Rapport annuel 2016

RÉPUBLIQUE DOMINICAINE

République dominicaine
Chef de l’État et du gouvernement : Danilo Medina Sánchez


Un texte de loi visant à porter réforme de la police n’a pas été adopté. De nombreuses personnes d’origine haïtienne sont demeurées apatrides malgré l’application d’une loi censée remédier à leur situation (loi 169-14). Un nouveau Code pénal dans lequel devait être supprimée l’interdiction absolue de l’avortement n’est pas entré en vigueur. Des textes de loi qui auraient pu améliorer la protection des droits des femmes, des filles et des personnes LGBTI n’ont pas été adoptés par le Parlement.

CONTEXTE

En juin, à l’issue d’un accord conclu entre le parti au pouvoir et les principaux partis d’opposition, le Congrès a adopté une modification constitutionnelle autorisant le président sortant à se représenter à la fin de son mandat. Quelques jours plus tard, le président a annoncé son intention de briguer un deuxième mandat lors de l’élection présidentielle de 2016.
Un projet de règlement régissant les procédures internes du Bureau du médiateur, créé en 2013, a été présenté au Congrès en juillet, mais il était toujours en instance à la fin de l’année.

Le ministère des Affaires étrangères a lancé une consultation auprès de plusieurs organisations de la société civile afin d’élaborer un plan national d’action concernant les droits humains.

POLICE ET FORCES DE SÉCURITÉ

Le Bureau du procureur général a recensé 152 homicides commis par les forces de sécurité entre janvier et septembre. De nombreux homicides ont eu lieu dans des circonstances laissant supposer qu’il pouvait s’agir d’exécutions illégales.

Le Congrès a continué à débattre d’un projet de loi sur la réforme de la police, mais il ne l’avait pas encore adopté à la fin de l’année. Par conséquent, cette réforme de grande envergure a de nouveau été retardée.
Le nombre de meurtres demeurait élevé, malgré une baisse de 6 % entre janvier et septembre par rapport à la même période de 2014. En ce qui concerne la mise en œuvre du Plan national de sécurité, lancé officiellement en mars 2013, aucune information n’a été publiée à part les rapports d’activité sur le mécanisme national de réaction aux situations d’urgence.

IMPUNITÉ

L’enquête était au point mort sur la disparition forcée de trois hommes, Gabriel Sandi Alistar, Juan Almonte Herrera et Randy Vizcaíno González, vus pour la dernière fois alors qu’ils étaient en garde à vue respectivement en juillet 2009, septembre 2009 et décembre 2013. On ignorait toujours tout de leur sort et de l’endroit où ils se trouvaient.

En juin, la Cour suprême a entendu le recours formé par six membres des forces de sécurité qui ont fait valoir que le procès intenté contre eux en 2013 pour la mort, en 2009, de Cecilio Díaz et William Checo avait été ouvert après expiration du délai de prescription ; la Cour a mis fin aux procédures à leur encontre.

DÉCHÉANCE DE LA NATIONALITÉ
Les autorités ont continué à appliquer la loi 169-14, dont le but était de restituer leur nationalité dominicaine aux personnes qui en avaient été arbitrairement et rétroactivement privées en vertu d’un arrêt de la Cour constitutionnelle de 2013. La procédure administrative de récupération de la nationalité s’est poursuivie, quoique lentement, pour les personnes dites du « groupe A », c’est-à-dire celles qui étaient nées en République dominicaine de parents étrangers et dont la naissance avait été enregistrée par le passé au registre de l’état civil dominicain. Du fait de cette lenteur, de nombreuses personnes étaient toujours privées arbitrairement de leurs papiers d’identité. Sur les quelque 55 000 personnes nées en République dominicaine de parents étrangers et dont la naissance n’avait jamais été enregistrée (« groupe B »), seules 8 755 avaient demandé à participer au programme de naturalisation prévu par la loi, qui fixait au 1er février la limite de dépôt de la demande. Le gouvernement n’a pas reconnu publiquement l’existence d’un grand groupe de personnes qui étaient dans l’impossibilité de déposer un dossier et demeuraient par conséquent apatrides1.

De très nombreux Dominicains d’origine haïtienne ont été arbitrairement détenus et menacés d’expulsion vers Haïti car ils étaient considérés comme des migrants « en situation irrégulière ». La plupart d’entre eux ont cependant été remis en liberté après que les autorités eurent vérifié qu’ils étaient nés en République dominicaine.

