Les droits humains en 2019 dans les Amériques | Résumé

Les inégalités, la corruption, la violence, la dégradation de l’environnement, l’impunité et l’affaiblissement des institutions sont demeurés des réalités communes dans toute la région, causant des violations des droits fondamentaux de millions de personnes.

Plusieurs pays de la région ont été ébranlés par de vastes mouvements de protestation durant l’année : les gens sont descendus dans la rue pour réclamer le respect de l’obligation de rendre des comptes et le respect de leurs droits humains. La plupart des gouvernements ont réagi, à quelques exceptions près, en réprimant les manifestations et en utilisant une force excessive, tentant ainsi d’étouffer les revendications en faveur d’une plus grande justice sociale. Au lieu de mettre en place des mécanismes pour promouvoir le dialogue et apporter des solutions aux préoccupations de la population, les autorités ont recouru à la violence lors des opérations de police liées aux manifestations et, dans certains cas, ont renforcé la militarisation des opérations de maintien de l’ordre public. Au moins 210 personnes ont perdu la vie à cause des violences qui ont été commises dans le contexte des mouvements de protestation au cours de l’année.

Les Amériques restaient la région la plus dangereuse au monde pour les défenseurs et défenseures des droits humains et pour les journalistes. En 2019, 208 personnes ont été tuées en raison de leurs activités de défense des droits humains, et un nombre bien plus important encore ont été harcelées, traitées comme des délinquantes ou soumises à un déplacement forcé. Dans certains pays, des journalistes ont cette année encore été en butte au harcèlement et à des arrestations arbitraires, voire ont été victimes d’exécutions extrajudiciaires. Ainsi, au Mexique, au moins 10 journalistes ont été tués au cours de l’année en raison de leur travail.

Les militant·e·s des droits humains et les responsables autochtones œuvrant à la défense des droits liés à la terre, au territoire et à l’environnement faisaient partie des personnes les plus exposées à la violence et au harcèlement. En ce qui concerne les projets d’aménagement et l’impact considérable des industries extractives, la plupart des gouvernements n’ont pas respecté ni garanti le droit des peuples autochtones à un consentement préalable libre et éclairé à propos de l’utilisation de leurs terres ancestrales.

L’impunité pour les violations des droits humains est demeurée la norme partout dans la région. En 2019, l’un des mécanismes les plus innovants qui ait été créé pour lutter contre l’absence de justice, la Commission internationale contre l’impunité au Guatemala (CICIG), a été supprimé par le gouvernement guatémaltèque.

L’année 2019 a aussi été marquée par la présence et la puissance croissantes de divers mouvements de défense des droits des femmes. Malgré cela, les violences liées au genre restaient répandues dans les Amériques. Les défenseures des droits des femmes, les travailleuses du sexe, les migrantes et les réfugiées, les Afro-américaines et les femmes indigènes, ainsi que les lesbiennes et les femmes bisexuelles, transgenres et intersexes, entre autres, étaient particulièrement exposées au risque de subir des violences liées au genre et des actes de torture en raison de multiples formes de discrimination.

En novembre 2019, l’Observatoire de l’égalité de genre de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC) a publié ses informations les plus récentes sur les féminicides (meurtres de femmes liés au genre) en se basant sur les statistiques officielles de 16 pays d’Amérique latine et de neuf pays des Caraïbes. Selon ces chiffres, au moins 3 500 femmes ont été tuées en 2018 en raison de leur genre. Ce nombre est en réalité sans doute beaucoup plus élevé, car 10 pays seulement ont fourni des statistiques sur les femmes tuées par leur partenaire ou ancien partenaire.

