REPUBLIQUE DOMINICAINE

Des informations ont fait état d’homicides illégaux commis par des policiers. Un grand nombre d’affaires de violations des droits humains imputables à la police n’étaient pas élucidées. Cette année encore, des personnes d’origine haïtienne se sont vu refuser la délivrance de documents d’identité. Les violences faites aux femmes et aux filles demeuraient un grave motif de préoccupation.

RÉPUBLIQUE DOMINICAINE
Chef de l’État et du gouvernement : Leonel Antonio Fernández Reyna
Peine de mort : abolie
Population : 10,1 millions
Espérance de vie : 73,4 ans
Mortalité des moins de cinq ans : 31,9 ‰
Taux d’alphabétisation des adultes : 88,2 %

Contexte

Le Parlement a adopté plusieurs lois organiques réglementant le fonctionnement des institutions de l’État. Des membres de la Cour suprême et de la Cour constitutionnelle, nouvellement créée, ont été nommés à la fin de l’année. Pour la 10e année consécutive, le Parlement a omis de nommer un médiateur des droits humains.

Police et forces de sécurité

Selon les statistiques du Bureau du procureur général, 289 personnes ont été tuées par la police en 2011, contre 260 en 2010. D’après certains éléments de preuve, nombre de ces homicides pourraient avoir été commis en toute illégalité.
*Luis Alfredo Domínguez Rodríguez a été tué par des policiers à Nagua, le 26 janvier. Son ami Henry Ortiz, qui a été blessé, a déclaré qu’il venait de s’arrêter pour faire monter Luis Alfredo Domínguez Rodríguez sur sa moto lorsque quatre agents qui patrouillaient en voiture s’étaient dirigés vers eux et, sans sommation, avaient tiré sur lui à cinq reprises. L’un des agents, a-t-il ajouté, a ensuite tiré sur Luis Alfredo Domínguez Rodríguez après qu’un de ses collègues eut déclaré qu’il ne fallait pas de témoin de cette fusillade. Luis Alfredo Domínguez Rodríguez est mort quelques heures plus tard. Henry Ortiz a été hospitalisé pendant 20 jours. À la fin de 2011, trois policiers étaient en instance de jugement dans cette affaire.
Cette année encore, Amnesty International a recueilli des informations faisant état de torture au cours d’arrestations arbitraires massives et d’interrogatoires menés par la police.
*Le 13 octobre, Pedro Arias Roja a été frappé chez lui, à San Cristóbal, par cinq policiers venus l’interpeller pour détention illégale d’une arme à feu. Au poste de police, ils lui ont mis un sac en plastique sur la tête et ont continué à le frapper. Pedro Arias Roja a porté plainte, mais aucune enquête sérieuse n’avait été ouverte par les autorités à la fin de l’année.
À plusieurs reprises, la police a eu recours à une force excessive ou injustifiée pour disperser des manifestants.
*Le 20 octobre, Claudia Espíritu, une étudiante, a été blessée à la jambe par un policier, qui a tiré sur elle alors qu’elle manifestait à l’Université autonome de Saint-Domingue contre la loi budgétaire qui venait d’être adoptée. Au moins trois autres étudiants ont été blessés par des tirs de la police.

Impunité

De nombreuses atteintes aux droits humains qui auraient été commises par des policiers restaient impunies, malgré des éléments de preuve accablants.
*Les autorités n’ont pas fait la lumière sur la disparition forcée de Gabriel Sandi Alistar et de Juan Almonte Herrera. Ces deux hommes ont été vus pour la dernière fois respectivement en juillet et septembre 2009, alors qu’ils se trouvaient en garde à vue. À la fin de 2011 on ignorait toujours le sort qui leur avait été réservé.

