BANGLADESH

République populaire du Bangladesh

Chef de l’État : Abdul Hamid Chef du gouvernement : Sheikh Hasina

Des dizaines de personnes ont été victimes de disparition forcée. Cette année encore, des journalistes et des défenseurs des droits humains ont été attaqués et harcelés. Les violences faites aux femmes étaient une source de préoccupation majeure en matière de droits humains. La police et d’autres branches des forces de sécurité commettaient des actes de torture en toute impunité. Les ouvriers des usines étaient toujours en danger en raison de normes de sécurité insuffisantes sur leur lieu de travail. Une personne au moins a été exécutée sans avoir eu le droit d’interjeter appel de sa condamnation à mort.

CONTEXTE

Le gouvernement de la Première ministre Sheikh Hasina a vu son mandat prolongé après que son parti, la Ligue Awami, a été proclamé vainqueur des élections organisées en janvier. Le scrutin a été boycotté par le Parti nationaliste du Bangladesh (BNP), mouvement d’opposition, ainsi que par ses alliés. Plus d’une centaine de personnes ont été tuées au cours de manifestations de protestation contre les élections, dans certains cas après que la police eut ouvert le feu en direction de manifestants qui étaient souvent violents. Aucun de ces décès n’a semble-t-il fait l’objet d’une enquête. Des partisans de partis d’opposition auraient lancé des cocktails Molotov sur des passagers d’autobus ; neuf personnes au moins ont été tuées et beaucoup d’autres ont été blessées.
Le Tribunal pour les crimes de droit international, une juridiction bangladaise instaurée en 2009 pour juger les personnes accusées de crimes commis durant la guerre d’indépendance du Bangladesh en 1971, a rendu ses décisions dans un climat politique très tendu. Ceux qui soutenaient la tenue de ces procès réclamaient la condamnation à mort des accusés sans tenir compte de la validité des éléments de preuve à charge.

DISPARITIONS FORCÉES

On ignorait le nombre exact de personnes victimes de disparition forcée ; selon certaines estimations, il dépassait les 80. Neuf des 20 personnes dont la disparition forcée avait été signalée entre 2012 et 2014 ont été retrouvées mortes. Six autres ont rejoint leur famille après avoir été détenues pendant plusieurs semaines, voire plusieurs mois, sans qu’aucune information ne soit fournie sur leur lieu de détention jusqu’à leur remise en liberté. On ignorait tout du sort des cinq autres.
À la suite de la disparition forcée suivie de l’homicide de sept personnes à Narayanganj en avril, trois membres du Bataillon d’action rapide (RAB) ont été arrêtés et ont fait l’objet d’une enquête pour leur participation présumée à des enlèvements et à des homicides ; ils étaient au moins 17 dans ce cas à la fin de l’année. C’est la première fois qu’une telle initiative était prise depuis la création du RAB en 2004. Amnesty International a accueilli favorablement cette enquête comme une étape vers l’obligation pour les responsables de l’application des lois de rendre compte des violations des droits humains dont ils se seraient rendus coupables. On craignait toutefois que le gouvernement ne renonce aux poursuites si la pression publique pour traduire ces hommes en justice diminuait. En dehors de ce cas, rien n’indiquait qu’une enquête approfondie ait été diligentée sur d’autres faits, par exemple l’enlèvement inexpliqué suivi du meurtre d’Abraham Linkon en février1.

