GUINÉE-BISSAU

La situation politique restait fragile et le conflit entre le pouvoir politique et les autorités militaires se poursuivait. L’instabilité était exacerbée par les divisions au sein des autorités civiles et par les luttes de factions dans l’armée. La tension s’est accrue en avril à la suite d’un soulèvement militaire. Les forces armées se sont rendues responsables de violations des droits humains, notamment de torture ainsi que d’arrestations et de détentions arbitraires. Personne n’a été traduit en justice pour répondre des assassinats politiques et des actes de torture commis en 2009.

RÉPUBLIQUE DE GUINÉE-BISSAU
CHEF DE L’ÉTAT : Malam Bacai Sanhá
CHEF DU GOUVERNEMENT : Carlos Gomes Júnior
PEINE DE MORT : abolie
POPULATION : 1,6 million
ESPÉRANCE DE VIE : 48,6 ans
MORTALITÉ DES MOINS DE CINQ ANS (M/F) : 207 / 186 ‰
TAUX D’ALPHABÉTISATION DES ADULTES : 51 %

Contexte

En janvier, le gouvernement a signé un accord avec les États-Unis prévoyant une coopération entre un procureur américain et le procureur général de la République de Guinée-Bissau dans la lutte contre le trafic de stupéfiants et d’autres infractions. Le procureur américain ne s’était toutefois pas encore rendu en Guinée-Bissau à la fin de 2010.
Un ancien ministre de la Pêche et trois fonctionnaires du ministère ont été inculpés en février de détournement de fonds. L’affaire n’était toujours pas jugée à la fin de l’année. L’Assemblée nationale était manifestement peu disposée à lever l’immunité parlementaire de l’une des personnes mises en cause.
En avril, le général António Indjai, chef d’état-major adjoint des forces armées, a déposé et mis en état d’arrestation le chef d’état-major, l’amiral Zamora Induta. Le général Indjai a retenu pendant un court laps de temps le Premier Ministre, Carlos Gomes Júnior, et a menacé de le tuer si les manifestants qui étaient descendus dans la rue pour le soutenir continuaient de protester. Au même moment, des militaires agissant sur les ordres du général Indjai ont pris d’assaut les bureaux des Nations unies dans la capitale, Bissau, et « libéré » l’ancien chef d’état-major de la Marine, le contre-amiral Bubo Na Tchuto. Ce dernier s’était réfugié dans les locaux de l’ONU après être volontairement rentré en Guinée-Bissau en décembre 2009. Il résidait en Gambie depuis 2008, où il s’était réfugié après avoir été accusé de complot. Le contre-amiral a été réinvesti dans ses fonctions de chef d’état-major de la Marine en octobre. Le président Sanhá a nommé en juin le général António Indjai au poste de chef d’état-major des forces armées, en remplacement de l’amiral Zamora Induta, démis de ses fonctions. Cette nomination et celle du contre-amiral Bubo Na Tchuto, en octobre, ont soulevé de vives critiques dans le pays et à l’étranger.
Le bilan de la Guinée-Bissau en matière de droits humains a été évalué en mai dans le cadre de l’examen périodique universel des Nations unies, et le rapport final du Conseil des droits de l’homme a été adopté en septembre. Le gouvernement a rejeté cinq recommandations, dont celles demandant la fin de l’impunité pour les violations des droits humains commises par les forces armées. Parmi les recommandations acceptées figure celle concernant un engagement à ériger les mutilations génitales féminines en infraction pénale, quoique seulement au terme d’une campagne de sensibilisation de la population.
En mai, l’Assemblée nationale a approuvé un train de mesures législatives comprenant des modifications à la loi organique sur les forces armées ainsi que plusieurs textes sur la Garde nationale, la police chargée du maintien de l’ordre et des services du renseignement.
Invoquant l’instabilité politique et le non-respect de l’état de droit, l’Union européenne a mis fin en septembre à la mission de réforme du secteur de la sécurité qu’elle menait sur place depuis 2008.
La Guinée-Bissau a ratifié en novembre la Convention internationale sur la discrimination raciale et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Ces instruments devaient entrer en vigueur respectivement le 1er décembre 2010 et le 1er février 2011.

