Rapport annuel 2018

Guatemala

République du Guatemala
Chef de l’État et du gouvernement : Jimmy Morales Cabrera

Des milliers de personnes ont cette année encore fui le Guatemala pour échapper aux inégalités et aux violences, importantes dans le pays. Les défenseurs des droits humains, en particulier ceux qui travaillaient sur les questions liées à la terre, au territoire et à l’environnement, étaient en grand danger et visés par des campagnes de diffamation. L’impunité et la corruption étaient toujours de mise, entamant la confiance du public à l’égard des autorités locales et entravant l’accès à la justice. Les récents progrès réalisés pour consolider le système de justice pénale et l’état de droit se heurtaient à des obstacles. D’importantes affaires de crimes de droit international commis dans le passé étaient toujours au point mort.

ÉVOLUTIONS LÉGISLATIVES, CONSTITUTIONNELLES OU INSTITUTIONNELLES

En août, Augusto Jordan Rodas a pris ses fonctions de procureur des droits humains. En novembre, les dernières dispositions pénales relatives à la peine de mort ont été déclarées inconstitutionnelles.

JUSTICE DE TRANSITION

Malgré des avancées dans les poursuites pénales relatives à certains crimes contre l’humanité commis pendant le conflit armé interne (1960-1996), les mesures visant à obtenir la vérité, la justice et des réparations étaient toujours au point mort. Par ailleurs, la grande majorité des affaires continuaient de subir des contretemps ou d’être retardées de manière injustifiée. Cinq anciens membres de l’armée, dont l’ancien chef du Haut Commandement de l’armée guatémaltèque, ont comparu devant la justice. Ils étaient inculpés de crimes contre l’humanité et de viol à l’encontre d’Emma Guadalupe Molina Theissen, et de la disparition forcée de son frère cadet, Marco Antonio Molina Theissen.
Les procédures pénales engagées contre d’anciens militaires pour des accusations liées à plusieurs affaires de disparitions forcées et d’homicides illégaux commis dans une base militaire aujourd’hui connue sous le nom de Creompaz, dans le département d’Alta Verapaz (nord du pays), étaient toujours au point mort. Des recours formés contre des décisions intéressant les droits des victimes étaient en instance et plusieurs militaires étaient toujours en fuite. Dans les deux cas, des victimes et des défenseurs des droits humains ont été intimidés et harcelés à l’intérieur comme à l’extérieur du tribunal et aussi en ligne. Après plusieurs vaines tentatives depuis 2015, les procès de José Efraín Ríos Montt, ancien président et commandant en chef des armées, et de Rodríguez Sánchez, ancien chef du renseignement militaire, ont repris en octobre.

IMPUNITÉ

Cette année encore, des juges et des procureurs ont été la cible de manoeuvres d’intimidation et de pressions. Les mesures de lutte contre l’impunité risquaient fortement d’être mises à mal par une résistance accrue de certains acteurs politiques. Une réforme constitutionnelle soumise au Congrès en novembre 2016, visant à consolider les initiatives en faveur de la justice et de l’obligation de rendre des comptes et à renforcer l’indépendance de l’appareil judiciaire, n’avait pas été approuvée à la fin de l’année. Des manifestations de masse ont eu lieu en août et en septembre, et le pays a été confronté à une crise politique lorsque plusieurs membres du gouvernement ont démissionné en septembre à la suite de la tentative du président Morales de destituer le chef de la Commission internationale contre l’impunité au Guatemala (un organe indépendant créé en 2006 par l’ONU et le gouvernement guatémaltèque pour renforcer l’état de droit après le conflit).

