Croatie

RÉPUBLIQUE DE CROATIE
CAPITALE : Zagreb
SUPERFICIE : 56 538 km_
POPULATION : 4,4 millions
CHEF DE L’ÉTAT : Stipe Mesi_
CHEF DU GOUVERNEMENT : Ivica Ra_an, remplacé par Ivo Sanader le 23 décembre
PEINE DE MORT : abolie
CONVENTION SUR L’ÉLIMINATION DE TOUTES LES FORMES DE DISCRIMINATION À L’ÉGARD DES FEMMES : ratifiée
PROTOCOLE FACULTATIF À LA CONVENTION SUR L’ÉLIMINATION DE TOUTES LES FORMES DE DISCRIMINATION À L’ÉGARD DES FEMMES : ratifié

Un certain nombre de personnes soupçonnées de crimes de guerre ont été remises au Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (le Tribunal). Parmi elles figuraient aussi bien des Serbes que des Croates. Toutefois, d’autres suspects n’avaient toujours pas été arrêtés, certains bénéficiant apparemment de la protection des autorités croates. Le Tribunal a rejeté la proposition de la Croatie de livrer un ancien général de l’armée, à condition que l’acte d’accusation le concernant soit modifié. Un nombre croissant de Croates et de Serbes ont été traduits devant les tribunaux nationaux pour crimes de guerre. Les témoins restaient cependant exposés à d’éventuels actes d’intimidation ou de harcèlement. Les responsables de centaines de « disparitions » non élucidées (on cite le chiffre de 1 200) n’avaient toujours pas été identifiés. Des milliers de membres de la communauté serbe, vivant avant la guerre en Croatie, continuaient de se heurter à un traitement discriminatoire qui les empêchait de rentrer chez eux.

Contexte
En février, la Croatie a officiellement posé sa candidature pour devenir membre à part entière de l’Union européenne en 2008. La Commission européenne s’est félicitée, au mois de mars, de l’évolution constatée en matière de renforcement de la démocratie et des relations avec les autres États de la région, mais elle a dénoncé l’absence de coopération avec le Tribunal, la persistance des difficultés rencontrées par les réfugiés serbes de Croatie souhaitant rentrer chez eux et se réintégrer, et la lenteur de la réforme judiciaire.
Au mois de mai, Amnesty International a rappelé au gouvernement quelles étaient les obligations de la Croatie aux termes du droit international et en tant qu’État signataire du Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI). En juin, Amnesty International a instamment prié le gouvernement de consulter la société civile à propos de la législation nécessaire à la mise en œuvre du Statut de Rome. L’adoption de cette législation a été différée, afin de permettre aux experts croates et étrangers de la commenter.
Malgré les pressions insistantes exercées par les États-Unis, la Croatie a refusé de signer un accord d’impunité, aux termes duquel elle devait s’engager à ne pas livrer à la CPI les ressortissants des États-Unis accusés de génocide, de crimes contre l’humanité ou de crimes de guerre.
La Hrvatska Demokratska Zajednica (HDZ, Communauté démocratique croate) est devenue la première force du Parlement à l’issue des élections législatives de novembre. Le dirigeant de cette formation, Ivo Sanader, a été nommé Premier ministre au mois de décembre.

