ALLEMAGNE

Selon certaines sources, la police s’était rendue coupable de mauvais traitements et d’un recours excessif à la force. Une vive polémique se poursuivait sur l’existence de circonstances pouvant légitimer l’usage de la torture par les responsables de l’application des lois.

République fédérale d’Allemagne
CAPITALE : Berlin
SUPERFICIE : 357 028 km²
POPULATION : 82,5 millions
CHEF DE L’ÉTAT : Johannes Rau, remplacé par Horst Köhler le 1er juillet
CHEF DU GOUVERNEMENT : Gerhard Schröder
PEINE DE MORT : abolie
COUR PÉNALE INTERNATIONALE : Statut de Rome ratifié
CONVENTION SUR LES FEMMES : ratifiée
PROTOCOLE FACULTATIF À LA CONVENTION SUR LES FEMMES : ratifié

Contexte

Au mois de juillet, après avoir longtemps remis leur décision, les ministres de l’Intérieur des 16 Länder (États régionaux) ont recommandé la ratification du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants des Nations unies. Ce Protocole exige notamment la mise en place, à l’échelle nationale, d’un mécanisme indépendant de surveillance des centres de détention. La création de ce mécanisme était à l’étude.
Le Bundestag (Diète fédérale) a ratifié le Protocole facultatif se rapportant à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la participation des enfants aux conflits armés. Il a, malheureusement, formulé une réserve afin que les mineurs puissent s’engager dans l’armée à partir de l’âge de dix-sept ans.

Mauvais traitements et recours excessif à la force par la police

En janvier, Amnesty International a publié un rapport sur les mauvais traitements et les recours excessifs à la force imputables à la police. Ce document citait, à titre d’exemples, 20 affaires différentes et évoquait de nombreuses allégations de même nature. Dans son rapport, l’organisation exhortait les autorités fédérales et les gouvernements des 16 Länder à veiller à ce que ces accusations fassent l’objet d’enquêtes immédiates et impartiales, à tenir des statistiques sur les cas de brutalités policières présumées et à créer un organe indépendant chargé d’enquêter sur les affaires de ce type. Amnesty International a débattu du contenu du rapport et de ses recommandations avec des représentants de l’État et de la force publique, ainsi qu’avec d’autres experts. Fin 2004, toutefois, ni le gouvernement fédéral ni les autorités des Länder n’avaient appliqué les recommandations de l’organisation.
Dans les nombreux cas sur lesquels Amnesty International a enquêté, les poursuites pénales engagées contre des policiers ont été abandonnées ou se sont conclues par un acquittement. L’affaire Aamir Ageeb (voir ci-après) est la seule à l’issue de laquelle des agents de la force publique ont été reconnus coupables.
Svetlana Lauer, une Allemande de quarante-quatre ans originaire du Kazakhstan, a affirmé que plusieurs policiers lui avaient infligé des mauvais traitements, au mois de février 2002, alors qu’elle se trouvait à son domicile de Hallstadt, en Bavière. Les poursuites pénales engagées contre les agents de la force publique ont été abandonnées et Svetlana Lauer a été déboutée de son appel en avril 2003. Toutefois, les poursuites engagées, au mois de septembre 2003, par le Bureau du procureur de Bamberg contre Svetlana Lauer pour diffamation et rébellion contre des représentants de la loi ayant entraîné des lésions corporelles ont abouti à un règlement amiable, cette femme ayant accepté de payer la somme de 210 euros. L’affaire a été officiellement close au mois de mai.
Josef Hoss aurait été brutalisé, en décembre 2000, par des policiers appartenant à l’Unité spéciale d’intervention, à Saint-Augustin, près de Bonn. Les poursuites engagées contre les agents de la force publique ont été abandonnées au mois de juin 2003. Josef Hoss a fait appel de cette décision, mais le Bureau du procureur de Cologne l’a débouté en février 2004. Un ultime recours formé par l’avocat du plaignant a été rejeté au mois d’avril. L’Unité spéciale d’intervention a, semble-t-il, été dissoute. Fin 2004, la question de l’indemnisation de Josef Hoss n’avait pas été réglée.
Walter Herrmann, un militant associatif de soixante-deux ans, aurait subi des mauvais traitements en septembre 2001 après avoir été arrêté par la police à Cologne. Il souffrait de nombreuses blessures, dues, semble-t-il, aux brutalités exercées par les policiers sur le lieu de l’arrestation, ainsi qu’au siège de la police de Cologne. En février 2004, les trois agents de la force publique accusés de lui avoir infligé des mauvais traitements ont été acquittés par un tribunal de Cologne. Le juge a conclu qu’il n’existait pas de preuves suffisantes du caractère délibéré des blessures infligées à Walter Herrmann. En novembre, ce dernier a été débouté en appel et l’acquittement des policiers a été confirmé.
René Bastubbe, un homme de trente ans, a été abattu par un policier, en juillet 2002, à Nordhausen (Land de Thuringe) alors qu’il s’opposait à son arrestation. Il a lancé un ou plusieurs pavés en direction de l’agent et, tandis qu’il se penchait pour en ramasser un autre, le policier lui a tiré dans le dos à une distance de plusieurs mètres. René Bastubbe est mort des suites d’une grave hémorragie. En octobre 2003, le tribunal régional de Mühlhausen a conclu que l’agent de police avait agi en légitime défense et a prononcé son acquittement. La Cour fédérale de justice de Karlsruhe a rejeté en juin le pourvoi en révision introduit par le ministère public.
Miriam Canning, une ressortissante kenyane, aurait été molestée par des policiers, en juillet 2001, à Stuttgart, dans le Bade-Wurtemberg. Les agents de la force publique avaient fait irruption à son domicile à l’aube dans le but de contrôler l’identité de son fils de dix-neuf ans et celle de son cousin. L’un et l’autre avaient été interpellés dans le courant de la nuit par la police, et soumis à une fouille. La famille Canning a porté plainte mais le ministère public a classé l’affaire. Il n’a manifestement pas pris en compte un certain nombre de points importants, en particulier la cause des blessures de Miriam Canning qui, d’après un médecin, concordaient parfaitement avec ses déclarations. Au mois d’octobre, la demande de dommages et intérêts formulée par Miriam Canning a été rejetée, au motif que ses blessures résultaient de la négligence ou du manque d’attention, et non d’une agression délibérée.
Aamir Ageeb, un ressortissant soudanais, est mort le 28 mai 1999, lors de son renvoi forcé, dans l’avion qui le ramenait de Francfort à Khartoum, via Le Caire. D’après des experts, il aurait été victime d’une asphyxie causée par la méthode d’immobilisation qui lui a été appliquée durant le vol. Le 18 octobre, le tribunal régional de Francfort-sur-le-Main a reconnu coupables d’homicide trois agents de la Police fédérale des frontières. Il les a tous condamnés à une peine de neuf mois de prison avec sursis et mise à l’épreuve, ainsi qu’à une amende d’un montant de 2 000 euros à verser à la famille de la victime. Le président du tribunal a déclaré que les trois agents condamnés étaient certes responsables de la mort d’Aamir Ageeb, mais que leurs supérieurs l’étaient tout autant, parce qu’ils n’avaient pas donné d’instructions précises et qu’ils n’étaient pas intervenus au cours de l’expulsion. Par ailleurs, les directives relatives aux renvois étaient insuffisantes. Certaines ont été modifiées et précisées à la suite du décès d’Aamir Ageeb.