DÉFENSEURES ET DÉFENSEURS DES DROITS HUMAINS

Les défenseurs des droits humains ont été constamment en butte à des menaces, des campagnes de dénigrement, des actes d’intimidation et des agressions.
D’après l’ONG guatémaltèque Unité de protection des défenseures et défenseurs au Guatemala, les personnes qui travaillaient sur les droits relatifs à la terre, au territoire et à l’environnement sont celles qui ont été visées par le plus grand nombre d’attaques. En janvier, Sebastián Alonso Juan a été tué lors d’une manifestation pacifique contre la construction d’installations hydroélectriques dans le village d’Ixquisis, rattaché à San Mateo Ixtatán.
En outre, les défenseurs des droits humains étaient constamment soumis à des campagnes de dénigrement destinées à les avilir et à discréditer leur travail, dans le but de les forcer à abandonner leurs activités légitimes. À partir de la fin du mois de juin, les membres du Centre d’action juridique, environnementale et sociale du Guatemala ont été la cible de campagnes de diffamation après avoir contesté en justice la licence d’exploitation de la compagnie minière Minera San Rafael à San Rafael Las Flores. Le système judiciaire a été régulièrement détourné pour cibler et harceler des défenseurs des droits humains en vue de les réduire au silence et de briser leurs mouvements et leurs organisations.
Une instruction générale du parquet contenant des directives pour enquêter efficacement sur les attaques contre les défenseurs des droits humains est restée à l’étude, dans l’attente de son approbation, pendant plusieurs mois. Malgré quelques avancées, le processus d’élaboration, en consultation avec la société civile, d’une politique publique globale pour la protection des défenseurs des droits humains n’était toujours pas terminé à la fin de l’année.

CONFLITS FONCIERS

En septembre, la Cour suprême a reconnu l’absence de consultation préalable de la population indigène xinca de Santa Rosa et Jalapa, qui a souffert des répercussions négatives des activités de la mine de San Rafael Las Flores. La Cour a ordonné au ministère de l’Énergie et des Mines de mener une consultation, mais elle a aussi autorisé la compagnie à poursuivre ses opérations d’extraction. Par conséquent, un recours a été formé devant la Cour constitutionnelle ; il était toujours en instance à la fin de l’année.
En septembre, la Commission interaméricaine des droits de l’homme a ordonné au Guatemala de protéger les droits d’environ 400 personnes, dont des enfants et des personnes âgées, qui étaient bloquées depuis début juin, dans de mauvaises conditions sanitaires, à la frontière nord avec le Mexique. Elles avaient quitté leur communauté, située à Laguna Larga, quelques heures avant une opération d’expulsion massive. À la fin de l’année, les autorités n’avaient toujours pas facilité leur retour.

DROITS DES PERSONNES RÉFUGIÉES OU MIGRANTES

Des milliers de Guatémaltèques ont émigré aux États-Unis en passant par le Mexique pour échapper aux inégalités et à la violence qui touchent divers groupes marginalisés dans le pays. D’après les chiffres du Haut- Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), 18 764 ressortissants guatémaltèques ont demandé l’asile dans d’autres pays entre janvier et octobre. Les enfants non accompagnés venant du Guatemala constituaient le groupe le plus nombreux parmi les personnes appréhendées à la frontière avec les États- Unis. Alors que de nombreuses personnes continuaient d’être renvoyées de force au Guatemala, aucun mécanisme ni protocole global n’était en place pour répondre aux besoins de ceux qui étaient ainsi forcés de retrouver des situations et des dangers qu’ils avaient justement voulu fuir.

DROITS DES ENFANTS

En mars, 41 filles sont mortes dans l’incendie du foyer d’accueil public Virgen de la Asunción, dans la municipalité de San José Pinula, alors qu’elles étaient enfermées dans une salle de classe. Ces décès ont révélé le manque de mesures adéquates et suffisantes pour protéger les droits des enfants au Guatemala. Un certain nombre de fonctionnaires ont été inculpés, mais des retards ont été signalés concernant l’enquête.
Le nombre élevé de grossesses chez les adolescentes restait particulièrement préoccupant. L’Observatoire de la santé sexuelle et reproductive a enregistré, entre janvier et septembre, 69 445 naissances d’enfants nés de filles et de jeunes femmes âgées de 10 à 19 ans.

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