DROITS DES MIGRANTS
En février, après une montée des tensions entre la République dominicaine et Haïti, le corps d’un migrant haïtien a été retrouvé pendu à un arbre dans un parc de Santiago. Un homicide xénophobe était à craindre. À la fin de l’année, personne n’avait été traduit en justice pour cet homicide. Des agressions ont été signalées contre des migrants haïtiens en représailles de crimes prétendument commis par d’autres Haïtiens2.

Le délai pour le dépôt des demandes dans le cadre du Plan national de régularisation des étrangers en situation migratoire irrégulière a expiré le 17 juin. Le gouvernement a annoncé que 288 486 demandes avaient été déposées et, à la fin du mois de septembre, il a déclaré que plus de 239 000 personnes avaient été régularisées.

Les renvois forcés de migrants en situation irrégulière ont repris officiellement au milieu du mois d’août3. À partir de la mi-juin, des dizaines de milliers de migrants haïtiens ont décidé de rentrer en Haïti, principalement par crainte de violences lors des opérations d’expulsion ou de pressions xénophobes de la part de leurs employeurs ou voisins. Ce mouvement de population a entraîné une escalade des tensions entre la République dominicaine et Haïti. L’Organisation des États américains (OEA) a réagi en envoyant une mission dans les deux pays en juillet. À la suite de cette visite, les autorités dominicaines ont refusé la médiation proposée par le secrétaire général de l’OEA ainsi que la négociation avec Haïti d’un protocole relatif aux renvois forcés. Les autorités n’ont pas rendu public leur propre protocole.

Dans la plupart des cas de renvoi, les autorités ont évalué chaque situation individuellement. Toutefois, selon l’Organisation internationale pour les migrations et certaines organisations dominicaines et haïtiennes de la société civile, plusieurs personnes qui avaient déposé un dossier dans le cadre du Plan national de régularisation des étrangers en situation migratoire irrégulière ont déclaré avoir été expulsées du pays.

VIOLENCES FAITES AUX FEMMES ET AUX FILLES
Selon les statistiques officielles, le premier semestre 2015 a vu une baisse de 4 % du nombre de femmes et de filles tuées par rapport à la même période de 2014.

Le Parlement n’avait toujours pas adopté, à la fin de l’année, la loi de portée générale visant à prévenir et supprimer les violences faites aux femmes, qui avait été approuvée par le Sénat en 2012.

DROITS SEXUELS ET REPRODUCTIFS
En décembre 2014, le Congrès avait adopté des dispositions du Code pénal dépénalisant l’avortement dans les cas où la grossesse mettait en danger la vie de la femme ou jeune fille concernée, lorsqu’il était établi que le bébé ne survivrait pas à la naissance ou quand la grossesse résultait d’un viol ou d’un inceste. Des groupes opposés à l’avortement ont par la suite déposé un recours en inconstitutionnalité concernant cette réforme. Le 2 décembre, la Cour constitutionnelle a déclaré que l’adoption de ces textes avait été entachée d’erreurs de procédure et était donc contraire à la Constitution. Elle a ordonné le maintien en vigueur du Code pénal précédent, adopté en 1884.

Le ministère de la Santé, en coopération avec des organisations de la société civile, a élaboré des protocoles pour mettre en œuvre la dépénalisation de l’avortement dans les trois circonstances autorisées par le Code pénal.
En juillet, face aux pressions de groupes religieux, le président de la Chambre des députés a retiré un projet de loi sur la santé sexuelle et reproductive qui était à l’ordre du jour du Parlement. Ce texte n’avait pas été débattu à la fin de l’année.

DROITS DES LESBIENNES, DES GAYS ET DES PERSONNES BISEXUELLES, TRANSGENRES OU INTERSEXUÉES
Des organisations de la société civile ont signalé que des personnes LGBTI avaient été victimes d’infractions motivées par la haine, dont des crimes de viol et de meurtre.

La commission de la Chambre des députés qui a examiné le projet de loi sur la santé sexuelle et reproductive a supprimé les sanctions proposées en cas de discrimination dans l’accès aux soins fondée sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre. La loi n’avait pas encore été débattue à la fin de l’année.

République dominicaine. « Sans papiers, je ne suis personne. » Les personnes apatrides en République dominicaine. (AMR 27/2755/2015)
Dominican Republic : Authorities must investigate xenophobic violence (AMR 27/1449/2015)
La République dominicaine a officiellement repris les expulsions et la situation des Dominicains d’origine haïtienne suscite des inquiétudes (AMR 27/2304/2015)
Retour en 1884 : la République dominicaine rétrograde les droits des femmes (nouvelle, 3 décembre)

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