Le droit à la liberté d’expression, de réunion pacifique et d’association a été soumis à des restrictions. Une coulée de boue a fait des centaines de morts ainsi que des milliers de sans-abri. Les conditions de détention étaient loin de satisfaire aux normes internationales. Des filles enceintes ont été exclues du système éducatif.
LIBERTÉ D’EXPRESSION
Abdul Fatoma, de l’organisation Campaign for Human Rights and Development International, a été arrêté le 31 janvier à Freetown, la capitale, après sa participation à un débat à la radio au cours duquel il a déploré que le gouvernement et la Commission anticorruption ne soient pas tenus de rendre des comptes. Il a été libéré sous caution le 1er février, mais son passeport lui a été confisqué pendant 45 jours [1].
Trois journalistes du Salone Times et du New Age ont été cités à comparaître le 22 septembre pour répondre de divers chefs d’inculpation de diffamation séditieuse au titre de la Loi de 1965 relative à l’ordre public, après avoir publié des articles critiquant les projets de la Commission nationale des télécommunications d’augmenter les tarifs des télécommunications. Leur audience préliminaire a été reportée à deux reprises, et ils n’avaient pas comparu devant le tribunal à la fin de l’année.
LIBERTÉ DE RÉUNION
Le 23 mars, les forces de sécurité ont tué un adolescent âgé d’environ 16 ans et grièvement blessé deux étudiants en ouvrant le feu sur une manifestation d’étudiants de l’université de Njala, dans la ville de Bo (province du Sud). Les étudiants protestaient contre une grève des chargés de cours, qui avait entraîné la fermeture de l’université pendant plusieurs mois. La police a affirmé que les étudiants n’avaient pas obtenu l’autorisation de manifester et qu’ils avaient brûlé des pneus et bloqué des routes. Sept étudiants ont été arrêtés avant d’être relâchés sans inculpation après deux jours de détention. Le Bureau indépendant des plaintes contre la police a ouvert une enquête sur des allégations selon lesquelles la police aurait fait usage d’une force excessive.
Le même jour, la police a utilisé du gaz lacrymogène pour disperser des étudiants qui protestaient contre la grève devant la résidence du président à Freetown. Quatorze étudiants ont été arrêtés et inculpés de comportement séditieux, sanctionnés d’une amende, puis libérés par le tribunal de première instance. Deux autres étudiants ont été arrêtés le même jour au siège de la présidence et inculpés de complot et de possession d’une arme offensive. Ils ont été libérés sous caution et l’affaire était toujours en cours à la fin de l’année.
Le 21 septembre, la police a empêché l’Association des propriétaires et utilisateurs de terres de Malen (MALOA) d’organiser un rassemblement pacifique dans la ville de Pujehun. Ce rassemblement devait avoir lieu en même temps qu’une réunion entre des membres de la MALOA et le Comité de sécurité de district à l’occasion de la Journée internationale de lutte contre la monoculture d’arbres. La police a bloqué la route et a empêché la tenue du rassemblement. Elle a toutefois autorisé six membres à assister à la réunion.
En octobre, le Comité de sécurité de district a refusé d’autoriser la MALOA à organiser une réunion à Pujehun au motif que l’association n’était pas enregistrée dans la chefferie. Le chef traditionnel souverain refusait depuis 2013 de le faire, alors que l’association était immatriculée auprès du bureau d’enregistrement de Freetown.
DÉFENSEURES ET DÉFENSEURS DES DROITS HUMAINS
En février, le Réseau des défenseurs des droits humains-Sierra Leone (HRDN-SL), une coalition de défenseurs des droits humains, a présenté au bureau du procureur général une proposition de loi visant à protéger les défenseurs des droits humains.
DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS
Le 14 août, une coulée de boue dans le quartier de Regent, à Freetown, a fait plus de 400 morts et environ 3 000 sans-abri. La plupart des victimes vivaient dans des quartiers informels. Le manque de planification, l’absence de mise en oeuvre de la législation applicable et l’incapacité des autorités à garantir des logements convenables ont aggravé le bilan de la catastrophe [2]. L’État a apporté un soutien immédiat et fourni des abris temporaires aux victimes, mais les camps qui avaient été mis à la disposition de celles-ci ont été fermés à la mi-novembre. Des familles ont reçu de l’argent liquide et d’autres avantages pour les aider à se réinstaller, mais des groupes de la société civile et des rescapés ont affirmé que c’était insuffisant. À la fin de l’année, aucune enquête n’avait encore été ouverte sur les circonstances de la catastrophe.
