BELGIQUE

Cette année encore, des agressions contre des juifs et des musulmans ont été enregistrées. Des détenus, étrangers pour nombre d’entre eux, auraient été victimes de violences et d’autres traitements cruels, inhumains ou dégradants infligés par des policiers. De nouvelles informations ont fait état d’une surpopulation carcérale et d’un taux élevé de suicide parmi les prisonniers. Il était à craindre que certains aspects de la procédure d’asile et des voies de recours à cet égard ne respectent pas les normes internationales relatives aux droits des demandeurs d’asile. L’entrée en vigueur d’une loi adoptée en 2003 et portant création d’un service de tutelle destiné à protéger les droits des mineurs étrangers non accompagnés a été accueillie avec satisfaction. Toutefois, le sort réservé à certains de ces enfants ne répondait toujours pas aux normes internationales. Le gouvernement a annoncé la mise en place d’un plan d’action national contre la violence conjugale portant sur la période allant de fin 2004 à 2007 ; on craignait néanmoins que ce plan ne dispose pas d’un financement suffisant. Le nombre de cas de traite d’êtres humains, en particulier de femmes et de jeunes filles destinées à l’exploitation sexuelle, a encore augmenté.

Royaume de Belgique
CAPITALE : Bruxelles
SUPERFICIE : 30 520 km²
POPULATION : 10,3 millions
CHEF DE L’ÉTAT : Albert II
CHEF DU GOUVERNEMENT : Guy Verhofstadt
PEINE DE MORT : abolie
COUR PÉNALE INTERNATIONALE : Statut de Rome ratifié
CONVENTION SUR LES FEMMES : ratifiée
PROTOCOLE FACULTATIF À LA CONVENTION SUR LES FEMMES : ratifié

Surveillance réalisée par les organisations intergouvernementales
Dans un rapport publié au mois de janvier, la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI) a noté que la Belgique avait accompli des progrès, mais qu’un certain nombre de ses recommandations antérieures « n’[avaient] pas été mises en œuvre ou l’[avaient] été de façon incomplète ».
En juillet, le Comité des droits de l’homme des Nations unies a fait part de ses préoccupations concernant, notamment, les informations faisant état d’actes racistes, les cas de brutalités policières et la non-garantie ou le non-respect de l’intégralité des droits des demandeurs d’asile, des immigrés en situation irrégulière, des personnes gardées à vue, des détenus et des personnes souffrant de troubles mentaux. Le Comité déplorait également l’insuffisance de l’aide aux victimes de traite des êtres humains. Il a indiqué que les modifications apportées en 2003 à la loi sur la compétence universelle avaient des répercussions négatives pour les personnes ayant été victimes de violations graves du droit international humanitaire. Le Comité s’est également dit préoccupé par le fait que la définition du « terrorisme » présente dans la Loi relative aux infractions terroristes de décembre 2003, n’était pas de nature à satisfaire entièrement au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP).

