BOLIVIE

État plurinational de Bolivie

Chef de l’État et du gouvernement : Evo Morales Ayma

Les victimes de violations des droits humains commises sous les régimes militaires du passé se voyaient toujours refuser la justice, la vérité et des réparations pleines et entières. Les droits des populations indigènes à être consultées et à donner au préalable leur consentement libre et éclairé n’étaient toujours pas respectés.
Ces populations étaient toujours privées de l’égalité d’accès aux droits sexuels et reproductifs.

CONTEXTE

En octobre, le président Evo Morales a été réélu pour un troisième mandat. Les dispositions relatives à l’égalité hommes- femmes, inscrites dans la loi électorale adoptée en 2010, ont été appliquées pour la première fois lors des élections législatives. Aussi, plus de la moitié des candidats étaient des femmes.
Également en octobre, la Bolivie a accepté la plupart des recommandations qui lui avaient été adressées dans le cadre de l’Examen périodique universel de l’ONU, notamment celles d’enquêter sur les violations des droits humains commises dans le passé, de garantir des réparations complètes et effectives aux victimes, de revoir la législation érigeant l’avortement en infraction pénale et d’améliorer les conditions carcérales. Les mêmes sujets de préoccupation avaient été soulevés par le Comité des droits de l’homme [ONU] en octobre 20131, et par le Comité contre la torture [ONU] en mai 2013.

IMPUNITÉ ET SYSTÈME JUDICIAIRE

Cinquante ans après le début du régime militaire et autoritaire (1964-1982), aucun progrès n’avait été accompli pour rendre justice aux victimes de violences politiques, et aucune mesure n’avait été prise pour mettre en place un mécanisme permettant d’établir la vérité sur les violations des droits humains commises au cours de cette période2. Les autorités n’ont tenu aucun compte des inquiétudes exprimées par divers organismes nationaux et internationaux concernant le manque de transparence et d’équité qui a caractérisé le processus de réparation, achevé en 2012. À peine plus d’un quart des personnes ayant fait une demande de réparation ont obtenu de pouvoir en bénéficier.
En février 2014, un campement installé devant le ministère de la Justice par l’association de victimes Plateforme pour les militants sociaux contre l’impunité, pour la justice et pour la mémoire du peuple bolivien, a été incendié3. Des dossiers et d’autres documents ont été détruits. D’après l’enquête préliminaire, un court-circuit serait à l’origine du feu. Cependant, l’association a affirmé qu’il s’agissait d’un incendie volontaire.
L’enquête était toujours en cours à la fin de l’année. Les investigations sur l’agression d’un membre de la même association en février 2013 ont semble-t-il pris du retard4.
En juillet, les autorités boliviennes ont présenté aux États-Unis une deuxième demande d’extradition de l’ancien président bolivien Gonzalo Sánchez de Lozada.
Celui-ci devait répondre d’accusations liées aux événements dits d’« Octobre noir », quand 67 personnes avaient été tuées et plus de 400 blessées lors de manifestations à El Alto, non loin de La Paz, fin 2003. La première demande avait été rejetée en 2012.
En mai 2014, un juge fédéral américain a autorisé l’ouverture d’une action civile contre l’ancien président et son ministre de la Défense pour leurs responsabilités dans ces événements.
Les poursuites judiciaires concernant le massacre de Pando, perpétré en 2008 et au cours duquel 19 personnes - pour la plupart des petits paysans - avaient été tuées et 53 autres blessées, se poursuivaient mais avaient pris du retard.
Le procès de 39 personnes accusées d’implication dans un complot qui aurait été ourdi en 2009 pour assassiner le président Evo Morales suivait son cours. À la fin de l’année, aucune enquête n’avait été menée sur les allégations de non-respect de la procédure légale ni sur le meurtre de trois hommes en 2009, en lien avec cette affaire. En mars, le procureur qui avait démissionné après avoir dénoncé des ingérences politiques dans le cours de la justice et qui avait ensuite été accusé de chantage, a demandé l’asile politique au Brésil. Au mois d’août, le Groupe de travail sur la détention arbitraire [ONU] a dénoncé le caractère arbitraire de la détention de l’un des suspects et recommandé que celui-ci soit immédiatement libéré et puisse obtenir réparation.
En juin, des procédures judiciaires ont été engagées devant l’Assemblée législative plurinationale contre trois juges de la Cour constitutionnelle pour manquement à leurs obligations, entre autres infractions. Les juges ont été suspendus.