En août, le Rapporteur spécial des Nations unies sur les incidences sur les droits de l’homme de la gestion et de l’élimination écologiquement rationnelles des produits et déchets dangereux s’est rendu en Sierra Leone. Il s’est inquiété des répercussions sur les droits humains des produits et déchets dangereux et a appelé le gouvernement à adopter de nouvelles lois et règlements en matière de réduction des déchets et d’inspection du travail et à faire appliquer la législation existante.
DROITS DES ENFANTS
En octobre, des organisations de la société civile ont une nouvelle fois demandé au gouvernement d’autoriser les filles enceintes à poursuivre leur scolarité dans le système classique et à passer leurs examens. Les dispositifs d’enseignement à temps partiel destinés aux jeunes filles enceintes, proposés trois jours par semaine avec un programme restreint, se sont terminés en juillet et devaient reprendre en janvier 2018. Après la naissance de leur enfant, nombre de ces jeunes filles ne pouvaient pas reprendre leur scolarité en raison du coût que représentaient les frais de garde, de scolarité ou d’autres dépenses connexes, comme les uniformes.
DÉTENTION
Les prisons étaient toujours surpeuplées, surtout en raison des périodes prolongées de détention provisoire, et étaient loin de satisfaire aux normes internationales. Des organisations de la société civile ont fait part de leurs préoccupations concernant les retards d’accès aux soins de santé pour les détenus ; l’insuffisance de nourriture et de produits de première nécessité ; les mauvaises conditions dans les cellules de garde à vue, en particulier les installations sanitaires inadaptées ; ainsi que les périodes de détention prolongées, contraires aux droits constitutionnels des détenus.
En novembre, des organisations de la société civile ont demandé la dépénalisation d’infractions mineures, comme le détournement frauduleux (endettement érigé en infraction) et le vagabondage, qui étaient utilisées de manière disproportionnée contre les femmes et les groupes marginalisés. Le fait que des personnes soient condamnées à des peines d’emprisonnement pour de telles infractions contribuait également à la surpopulation carcérale. La législation relative à ces infractions était en outre formulée de manière vague et autorisait les arrestations arbitraires.
En mai, de nouvelles règles concernant le cautionnement et la détermination des peines dans le but de réduire le recours à la détention provisoire ont été approuvées par la Commission sur les règles des tribunaux et sont devenues contraignantes.
ARRESTATIONS ET DÉTENTIONS ARBITRAIRES
Le 1er juin, Mohamed Kamaraimba Manasary, dirigeant du Parti de l’alliance démocratique, a été arrêté sur la base d’allégations selon lesquelles il était en possession d’un pistolet à impulsion électrique. Il a été inculpé de possession d’une arme offensive avant d’être libéré sous caution le 7 juin. Le 21 juin, ces poursuites ont été abandonnées et une nouvelle accusation de possession d’armes de petit calibre a été formulée à son encontre, au titre de la Loi de 2012 relative aux armes et aux munitions, qui ne porte pourtant pas spécifiquement sur les pistolets à impulsion électrique. Sa libération sous caution a été annulée et il a été détenu pendant une semaine supplémentaire avant d’être relâché le 28 juin. Son procès n’était pas terminé à la fin de l’année. Selon lui et ses avocats, son arrestation était motivée par des considérations politiques.
PEINE DE MORT
De nouvelles condamnations à la peine capitale ont été prononcées. En septembre, six policiers ont été condamnés à être fusillés par un peloton d’exécution pour complot et vol aggravé.
ÉVOLUTIONS LÉGISLATIVES, CONSTITUTIONNELLES OU INSTITUTIONNELLES
Le 10 novembre, le gouvernement a publié un Livre blanc en réponse aux recommandations de la Commission de révision de la Constitution. Il a rejeté 100 des 134 recommandations de la Commission, notamment l’abolition de la peine de mort et un certain nombre de dispositions constitutionnelles visant à protéger les droits économiques, sociaux et culturels, ainsi que l’égalité des droits entre les hommes et les femmes [3].