CHILI

République du Chili

Chef de l’État et du gouvernement : Michelle Bachelet Jeria (a remplacé Sebastián Piñera Echenique en mars)

Des affaires de violences policières étaient toujours déférées à la justice militaire. Les procédures judiciaires engagées contre les responsables de violations des droits humains commises dans le passé se poursuivaient.

CONTEXTE

Michelle Bachelet Jeria a pris ses fonctions en mars et promis de dépénaliser l’avortement dans certaines circonstances.
Elle s’est également engagée à mettre la loi relative à la lutte contre le terrorisme, ainsi que le système de justice militaire, en conformité avec les normes internationales.
Le Chili a accepté la plupart des recommandations présentées dans le cadre de l’Examen périodique universel de l’ONU, dont celles d’abroger la loi d’amnistie de 1978 et de réformer les dispositions législatives régissant les droits sexuels et reproductifs. En juin, le Comité des droits de l’homme [ONU] a formulé des recommandations similaires1.

POLICE ET FORCES DE SÉCURITÉ

En août, la police a rendu publics les protocoles de sécurité utilisés lors des manifestations. Cette initiative est intervenue à la suite de plaintes répétées concernant le manque de transparence des méthodes utilisées par ses agents face aux manifestants. Depuis 2011, la police avait été accusée à plusieurs reprises de recourir à une force excessive durant les manifestations.

JUSTICE MILITAIRE

Des affaires de violations des droits humains impliquant des membres des forces de sécurité étaient toujours déférées à des tribunaux militaires2. Invoquant les obligations internationales en matière de droits humains et le droit à des procédures régulières, la Cour suprême et la Cour constitutionnelle ont ordonné le transfert de certaines de ces affaires à des tribunaux civils ordinaires3.
En mai, un ancien policier a été condamné à une peine de trois ans et 61 jours d’emprisonnement pour avoir tué par balle Manuel Gutiérrez Reinoso, âgé de 16 ans, et blessé Carlos Burgos Toledo lors d’une manifestation en 2011. La peine infligée étant toutefois inférieure à cinq ans, le policier a bénéficié d’une libération conditionnelle.
La famille a interjeté appel de la décision et l’affaire était en attente auprès d’un tribunal militaire supérieur à la fin de l’année4.
En 2013, un policier a été déclaré coupable par un tribunal militaire d’avoir grièvement blessé le journaliste Víctor Salas Araneda. Il a été suspendu de ses fonctions et condamné à 300 jours d’emprisonnement, avec une mesure lui permettant d’effectuer sa peine sous contrôle hors du milieu carcéral. Víctor Salas Araneda, qui a perdu la vue de l’œil droit en couvrant une manifestation en 2008, n’a toutefois pas obtenu réparation.
Mort en détention En mai, Iván Vásquez Vásquez est mort en détention à Chile Chico, dans la région d’Aysén. Selon les avocats de la famille, il a été battu à mort et plusieurs policiers étaient impliqués dans les faits. Les résultats d’une première autopsie ont indiqué qu’il ne s’agissait pas d’un suicide, contrairement aux déclarations initiales de la police. Un policier a été inculpé par un tribunal militaire de violences injustifiées ayant entraîné la mort. Cependant, les poursuites ont été abandonnées en octobre après qu’une deuxième autopsie, demandée par la défense, eut conclu au suicide. Les doutes demeuraient quant à l’impartialité de cette autopsie, dont l’ensemble des résultats n’avaient pas été communiqués à la fin de l’année.