En 2019, plusieurs millions de personnes dans la région des Amériques ont tenté de trouver la sécurité en dehors de leur pays. À la fin de l’année, la crise persistante des droits humains au Venezuela avait fait presque 4,8 millions de personnes réfugiées, ce triste bilan n’étant surpassé à l’échelle mondiale que par un seul autre pays : la Syrie. La plupart des réfugié·e·s vénézuéliens vivaient dans des pays voisins du Venezuela. Si quelques pays d’Amérique latine ont mis en place des mécanismes ad hoc afin de régulariser la situation de ces personnes au regard de la législation sur l’immigration, d’autres ont instauré des obstacles inutiles et illégaux à l’entrée sur leur territoire, mettant en danger les personnes demandeuses d’asile.

Des ressortissant·e·s honduriens, guatémaltèques et salvadoriens fuyant la violence généralisée dans leur pays ont cette année encore tenté de gagner les États-Unis. La forte augmentation constatée ces dernières années du nombre de personnes de nationalité cubaine, nicaraguayenne et vénézuélienne dont le dossier était en attente d’examen par les tribunaux chargés des questions d’immigration aux États-Unis s’est poursuivie en 2019. Le gouvernement de Donald Trump a continué, au mépris des obligations internationales des États-Unis, d’attaquer et de saper le principe de l’asile en appliquant des mesures et des politiques visant à empêcher les personnes demandeuses d’asile de franchir la frontière avec le Mexique.

Le gouvernement mexicain a déployé des soldats à la frontière mexico-américaine – une mesure qui n’était pas sans rappeler certaines initiatives prises par les États-Unis ces dernières années. Il a également accepté, dans le cadre d’un accord signé avec les États-Unis afin d’éviter l’imposition de taxes douanières, de recevoir et d’accueillir des personnes demandeuses d’asile renvoyées de force par les autorités américaines en attendant que leur dossier soit examiné par l’administration américaine. En Amérique centrale, au moins 70 000 personnes ayant fui la crise persistante des droits humains au Nicaragua vivaient au Costa Rica, où il leur était toujours très difficile d’accéder à la procédure d’asile et aux services de première nécessité.

Manifestations, répression et militarisation

L’année 2019 a été marquée par des mouvements massifs de protestation partout dans la région. Dans de nombreux pays, tels que la Bolivie, le Chili, la Colombie, l’Équateur, Haïti, le Honduras, le Nicaragua et le Venezuela, les principaux acteurs de ces mouvements de mobilisation ont été des jeunes, des personnes issues de milieux sociaux défavorisés et des femmes. À quelques exceptions près, ces manifestations ont été très largement pacifiques.

Cependant, l’année a aussi été marquée par l’incapacité des gouvernements à canaliser le mécontentement des populations et à répondre à leurs revendications concernant leurs droits. Ils ont en lieu et place eu recours à la répression et à une force excessive, utilisant notamment la force meurtrière de façon intentionnelle, et ont commis d’autres violations des droits humains.

Principales causes des manifestations de masse

Au cours de l’année, dans toute la région, des personnes majoritairement jeunes et reflétant une grande diversité ont manifesté en masse pour réclamer des mesures au sujet des droits des femmes, de la crise climatique et de l’égalité des droits pour les lesbiennes, les gays et les personnes bisexuelles, transgenres ou intersexes (LGBTI). De très nombreuses manifestations contre les gouvernements ont également eu lieu, avec des revendications allant de la lutte contre la corruption au droit de vote, en passant par l’égalité d’accès à l’éducation, un niveau de vie satisfaisant et un accès suffisant à la santé.

Dans beaucoup de pays, tels que le Chili, la Colombie, l’Équateur, Haïti et le Honduras, les manifestations ont été déclenchées par des mesures politiques et économiques menaçant la jouissance des droits économiques et sociaux et creusant les inégalités. En Bolivie, les manifestations ont principalement été provoquées par les accusations de fraude électorale entourant l’élection présidentielle. Au Venezuela, dans le contexte de l’urgence humanitaire frappant le pays, les manifestant·e·s ont continué de demander le respect de leurs droits politiques, l’accès à la justice et l’accès aux droits économiques et sociaux. Au Nicaragua, les manifestant·e·s ont réclamé la fin de la répression persistante, la justice pour les victimes de violations des droits humains et la liberté pour les personnes détenues en raison de leur opposition légitime au régime politique en place.

