Rapport Annuel 2016

Australie

Australie
Chef de l’État : Elizabeth II, représentée par Peter Cosgrove
Chef du gouvernement : Malcolm Turnbull (a remplacé Tony Abbott en septembre)

Le nombre de personnes autochtones emprisonnées en Australie était disproportionné par rapport au reste de la population ; certains enfants étaient détenus avec des adultes. Le pays a maintenu sa politique draconienne vis-à-vis des demandeurs d’asile, notamment en repoussant des navires en mer, en renvoyant des personnes vers des pays où elles risquaient des persécutions, en procédant à des placements systématiques en détention pour une durée indéterminée, et en externalisant le traitement de demandes d’asile à Nauru et en Papouasie-Nouvelle- Guinée. Les personnes reconnues réfugiées à Nauru n’obtenaient pas le droit de s’établir en Australie. On ne leur proposait qu’un titre de séjour temporaire, ou bien une réinstallation au Cambodge. Les autorités de Papouasie-Nouvelle-Guinée n’ayant pas encore mis en place de permis de séjour temporaire pour les réfugiés reconnus, de nombreuses personnes ont été maintenues dans une situation juridique incertaine et se sont trouvées dans l’impossibilité de quitter l’île de Manus. Aux termes de nouvelles dispositions législatives, les employés et le personnel contractuel des centres de détention qui dénonçaient les violations des droits humains dans ces structures s’exposaient à des poursuites pénales. Une nouvelle loi relative à la « sécurité » a étendu les pouvoirs des autorités en matière d’interception des données. Une loi prévoyant le retrait de la nationalité australienne aux binationaux soupçonnés d’implication dans des activités terroristes a été adoptée.

DROITS DES PEUPLES AUTOCHTONES

Le taux d’incarcération des mineurs aborigènes était 24 fois plus élevé que celui des enfants issus du reste de la population. L’âge de la responsabilité pénale étant de 10 ans en Australie, des enfants âgés de 10 ou 11 ans pouvaient légalement être détenus partout dans le pays, en violation de la Convention relative aux droits de l’enfant [ONU]. Dans le Queensland, des enfants étaient incarcérés avec des adultes ; dans le Territoire du Nord, les prisonniers mineurs n’étaient qu’à peine séparés des prisonniers adultes dans au moins un centre de détention.
Les autorités d’Australie-Occidentale ont élargi le dispositif de peines obligatoires et introduit ce type de sanction pour les cambriolages aggravés commis par des adultes ou des enfants âgés de 16 ou 17 ans ; les règles présidant à l’imposition de peines obligatoires pour les cambriolages commis sans violence ont en outre été durcies. Le taux d’incarcération des adultes autochtones était 14 fois supérieur à celui des adultes non autochtones ; de nouveaux cas de mort en détention ont été signalés. En mai, un aborigène du Territoire du Nord est mort d’un arrêt cardiaque dans la cellule d’un poste de police trois heures après y avoir été placé pour consommation présumée d’alcool dans un lieu où cela était interdit. Il avait été interpellé dans le cadre d’une procédure dite « sans papier » qui permet dans certains cas de placer une personne en détention sans aucune formalité. Le coroner (officier de justice chargé de faire une enquête en cas de mort violente, subite ou suspecte) a estimé que cette procédure était « manifestement inéquitable » car elle avait des effets disproportionnés sur les autochtones. Trois prisonniers sont morts dans deux prisons d’Australie-Occidentale en septembre, novembre et décembre, rallongeant ainsi la liste des morts en détention sur lesquelles le coroner de cet État devait encore enquêter. Un autre prisonnier est mort en décembre, dans une prison de la Nouvelle-Galles du Sud.
En juin, le gouvernement fédéral a transféré aux autorités des États la responsabilité des services de base et des services municipaux dispensés dans les communautés indigènes reculées. Le Premier ministre de l’Australie-Occidentale a déclaré que cette décision pourrait entraîner la fermeture de quelque 150 communautés aborigènes, ce qui a déclenché un vaste mouvement de protestation. À la suite des manifestations, le gouvernement d’Australie- Occidentale a mis en place un processus de consultation.