Racisme et xénophobie dans la société
De nombreux cas d’injures, d’actes de harcèlement et d’agressions violentes contre des membres de la communauté juive, y compris des enfants, ont été signalés. Des actes racistes contre des Arabes et des musulmans, notamment des demandeurs d’asile, ont également été recensés.
En janvier, l’ECRI a demandé « que la réponse des institutions face à l’usage de propos racistes et xénophobes en politique soit plus déterminée », et que soient entrepris « des efforts concertés de la société belge dans son ensemble » afin de lutter contre les « manifestations d’antisémitisme et d’islamophobie ».
Au mois de juillet, le Comité des droits de l’homme a relevé avec inquiétude le nombre d’« actes racistes, xénophobes, antisémites ou antimusulmans » et a exhorté la Belgique à prendre toutes les mesures nécessaires afin de protéger les différentes communautés résidant dans le pays. Le gouvernement fédéral a vivement condamné ces actes et un certain nombre d’initiatives ont été adoptées par les autorités locales, régionales et fédérales afin de protéger les communautés vulnérables, de lutter contre le racisme et de promouvoir le dialogue interculturel. Au mois de juillet, à la suite d’une brusque augmentation du nombre d’agressions à caractère raciste, l’État a adopté un plan d’action fédéral détaillé en vue de lutter contre le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie.
• Au mois de juin, quatre adolescents, élèves d’une école talmudique d’une banlieue d’Anvers, ont déclaré s’être retrouvés face à face, dans la rue, avec un groupe de jeunes gens, d’origine nord-africaine semble-t-il, armés de couteaux et d’instruments contondants. L’un des adolescents, âgé de seize ans, a été poignardé dans le dos, ce qui lui a occasionné une perforation du poumon. Les autorités ont affirmé que toutes les mesures nécessaires seraient prises afin de protéger l’école ; une information judiciaire a été ouverte pour retrouver les agresseurs.
• Un matin de juillet, à l’aube, plusieurs individus masqués et armés de matraques et d’un couteau ont fait irruption dans le centre d’accueil ouvert pour demandeurs d’asile de Broechem, près d’Anvers. Ils ont pénétré dans les chambres des résidents, ont terrorisé ces derniers et ont pris trois hommes à part dans le but de les brutaliser. Les agresseurs leur ont posé des questions à connotation raciste, leur demandant en particulier s’ils étaient musulmans. Il est apparu ultérieurement que les victimes étaient d’origine russe, israélienne et serbe. À la suite de cet épisode, l’une d’elles a dû être hospitalisée. La police et l’Agence fédérale pour l’accueil des demandeurs d’asile (Fedasil) ont annoncé la mise en place de mesures de sécurité supplémentaires afin de protéger les résidents de Broechem et des autres centres pour demandeurs d’asile. La Fedasil a par ailleurs déposé une plainte contre X et une information judiciaire a été ouverte. Les agresseurs - tous des adolescents, mineurs pour certains - ont été arrêtés dans les jours qui ont suivi.

Mauvais traitements imputables à la police, racisme et impunité
De nouvelles informations ont fait état de mauvais traitements et de violences à caractère raciste infligés par des fonctionnaires de police. Le Comité permanent de contrôle des services de police a indiqué que les plaintes déposées pour actes racistes commis par des policiers étaient en augmentation et que la plupart étaient enregistrées dans des villes à forte population immigrée, comme Bruxelles ou Anvers. Les auteurs de ces violences bénéficiaient souvent de l’impunité. Un certain nombre de garanties fondamentales contre les mauvais traitements en garde à vue n’avaient toujours pas été mises en place.
Le Comité des droits de l’homme a demandé à la Belgique de modifier son Code de procédure pénale et de « garantir les droits des personnes gardées à vue d’informer leurs proches de leur détention et d’accéder à un avocat et à un médecin dès les premières heures de la détention ». Le Comité s’est déclaré préoccupé par la persistance « d’allégations de violences policières, souvent accompagnées d’actes de discrimination raciale », et par les informations selon lesquelles les enquêtes n’étaient pas toujours conduites avec diligence et les sentences, lorsqu’elles étaient prononcées, demeuraient « la plupart du temps symboliques ». Le Comité a demandé que soient menées des enquêtes plus approfondies et que soient systématiquement jointes les actions intentées pour violences policières et celles intentées par les forces de l’ordre contre les victimes présumées.
L’ECRI a demandé que des « efforts supplémentaires soient déployés pour prévenir les comportements racistes ou discriminatoires » de la police. Elle a réitéré ses recommandations sur la nécessité de mettre en œuvre la législation nationale existante dans le domaine de la lutte contre le racisme et la discrimination raciale, afin de garantir l’application de ces textes à l’égard des policiers responsables de tels actes.