Impunité

Les enquêtes sur les assassinats politiques commis en mars et juin 2009 étaient au point mort, apparemment faute de moyens suffisants pour interroger certains témoins à l’étranger. Les forces armées continuaient de perpétrer des violations des droits humains en toute impunité.

Arrestations et détentions arbitraires

Six militaires – dont une femme – arrêtés pour leur implication présumée dans l’assassinat, en mars 2009, du général Tagme na Waie, ancien chef d’état-major, ont été détenus au secret sans inculpation pendant 20 mois. Ils ont été remis en liberté en décembre dans l’attente de leur inculpation et de leur procès. D’après les informations recueillies il leur était interdit de quitter le pays.
En avril, le général António Indjai a arrêté l’amiral Zamora Induta, chef d’état-major des forces armées, et l’a accusé d’être impliqué dans la disparition de stupéfiants saisis lors d’une opération coup de poing. Selon d’autres informations, toutefois, l’arrestation serait liée à une enquête lancée en mars par l’amiral Zamora Induta sur l’implication d’officiers de haut rang dans un trafic de drogue. Le général Indjai a également arrêté le colonel Samba Djaló, chef des services du renseignement militaire, et l’a accusé d’ingérence dans les activités des partis politiques. Les deux hommes auraient été torturés en détention à la caserne de Mansôa. En septembre, la Cour suprême militaire a ordonné leur remise en liberté conditionnelle, mais ce n’est qu’à la mi-décembre qu’ils ont été libérés, sans inculpation, dans l’attente d’un complément d’enquête. Il semblerait que la seule restriction qui leur était imposée était l’interdiction de quitter le territoire national.

Torture et autres mauvais traitements

Fernando Té est mort à l’hôpital en juillet, quelques jours après avoir été arrêté et frappé par des policiers du poste n° 5 de Bissau. Selon les informations recueillies, il avait été arrêté à la suite d’une querelle dans un commerce. Conduit au poste, il a été battu et remis en liberté sans inculpation quelques heures plus tard. Les policiers impliqués dans les faits ont été arrêtés deux jours après la mort de Fernando Té. À la fin de l’année, toutefois, ils n’avaient semble-t-il été ni inculpés ni jugés.

Violences faites aux femmes et aux filles

Les violences envers les femmes et les filles demeuraient très répandues, y compris les mariages précoces et forcés.

  • Une adolescente de 15 ans a été battue à mort en avril parce qu’elle refusait d’épouser un homme bien plus âgé qu’elle. Ce sont des femmes d’un village de la région de Tombali, dans le sud du pays, qui ont roué de coups la jeune fille, laquelle s’était enfuie lors de la cérémonie de mariage. Bien que le parquet ait été saisi, aucune arrestation n’a été effectuée.
  • En mars, des membres de l’Église évangélique de la région de Tombali ont été frappés par des villageois qui leur reprochaient d’avoir donné refuge à une vingtaine d’adolescentes âgées de 14 à 16 ans. Les jeunes filles s’étaient enfuies pour ne pas être mariées à des hommes plus âgés qu’elles.
  • En août, une jeune fille et deux de ses parentes ont été battues par des hommes de leur famille dans un autre village de la région de Tombali. La jeune fille avait été donnée en mariage à un homme plus âgé, mais ses parentes s’y étaient opposées au motif qu’elle était trop jeune. Une plainte a été déposée auprès de la police mais n’a été suivie d’aucune action.

Visites d’Amnesty International

  • Amnesty International s’est rendue en Guinée-Bissau en mars et en octobre afin d’y mener des recherches.
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