Les clivages politiques se sont accrus dans la région, reflétant un sentiment général de désillusion à l’égard des gouvernements et des élites, quelle que soit leur tendance politique. Les gens ont manifesté parce qu’ils estimaient que celles et ceux qui les représentaient étaient de plus en plus coupés de leurs besoins et de leurs revendications, notamment à cause de la corruption. Ils se sentaient également exclus des processus décisionnels, qui aboutissaient souvent à des politiques désavantageant de façon disproportionnée les personnes vivant dans la pauvreté ou appartenant à des milieux modestes, les femmes et les filles, ainsi que les peuples autochtones et les jeunes.

Le mécontentement a été alimenté par le fait que l’Amérique latine et les Caraïbes demeuraient les régions les plus inégalitaires et les plus violentes au monde, selon les estimations des Nations unies. La pauvreté a encore gagné du terrain en 2019 (touchant 31 % de la population, selon les estimations de la CEPALC), les inégalités ont continué de régresser mais de façon marginale, et la croissance économique a été presque nulle (0,1 % selon la CEPALC). Dans ce contexte, l’accès aux droits économiques et sociaux tels que l’éducation, la santé et le logement a été très inégalitaire. Le montant des dépenses sociales publiques a légèrement augmenté dans la plupart des pays, mais dans une mesure malheureusement insuffisante pour atteindre les objectifs définis dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030.

La réaction des états face aux manifestations : la répression plutôt que le dialogue

L’ampleur des manifestations, leur diversité, leur portée géographique et la large participation de la population à ces mouvements de protestation ont pris par surprise de nombreux gouvernements dans les Amériques, et mis à l’épreuve leur capacité à établir un dialogue politique avec leurs ressortissant·e·s. Ils ont pour la plupart réagi en utilisant une force injustifiée et excessive, recourant intentionnellement à la force meurtrière dans certains cas, ainsi qu’en instaurant l’« état d’urgence » ou des « mesures d’exception » qui menaçaient les droits à la liberté d’expression et de réunion pacifique. Ces réactions violentes ont intensifié le mécontentement de la population et poussé davantage de personnes encore à descendre dans la rue.

Au Venezuela, en raison de l’aggravation de la situation d’urgence humanitaire, plusieurs milliers de personnes ont manifesté du 21 au 25 janvier pour demander un changement de gouvernement. Au moins 47 personnes sont mortes dans le cadre de ces manifestations, toutes des suites de blessures par balle. Selon les informations disponibles, 39 au moins ont été tuées par des membres des forces gouvernementales ou par des tiers agissant avec leur assentiment. Au moins 11 d’entre elles auraient été victimes d’une exécution extrajudiciaire. Plus de 900 personnes ont été arrêtées, dont des enfants et des adolescent·e·s. Les formes de répression observées en 2019 étaient semblables aux pratiques répressives utilisées contre la population civile depuis 2014 et représentaient autant de raisons d’affirmer que les attaques systématiques et généralisées contre les civils au Venezuela étaient susceptibles de constituer des crimes contre l’humanité.

En Haïti, durant le seul mois de février, 41 personnes ont perdu la vie et 100 autres ont été blessées dans le contexte des manifestations. Selon les Nations unies, entre mi-septembre et la fin du mois d’octobre, 42 autres personnes ont été tuées, dont 19 au moins par les forces de sécurité, semble-t-il. La police a eu recours à une force excessive à de multiples reprises lors des manifestations antigouvernementales du mois d’octobre.