LIBERTÉ D’EXPRESSION

L’utilisation par le gouvernement de l’article 57 de la Loi sur l’information et les technologies de communication (ICT) imposait des restrictions sévères à la liberté d’expression. Aux termes de cet article, les personnes déclarées coupables d’infraction à la loi étaient passibles d’une peine maximale de 10 ans d’emprisonnement si elles avaient été inculpées avant le 6 octobre 2013, date à laquelle une modification du texte a non seulement porté la peine maximale à 14 ans d’emprisonnement, mais également fixé une peine minimale de sept ans d’emprisonnement.
L’article 57 de l’ICT pénalisait toute une série d’actes pacifiques, comme la critique d’opinions religieuses islamiques dans un article de presse ou la dénonciation de violations des droits humains. Au moins quatre blogueurs, deux utilisateurs de Facebook et deux dirigeants d’une organisation de défense des droits humains ont été inculpés en vertu de cet article en 2013 et en 2014. Citons, entre autres, les blogueurs Asif Mohiuddin, Subrata Adhikari Shuvo, Mashiur Rahman Biplob et Rasel Parvez, ainsi que les défenseurs des droits humains Adilur Rahman Khan et Nasiruddin Elan.
Plus d’une douzaine d’employés des médias, dont des journalistes, ont affirmé qu’ils avaient été menacés par des membres des services de sécurité car ils avaient critiqué les autorités. Les menaces étaient le plus souvent proférées dans des appels téléphoniques adressés directement aux journalistes ou par l’intermédiaire de messages transmis à leurs rédacteurs en chef. De nombreux journalistes et participants à des émissions de débat ont déclaré qu’ils s’autocensuraient pour cette raison.
La liberté d’expression était également menacée par des groupes religieux. Dans 10 cas au moins, ces groupes auraient répandu des rumeurs selon lesquelles une personne avait utilisé les réseaux sociaux pour insulter l’islam ou s’était livrée à des activités prétendument anti-islamiques sur son lieu de travail. Cinq personnes au moins ont ensuite été attaquées ; deux ont été tuées et les autres grièvement blessées. Les victimes étaient Ahmed Rajib et AKM Shafiul Islam, professeur à l’université de Rajshahi, poignardé en novembre 2014 semble- t-il par des membres d’un groupe qui lui reprochait son opposition, qualifiée de « non islamique », au port de la burqa par des étudiantes qui suivaient ses cours2.

VIOLENCES FAITES AUX FEMMES ET AUX FILLES

Les violences à l’égard des femmes et des filles restaient une source de préoccupation majeure en matière de droits humains.
L’organisation de défense des droits des femmes Bangladesh Mahila Parishad a signalé que son analyse de la presse avait révélé qu’au moins 423 femmes et filles avaient subi différentes formes de violence durant le seul mois d’octobre 2014. Selon l’organisation, plus de 100 femmes avaient été violées et 11 d’entre elles avaient été tuées. Quarante au moins avaient été victimes de violences physiques parce que leur famille n’était pas en mesure de fournir la dot réclamée par leur époux ou sa famille, et 16 d’entre elles étaient mortes des suites de leurs blessures. Des femmes et des filles ont également été victimes de violence au sein de leur famille, d’attaques à l’acide et de la traite des êtres humains.

TORTURE ET AUTRES MAUVAIS TRAITEMENTS

Des actes de torture et d’autres mauvais traitements étaient régulièrement infligés en toute impunité. Les policiers torturaient systématiquement les suspects placés en garde à vue. Parmi les méthodes signalées figuraient les coups, la suspension au plafond, les décharges électriques sur les organes génitaux et, dans certains cas, les tirs dans les jambes des détenus. Neuf personnes au moins sont mortes durant leur garde à vue entre janvier et juillet 2014, semble-t-il des suites de tortures.

DROITS DES TRAVAILLEURS

Les normes de sécurité dans les usines et autres lieux de travail étaient dangereusement basses. Au moins 1 130 ouvriers du secteur textile ont été tués et 2 000 autres, peut-être plus, ont été blessés lorsque le Rana Plaza, un immeuble de neuf étages qui abritait cinq usines de vêtements, s’est effondré le 24 avril 2013. On a appris par la suite que les gérants avaient ordonné aux ouvriers d’entrer dans l’immeuble, qui avait pourtant été fermé la veille après l’apparition de fissures dans les murs. Un accident similaire avait eu lieu en 2012, date à laquelle 112 ouvriers au moins avaient trouvé la mort dans l’incendie de l’usine Tazreen Fashions, à Dacca, après que les gérants les eurent empêchés de s’enfuir en affirmant qu’il s’agissait d’une fausse alerte.
Les initiatives du gouvernement, des marques internationales et de l’OIT en vue d’indemniser les victimes d’accidents sur le lieu de travail se sont révélées insuffisantes et les survivants continuaient de lutter pour subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille.

PEINE DE MORT

Cette année encore les tribunaux ont prononcé des condamnations à mort. Onze sentences capitales ont été prononcées par le Tribunal pour les crimes de droit international. Une condamnation à mort a été prononcée directement par la Cour suprême après que le gouvernement eut interjeté appel de l’acquittement d’un accusé par ce Tribunal. L’homme en question a été exécuté en décembre 2013. Les prisonniers dont les sentences capitales avaient été confirmées en appel risquaient d’être exécutés d’un moment à l’autre.

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