui-ci se marie avec la victime étaient toujours en vigueur.
Peine de mort
En février, sept personnes ont été condamnées à mort après avoir été reconnues coupables du meurtre d’un agent de police tué à Bamenda en janvier 2002. En juin, une infirmière s’est vu infliger la peine capitale. Elle avait été déclarée coupable d’avoir contaminé, par les virus du sida et de l’hépatite, les deux enfants de son ancien compagnon, auxquels elle avait injecté son propre sang.