Au Honduras, au moins six personnes ont été tuées, et plusieurs dizaines d’autres blessées, dans le cadre de la répression des manifestations entre avril et juin. La plupart ont été touchées par des tirs des forces de sécurité, notamment de l’armée. En Équateur, après avoir déclaré l’état d’urgence en octobre, le gouvernement a autorisé les forces armées à intervenir face aux manifestations de grande ampleur. Huit personnes au moins ont été tuées et 1 340 autres blessées dans le cadre du mouvement de protestation.

En Bolivie, le gouvernement a également instauré l’état d’urgence quand des manifestations ont éclaté à la suite de l’élection présidentielle d’octobre, certaines en soutien au président alors en poste, Evo Morales, et d’autres contre lui. Selon certaines informations, la police nationale a utilisé une force excessive et injustifiée contre les personnes qui manifestaient.

En novembre, la publication d’un rapport de l’Organisation des États américains pointant de graves irrégularités dans le scrutin a exacerbé la contestation, et été suivie d’appels à la démission du président Evo Morales, y compris de la part de certains de ses soutiens. Les forces armées ont « suggéré » à Evo Morales de démissionner afin de « pacifier le pays » – ce qu’il a fait le jour même. Deux jours après, Jeanine Añez a endossé les fonctions de présidente par intérim et pris le décret 4078, qui prévoit la participation des forces armées aux opérations de maintien de l’ordre et garantit l’immunité pour les violations des droits humains.

En application de ce décret, la police nationale et les forces armées ont mené des opérations conjointes de maintien de l’ordre lors des manifestations, et des informations ont fait état d’une utilisation excessive et injustifiée de la force contre des manifestant·e·s. La présence de protestataires armés a également été signalée. À la fin de l’année, au moins 35 personnes avaient été tuées dans le cadre des manifestations. Le décret 4078 a été abrogé le 27 novembre, mais des violations des droits humains ont continué d’être signalées.

Au Chili, les manifestations ont débuté mi-octobre et les forces gouvernementales, principalement les forces armées et les carabineros (police nationale), ont mené des attaques de grande ampleur contre les manifestant·e·s ; quatre d’entre eux ont été tués, tandis que d’autres ont été torturés ou grièvement blessés. Parmi les personnes blessées, plus de 350 ont subi de graves lésions aux yeux. En Colombie, où des manifestations ont éclaté en novembre, un jeune homme de 18 ans est mort des suites de blessures à la tête causées par des tirs de munitions à létalité réduite.

Accès à la justice et lutte contre l’impunité

L’impunité a continué d’être la norme plutôt que l’exception, tant pour les crimes de droit international et les violations des droits humains actuels que pour ceux commis par le passé.

Au Guatemala, après plusieurs tentatives, le gouvernement a finalement réussi à mettre un terme définitif au mandat de la Commission internationale contre l’impunité au Guatemala, qui avait obtenu des résultats sans précédent en menant des enquêtes sur la corruption généralisée et les atteintes aux droits fondamentaux. Parallèlement, le Congrès a examiné une proposition d’amnistie pour les personnes accusées d’être pénalement responsables de violations des droits humains et de crimes de droit international perpétrés pendant le conflit armé interne.

Au Salvador, l’Assemblée législative a examiné un projet de loi spéciale sur la justice transitionnelle et restauratrice en vue d’une réconciliation nationale, qui risquait de mettre en péril les droits à la justice, à la vérité et à réparation des victimes d’atteintes aux droits fondamentaux. Le Nicaragua a adopté une Loi d’amnistie, qui a été largement critiquée car susceptible de constituer un obstacle à la liberté d’expression et de réunion pacifique et une menace pour le droit des victimes à un recours effectif. En Colombie, une série de mesures soutenues par le président Iván Duque a provoqué d’inquiétants retards et de graves reculs dans la mise en œuvre de l’accord de paix de 2016.

En septembre, le Conseil des droits de l’homme [ONU] a adopté une résolution mettant en place une mission internationale indépendante d’établissement des faits sur le Venezuela, chargée d’enquêter sur les exécutions extrajudiciaires, les disparitions forcées et les cas de détention arbitraire et de torture commis depuis 2014. Ses conclusions étaient attendues en 2020.

