BOLIVIE

De très nombreuses personnes ont été blessées lorsque la police a violemment dispersé un campement dressé par des manifestants indigènes, en marge d’une marche vers La Paz visant à dénoncer le projet d’aménagement d’une route à travers un territoire indigène protégé. Des condamnations ont été prononcées dans le cadre des poursuites relatives aux événements dits d’« octobre noir », datant de 2003.

ÉTAT PLURINATIONAL DE BOLIVIE
Chef de l’État et du gouvernement : Evo Morales Ayma
Peine de mort : abolie sauf pour crimes exceptionnels
Population : 10,1 millions
Espérance de vie : 66,6 ans
Mortalité des moins de cinq ans : 51,2 ‰
Taux d’alphabétisation des adultes : 90,7 %

Contexte

Les tensions sociales se sont exacerbées au fil de l’année, sur fond de manifestations récurrentes au sujet des difficultés économiques et des droits des indigènes.
En mars, le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale [ONU] a salué l’adoption par le Congrès, en janvier, d’une loi relative à la lutte contre la discrimination raciale. Il s’est cependant déclaré préoccupé par la mise en œuvre de ce texte, par le fait que les habitants indigènes étaient sous-représentés dans les organes de prise de décision, par la question de l’accès à la justice, ainsi que par le manque de clarté de la nouvelle loi sur la délimitation juridictionnelle concernant les mécanismes de coordination avec le système judiciaire ordinaire.

Droits des peuples indigènes

Le 25 septembre, de très nombreuses personnes ont été blessées lorsque des policiers ont utilisé des gaz lacrymogènes et des matraques pour disperser les occupants d’un campement de fortune érigé par des manifestants indigènes à proximité de Yucumo, dans le département du Beni. Ces derniers participaient à une marche de 580 km entre Trinidad (Beni) et La Paz pour dénoncer le projet public d’aménagement d’une route traversant le Territoire indigène et parc national Isiboro-Sécure (TIPNIS), conduit en violation des garanties constitutionnelles relatives à la consultation préalable des peuples indigènes, ainsi que des lois en matière de préservation de l’environnement. La police a arrêté plusieurs centaines de manifestants indigènes et les a conduits dans les villes de San Borja et de Rurrenabaque, pour qu’ils soient renvoyés chez eux en avion par l’armée.
Le gouvernement faisait valoir que cet axe routier assurerait le développement économique de la région, tandis que les protestataires indigènes mettaient en avant le fait qu’il ouvrirait la voie à l’installation dans la région d’industries extractives et encouragerait la déforestation et la production de coca. L’opération de répression a donné lieu à des manifestations dans tout le pays et les ministres de l’Intérieur et de la Défense ont été contraints à la démission.
Le président Morales a fini par annuler le projet en octobre. En novembre, un juge a ordonné le placement en résidence surveillée du commandant adjoint de la police nationale qui aurait ordonné l’opération policière à Yucumo. Les enquêtes pénales ouvertes sur l’intervention de la police se poursuivaient à la fin de l’année.

Impunité

Les auteurs de violations graves des droits humains – disparitions forcées et exécutions extrajudiciaires notamment – perpétrées avant le retour à la démocratie, en 1982, continuaient d’échapper à la justice.
Malgré deux arrêts de la Cour suprême ayant ordonné en avril 2010 la déclassification des archives, les forces armées n’avaient toujours pas, fin 2011, communiqué aux magistrats du parquet certaines informations relatives à d’anciennes violations des droits fondamentaux. Le gouvernement n’a pas fait pression pour que ces éléments soient divulgués.
*En août, la Cour suprême a reconnu coupables sept anciens hauts responsables pour leur implication dans les événements dits d’« octobre noir », qui ont fait 67 morts et plus de 400 blessés au cours de manifestations survenues fin 2003 à El Alto, près de La Paz. Il s’agissait du premier procès de responsables militaires accusés de violations des droits humains se concluant devant un tribunal civil. Cinq anciens officiers de l’armée ont été condamnés à des peines allant de 10 à 15 ans de réclusion et deux anciens ministres à trois années d’emprisonnement. Une procédure d’extradition était en cours à la fin de l’année contre l’ancien président Gonzálo Sánchez de Lozada et deux de ses ministres, qui avaient fui aux États-Unis peu après les violences. D’autres ministres s’étaient par la suite exilés au Pérou et en Espagne.
*Quatre militaires qui faisaient l’objet d’une enquête sur des actes de torture infligés à un conscrit en 2009 à Challapata, dans le département d’Oruro, ont recouvré la liberté en avril après qu’un juge eut annulé les accusations retenues contre eux. En juillet, la Cour d’appel d’Oruro a infirmé la décision du juge et ordonné la poursuite de la procédure devant une juridiction civile. Le procès n’avait pas débuté à la fin de l’année. Un enregistrement vidéo de 2009 montrant le conscrit immergé sous l’eau à plusieurs reprises par les officiers avait été divulgué en 2010.
*En septembre, un juge a annulé les charges retenues contre cinq membres de la police nationale accusés d’avoir participé à la dispersion de manifestants qui, en mai 2010, avaient dressé un barrage routier dans la province de Caranavi. Deux personnes étaient mortes et 30 autres au moins avaient été blessées au cours de l’opération. À la fin de l’année, les magistrats du parquet envisageaient de prononcer de nouvelles inculpations.
*Les poursuites judiciaires concernant le massacre de Pando, perpétré en 2008 et au cours duquel 19 personnes (pour la plupart des petits paysans) avaient été tuées et 53 autres blessées, se poursuivaient en dépit de plusieurs atermoiements.

Torture et autres mauvais traitements

Gróver Beto Poma Guanto est mort à l’hôpital en février, deux jours après avoir été battu par des instructeurs de l’École militaire des condors de Bolivie (ESCOBOL) à Sanandita, dans le département de Tarija. À la fin de l’année, trois membres de l’armée faisaient toujours l’objet d’une enquête dans le cadre de cette affaire. Malgré plusieurs demandes de transfert devant une juridiction civile, l’affaire était toujours instruite par la justice militaire, qui manquait d’indépendance et d’impartialité.

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