Maroc et Sahara occidental

Les autorités ont imposé des restrictions à la liberté d’expression et engagé des poursuites contre des détracteurs de la monarchie et des institutions étatiques, ainsi que contre des Sahraouis partisans de l’autodétermination. Les forces de sécurité ont fait usage d’une force excessive contre des manifestants. Dans les affaires de terrorisme et d’infractions liées à la sécurité, les suspects risquaient d’être torturés et autrement maltraités, et d’être jugés au cours de procès inéquitables. Des migrants, des réfugiés et des demandeurs d’asile ont été la cible d’attaques. Les femmes et les filles étaient victimes de discrimination dans la législation et dans la pratique. Sept personnes au moins ont été condamnées à mort ; aucune exécution n’a eu lieu.

ROYAUME DU MAROC
Chef de l’État : Mohammed VI
Chef du gouvernement : Abdelilah Benkirane

Contexte

Le Conseil de sécurité des Nations unies a prorogé d’un an en avril le mandat de la Mission des Nations unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO), sans prévoir cette année encore un quelconque mécanisme de surveillance de la situation des droits humains.
Le bilan du Maroc en matière de droits humains a été examiné en mai dans le cadre de l’Examen périodique universel de l’ONU. Le gouvernement a accepté d’ériger en infraction pénale les disparitions forcées et d’adopter une loi sur la violence au sein de la famille. Il a toutefois rejeté les recommandations en faveur d’un moratoire de jure sur les exécutions et d’une amélioration des procédures d’accréditation des organisations de la société civile.
Le rapporteur spécial des Nations unies sur la torture s’est rendu au Maroc et au Sahara occidental en septembre.

Liberté d’expression, d’association et de réunion

Les autorités ont poursuivi la répression contre les journalistes et d’autres détracteurs de la monarchie ou des institutions étatiques. Les forces de sécurité ont eu recours à une force excessive pour disperser des manifestations.
 Abdelsamad Haydour, un étudiant, a été condamné en février à trois ans d’emprisonnement et à une amende pour avoir insulté le roi dans une vidéo mise en ligne.
 Le rappeur Mouad Belghouat a vu sa peine d’un an d’emprisonnement pour outrage à la police confirmée en juillet par la cour d’appel de Casablanca. Il avait été inculpé à la suite de la diffusion sur Internet d’un clip vidéo d’une de ses chansons. Incarcéré en mars, Mouad Belghouat était maintenu en détention à la fin de l’année.
 Tarek Rouchdi et cinq autres militants du Mouvement du 20 février, qui réclame des réformes politiques, ont été condamnés en septembre à des peines allant jusqu’à 10 mois d’emprisonnement. Ils avaient été déclarés coupables d’outrage et de coups et blessures à l’encontre d’agents publics, entre autres. Selon certaines informations, des dizaines de membres de ce mouvement étaient maintenus en détention à la fin de l’année.
En août, la police a eu recours à une force excessive envers des personnes qui protestaient devant le Parlement à Rabat contre une cérémonie annuelle commémorant l’accession du roi au trône. Un journaliste qui couvrait l’événement a également été maltraité. En novembre, la police a fait usage d’une force excessive pour empêcher des membres du Mouvement du 20 février de manifester devant le Parlement. La manifestation avait été annoncée.

Répression de la dissidence – militants sahraouis

Les autorités continuaient de s’en prendre aux défenseurs sahraouis des droits humains et aux partisans de l’autodétermination du Sahara occidental. Les forces de l’ordre ont fait un usage excessif de la force au Sahara occidental pour réprimer des manifestations ou les empêcher. Les organisations sahraouies de la société civile étaient toujours confrontées à des obstacles qui empêchaient leur reconnaissance légale.
*Selon certaines informations, plusieurs dizaines de personnes qui manifestaient à Laayoune en solidarité avec 23 prisonniers sahraouis auraient été blessées par la police le 13 janvier. Arrêtés à la suite de violences intervenues en novembre 2010 dans le campement de protestation de Gdim Izik, non loin de Laayoune, ces 23 prisonniers étaient détenus dans l’attente de leur procès dans la prison de Salé, à côté de Rabat, loin de chez eux. Beaucoup se sont plaints d’avoir été torturés ou maltraités en détention. Treize personnes, dont 11 membres des forces de sécurité, avaient trouvé la mort dans les affrontements qui avaient débuté à Gdim Izik puis s’étaient étendus à Laayoune.
 L’Association sahraouie des victimes des violations graves des droits de l’homme commises par l’État marocain (ASVDH) était toujours privée de reconnaissance légale, bien qu’un jugement ait conclu en 2006 à l’illégalité d’une décision administrative refusant l’enregistrement. Le gouvernement a rejeté une recommandation formulée dans le cadre de l’Examen périodique universel de l’ONU et qui l’appelait à permettre la reconnaissance légale des organisations de défense du droit du peuple sahraoui à l’autodétermination.