VIOLENCES FAITES AUX FEMMES ET AUX FILLES

D’après une étude menée au cours de l’année par l’Organisation panaméricaine de la santé, la Bolivie présentait le nombre le plus élevé d’actes de violence infligés à des femmes par leur partenaire, et le deuxième taux de violence sexuelle de la région. Un règlement relatif à l’application et au budget de la Loi n° 348 de 2013, visant à garantir les droits des femmes à ne pas subir de violence, a été promulgué en octobre.

DROITS SEXUELS ET REPRODUCTIFS

En février, le Tribunal constitutionnel plurinational a déclaré que l’obligation de demander une autorisation judiciaire pour avorter, telle que prévue à l’article 266 du Code pénal, était anticonstitutionnelle. Cependant, cette décision n’avait pas encore été mise en œuvre à la fin de l’année.
L’Assemblée législative plurinationale poursuivait l’examen d’un projet de loi de 2012 relatif aux droits sexuels et reproductifs visant à garantir, entre autres, le droit de recevoir des informations sur les services de santé sexuelle et reproductive permettant d’empêcher des grossesses non planifiées ou non désirées, ainsi que le droit à l’éducation sexuelle dans les écoles.

DROITS DES PEUPLES AUTOCHTONES

En novembre, 14 policiers ont été inculpés pour avoir eu recours à une force excessive lors d’une marche pacifique organisée en 2011 contre la construction d’une route traversant le Territoire indigène et parc national Isiboro-Sécure (TIPNIS). Le ministère public a écarté les allégations des victimes selon lesquelles des membres de haut rang des autorités civiles étaient impliqués dans cette affaire.’Le projet de construction, interrompu à la suite d’une consultation controversée avec les communautés indigènes concernées en 2012, était toujours suspendu.
Un nouveau Code minier, adopté en mai, ne prévoyait pas la consultation des peuples indigènes pour des activités de prospection et d’exploration minières. Il ne reconnaissait pas non plus le principe selon lequel les populations concernées devaient pouvoir donner au préalable, librement et en connaissance de cause, leur consentement à propos des projets qui allaient avoir des répercussions sur elles. Un projet de loi sur la consultation préalable, libre et éclairée a été finalisé.
DÉFENSEURS DES DROITS HUMAINS
Des inquiétudes subsistaient quant aux conditions énoncées par la loi de 2013 pour que les ONG puissent acquérir une identité juridique, celles-ci devant préciser dans quelle mesure elles « contribuent au développement économique et social » du pays. En 2013, le Comité des droits de l’homme [ONU] a recommandé à la Bolivie de renoncer à ces conditions au motif qu’elles restreignaient la capacité des ONG à mener leurs activités de façon libre, indépendante et efficace.
En janvier, des membres du Conseil national des Ayllus et Markas du Qullasuyu (CONAMAQ), qui participaient à une manifestation silencieuse devant le bureau de cette organisation à La Paz, ont été violemment expulsés par d’autres associations de peuples indigènes qui revendiquaient la direction du CONAMAQ. La police a été accusée de ne pas être intervenue pour empêcher cette expulsion violente.
En mars, l’ONG danoise IBIS a mis un terme à la plupart de ses projets dans le pays après que le gouvernement eut annoncé son expulsion en décembre 2013, au motif qu’elle s’immisçait dans les questions politiques et contribuait à diviser le mouvement indigène.

CONDITIONS CARCÉRALES

Le manque de sécurité dans les prisons et les conditions de détention déplorables demeuraient des sujets de préoccupation. Les retards empêchant la conclusion des procès dans des délais raisonnables, le recours excessif à la détention provisoire et le recours limité aux alternatives à la détention sont autant de facteurs qui contribuaient à la surpopulation carcérale. Pour remédier à ce problème, des amnisties et des grâces ont été accordées par des décrets présidentiels en 2013 et 2014, mais sans produire les effets escomptés.
En août, le médiateur a indiqué que l’enquête sur la mort de plus de 30 détenus à la prison de Palmasola, dans le département de Santa Cruz en août 2013, n’avait que peu progressé5.
En septembre, quatre détenus sont morts et une dizaine d’autres ont été blessés lors de bagarres à la prison d’El Abra, dans le département de Cochabamba. L’enquête était toujours en cours fin 2014.

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