ARGENTINE

Les femmes et les filles enceintes à la suite d’un viol rencontraient toujours des obstacles considérables lorsqu’elles tentaient de bénéficier d’un avortement légal. Le recours excessif à la force de la part de la police et l’inhumanité des conditions de détention demeuraient des sources de vive préoccupation. Les procédures judiciaires engagées contre les responsables de violations des droits humains commises sous les gouvernements militaires se poursuivaient.

RÉPUBLIQUE ARGENTINE
CHEF DE L’ÉTAT ET DU GOUVERNEMENT : Cristina Fernández de Kirchner
PEINE DE MORT : abolie
POPULATION : 40,7 millions
ESPÉRANCE DE VIE : 75,7 ans
MORTALITÉ DES MOINS DE CINQ ANS (M/F) : 17 / 14 ‰
TAUX D’ALPHABÉTISATION DES ADULTES : 97,7 %

Contexte

En juin, l’Argentine est devenue le premier pays d’Amérique latine à légaliser le mariage entre personnes de même sexe. En juillet, la présidente Cristina Fernández de Kirchner a adopté un décret d’application de la loi de 2009 visant à empêcher et à sanctionner les violences envers les femmes. À la suite d’une consultation nationale, un Plan national des droits humains a été rendu public en décembre.

Droits sexuels et reproductifs

Le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et le Comité des droits de l’homme, deux organes de l’ONU, ont exhorté l’Argentine à modifier sa législation actuelle, qui considère l’avortement dans certaines circonstances comme une infraction pénale. En raison d’une mauvaise interprétation du Code pénal, les femmes qui se retrouvaient enceintes à la suite d’un viol étaient confrontées à d’énormes obstacles lorsqu’elles tentaient de recourir à un avortement légal. On s’interrogeait sur le poids légal du Guide technique relatif à la prise en charge intégrale des avortements non passibles de poursuites, document attendu de longue date, et il était à craindre que l’absence de directives officielles claires en matière d’avortement ne se poursuive.

  • En mars, deux jeunes filles de 15 ans habitant la province de Chubut (sud du pays), qui avaient semble-t-il été violées par leur beau-père respectif, se sont vu refuser par deux juges distincts la possibilité de bénéficier d’un avortement légal. Les deux décisions judiciaires, qui avaient entraîné des retards préjudiciables et mis en péril la vie des jeunes filles, ont par la suite été annulées.

Torture et autres mauvais traitements

Le Comité des droits de l’homme et le Comité des droits de l’enfant [ONU], ainsi que la Commission interaméricaine des droits de l’homme, ont fait part de leur vive préoccupation face aux informations faisant état d’actes de torture et d’autres mauvais traitements infligés dans les établissements pénitentiaires et les postes de police, en particulier dans les provinces de Buenos Aires et de Mendoza. En janvier, un mécanisme provincial de prévention de la torture a été approuvé par les législateurs de la province du Chaco. À la fin de 2010, un mécanisme similaire n’avait toutefois pas encore été mis en place à l’échelle nationale, alors qu’il était exigé par le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture [ONU].

Police et forces de sécurité

Selon certaines sources, des personnes ont été blessées ou tuées en raison d’un recours excessif à la force de la part des forces de sécurité. Au cours d’épisodes distincts survenus en juin et en octobre, deux jeunes garçons ont été abattus par des policiers dans la province de Río Negro.

  • Le 15 février, la police a dispersé avec violence une manifestation organisée à Andalgalá (province de Catamarca) par des habitants qui protestaient contre l’exploitation minière à ciel ouvert dans la région. Quelques heures plus tard, plusieurs milliers de personnes se sont rassemblées sur la place municipale pour exprimer leur solidarité avec les manifestants. D’après les informations recueillies, les forces de sécurité ont alors frappé des manifestants à coups de matraque, aspergé du gaz lacrymogène et tiré des balles en caoutchouc sans discernement. Des manifestants ont endommagé l’hôtel de ville au cours de ces incidents. Plusieurs personnes ont été interpellées et environ 70 ont été blessées.

Impunité

Selon des chiffres officiels, à la fin de l’année, 110 personnes avaient été reconnues coupables de participation aux violations des droits humains commises sous les précédents gouvernements militaires ; 820 autres personnes faisaient l’objet de poursuites pénales et 13 procès étaient en cours. Bien que des avancées aient été enregistrées dans les procédures contre les responsables de violations des droits humains commises par le passé, la Cour suprême a reconnu dans un rapport qu’il y avait eu quelques retards, en particulier dans les tribunaux provinciaux.

  • Le 20 avril, Reynaldo Bignone, ancien général et ancien président de facto, a été reconnu coupable de torture, d’assassinat et de plusieurs enlèvements survenus alors qu’il occupait le poste de commandant du tristement célèbre centre de détention Campo de Mayo, entre 1976 et 1978.
  • En juillet, l’ancien général Luciano Benjamín Menéndez et l’ancien chef des services de renseignement de la police de Tucumán, Roberto Albornoz, ont été condamnés à la réclusion à perpétuité pour des violations des droits fondamentaux perpétrées dans un centre de détention secret de la province de Tucumán durant le régime militaire de 1976-1983.
  • En décembre, Jorge Videla, président de facto de l’Argentine de 1976 à 1981, a été déclaré pénalement responsable des actes de torture infligés à plus de 30 prisonniers à Córdoba, en 1976, et de leur mort. Le tribunal a déclaré 22 autres membres de l’armée et de la police coupables de ces crimes.

Droits des peuples indigènes

La législation nationale d’exception adoptée en 2006, qui suspendait temporairement les ordonnances d’expulsion et l’éviction des populations indigènes de leurs terres traditionnelles jusqu’à ce qu’un relevé foncier national ait été effectué, n’avait pas encore été mise en œuvre, ce qui constituait toujours un sujet d’inquiétude.

  • En novembre, 400 policiers ont violemment dispersé des membres de la communauté indigène toba qom, qui avaient érigé un barrage routier afin de protester contre le projet de construction d’une université sur leurs terres traditionnelles. Les forces de l’ordre ont également incendié les logements provisoires de la communauté. Au moins un agent de police et un habitant indigène ont été tués.

Droit à la santé – terre et environnement

Un rapport rendu public par une ONG au début de 2010 recensait 120 litiges liés aux droits fonciers et à l’environnement dans la région du Chaco (nord du pays). Ces différends concernaient au total plus d’un demi-million d’habitants, essentiellement issus des communautés paysannes et indigènes.
En dépit du nombre croissant d’éléments attestant des conséquences néfastes pour la santé des produits chimiques utilisés dans les exploitations de soja et de riz dans plusieurs provinces du nord du pays, aucune étude ni enquête épidémiologique systématique n’avait encore été lancée, à la fin de 2010, pour estimer l’ampleur et la gravité du problème.

Justice internationale

En septembre, la Cour suprême s’est prononcée à l’unanimité en faveur de l’extradition de Sergio Galvarino Apablaza Guerra vers le Chili, où cet homme faisait l’objet de poursuites dans le cadre de l’assassinat du sénateur Jaime Guzmán et de l’enlèvement de Cristián Edwards, deux crimes datant de 1991. En octobre, un juge fédéral a cependant annulé la décision d’extradition au motif que la Commission nationale pour les réfugiés avait accordé à Sergio Galvarino Apablaza Guerra le statut de réfugié.

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