Rapport annuel 2018

Nicaragua

République du Nicaragua
Chef de l’État et du gouvernement : Daniel Ortega Saavedra

Les homicides liés au genre étaient caractérisés par une plus grande violence. Cette année encore, des défenseurs des droits humains ont été la cible d’attaques. L’interdiction de toute forme d’avortement demeurait en vigueur. Les auteurs de violences contre les indigènes jouissaient toujours de l’impunité. Les autorités continuaient de refuser de mettre en place un processus de consultation véritablement efficace pour les personnes susceptibles de subir les conséquences de la construction d’un grand canal interocéanique.

CONTEXTE

En janvier, Daniel Ortega a entamé son troisième mandat consécutif à la tête du pays. Son épouse, Rosario Murillo, a pris ses fonctions en tant que vice-présidente. Il s’agissait de son premier mandat.

DROITS DES FEMMES

L’ONG Catholiques pour le droit de décider a recensé 55 féminicides entre janvier et décembre. D’après cette organisation, ces meurtres étaient caractérisés par une violence accrue par rapport aux années précédentes, et étaient plus souvent le fait d’auteurs agissant en groupes.
En juin 2017, l’Assemblée nationale a approuvé une modification de la Loi intégrale sur les violences faites aux femmes. Cette modification visait à restreindre la définition du féminicide à la sphère privée et aux relations entre époux ou partenaires. Il a été reproché à cette nouvelle définition de nier la réalité des faits, des féminicides étant aussi commis dans la sphère publique.
L’avortement restait interdit en toutes circonstances. Selon le Fonds des Nations unies pour la population (FNUAP), le Nicaragua affichait toujours un taux de mortalité maternelle et un taux de grossesse chez les adolescentes parmi les plus élevés de la région Amériques.

DROITS DES PEUPLES AUTOCHTONES

L’impunité restait de mise pour les crimes tels que les meurtres, les viols, les enlèvements, les disparitions forcées, les menaces de mort et les déplacements forcés visant des membres des peuples indigènes dans la région autonome de l’Atlantique nord, bien que la Commission interaméricaine et la Cour interaméricaine des droits de l’homme aient toutes deux ordonné au Nicaragua, en 2015, d’adopter toutes les mesures nécessaires pour enquêter sur ces crimes.

DÉFENSEURES ET DÉFENSEURS DES DROITS HUMAINS

Cette année encore des femmes défenseures des droits humains ont été victimes d’agressions, qui ont été dénoncées lors d’une audience publique de la Commission interaméricaine des droits de l’homme en septembre. Des organisations de femmes de la société civile ont également signalé des menaces de mort, des détentions arbitraires et des agressions menées avec la complicité ou l’assentiment de représentants de l’État.
En mars, la Cour interaméricaine des droits de l’homme a rendu sa décision dans l’affaire Aosta et al. c. Nicaragua. Elle a jugé l’État nicaraguayen responsable des violations des droits à la justice, à la vérité et à l’intégrité physique subies par la défenseure des droits humains María Luisa Acosta à la suite du meurtre de son mari, Francisco García Valle [1]. À la fin de l’année les autorités n’avaient encore pris aucune mesure pour se conformer à cette décision, notamment pour mettre un terme à l’impunité qui a prévalu dans cette affaire et garantir le respect des droits à la justice et à la vérité de María Luisa Acosta.
En août, la Commission interaméricaine des droits de l’homme a prononcé des mesures conservatoires en faveur de Francisca Ramírez et des membres de sa famille en raison des menaces de mort, des actes d’intimidation et des agressions dont ils ont fait l’objet en représailles des activités menées par la militante pour s’opposer au projet de construction du grand canal interocéanique.

GRAND CANAL INTEROCÉANIQUE

Aucun véritable processus de consultation n’avait été mis en place à la fin de l’année pour les personnes risquant de subir les conséquences de la construction du grand canal interocéanique, au mépris des principes internationaux en matière de droits humains [2].
D’après le Centre d’aide juridique aux peuples indigènes, le droit des populations indigènes et afro-nicaraguayennes du territoire rama et kriol à être consultées et à donner ou refuser de donner leur consentement préalable, libre et éclairé n’a pas été respecté dans le cadre de ce projet, malgré plusieurs recours en justice. Des organisations de la société civile ont souligné qu’étant donné l’ampleur du projet – qui comprend la construction d’un oléoduc et de deux ports, entre autres infrastructures –, des centaines de milliers de personnes seraient affectées et risqueraient d’être chassées de chez elles.
Des organisations de défense des droits humains et des groupes de petits agriculteurs ont continué de demander l’abrogation de la Loi 840, qui régit la construction du canal, au motif qu’elle ne prévoit pas de garanties suffisantes en matière de protection des droits des peuples indigènes. Ces demandes sont restées lettre morte et les autorités n’avaient toujours pas instauré, à la fin de l’année, de véritable dialogue avec les communautés susceptibles d’être concernées par ce projet.

LIBERTÉ D’EXPRESSION, D’ASSOCIATION ET DE RÉUNION

En novembre, les élections municipales ont été marquées par la violence : cinq personnes au moins auraient été tuées et 30 autres blessées dans six municipalités.
Des informations ont également fait état d’un recours à la force excessif et injustifié par la police face à des personnes qui manifestaient pacifiquement contre le projet de construction du canal. Des manifestants auraient également fait l’objet d’arrestations arbitraires. Des défenseurs des droits humains ont signalé avoir subi des actes de harcèlement et d’intimidation en raison de leur opposition au projet.

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