Au Mexique, le ministère de l’Intérieur a créé une Commission d’enquête pour la vérité et la justice chargée de faire la lumière sur l’affaire des 43 étudiants d’Ayotzinapa soumis à une disparition forcée en 2014. La ministre de l’Intérieur a également annoncé le rétablissement du Groupe interdisciplinaire d’experts indépendants (GIEI) de la Commission interaméricaine des droits de l’homme chargé d’enquêter sur cette affaire. Malgré ces mesures positives et d’autres réformes mises en place par l’actuel gouvernement, le Mexique continuait de présenter l’un des taux d’impunité les plus élevés de la région pour les disparitions, les autres crimes de droit international et les violations graves des droits humains toujours recensés en très grand nombre dans le pays.

Défenseures et défenseurs des droits humains

D’après le rapport de l’organisation Front Line Defenders portant sur l’année 2019, les Amériques étaient la région la plus dangereuse au monde pour les défenseures et défenseurs des droits humains. La Colombie, le Honduras, le Mexique et le Brésil figuraient, avec les Philippines, au rang des pays où l’on recensait le plus grand nombre d’assassinats de défenseur·e·s au monde.

Durant toute l’année 2019, Amnesty International a continué de recevoir des informations très préoccupantes signalant des cas de stigmatisation, de menaces, de déplacements forcés, de criminalisation et d’homicides à l’encontre de personnes et de communautés qui défendaient les droits humains. Les défenseur·e·s des droits liés à la terre, au territoire et à l’environnement étaient tout particulièrement menacés, et représentaient un grand nombre des victimes de meurtres.

La plupart des États n’avaient pas mis en place de programme de protection apportant une solution aux causes structurelles de la violence dirigée contre ces personnes. La majeure partie d’entre eux, en particulier ceux qui s’étaient dotés de mécanismes spécifiques de protection des défenseur·e·s des droits humains, continuaient d’envisager la protection sous l’angle de la réaction et de la sécurité matérielle, au lieu de s’efforcer de régler le problème des causes structurelles de la violence contre les personnes et les communautés vulnérables.

Aux États-Unis, le gouvernement de Donald Trump a harcelé les défenseur·e·s des droits des personnes migrantes et réfugiées, et encouragé l’ouverture d’enquêtes judiciaires à leur encontre. En décembre, la Commission interaméricaine des droits de l’homme a pris des mesures conservatoires en faveur de 17 défenseures des droits humains nicaraguayennes qui, dans le cadre de la crise en cours, faisaient l’objet de manœuvres de harcèlement et d’intimidation, de menaces de mort et d’attaques. Au Salvador, des ONG locales ont dénoncé l’absence de statistiques officielles sur les violations commises contre les défenseur·e·s des droits humains, ainsi que le rejet par l’Assemblée législative d’une loi prévoyant la reconnaissance et la protection exhaustive des défenseur·e·s des droits humains et garantissant le droit de défendre les droits fondamentaux.

Des mesures encourageantes ont malgré tout été adoptées dans certains pays durant l’année pour protéger les défenseures et défenseurs des droits humains. Par exemple, le Mexique a redéfini son mécanisme national de protection, et le Pérou a adopté un protocole pour la protection des défenseur·e·s dans le pays. Au Paraguay, le Plan d’action conjointe, mécanisme qui était utilisé pour procéder à l’expulsion forcée de défenseur·e·s et de communautés protégeant leurs droits, a été abrogé.

