Rapport annuel 2018

Paraguay

République du Paraguay
Chef de l’État et du gouvernement : Horacio Manuel Cartes Jara

Les peuples indigènes étaient toujours privés de leurs droits à la terre et au respect du principe de consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause, sur les projets les concernant. Un projet de loi visant à éliminer toutes les formes de discrimination était en attente d’adoption à la fin de l’année. Des informations ont fait état de persécutions visant des défenseurs des droits humains et des journalistes sur fond de violations du droit à la liberté d’expression, ainsi que de cas de recours à une force excessive de la part de la police pour réprimer des manifestations.

LIBERTÉ D’EXPRESSION ET DE RÉUNION

En mars, Menchi Barriocanal et Oscar Acosta, deux journalistes, ont dénoncé une tentative secrète des sénateurs de modifier la Constitution en vue de permettre la réélection du président. En réaction, des manifestations ont éclaté le 31 mars et le 1er avril, et certains manifestants ont mis le feu au bâtiment du Congrès.
Le président Horacio Manuel Cartes Jara et des représentants du parti au pouvoir ont accusé publiquement les deux journalistes d’incitation à la violence et les ont menacés d’arrestation. D’autres professionnels des médias qui avaient critiqué la réaction du gouvernement face aux manifestations ont également indiqué avoir été harcelés par les autorités.
Le 1er avril, Rodrigo Quintana, un militant de l’opposition, a été tué par la police lors de ces manifestations. Des dizaines de personnes ont été blessées, plus de 200 ont été arrêtées, et des organisations locales ont signalé des allégations de torture et d’autres formes de mauvais traitements par les forces de sécurité.
En juin, face aux affirmations selon lesquelles 23 journalistes auraient été attaqués par la police pendant les manifestations de mars-avril, la police nationale a adopté un protocole de sécurité pour les journalistes en danger.

SURVEILLANCE INTERNATIONALE

En septembre, le Comité des Nations unies contre la torture a publié ses observations finales et ses recommandations sur le Paraguay, lui préconisant entre autres de veiller à ce que toutes les personnes privées de leur liberté bénéficient, dès le début de leur détention, de toutes les garanties juridiques, notamment de leur droit de consulter un avocat de leur choix, d’être rapidement examinées par un médecin dans le respect de la confidentialité et de leur vie privée et de consulter un professionnel de la santé indépendant si elles en font la demande.
Le Comité a également recommandé que des enquêtes indépendantes et impartiales soient menées sans délai sur toutes les allégations de recours excessif à la force, de détention arbitraire et d’actes de torture ou autres mauvais traitements par des responsables de l’application des lois, et notamment sur les allégations concernant les manifestations du 31 mars et du 1er avril. Il a demandé aux autorités de veiller à ce que les responsables présumés soient traduits en justice et à ce que les victimes obtiennent des réparations satisfaisantes.
Le Comité a par ailleurs préconisé une enquête indépendante, efficace, exhaustive et impartiale sur les allégations de recours disproportionné à une force meurtrière et d’actes de torture et de mauvais traitements lors des affrontements de Curuguaty en 2012, ainsi que sur les accusations de violations du droit à une procédure régulière dans le cadre des procédures judiciaires engagées contre 11 paysans locaux dans cette affaire.
Le 16 août, le Congrès a adopté une loi prévoyant la mise en oeuvre du Statut de Rome de la CPI et garantissant sa coopération avec cette juridiction. Le 23 août, l’exécutif a transmis au Congrès, pour ratification, les amendements de Kampala sur le crime d’agression et sur l’article 8 du Statut de Rome.

DROITS DES PEUPLES AUTOCHTONES

Des négociations ont été engagées entre le gouvernement et des représentants des communautés indigènes ayoreos totobiegosodes, qui vivent dans un isolement volontaire. Ces négociations ont pour but de mettre en oeuvre les mesures conservatoires prononcées par la Commission interaméricaine des droits de l’homme (CIDH) afin de protéger ces peuples de ceux qui voudraient mettre la main sur leurs terres ancestrales, et de parvenir à un règlement à l’amiable dans le cadre d’une affaire portée devant la CIDH pour violation de leurs droits.
La communauté yakye axa n’avait toujours pas pu se réinstaller sur ses terres, bien que la Cour interaméricaine des droits de l’homme ait ordonné au gouvernement de construire une route d’accès. L’affaire de l’expropriation des terres de la communauté sawhoyamaxa, dans laquelle la CIDH avait rendu une décision similaire en faveur de ce peuple, n’avait toujours pas été traitée par le gouvernement.

DROITS EN MATIÈRE DE LOGEMENT ET EXPULSIONS FORCÉES

En septembre, la Chambre des députés a validé le veto opposé par l’exécutif à une proposition de loi qui aurait exproprié les habitants actuels de 900 hectares de terres afin de les rendre à la communauté paysanne guahory, qui en avait été expulsée de force en 2016.
En octobre, des organisations de défense des droits humains ont signalé qu’un an après l’expulsion forcée de la communauté avá guaraní de Sauce, en lien avec le barrage hydroélectrique d’Itaipu, aucun progrès n’avait été constaté concernant la restitution de ses terres. En conséquence, la communauté s’est retirée du dialogue avec les autorités.

DÉTENTION

En septembre, deux garçons détenus dans un centre de détention pour mineurs de la ville de Ciudad del Este sont morts dans un incendie et 12 autres ont été blessés. Le Mécanisme national de prévention de la torture avait signalé en 2016 le manque de dispositifs de protection contre les incendies et l’absence de protocole d’évacuation dans ce centre.

DROITS SEXUELS ET REPRODUCTIFS

En juillet, le président Horacio Manuel Cartes Jara a opposé son veto au projet de loi n° 5833/2017, qui prévoyait la mise en place d’un registre de l’état civil pour les « foetus morts in utero ». En août, la Chambre des députés et le Sénat ont outrepassé le veto et ont adopté cette loi, qui a été promulguée par le président à la fin de l’année. Ce texte a été dénoncé par des organisations de défense des droits humains, qui estiment qu’il introduit une protection presque absolue du foetus, qui pourrait prévaloir sur les droits à la vie, à l’intégrité physique et à la santé des femmes et des filles.
En octobre, le ministère de l’Éducation et des Sciences a adopté une résolution interdisant l’utilisation dans l’enseignement public de matériel éducatif sur la « théorie du genre », ce qui a eu pour effet, dans la pratique, de restreindre la possibilité d’utiliser des contenus sur les droits reproductifs, la sexualité et la non-discrimination.

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