BURUNDI

République du Burundi

Chef l’État et du gouvernement : Pierre Nkurunziza

Au cours de l’année, l’État a intensifié les mesures de répression visant les détracteurs du gouvernement. Les violations des droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique se sont multipliées. Plusieurs catégories de personnes ont été soumises à des restrictions accrues à l’approche des élections de 2015, dont les membres de l’opposition, les militants de la société civile, les avocats et les journalistes. Des réunions et des marches ont été interdites. Des membres des Imbonerakure, la branche jeunesse du parti au pouvoir, auraient commis des actes de harcèlement et des violences qui n’ont pas fait l’objet de véritables enquêtes.

CONTEXTE

Les tensions politiques étaient vives alors que le président Nkurunziza semblait se préparer à briguer un troisième mandat, cette initiative étant perçue par nombre de personnes comme une violation de la Constitution. Un projet de loi visant à modifier la Constitution pour que le président puisse se porter à nouveau candidat a été rejeté de peu par l’Assemblée nationale en mars. Selon les déclarations officielles, la Cour constitutionnelle devait statuer sur la question à une date ultérieure. Le parti au pouvoir, le Conseil national pour la défense de la démocratie – Forces pour la défense de la démocratie (CNDD-FDD), a été accusé de mettre à mal les principes d’un partage interethnique du pouvoir inscrits dans l’Accord d’Arusha, conclu dans la période qui a fait suite au conflit au Burundi.
Le Bureau des Nations unies au Burundi (BNUB), créé en janvier 2011, a fermé ses portes à la fin de l’année 2014.
Le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, le haut-commissaire aux droits de l’homme [ONU], l’Union africaine et certains pays donateurs, dont la France et les États-Unis, ont vivement critiqué la situation au Burundi en matière de droits civils et politiques.

LIBERTÉ D’ASSOCIATION ET D’EXPRESSION

Des groupes d’opposition, la presse, l’Ordre des avocats du Burundi et des organisations de la société civile se sont vu interdire d’organiser des réunions légitimes et des manifestations pacifiques1.
Ainsi, en février, le maire de Bujumbura a empêché l’Ordre des avocats du Burundi de tenir son assemblée générale et un atelier de formation qui était déjà prévu. En mars, les autorités ont interdit à de jeunes militants du Mouvement pour la solidarité et la démocratie (MSD) de se réunir dans un centre de Gihosha, une commune de Bujumbura, où ils devaient discuter des propositions de modification de la Constitution. Elles n’ont donné aucune explication à leur décision.
Des personnalités politiques et des partis de l’opposition ont subi l’ingérence des autorités et des actes de harcèlement. Des arrestations arbitraires ont également eu lieu. Accusé de corruption, Frédéric Bamvuginyumvira a fait l’objet d’une arrestation irrégulière et d’une procédure judiciaire, ce qui a restreint ses activités politiques. Il a été libéré en mars pour des raisons médicales.
Législation répressive La Loi sur la presse, promulguée en juin 2013, permettait aux autorités de limiter les activités de la presse et la liberté d’expression. Elle disposait que les journalistes pouvaient être contraints de révéler leurs sources dans un certain nombre de domaines allant de l’ordre public à la sûreté de l’État.
La Loi sur les rassemblements publics a été invoquée pour interdire de façon arbitraire à des groupes de l’opposition et de la société civile d’organiser des réunions publiques ou des manifestations.