Certaines mesures, qui restaient cependant insuffisantes, ont été prises dans la région pour déférer à la justice des personnes soupçonnées d’avoir une responsabilité pénale dans des attaques contre des défenseur·e·s des droits humains. Ainsi, au Honduras, sept hommes ont été condamnés pour l’assassinat de la défenseure de l’environnement Berta Cáceres. Ses proches considèrent toutefois que justice ne sera vraiment rendue que lorsque les instigateurs de ce meurtre seront traduits devant les tribunaux. Deux personnes soupçonnées d’avoir assassiné le défenseur indigène de l’environnement Julián Carillo ont été arrêtées. Cependant, les membres de sa communauté de Coloradas de la Virgen étaient toujours en danger en raison d’un intense climat de violence et de l’absence de services de base. Au Paraguay, les dernières poursuites judiciaires en date injustement engagées contre Andrés Brizuela, défenseur des droits liés à la terre, ont été abandonnées à la suite d’une transaction judiciaire.

D’autres groupes ont aussi été pris pour cible en raison de leur travail de défense des droits humains, notamment les défenseur·e·s des droits des personnes LGBTI, des personnes migrantes et des femmes, les journalistes, et les personnes recherchant des disparu·e·s. Au Mexique, à la suite de l’assassinat d’Oscar Cazorla, défenseur bien connu des droits des LGBTI, la haute-commissaire aux droits de l’homme des Nations unies a pointé du doigt l’impunité systématique dans les affaires de ce type. Au Brésil, la défenseure des droits des femmes Debora Diniz a reçu des menaces de mort parce qu’elle défendait le droit à l’avortement dans le pays. Au Mexique, deux défenseurs des droits des personnes migrantes ont été arrêtés à la suite d’une campagne de stigmatisation durant laquelle de hauts représentants des autorités ont lancé contre eux des accusations persistantes ne reposant sur aucune preuve crédible.

Droits des femmes et des filles

En 2019, les femmes et les filles ont pris une place croissante dans la région, aussi bien sur le plan de la participation politique que sur celui de la mobilisation pour leurs droits. D’importantes avancées ont été réalisées en Amérique latine et dans les Caraïbes en ce qui concerne l’égalité des genres dans les domaines de la politique, de l’éducation et de l’emploi. Toutefois, au rythme actuel de cette évolution, il faudra probablement attendre encore plusieurs décennies avant de parvenir à une parité totale.

Partout dans la région, les violences liées au genre contre les femmes et les filles sont restées monnaie courante. Même si toutes les femmes de la région étaient menacées, certaines d’entre elles couraient un risque particulièrement élevé, par exemple les travailleuses du sexe, les défenseures des droits humains et les femmes autochtones et d’origine africaine. Les femmes qui défendaient haut et fort leurs droits, en particulier, étaient la cible de violences sur les réseaux sociaux.

En République dominicaine, les policiers violaient, frappaient et humiliaient couramment les travailleuses du sexe, leur infligeant des actes qui pouvaient s’apparenter à de la torture ou à d’autres mauvais traitements. En Colombie, les défenseures des droits étaient particulièrement menacées ; elles étaient notamment la cible de violences sexuelles, de menaces et d’homicides. Selon les informations disponibles, plus de 500 femmes et filles autochtones ont disparu ou ont été tuées dans 71 villes des États-Unis, mais le chiffre réel était probablement beaucoup plus élevé.

Même si l’égalité des genres était de plus en plus promue, en particulier par les jeunes, les mesures adoptées par les pouvoirs publics pour éliminer les comportements discriminatoires ancrés dans la société, qui fondaient et perpétuaient la violence contre les femmes, demeuraient insuffisantes. Les victimes de violences liées au genre se heurtaient aussi à des obstacles les empêchant d’obtenir justice en raison de préjugés de classe profondément enracinés au sein du système judiciaire, qui donnaient lieu à des jugements toujours en défaveur des femmes. De plus, l’impunité demeurait la norme pour les auteurs de violences liées au genre, notamment de violences sexuelles et de féminicides, et très peu de mesures étaient mises en place pour prévenir la violence à l’égard des femmes et offrir aux victimes des services appropriés et un accès à la justice.