Torture et autres mauvais traitements

De nouvelles informations ont fait état d’actes de torture et de mauvais traitements infligés notamment à des personnes détenues aux fins d’interrogatoire par des agents de la Direction de la surveillance du territoire (DST). À la suite de sa visite au Maroc en septembre, le rapporteur spécial des Nations unies sur la torture a fait observer que les actes de torture étaient plus répandus lorsque les autorités considéraient que la sécurité nationale était menacée. Il a ajouté que les allégations de torture débouchaient rarement sur des poursuites à l’encontre des auteurs.
Le Conseil national des droits de l’homme (CNDH) a signalé en octobre que les membres du personnel pénitentiaire continuaient de maltraiter les détenus et que ces agissements faisaient rarement l’objet d’enquêtes.

Lutte contre le terrorisme et sécurité

Les personnes soupçonnées d’actes de terrorisme, entre autres infractions liées à la sécurité, risquaient d’être torturées ou maltraitées et de ne pas bénéficier d’un procès équitable.
 Ali Aarass, reconnu coupable en novembre 2011 d’appartenance à une organisation terroriste, a vu sa peine de 15 ans d’emprisonnement ramenée à 12 ans par la cour d’appel de Salé. Un recours en cassation était en instance à la fin de l’année. Cet homme avait été extradé par l’Espagne vers le Maroc en décembre 2010, en violation de mesures provisoires ordonnées par le Comité des droits de l’homme [ONU] car il risquait d’être torturé et maltraité au Maroc. Il aurait été contraint de faire des « aveux » sous la torture.
 En août, le Groupe de travail sur la détention arbitraire [ONU] a conclu que la détention de Mohamed Hajib, ressortissant germano-marocain, était arbitraire ; il a demandé au gouvernement marocain de remettre cet homme en liberté. Mohamed Hajib avait été déclaré coupable en 2010 d’infractions liées au terrorisme sur la base d’aveux qui auraient été obtenus sous la torture pendant sa détention provisoire, en l’absence d’un avocat. Il avait été condamné à une peine de 10 ans d’emprisonnement, qui a été ramenée à cinq ans en janvier. Il était maintenu en détention à la fin de l’année. Ses allégations de torture n’ont pas fait l’objet d’une enquête.

Justice de transition

Les autorités n’avaient toujours pas mis en œuvre les recommandations émises en novembre 2005 par l’Instance équité et réconciliation, qui avait notamment demandé aux autorités de ratifier le Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI) et de permettre aux victimes d’atteintes graves aux droits humains commises entre 1956 et 1999 d’avoir accès à la justice.

Réfugiés, demandeurs d’asile et migrants

Les migrants, les réfugiés et les demandeurs d’asile risquaient d’être victimes d’agressions et de mauvais traitements. En septembre, le rapporteur spécial des Nations unies sur la torture a signalé que les « actes d’agression, les violences sexuelles et d’autres formes de mauvais traitements » envers les migrants en situation irrégulière étaient en augmentation. Il a prié les autorités d’enquêter sur les informations faisant état de « violence contre les migrants subsahariens » et de prévenir le renouvellement de ces pratiques.

Droits des femmes

Les femmes et les filles étaient victimes de violences sexuelles et de discrimination dans la législation et dans la pratique. Le gouvernement a entamé en novembre le processus devant aboutir à l’adhésion du Maroc au Protocole facultatif à la Convention sur les femmes. Il maintenait toutefois ses réserves à la Convention, à savoir que les dispositions l’obligeant à éliminer la discrimination à l’égard des femmes ne devaient pas aller à l’encontre de la charia. Le gouvernement a rejeté une recommandation formulée dans le cadre de l’Examen périodique universel qui l’invitait à réviser le Code de la famille pour garantir l’égalité entre les hommes et les femmes en matière d’héritage. Les hommes coupables de viol pouvaient toujours échapper aux poursuites en épousant leur victime.

Camps du Front Polisario

Cette année encore, le Front Polisario n’a pris aucune mesure pour amener à rendre compte de leurs actes les personnes accusées d’avoir commis des atteintes aux droits humains durant les années 1970 et 1980 dans les camps qu’il contrôlait.

Peine de mort
Sept personnes au moins ont été condamnées à mort. La dernière exécution a eu lieu en 1993.

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