DÉFENSEURS DES DROITS HUMAINS

Des membres d’organisations de la société civile et des acteurs des médias ont été victimes de harcèlement, en particulier ceux qui travaillaient sur des sujets potentiellement sensibles ayant trait aux droits humains ou à l’obligation pour l’État de rendre des comptes.
Pierre Claver Mbonimpa, éminent défenseur des droits humains, a été placé en détention en mai et inculpé d’atteinte à la sûreté de l’État et d’usage de faux.
Amnesty International l’a considéré comme un prisonnier d’opinion. Quelque temps auparavant, il avait affirmé à la radio que des jeunes hommes recevaient des armes et des uniformes et se rendaient dans la République démocratique du Congo voisine afin d’y suivre un entraînement militaire.
En septembre, il a bénéficié d’une mise en liberté provisoire pour raisons de santé. Son incarcération a fait clairement comprendre au reste de la société civile que désormais toute personne rendant publiques des informations sur des sujets sensibles risquait d’être arbitrairement détenue2.
En avril, une marche préparée par des organisations de la société civile pour marquer le cinquième anniversaire de l’assassinat d’Ernest Manirumva, vice- président de l’Observatoire de lutte contre la corruption et les malversations économiques (OLUCOME), n’a pas pu avoir lieu. Au moment où elle aurait dû se dérouler, le procureur général a publié une déclaration affirmant que l’accusation disposait d’éléments à charge permettant d’établir un lien entre Gabriel Rufyiri, président de l’OLUCOME, et la mort d’Ernest Manirumva. Aucune enquête n’avait été ouverte sur l’implication présumée de plusieurs membres de haut rang des services de sécurité dans cet homicide.

IMPUNITÉ

Atteintes aux droits humains perpétrées par les Imbonerakure Des membres des Imbonerakure, la branche jeunesse du CNDD-FDD, ont commis des atteintes aux droits humains sous prétexte d’assurer la sécurité. Ils ont empêché des partis adverses de tenir des réunions et ont tenté d’intimider, attaqué et parfois tué des membres de l’opposition en toute impunité.
Le 14 mars, Ananias Nsabaganwa, membre du Front pour la démocratie au Burundi (FRODEBU), a reçu la visite à son domicile de Busoni, une commune de la province de Kirundo, de deux représentants de l’administration locale, trois membres des Imbonerakure (dont le chef de la zone de Nyagisozi) et deux soldats. D’après les informations disponibles, l’un des soldats l’a abattu sur l’ordre de l’un des fonctionnaires locaux et d’un des Imbonerakure.
En avril, dans un document interne ayant fait l’objet d’une fuite, le BNUB signalait que, dans une province, deux militaires avaient fourni aux Imbonerakure et à des soldats démobilisés des armes et des uniformes de l’armée et de la police. Les pouvoirs publics ont nié ces allégations mais n’ont pris aucune mesure pour enquêter sur l’affaire.
Exécutions extrajudiciaires La plupart des allégations dénonçant des homicides motivés par des considérations politiques qui auraient été commis entre 2010 et 2012 n’ont pas fait l’objet d’une enquête. Les victimes et les témoins étaient toujours en danger, faute de mécanismes de protection efficaces.
En juin, la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples a accepté d’examiner une plainte déposée par des groupes de la société civile et Track Impunity Always (TRIAL) au sujet de quatre cas d’exécutions extrajudiciaires.

SYSTÈME JUDICIAIRE

Les ressources matérielles, financières et logistiques dont disposait le système judiciaire n’étaient pas suffisantes. Des problèmes d’ordre général étaient régulièrement signalés, notamment des retards importants dans le traitement des affaires, le manque de moyens de transport pour le transfèrement des suspects entre les lieux de détention et les tribunaux et le fait que le parquet n’ouvre pas certains dossiers ou ne les prépare pas pour les juges. Certaines informations faisaient également état de corruption au sein de l’appareil judiciaire, et les autorités s’abstenaient toujours d’enquêter sérieusement sur les affaires politiquement sensibles.

COMMISSION VÉRITÉ ET RÉCONCILIATION

Une loi portant création d’une Commission vérité et réconciliation (CVR) a été adoptée le 15 mai. Cela étant, ce texte ne prévoyait pas clairement la mise en place d’un tribunal spécial chargé de poursuivre les responsables présumés de crimes internationaux, notamment les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité. La Commission vérité et réconciliation est entrée en fonction le 10 décembre 2014 avec la prestation de serment de ses 11 membres.

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