RÉFUGIÉS ET DEMANDEURS D’ASILE

L’Australie a maintenu sa politique répressive vis-à-vis des demandeurs d’asile arrivant par bateau : elle a continué de les refouler en haute mer, de les renvoyer vers leur pays d’origine sans procéder à un examen approprié de leur dossier, au risque que les intéressés soient soumis à des persécutions à leur retour, ou de les transférer vers des centres administrés par ses soins à Nauru et dans l’île de Manus, en Papouasie-Nouvelle- Guinée. À la date du 30 novembre, 926 personnes étaient détenues en Papouasie-Nouvelle-Guinée et 543 autres, dont 70 enfants, se trouvaient toujours dans le centre « ouvert » de Nauru. Les autorités ont rendu public en mars un rapport indépendant sur le centre de Nauru qui faisait état de cas présumés de viol et de violences sexuelles, y compris sur la personne de mineurs, et de cas de harcèlement et d’agressions physiques (voir Nauru). Bien que le gouvernement australien ait accepté toutes les recommandations, un rapport du Sénat publié en août indiquait que les conditions n’étaient toujours « ni adéquates, ni adaptées, ni sûres ». Le gouvernement de Nauru a annoncé en octobre que les demandeurs d’asile ne seraient plus détenus dans le centre, qui allait devenir une structure ouverte. Il a également indiqué que les 600 demandes d’asile en instance seraient traitées « dans la semaine », processus qui n’était pas encore entièrement terminé à la fin du mois de décembre.
En juin, quatre réfugiés ont été transférés au Cambodge dans le cadre d’un accord signé en septembre 2014, par lequel l’Australie s’engageait à verser une aide de 40 millions de dollars australiens (28 millions de dollars des États-Unis) au Cambodge, en sus d’une somme de 15 millions de dollars (10,5 millions de dollars des États-Unis) affectée aux dépenses spécifiques, en contrepartie de la réinstallation dans ce pays de réfugiés présents dans le centre pour migrants australien à Nauru. En octobre, l’un de ces quatre réfugiés a accepté de repartir au Myanmar à partir du Cambodge et, en novembre, un cinquième homme a été transféré de Nauru vers le Cambodge.
Également en juin, des responsables indonésiens ont accusé l’Australie d’avoir versé en mai 31 000 dollars australiens à des passeurs afin qu’ils ramènent en Indonésie un bateau à bord duquel se trouvaient 65 demandeurs d’asile. Une enquête sénatoriale était en cours à la fin de l’année.
L’Australie a poursuivi sa politique de placement systématique en détention pour une durée indéterminée. Au 1er décembre, 1 852 personnes étaient détenues dans des centres sur le continent. Parmi elles se trouvaient 104 enfants, malgré l’engagement pris par le gouvernement en août 2014 de mettre un terme à la détention des enfants. En juillet, le gouvernement a adopté la loi de 2015 relative à la force frontalière, qui prévoit notamment des peines d’emprisonnement pour les agents de l’État et les intervenants extérieurs travaillant dans les centres de détention pour migrants (par exemple les professionnels de la santé et les éducateurs pour la jeunesse) qui dénoncent des violations des droits humains dans ces centres.
Les autorités ont également déposé un projet de loi dont les dispositions autoriseraient les agents des centres de détention pour migrants à faire usage de la force, y compris meurtrière, contre toute personne détenue, et ce sans aucun contrôle du juge.
Le gouvernement a annoncé en août avoir repoussé en mer 20 navires (transportant 633 personnes au total) depuis décembre 2013, dont un directement vers le Viêt-Nam en juillet. En novembre, un autre bateau avec à bord 16 demandeurs d’asile aurait été refoulé vers l’Indonésie. Face à la crise au Moyen-Orient, les autorités ont annoncé en septembre que l’Australie allait accueillir 12 000 réfugiés syriens supplémentaires au titre de la réinstallation.

LUTTE CONTRE LE TERRORISME ET SÉCURITÉ

Le Parlement a adopté une loi retirant la nationalité australienne aux citoyens binationaux soupçonnés d’implication dans des activités à caractère terroriste. Les binationaux risquaient d’être déchus de leur nationalité australienne, ce sans même qu’une condamnation pénale ait été prononcée et dans le cadre d’une procédure ne comprenant que des garanties limitées. Une loi autorisant la surveillance de masse des métadonnées personnelles a été adoptée.

SURVEILLANCE INTERNATIONALE

En novembre, le bilan de l’Australie en termes de droits humains a été évalué pour la deuxième fois au titre de l’Examen périodique universel des Nations unies. Le fait que l’Australie ne ratifie pas le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture [ONU] et ne prenne pas de mesures pour remédier au taux d’incarcération des personnes autochtones lui a valu des critiques. Il lui a été recommandé d’adopter une loi relative aux droits humains et de mettre fin au placement en détention systématique des demandeurs d’asile.

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