Rapport annuel 2016

JAPON

Japon

Chef du gouvernement : Shinzo Abe

Alors que la Constitution adoptée après la Seconde Guerre mondiale dispose que le Japon renonce à « l’usage de la force comme moyen de règlement des conflits internationaux », en juillet, le Premier ministre Shinzo Abe a fait adopter par la Chambre des représentants une nouvelle loi permettant aux Forces d’autodéfense japonaises de participer à des opérations militaires conjointes à l’étranger. Ce projet a rencontré au sein de la population une vive opposition, qui s’est notamment traduite par une manifestation d’une ampleur inégalée depuis des décennies. Les gouvernements japonais et sud-coréen sont parvenus à un accord sur la question du système d’esclavage sexuel entretenu par l’armée japonaise avant et pendant la Seconde Guerre mondiale. Cet accord a été vivement critiqué par les victimes. Cette année encore, des condamnés à mort ont été exécutés.

DISCRIMINATION – MINORITÉS ETHNIQUES

Malgré la recommandation formulée en 2014 par le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale [ONU], la coalition au pouvoir s’est opposée à l’adoption d’une loi interdisant la discrimination raciale. Un groupe de législateurs a toutefois soumis au Parlement une proposition de loi visant à obliger le gouvernement à créer des programmes de lutte contre la discrimination. Les débats sur cette proposition de loi ont débuté en août. Face à la multiplication des manifestations contre les personnes d’origine coréenne, certaines municipalités, comme celle d’Osaka, ont proposé des arrêtés afin de juguler les discours de haine contre les étrangers et les minorités.
RÉFUGIÉS ET DEMANDEURS D’ASILE
La procédure de demande d’asile a continué de susciter des préoccupations. Le ministère de la Justice a accordé le statut de réfugié à seulement 11 personnes sur plus de 5 000 demandes en 2014. En juin, le ministère a dévoilé un projet de mise en place d’un système de présélection visant à empêcher l’accès à la procédure d’asile des candidats « ne pouvant pas prétendre » au statut de réfugié, affirmant que l’augmentation du nombre des demandes d’asile était en partie imputable à des personnes à la recherche d’un travail. Il n’a pas précisé clairement les critères qui seraient utilisés pour cette présélection. En août, un Sri-Lankais a engagé une nouvelle procédure judiciaire contre le ministère, qui continuait de lui refuser le statut de réfugié malgré une décision rendue en sa faveur par le tribunal de district d’Osaka. C’était la première fois qu’un refus du gouvernement de se conformer à une décision de justice quant au statut de réfugié donnait lieu à une seconde action en justice.
DROITS DES TRAVAILLEURS MIGRANTS
Le gouvernement a maintenu les sévères restrictions sur l’immigration et annoncé son intention de développer davantage encore son Programme de formation technique en entreprise déjà en place, pour faire venir un plus grand nombre de travailleurs étrangers. Ce programme a été utilisé de façon abusive par des employeurs, ce qui s’est traduit par des cas de travail forcé, une absence de contrôle effectif et un manque de protection des travailleurs, entre autres atteintes aux droits humains. En juin, quelque 180 000 étrangers occupaient un emploi dans le cadre de ce programme.
DROITS DES LESBIENNES, DES GAYS ET DES PERSONNES BISEXUELLES, TRANSGENRES OU INTERSEXUÉES
En avril, la municipalité de l’arrondissement de Shibuya, à Tokyo, est devenue la première dans tout le Japon à adopter un arrêté reconnaissant l’union entre personnes de même sexe au même titre que le mariage.
Les partenaires de même sexe pouvaient dès lors obtenir un certificat d’union, juridiquement non contraignant, leur permettant d’avoir un droit de visite à l’hôpital et de signer ensemble un bail de location pour un logement. L’arrondissement de Setagaya à Tokyo a adopté des mesures similaires en juillet, et d’autres villes ont annoncé la possible mise en place de dispositions pour les couples de même sexe.
VIOLENCES FAITES AUX FEMMES ET AUX FILLES
Lors du 70e anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale, le Premier ministre Shinzo Abe a exprimé sa profonde tristesse, mais il n’a fait que mentionner les excuses formulées par de précédents chefs du gouvernement. En décembre, le gouvernement a conclu un accord avec la Corée du Sud et a reconnu l’entière responsabilité du Japon dans le système d’esclavage sexuel entretenu par l’armée japonaise avant et pendant la guerre, système au sein duquel des femmes et des jeunes filles ont été contraintes par l’Armée impériale japonaise à servir d’esclaves sexuelles. Les victimes ont critiqué cet accord, affirmant qu’il ne tenait pas compte de leurs points de vue ni de leurs besoins et regrettant de ne pas avoir été associées aux négociations.
LIBERTÉ D’EXPRESSION
La Loi sur la protection des secrets spécifiques, entrée en vigueur en décembre 2014, contient des dispositions qui pourraient violer le droit d’accès aux informations détenues par les pouvoirs publics. Les opposants à cette loi ont souligné que le gouvernement pouvait refuser de donner des informations sans s’appuyer sur des critères clairs, que les commissions parlementaires chargées de superviser la détermination des secrets étaient trop faibles, et que des journalistes risquaient d’être emprisonnés pour avoir sollicité et relayé des informations désignées comme secrètes. À la fin de l’année, le gouvernement n’avait pas encore mis en place de mécanisme indépendant de contrôle habilité à lancer des alertes et ayant réellement la capacité d’empêcher un recours abusif à cette loi.
SYSTÈME JUDICIAIRE
Un projet de loi modifiant le Code de procédure pénale et visant à rendre obligatoire l’enregistrement vidéo ou audio intégral des interrogatoires menés par la police ou par le ministère public a été adopté par la Chambre des représentants en août, mais n’avait toujours pas été examiné par la Chambre des conseillers à la fin de l’année. Ses dispositions ne s’appliquaient qu’aux cas de « crimes graves » devant être jugés dans le cadre du système faisant appel à des juges non professionnels, soit environ 2 % des affaires pénales. Par ailleurs, ce projet de loi n’abolissait ni ne modifiait le système des daiyo kangoku, qui permet à la police de garder des suspects en détention jusqu’à
23 jours avant l’inculpation, ce qui facilite le recours à la torture et à d’autres mauvais traitements pour extorquer des « aveux » pendant les interrogatoires.

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