Rapport annuel 2018

Haïti

République d’Haïti
Chef de l’État : Jovenel Moïse (a remplacé Jocelerme Privert en février)
Chef du gouvernement : Jack Guy Lafontant (a remplacé Enex Jean-Charles en mars)

Les femmes et les filles étaient toujours en butte à des violences, en particulier d’ordre sexuel. Les parlementaires ont tenté d’adopter des lois ouvertement discriminatoires à l’égard des personnes LGBTI.

CONTEXTE

Jovenel Moïse a été investi président en février après avoir été élu en novembre 2016 à la suite d’une crise électorale. Un nouveau Premier ministre a été désigné.
En mars, à la demande du gouvernement haïtien, le mandat de l’expert indépendant des Nations unies sur la situation des droits de l’homme en Haïti a été révoqué.
En octobre, la résolution n° 2350 du Conseil de sécurité de l’ONU a mis fin à la Mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH), en place depuis 13 ans. Les Casques bleus ont quitté le pays après des années de polémique concernant leur responsabilité présumée dans l’épidémie de choléra de 2010 et de nombreux signalements de violences sexuelles. La MINUSTAH a été remplacée par la Mission des Nations unies pour l’appui à la justice en Haïti (MINUJUSTH), dont le rôle est de renforcer l’état de droit.
Les autorités ont pris des mesures pour reconstituer l’armée, qui avait été dissoute en 1995. On ignorait quel système de contrôle serait mis en place pour recruter les nouveaux soldats compte tenu des nombreuses violations des droits humains imputées aux précédentes forces armées.

PERSONNES DÉPLACÉES

Selon l’Organisation internationale pour les migrations, en juin, 37 867 personnes étaient toujours déplacées à l’intérieur du pays à la suite du séisme de 2010. La plupart d’entre elles vivaient dans des camps de fortune.

DISCRIMINATION – LES PERSONNES APATRIDES

En mars, le Parlement a voté en faveur de l’adhésion du pays à la Convention de 1954 relative au statut des apatrides et à la Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie [ONU], conformément aux recommandations formulées dans le cadre de l’Examen périodique universel du pays réalisé en 2016 par les Nations unies [1]. Haïti n’avait toujours pas signé ou ratifié ces conventions à la fin de l’année 2017.

DROITS DES PERSONNES RÉFUGIÉES OU MIGRANTES

En juillet, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies a signalé une augmentation des cas d’expulsion à la frontière dominico-haïtienne.
Bien que le gouvernement haïtien lui ait demandé une nouvelle prolongation en octobre, le Département américain de la sécurité intérieure a annoncé en novembre sa décision de mettre un terme au statut de protection temporaire (TPS) dont bénéficiaient près de 60 000 Haïtiens risquant d’être expulsés des États-Unis. Le TPS pour les ressortissants haïtiens devait prendre fin officiellement en janvier 2018 ; l’échéance effective sera toutefois différée de 18 mois, ce qui, selon les autorités américaines, devrait « permettre une transition harmonieuse jusqu’à la disparition finale de ce statut le 22 juillet 2019. » Cette protection temporaire est accordée aux ressortissants de certains États qui ne peuvent pas rentrer chez eux en toute sécurité en raison de la situation dans leur pays.

DROIT À LA SANTÉ – ÉPIDÉMIE DE CHOLÉRA

Entre janvier et juin, 7 623 nouveaux cas présumés de choléra et 70 décès liés à la maladie ont été recensés, soit une diminution de plus de 60 % par rapport à la même période en 2016. Depuis le début de l’épidémie en 2010, plus de 800 000 personnes avaient été infectées par la maladie et près de 10 000 en étaient mortes, d’après les autorités.
La « nouvelle approche de l’ONU sur le choléra en Haïti », présentée en 2016, était gravement sous-financée. Les survivants de l’épidémie n’ont bénéficié d’aucune consultation, contrairement à ce qui était prévu. Les programmes d’aide aux personnes ont par conséquent été suspendus. Les défenseurs des victimes ont protesté, indiquant que cette situation était en contradiction avec le droit à réparation.
Selon les autorités, près de 70 % des Haïtiens n’avaient pas accès à des services de santé.

VIOLENCES FAITES AUX FEMMES ET AUX FILLES

Les violences contre les femmes et les filles, notamment d’ordre sexuel, étaient très répandues, même si le nombre de cas signalés était en deçà de la réalité.
En avril, le gouvernement a présenté devant le Parlement une proposition de réforme exhaustive du Code pénal, contenant de nouvelles dispositions pour lutter contre les violences sexuelles et prévoyant notamment la criminalisation du viol conjugal. En juillet, l’ONG Médecins sans frontières a indiqué que, parmi les victimes de violences sexuelles et liées au genre traitées dans son hôpital spécialisé de la capitale, Port-au- Prince, entre mai 2015 et mars 2017, 77 % étaient âgées de moins de 25 ans et 53 % de moins de 18 ans.

DROITS DES LESBIENNES, DES GAYS ET DES PERSONNES BISEXUELLES, TRANSGENRES OU INTERSEXUÉES

Le Sénat a soutenu des propositions de loi discriminatoires à l’égard des personnes LGBTI ; ces textes étaient en attente d’approbation par la Chambre des députés à la fin de l’année. En juillet, le Sénat a voté pour la mise en place de certificats de « bonnes moeurs » qui ne pourraient pas être octroyés aux personnes considérées comme « homosexuelles ». En août, il a approuvé une loi interdisant le mariage entre personnes du même sexe, ainsi que le soutien ou la promotion de l’« homosexualité ».

DÉFENSEURES ET DÉFENSEURS DES DROITS HUMAINS

Selon certaines informations, les défenseurs des droits humains David Boniface et Juders Ysemé craignaient pour leur vie, à la suite de la mort soudaine en mars de leur collègue Nissage Martyr. Celui-ci est mort le lendemain du dépôt par les trois hommes, aux États-Unis, d’une plainte pour violations graves des droits humains contre Jean Morose Viliena, ancien maire des Irois, leur ville natale en Haïti. Jean Morose Viliena avait fui Haïti pour les États-Unis en 2009. Les trois hommes ont affirmé que l’ancien maire ou d’autres personnes agissant pour son compte les avaient menacés de mort et agressés violemment à plusieurs reprises depuis 2007. Cependant, les autorités n’ont pas mis en place les mesures de protection adéquates. La Commission interaméricaine des droits de l’homme avait pourtant prononcé en 2015 des mesures conservatoires en vue d’assurer la sécurité des trois hommes [2].
Sanièce Petit Phat a indiqué avoir reçu des menaces de mort parce qu’elle défend les droits des femmes et des filles [3].

DROIT À L’ÉDUCATION

En juin, le Groupe consultatif ad hoc sur Haïti du Conseil économique et social des Nations unies a critiqué l’inefficacité du système éducatif du pays, soulignant que la majorité des écoles étaient gérées par le secteur privé, « ce qui fait de l’éducation un système coûteux et à but lucratif, inaccessible à de nombreuses familles ». Plus de la moitié des plus de 15 ans étaient analphabètes.

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