Impunité pour les atteintes aux droits humains commises pendant la guerre
Poursuites entamées au niveau international
Les deux suspects du groupe dit des « Trois de Vukovar » qui étaient encore en liberté ont été remis au Tribunal, après avoir passé plusieurs années sans être inquiétés en Serbie. Miroslav Radi_, ancien officier de la Jugoslovenska Narodna Armija (JNA, Armée fédérale yougoslave), s’est rendu aux autorités serbes au mois d’avril. Veselin _ljivan_anin, lui aussi ex-officier de la JNA, puis de l’Armée yougoslave qui lui avait succédé, a quant à lui été arrêté en juin par la police serbe. Les deux hommes avaient été inculpés par le Tribunal de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre, pour leur participation présumée au massacre d’environ 200 personnes, croates pour la plupart, capturées à l’hôpital de Vukovar en novembre 1991, après la chute de la ville aux mains des forces de l’ex-JNA et des paramilitaires serbes.
_En avril, la police croate a arrêté Ivica Raji_, contre qui le Tribunal avait rendu public un acte d’accusation pour crimes de guerre perpétrés contre la population non croate de Bosnie-Herzégovine. Le suspect a été remis au Tribunal en juin, à l’issue d’une procédure d’extradition. Le ministère de l’Intérieur aurait enquêté sur certaines informations, selon lesquelles Ivica Raji_ se serait caché pendant des années dans la région de Split, où il aurait échappé aux recherches grâce à ses relations au sein de l’armée, qui lui auraient notamment permis de se procurer de faux papiers.
La procureure du Tribunal a dénoncé à plusieurs reprises l’attitude de la Croatie, qui n’avait toujours pas arrêté et remis à la justice internationale Ante Gotovina, général en retraite de l’armée croate, accusé d’être responsable de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre perpétrés au cours de l’année 1995 contre la population serbe de Krajina. Au mois de juin, des soldats de l’OTAN ont échoué dans une tentative d’arrestation menée dans le centre de la Bosnie-Herzégovine. Le Tribunal a ensuite refusé la proposition qu’aurait faite le président Mesic’, aux termes de laquelle les autorités croates acceptaient de remettre Ante Gotovina au Tribunal, à condition qu’il soit autorisé à faire une déposition auprès des enquêteurs du Tribunal et que l’acte d’accusation le concernant soit modifié.
Poursuites entamées au niveau national
Les tribunaux de Croatie ont continué d’examiner de nombreuses affaires mettant en cause, outre des Serbes, un nombre croissant de Croates accusés de crimes de guerre. Selon l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), 30 des 38 arrestations effectuées au cours du premier semestre concernaient des Serbes. Dans le même temps, les tribunaux de Croatie ont reconnu 31 Serbes et quatre Croates coupables de crimes de guerre.
Un certain nombre de procédures n’étaient pas conformes aux normes internationales d’équité.
Au mois d’avril, Mirko Graorac, un Serbe de Bosnie purgeant en Croatie une peine de quinze années d’emprisonnement pour crimes de guerre, a été transféré vers la Republika Srpska, l’une des entités composant la Bosnie-Herzégovine, où les crimes dont il était accusé avaient été commis. Son procès, devant le tribunal régional de Split, avait été entaché de graves irrégularités, et il avait demandé à être rejugé par un tribunal bosniaque.
L’un des rares procès intentés à des officiers supérieurs croates a débouché sur une condamnation.
Le tribunal régional de Rijeka a condamné, au mois de mars, trois officiers de l’armée croate, dont le général à la retraite Mirko Norac, à des peines allant jusqu’à quinze ans d’emprisonnement. Les trois hommes ont été reconnus coupables de crimes de guerre, perpétrés contre des civils serbes au cours de l’année 1991. Deux autres accusés ont été acquittés.
Des groupes locaux de défense des droits humains ont remis au parquet de nouveaux éléments de preuve attestant d’atteintes aux droits humains commises pendant la guerre, et notamment d’un grand nombre d’homicides et de « disparitions » dont auraient été victimes des Croates et des Serbes à Osijek, en 1991 et 1992.
En mars, deux anciens membres des forces armées croates ont été inculpés de crimes de guerre commis sur la personne de civils serbes, à Paulin Dvor, dans la région d’Osijek, en décembre 1991. Les corps de 18 victimes, exhumés en 2002 par les enquêteurs du Tribunal, auraient été identifiés en juin. Le procès a commencé ce même mois, après que la procureure du Tribunal eut communiqué au tribunal d’Osijek de nombreuses pièces à verser au dossier.
En juin, la justice serbe a ouvert une enquête sur la responsabilité présumée de six anciens membres et responsables des forces paramilitaires serbes dans les exécutions en masse de prisonniers non serbes perpétrées après la chute de Vukovar (voir ci-dessus). Quatre des suspects avaient été arrêtés par la police serbe dans le cadre d’une opération menée contre d’anciens membres des services de sécurité liés à des réseaux de la criminalité organisée, à la suite de l’assassinat, en mars, du Premier ministre serbe, Zoran Djindji_.
Protection des témoins
En l’absence d’une réelle politique globale visant à garantir leur sécurité, les victimes et les témoins appelés à comparaître dans le cadre de procédures judiciaires entamées pour crimes de guerre ne bénéficiaient toujours pas d’une protection suffisante de la part de l’État contre les menaces et les actes de harcèlement et d’intimidation.
D’anciens membres de la police et des forces armées qui témoignaient à charge dans les procès de personnes accusées de crimes de guerre perpétrés dans la région de _ibenik et de Split auraient tout particulièrement fait l’objet de manœuvres d’intimidation et de harcèlement.
Les responsables d’actes d’intimidation, voire d’agressions, contre des témoins n’ont jamais été traduits en justice, ni même identifiés.
Au mois de mai, la famille de Mile Levar, un ancien officier de l’armée croate assassiné en 2000, a intenté une action au civil afin d’obtenir réparation des dommages subis du fait de la passivité des autorités de l’État. Mile Levar avait été tué après avoir fourni au Tribunal des informations sur des crimes de guerre perpétrés contre des Serbes à Gospi_. Cette affaire n’était toujours pas élucidée.
« Disparitions »
Au mois de février, la Commission gouvernementale croate des personnes disparues était toujours à la recherche de plus de 1 200 personnes portées manquantes, notamment d’un grand nombre de « disparus ». Les responsables n’avaient toujours pas été identifiés. Le gouvernement croate, la Serbie et le Monténégro ont poursuivi leur coopération, afin de permettre l’exhumation des corps enterrés en Serbie et de les renvoyer en Croatie, aux fins d’identification et de sépulture.
En mars, les corps ont été exhumés d’un charnier situé à Cetingrad. Il s’agissait de victimes musulmanes, tuées pendant le conflit qui a opposé l’armée bosniaque aux forces loyales à Fikret Abdi_, un dirigeant politique. La Commission bosniaque pour les personnes portés disparues était apparemment toujours à la recherche de dizaines de personnes, portées manquantes en Croatie.