Les initiatives visant à remettre en cause et à faire évoluer cet état de fait ont constitué l’un des autres points importants de l’année 2019. Les mouvements de mobilisation féministes ont été nombreux dans la région. Ainsi, la chanson Un violeur sur ton chemin, du collectif chilien Las Tesis, qui dénonce les manquements des pouvoirs publics et la culture patriarcale en tant que causes premières de la violence contre les femmes, a rapidement été adoptée par des mouvements féministes de toute la région et du reste du monde, devenant l’hymne féministe de l’année.

En août, plusieurs cas de violences sexuelles contre des femmes et des filles ont déclenché une vague de colère et de manifestations à Mexico et dans d’autres villes du Mexique. Les autorités municipales de Mexico ont dans un premier temps qualifié ces manifestations d’actes de provocation et déclaré qu’elles allaient ouvrir des enquêtes judiciaires contre les protestataires pour dégradation de bâtiments. Par la suite, semble-t-il face au tollé général, elles ont opéré un revirement et déclaré qu’elles respecteraient le droit à la liberté de réunion et enquêteraient sur les cas de violences commises contre des femmes et des filles.

Droits sexuels et reproductifs

Les observations réalisées en matière de santé publique montrent que les lois sur l’avortement très restrictives n’induisent pas une diminution du nombre d’avortements, mais contraignent les femmes enceintes à recourir à des avortements pratiqués dans des conditions dangereuses. Or, d’après le Centre pour les droits reproductifs, en Amérique latine et aux Caraïbes, plus de 97 % des femmes en âge de procréer vivent dans des pays ayant adopté une législation très restrictive sur l’avortement. Même dans les pays où l’avortement est légal, les femmes et les filles continuent de se heurter à de nombreux obstacles quand elles veulent accéder à des services d’interruption de grossesse.

Selon une étude récente publiée par l’Institut Guttmacher, de nombreux systèmes de santé de la région n’étaient pas en mesure d’offrir des soins après avortement, bien que les gouvernements se soient engagés à offrir de tels soins dans le cadre de la fourniture de services de santé de qualité.

D’après le Fonds des Nations unies pour la population, l’Amérique latine et les Caraïbes présentaient le deuxième plus fort taux au monde de grossesses chez les adolescentes. Au moins 3,4 millions d’adolescentes, principalement issues de familles à bas revenus ou vivant en milieu rural, n’avaient pas accès aux moyens de contraception modernes. Le coût annuel de l’accès à cette contraception serait d’environ 0,38 dollar des États-Unis par personne, selon l’Institut Guttmacher. La mortalité maternelle demeurait l’une des principales causes de mortalité chez les adolescentes et les jeunes femmes âgées de 15 à 24 ans en Amérique latine et aux Caraïbes.

Le risque de mortalité maternelle est deux fois plus élevé chez les filles de moins de 15 ans que pour l’ensemble de la population féminine, parce qu’elles ne sont pas totalement prêtes physiquement et psychologiquement à assumer une maternité. L’Amérique latine et les Caraïbes ont été en 2019 les seules régions du monde où l’on a constaté une hausse du nombre de filles âgées de 10 à 15 ans contraintes de mener une grossesse à son terme, souvent à la suite de violences sexuelles. Ainsi, une récente étude menée par ONU Femmes a fait état d’une augmentation de 62,6 % du nombre de grossesses chez les filles âgées de 10 à 14 ans au Paraguay. En Argentine, toutes les trois heures, une fille de moins de 15 ans donne naissance à un enfant.

Droits des peuples autochtones

Les droits des peuples autochtones ont cette année encore été bafoués dans de nombreux pays, notamment en Argentine, en Bolivie, au Brésil, au Canada, au Chili, en Colombie, aux États-Unis, en Équateur, au Guatemala, au Honduras, au Mexique, au Nicaragua, au Paraguay, au Pérou et au Venezuela.

