Rapport annuel 2017

Guatemala

République du Guatemala
Chef de l’État et du gouvernement : Jimmy Morales Cabrera (a remplacé Alejandro Maldonado Aguirre en janvier)

Cette année encore, des défenseurs des droits humains ont été la cible de campagnes de diffamation et le système judiciaire a été utilisé de manière abusive pour harceler et intimider certains d’entre eux. Les personnes travaillant sur le droit à la terre et sur les questions liées au territoire et à l’environnement étaient particulièrement exposées. De nouvelles personnes ont fui le pays pour échapper aux inégalités et aux violences, importantes dans le pays. Le tribunal A de risque majeur a rendu une décision historique dans une affaire de violences sexuelles et d’esclavage domestique dont 11 femmes indigènes ont été victimes pendant le conflit armé interne. D’autres affaires importantes impliquant d’anciens membres de l’armée ont de nouveau été reportées ou retardées de manière injustifiée. La Commission des droits humains du Congrès a présenté une proposition de loi visant à abolir la peine de mort.

Justice de transition

En janvier, le procès de l’ancien président et commandant en chef des armées José Efraín Ríos Montt et de l’ex-directeur du renseignement militaire José Mauricio Rodríguez Sánchez, accusés de génocide et de crimes contre l’humanité, a été reporté. Le procès a commencé en mars devant un tribunal de risque majeur, puis, en mai, une cour d’appel a fait droit à la requête des plaignants, qui demandaient que les deux hommes soient jugés séparément. Le procès de José Efraín Ríos Montt devait se tenir à huis clos, en raison des dispositions spéciales adoptées après qu’il eut été établi que l’ancien président était mentalement inapte à comparaître. Les procès des deux hommes étaient au point mort à la fin de l’année.

Cinq anciens membres de l’armée, dont Benedicto Lucas García, ancien chef du Haut Commandement de l’armée guatémaltèque, ont été inculpés dans le cadre de l’enquête sur la détention illégale, les actes de torture et les violences sexuelles perpétrés contre Emma Guadalupe Molina Theissen, et la disparition forcée de Marco Antonio Molina Theissen. Des ONG locales ont indiqué que plusieurs audiences avaient été suspendues et que les autorités judiciaires avaient imposé certaines restrictions et conditions à la famille de la victime et au public. Des membres de la famille Molina Theissen ont été victimes d’actes de harcèlement, notamment sur Internet. Des femmes de la famille ont été la cible de formes particulières de violences liées au genre, notamment de harcèlement et de diffamation.

Dans une décision historique prononcée en février par le tribunal A de risque majeur, deux anciens militaires ont été reconnus coupables de crimes contre l’humanité pour avoir réduit en esclavage sexuel et domestique 11 femmes indigènes maya-q’eqchi et les avoir soumises à des violences sexuelles. Ces crimes ont eu lieu pendant le conflit armé interne dans une base militaire située dans la localité de Sepur Zarco.

En juin, le tribunal A de risque majeur a statué que huit anciens militaires devaient être jugés pour des accusations liées à des affaires de disparitions forcées et d’homicides illégaux commis dans une base militaire aujourd’hui connue sous le nom de Creompaz, dans le département d’Alta Verapaz (nord du pays). Des proches des victimes ont fait l’objet d’une surveillance et ont été la cible de menaces, de harcèlement en ligne et d’actes d’intimidation à l’intérieur comme à l’extérieur de la salle d’audience.

Des organisations de la société civile ont continué de militer en faveur de l’adoption de la Loi n° 3590 relative à la création d’une commission nationale pour la recherche des victimes de disparition forcée et d’autres formes de disparition. Ce texte, qui a été présenté pour la première fois devant le Congrès en 2006, n’avait pas été débattu à la fin de l’année 2016.

Défenseurs des droits humains

Les défenseurs des droits humains ont été en butte de façon répétée à des menaces, des campagnes de dénigrement, des actes d’intimidation et des agressions. Selon l’ONG UDEFEGUA, 14 militants des droits humains ont été tués. Les défenseurs des droits relatifs à l’environnement ont été le groupe le plus touché par les agressions. Des défenseurs des droits à la terre et au territoire et des militants des droits environnementaux ont fait l’objet de campagnes de dénigrement et de manœuvres visant à les faire passer pour des criminels, venant à la fois de représentants de l’État, par le biais de leurs déclarations publiques, et de particuliers. Des poursuites pénales sans fondement ont aussi été engagées contre certains de ces militants.

Les poursuites pénales engagées contre le défenseur des droits humains Daniel Pascual, accusé de diffamation écrite et orale, étaient toujours en cours à la fin de l’année. Ces accusations étaient liées à des déclarations publiques qu’il a faites en 2013. La juge a ignoré la requête de l’accusé qui demandait que l’affaire soit examinée au regard du droit constitutionnel relatif à la liberté d’opinion et non dans le cadre d’une procédure pénale ordinaire. Le 7 juin, la Cour constitutionnelle a rendu une ordonnance de référé qui a suspendu provisoirement les poursuites contre Daniel Pascual.

Début 2016, une défenseure des droits humains bien connue a reçu des menaces de mort dirigées contre elle et ses enfants. Ces menaces coïncidaient avec la publication dans un journal, le 6 avril, d’une annonce publicitaire dans laquelle le président d’une entreprise privée affirmait que le but des ONG de défense des droits humains était de freiner le développement économique. Il qualifiait en outre ces ONG d’ennemies du pays.

Le 22 juillet dans la ville de Guatemala, le tribunal A de risque majeur a acquitté sept défenseurs des droits des indigènes de l’ethnie Maya-Q’anjobal. Ceux-ci avaient été accusés de détention illégale, menaces et incitation à commettre une infraction. Lorsqu’ils ont été remis en liberté, ils avaient passé plus d’un an en détention provisoire.

Droits des réfugiés et des migrants

Depuis plusieurs décennies, des Guatémaltèques émigrent aux États-Unis en passant par le Mexique pour échapper aux inégalités et à la violence qui touchent divers groupes marginalisés dans le pays, notamment les populations indigènes. Un grand nombre d’entre eux ont été renvoyés de force au Guatemala au cours des cinq dernières années. Aucun mécanisme ou protocole adapté n’a cependant été mis en place pour répondre aux besoins des personnes ainsi rapatriées. D’après les chiffres du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), 11 536 ressortissants guatémaltèques ont demandé l’asile dans d’autres pays entre janvier et août. Le Congrès a approuvé en décembre un nouveau Code de la migration, qui vient remplacer la législation existante, devenue obsolète.

Conflits fonciers

À l’issue d’une procédure concernant l’absence de tenue d’une consultation préalable, la Cour suprême a suspendu, en février, la licence d’exploitation de la mine d’El Tambor. Le ministre de l’Énergie et des Mines a déclaré que la licence avait déjà été accordée et qu’elle ne pouvait donc pas être suspendue. À la suite de cette déclaration, des habitants de la région où se trouve la mine ont organisé, à partir du mois de mars, des sit-in devant les locaux du ministère de l’Énergie et des Mines pour demander que la décision de la Cour suprême soit appliquée. Fin juin, la Cour suprême a définitivement confirmé sa décision de suspendre la licence d’exploitation de la mine d’El Tambor.

Toutes les infos
Toutes les actions
2024 - Amnesty International Belgique N° BCE 0418 308 144 - Crédits - Charte vie privée
Made by Spade + Nursit