Débat sur la torture

Le débat public s’est poursuivi sur la question de savoir si les responsables de l’application des lois pouvaient avoir recours à la torture dans certaines circonstances, notamment dans le cadre de la lutte contre le « terrorisme ». Il était apparu que, en 2002, Wolfgang Daschner, vice-président de la police de Francfort-sur-le-Main, avait donné l’ordre à l’un de ses subordonnés d’utiliser la force lors de l’enquête menée sur l’enlèvement d’un garçon de onze ans. Wolfgang Daschner a publiquement défendu ses actes. En juin, le tribunal régional de Francfort-sur-le-Main a ordonné que Wolfgang Daschner comparaisse sous l’inculpation de manœuvres graves d’intimidation. Le 20 décembre, Wolfgang Daschner et l’un de ses subalternes ont été condamnés pour avoir menacé un suspect d’actes de torture. Le tribunal régional a néanmoins reconnu des circonstances atténuantes et les deux hommes ont simplement été condamnés à une amende avec sursis. Cependant, le président du tribunal a déclaré que la torture constitue un crime qui transgresse le droit international et le droit constitutionnel.
De nombreuses personnalités influentes se sont empressées de condamner le recours à la torture. Certains, toutefois, ont profité du débat soulevé pour tenter de justifier ces agissements et affirmer qu’il devrait, dans certains cas, y avoir des exceptions à l’interdiction absolue de pratiquer des actes de torture. Amnesty International déplorait toujours que les hauts responsables de la classe politique n’aient pas réaffirmé de façon ferme et sans équivoque l’engagement de l’Allemagne à respecter ses obligations internationales en matière d’interdiction de la torture.

Nouvelle loi sur l’immigration

Au terme de quasiment quatre années de délibérations, une nouvelle loi sur l’immigration a été adoptée. L’essentiel de ses dispositions devait entrer en vigueur au mois de janvier 2005. Au titre de la nouvelle législation, les victimes d’atteintes aux droits de la personne commises par des agents non gouvernementaux et les victimes de violations des droits humains liées au genre pourraient bénéficier du statut de réfugié.
Il est apparu cependant qu’un certain nombre de ces nouvelles dispositions portaient atteinte aux droits des demandeurs d’asile et des personnes ne possédant pas de permis de séjour.

Autres documents d’Amnesty International

  Back in the spotlight : Allegations of police ill-treatment and excessive use of force in Germany (EUR 23/001/2004).

  EU arms embargoes fail to prevent German engines being incorporated into military vehicles available in Burma/Myanmar, China and Croatia (ACT 30/016/2004).

  Europe and Central Asia : Summary of Amnesty International’s concerns in the region, January - June 2004 : Germany (EUR 01/005/2004).

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