IMPUNITÉ

Le processus visant à traduire en justice les responsables présumés des violations des droits humains commises sous le régime du général Pinochet a enregistré quelques progrès. Selon le président de la Cour suprême, 1 022 affaires étaient en cours en mars, dont 72 liées à des allégations de torture. D’après les chiffres officiels du Programme des droits humains du ministère de l’Intérieur, 279 personnes avaient été condamnées pour de tels crimes en octobre ; ces condamnations ne pouvaient faire l’objet d’un appel. À la fin de l’année 2014, 75 personnes purgeaient une peine d’emprisonnement en lien avec ces crimes.
En mai, 75 anciens agents de la Direction des services nationaux du renseignement (DINA, anciens services secrets) ont été condamnés pour leur rôle dans la disparition forcée de Jorge Grez Aburto, en 19745.
En octobre, la Cour suprême a condamné d’anciens membres de la DINA, dont son chef, Manuel Contreras Sepúlveda, pour la disparition forcée de Carlos Guerrero Gutiérrez et de Claudio Guerrero Hernández, respectivement en 1974 et 1975.
Les investigations sur les actes de torture perpétrés contre Leopoldo García Lucero se poursuivaient à la fin de l’année. Dans un arrêt rendu en août 2013 – sa première décision sur une affaire concernant une personne victime de torture au Chili –, la Cour interaméricaine des droits de l’homme a jugé excessif le temps qu’il avait fallu pour ouvrir une enquête sur ce crime6.
En juin, les autorités ont annoncé des réformes juridiques en vue de faire de la torture une infraction spécifique dans le Code pénal.
En septembre, le gouvernement a annoncé son intention d’accélérer l’examen d’un projet de loi de 2006 visant à révoquer la loi d’amnistie de 1978. Les débats étaient en cours au Congrès à la fin de l’année7.

DROITS DES PEUPLES AUTOCHTONES

Des cas de recours excessif à la force et d’arrestations arbitraires lors d’opérations de police contre des communautés mapuches ont été signalés cette année encore. Les violences commises contre des mineurs dans le contexte du conflit étaient particulièrement préoccupantes.
En mai, la Cour suprême a confirmé la condamnation à 18 années d’emprisonnement de Celestino Córdova, un machi (guérisseur traditionnel) mapuche, dans le cadre de l’affaire Werner Luchsinger et Vivianne Mackay. Ce couple était mort dans l’incendie criminel de sa maison, située dans la commune de Vilcún, en Araucanie. Le tribunal pénal oral de Temuco, qui avait statué en première instance, avait rejeté les allégations à charge selon lesquelles il s’agissait d’un acte terroriste. La défense a déclaré que le procès de Celestino Córdova obéissait à des motivations politiques et n’avait pas été conforme aux normes internationales d’équité, et qu’il s’agissait là d’un nouvel exemple de cas dans lequel les autorités cherchaient à réprimer pénalement les revendications territoriales des Mapuches au lieu d’essayer de résoudre les problèmes de fond.
En octobre, José Mauricio Quintriqueo Huaiquimil est mort écrasé par un tracteur alors qu’il pénétrait dans une ferme de la région d’Araucanie avec d’autres Mapuches. Selon les informations recueillies, les Mapuches s’étaient rendus sur place pour discuter d’une proposition qu’ils préparaient à l’intention des autorités sur la partie du territoire qui pourrait leur être donnée. La communauté occupait une partie de la ferme avec l’accord de son propriétaire. Le responsable présumé de la mort a été arrêté. L’enquête était en cours à la fin de l’année.
En avril, le rapporteur spécial des Nations unies sur la promotion et la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste a publié un rapport sur la mission qu’il a menée au Chili en 2013. Il a souligné les divergences entre la législation antiterroriste nationale et le principe de la légalité et du droit à une procédure régulière dans le contexte de poursuites visant des Mapuches. Un projet de loi de modification de la loi relative à la lutte contre le terrorisme était examiné au Congrès à la fin de l’année.
En mai, la Cour interaméricaine des droits de l’homme a condamné le Chili pour violations des droits humains dans le cadre du recours à la loi antiterroriste contre huit Mapuches condamnés en 2003. Elle a également ordonné à l’État de prendre toutes les dispositions nécessaires pour que les décisions judiciaires rendues dans ces affaires ne soient pas appliquées. Elle a fait valoir que les stéréotypes véhiculés à propos des accusés dans ces affaires avaient bafoué les principes de non-discrimination, d’égalité devant la loi et de l’égale protection de la loi.

DROITS SEXUELS ET REPRODUCTIFS

L’avortement était toujours considéré comme une infraction pénale en toutes circonstances. Le gouvernement a annoncé un projet de loi visant à dépénaliser l’avortement en cas de viol, d’inceste, de danger pour la vie de la femme ou de malformation du fœtus, mais aucun texte n’avait été déposé au Congrès à la fin de l’année.

DISCRIMINATION

En octobre, le Sénat a adopté un projet de loi sur l’union civile, y compris pour les couples de même sexe. Le texte était en cours d’examen à la Chambre des députés à la fin de l’année.
Une proposition de loi sur le droit à l’identité de genre qui permettrait aux personnes de faire inscrire un changement de nom et de genre sur les documents officiels était en cours d’examen au Sénat à la fin de l’année.

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