Droit au retour
Selon le gouvernement, environ 9 000 membres de minorités étaient rentrés en Croatie au cours des 11 premiers mois de l’année. Nombre de ces retours ne se sont cependant pas faits dans des conditions de réinstallation durable. Des études menées par le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) dans les environs de Knin, dans le sud de la Croatie, ont montré qu’environ 60 p. cent seulement des personnes retournées dans la région y étaient effectivement restées. Ceux qui cherchaient à rentrer chez eux se heurtaient toujours à de sérieuses difficultés pour récupérer leurs biens, les pouvoirs publics appliquant la législation avec mollesse et sans grande cohérence.
Des dizaines de milliers de réfugiés serbes n’étaient toujours pas en mesure de regagner leur foyer d’avant-guerre. La plupart d’entre eux avaient été dépouillés de leurs droits locatifs à l’issue de procédures judiciaires inéquitables engagées en leur absence. Le gouvernement a promis de mettre à leur disposition des logements sociaux, mais il n’a pas proposé de réparations à ces anciens locataires pour la perte de leurs droits, ce qui ne faisait que renforcer la discrimination dont étaient victimes les Serbes désireux de revenir vivre en Croatie.

Procédure d’asile
Le Parlement a adopté, en juin, une nouvelle Loi sur l’asile prévue pour entrer en vigueur en juillet 2004, après la construction d’un centre d’accueil pour demandeurs d’asile. Le système qui présidait jusqu’à présent à la détermination du statut de réfugié ne constituait pas une véritable procédure équitable d’examen des demandes d’asile. Les demandeurs d’asile et les étrangers sans papiers se retrouvaient souvent placés arbitrairement en détention, sans aucun recours judiciaire.

Visites d’Amnesty International
Une délégation d’Amnesty International s’est rendue en Croatie en février.

Autres documents d’Amnesty International
Concerns in Europe and Central Asia, January-June 2003 : Croatia (EUR 01/016/2003).

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