Atteintes aux droits humains au cours d’opérations d’éloignement
Cette année encore, des étrangers, hommes et femmes, auraient été victimes d’un usage excessif de la force et de traitements cruels, inhumains ou dégradants dans le cadre d’opérations d’éloignement. En juillet, le Comité des droits de l’homme a demandé que les personnes chargées de ces opérations bénéficient d’une formation plus approfondie et fassent l’objet d’une surveillance plus poussée.
Des étrangers qui s’étaient vu refuser l’entrée sur le territoire belge à leur descente d’avion et avaient été placés, sur décision administrative, dans des centres fermés pour étrangers en attendant d’être renvoyés, ont été remis en liberté sur décision du tribunal chargé de statuer sur la légalité de la prolongation de leur détention. Dans certains cas, les personnes non admises sur le territoire étaient directement transférées dans la zone de transit de l’aéroport de Bruxelles-National sous escorte policière, sur ordre de l’Office des étrangers, qui est rattaché au ministère de l’Intérieur. Elles y restaient plusieurs jours ou plusieurs semaines - plusieurs mois dans quelques cas -, détenues de fait, sans passeport, sans assistance juridique et sans certains des moyens de survie élémentaires (nourriture, air frais et installations sanitaires adaptées notamment).
Ces personnes, parmi lesquelles figuraient des demandeurs d’asile déboutés, étaient ainsi souvent tributaires de la charité des passagers et du personnel de l’aéroport.
Le ministère a affirmé que les étrangers qui avaient été remis en liberté sur décision de justice n’avaient toutefois nul droit de résider en Belgique et faisaient toujours l’objet d’une mesure d’éloignement prise par l’Office des étrangers. Il a indiqué qu’un placement en zone de transit ne correspondait pas à une mise en détention mais à une simple remise à la frontière extérieure, ajoutant que ces personnes étaient libres de quitter le territoire en empruntant un vol à destination de leur pays d’origine ou d’un autre État, les frais de transport étant supportés par la compagnie aérienne qu’elles avaient empruntée à l’aller.
Amnesty International s’est associée à plusieurs organisations non gouvernementales belges qui ont pris des initiatives publiques et ont adressé des appels directs aux autorités afin que cesse cette pratique. En juillet, le Comité des droits de l’homme a lui aussi fait part de son inquiétude devant le fait que des étrangers étaient maintenus en zone de transit « dans des conditions sanitaires et sociales précaires ». Il a estimé que ces pratiques s’apparentaient à des détentions arbitraires et pouvaient être à l’origine de traitements inhumains et dégradants, et que la Belgique devait y mettre fin immédiatement.
• Un adolescent originaire de Guinée-Bissau qui était arrivé à l’aéroport de Bruxelles au mois de novembre 2003 et avait déposé immédiatement une demande d’asile (par la suite rejetée) a passé huit mois dans des centres fermés pour étrangers. Au cours de cette période, il a fait l’objet de plusieurs tentatives d’éloignement. Les tribunaux ont, à deux reprises, conclu qu’il devait être remis en liberté et autorisé à pénétrer sur le territoire belge. Ils ont également indiqué qu’un tuteur devait lui être affecté et des soins adaptés lui être prodigués dans un établissement où il serait protégé en tant que mineur. L’Office des étrangers a contesté le fait que ce jeune homme soit mineur, comme il l’affirmait, et l’a finalement transféré, en juillet, dans la zone de transit de l’aéroport, où il a passé plusieurs jours sans nourriture et sans un matelas pour dormir. À la suite de l’intervention d’organisations non gouvernementales et de l’écho donné par les médias à cette affaire, le ministre de l’Intérieur a ordonné que le jeune garçon soit transféré dans un centre d’accueil ouvert pour demandeurs d’asile.
Dans le courant de l’année, à la demande de ce même ministre, une commission indépendante a réexaminé les méthodes employées lors des opérations de renvoi forcé. Amnesty International a attiré l’attention de cette commission sur ses motifs de préoccupation persistants, ainsi que sur les recommandations remises par l’organisation au gouvernement belge au cours de l’année 2003. Le rapport définitif et les recommandations de la commission n’avaient pas été publiés fin 2004.

Autres documents d’Amnesty International
 Europe and Central Asia : Summary of Amnesty International’s concerns in the region, January-June 2004 : Belgium (EUR 01/005/2004).
 Belgique. Halte à la violence contre les femmes. Briser le cycle de la violence (EUR 14/001/2004).
 Belgique. Agir rapidement pour répondre aux préoccupations relatives aux droits humains (EUR 14/002/2004).

Toutes les infos
Toutes les actions
2024 - Amnesty International Belgique N° BCE 0418 308 144 - Crédits - Charte vie privée
Made by Spade + Nursit