Discrimination – les Haïtiens et les Dominicains d’origine haïtienne

Une enquête réalisée par le Service jésuite pour les réfugiés et les migrants dans quatre régions rurales a révélé que 1 584 personnes, peut-être plus, s’étaient vu refuser des documents d’identité par le Conseil électoral dominicain, principalement sur la base d’une directive diffusée en mars 2007. Sur l’ensemble des personnes touchées, 96 % avaient essuyé un refus entre 2005 et 2011, plus précisément en 2011 pour la plupart d’entre elles. Environ 72 % avaient entre 15 et 34 ans. Sans papiers, elles n’ont pas pu poursuivre leur scolarité ou leurs études, trouver un emploi ou obtenir d’autres documents officiels.
Les répercussions de la directive de 2007 sur des milliers de Dominicains d’origine haïtienne ont été débattues lors d’une audience de la Commission interaméricaine des droits de l’homme qui s’est tenue en octobre. Cinq jours avant cette audience, le Conseil électoral dominicain avait autorisé la délivrance temporaire de pièces d’identité aux descendants de citoyens étrangers. Cette décision avait été prise dans l’attente des conclusions d’enquêtes sur les allégations selon lesquelles des pièces d’identité auraient été délivrées à tort avant 2007. Cependant, selon des organisations de défense des droits des migrants, la délivrance de ces documents restait à la discrétion d’agents administratifs qui, très souvent, continuaient de les refuser aux Dominicains d’origine haïtienne.

Droits des migrants

En janvier, à la suite d’une épidémie de choléra en Haïti, les autorités dominicaines ont intensifié les expulsions massives de migrants haïtiens, alléguant que cette mesure était indispensable pour empêcher la propagation de la maladie. Bien que deux agences de l’ONU aient demandé en juin la suspension, pour des motifs humanitaires, de tous les retours forcés en Haïti, les expulsions massives se sont poursuivies tout au long de l’année.
*Le 20 septembre, à 5 heures du matin, au moins 80 migrants haïtiens vivant à Navarrete ont été expulsés vers Haïti. Selon des organisations locales travaillant auprès des migrants, certains ont été battus au cours de l’opération et des enfants ont été séparés de leurs parents. Ces personnes, dont beaucoup habitaient dans cette ville depuis plus de 10 ans, n’ont pas eu la possibilité de voir leur situation examinée au cas par cas.

Violences faites aux femmes et aux filles

Selon le Bureau du procureur général, 127 femmes et jeunes filles ont été tuées par leur compagnon ou par un ancien compagnon en 2011, contre 97 en 2010.
À la fin de l’année, une proposition de loi sur le meurtre de femmes et de filles était en cours d’examen. Le Parlement envisageait notamment de l’inscrire comme un crime spécifique dans le Code pénal.

Liberté d’expression – journalistes

Le Syndicat national des professionnels de la presse a indiqué que, entre janvier et août, 60 journalistes et autres professionnels des médias ont été harcelés ou agressés physiquement, très souvent par des policiers. En août, plus de 60 journalistes ont dénoncé une campagne de dénigrement menée par des représentants de l’État contre des journalistes indépendants qui diffusaient des informations sur la corruption et le trafic de stupéfiants.
*Le 2 août, le journaliste de télévision José Silvestre a été enlevé et tué à La Romana. Il avait été la cible d’agressions et de menaces un peu plus tôt dans l’année, mais les autorités ne lui avaient fourni aucune protection, malgré la demande en ce sens formulée par le Syndicat national des professionnels de la presse.

Droits en matière de logement – expulsions forcées

Selon des ONG locales, au moins 100 expulsions forcées ont eu lieu entre janvier et septembre. Très souvent, la légalité n’a pas été respectée et les personnes concernées n’ont pas été consultées. Plusieurs morts et blessures par balle ont été signalées lors de ces opérations.
*Le 15 octobre, quelque 72 familles ont été expulsées par la force de terrains privés dans le quartier de Brisas del Este, situé dans la municipalité de Santo Domingo Este. Selon des témoins, des policiers et des soldats ont tiré des décharges de chevrotine et projeté du gaz lacrymogène dans les maisons pour contraindre les familles à sortir de chez elles. À la fin de l’année, plusieurs dizaines de ces familles vivaient toujours dans un campement de fortune, dans une rue adjacente.

Visites et documents d’Amnesty International

  • Une délégation d’Amnesty International s’est rendue en République dominicaine en mars et en octobre.
  • Dominican Republic : ’Shut up if you don’t want to be killed !’ : Human rights violations by police in the Dominican Republic (AMR 27/002/2011).
  • République dominicaine. Des familles expulsées menacées (AMR 27/007/2011).
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