Violences contre les populations autochtones et accès à la justice

Cette année encore, des dirigeant·e·s autochtones ont été menacés, attaqués ou tués parce qu’ils défendaient les droits liés à la terre, au territoire et à l’environnement, dans des pays tels que le Brésil, la Colombie, le Guatemala, le Honduras et le Mexique. Au Paraguay, par exemple, les autorités avaient toujours tendance à considérer les autochtones comme des délinquants et utilisaient les poursuites judiciaires pour les harceler. De violentes attaques, des manœuvres d’intimidation et des déplacements forcés ont également été signalés. En Équateur, il n’existait toujours pas de mécanismes adéquats de protection de la vie et de l’intégrité physique des défenseur·e·s autochtones des droits humains, garantissant la tenue d’enquêtes efficaces sur les menaces et les attaques subies par ces personnes.

Les femmes autochtones étaient particulièrement exposées au risque de violences. Aux États-Unis et au Canada, par exemple, elles continuaient d’être victimes d’un nombre disproportionné de viols et d’autres violences sexuelles.

Droits à la terre, au territoire et à un environnement sain

Les droits des peuples autochtones à la terre et à un consentement préalable, libre et éclairé concernant les projets d’aménagement ayant des conséquences sur leur mode de vie continuaient d’être bafoués par les gouvernements de la région. Au Pérou, de nouvelles lois ont affaibli la protection des droits des peuples autochtones liés à la terre et au territoire, et fragilisé le principe de leur consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause.

Au Paraguay, des mesures concrètes et encourageantes ont été adoptées en vue de la mise en œuvre des décisions rendues par la Cour interaméricaine des droits de l’homme dans les affaires concernant les Sawhoyamaxas et les Yakyes Axas. En revanche, il a été fait état d’une utilisation abusive du système judiciaire contre des communautés indigènes avas guaranís dans le district d’Itakyry, dans le cadre d’un différend sur les titres de propriété foncière. En Équateur, la communauté de Sarayaku attendait toujours que soit pleinement appliquée une décision rendue en 2008 par la Cour interaméricaine des droits de l’homme soulignant qu’elle devait être consultée au sujet des projets d’aménagement ayant une incidence sur son territoire. En Colombie, des dizaines de milliers de personnes, appartenant pour la plupart à des communautés indigènes ou afro-colombiennes, ont subi un déplacement forcé en raison d’affrontements entre différents groupes armés.

Au Canada, le gouvernement ne s’est pas engagé à suspendre la construction du barrage du site C, en Colombie-Britannique, en dépit de l’opposition de deux Premières Nations pâtissant directement de ce projet et d’une procédure judiciaire en cours sur les droits relatifs à la terre. En Argentine, 13 ans après son adoption, la Loi d’urgence territoriale (n° 26.160) pour la reconnaissance juridique des droits fonciers des peuples autochtones n’était toujours pas pleinement appliquée.

Sur tout le continent, la contamination et la dégradation de l’environnement avaient des effets préjudiciables sur les droits des peuples autochtones à un environnement sain. Le Pérou a pris quelques mesures, telles que la publication par le ministère de la Santé de lignes directrices relatives aux soins destinés aux personnes contaminées par des métaux toxiques. Cependant, le gouvernement n’avait pas encore mis en œuvre de mesures efficaces pour protéger le droit à la santé de plusieurs centaines d’autochtones dont les seules sources d’eau étaient contaminées par des métaux toxiques. Au Venezuela, des communautés indigènes continuaient de dénoncer les effets néfastes de l’exploitation minière sur les populations et l’environnement ; au Canada, le gouvernement n’a pas créé de centre de soins de santé spécialisé pour remédier aux conséquences de la contamination au mercure, depuis plusieurs décennies, du territoire de la Première Nation de Grassy Narrows.

Des entreprises ont continué de violer et de menacer les droits des peuples autochtones. Au Brésil, les communautés indigènes et d’origine africaine étaient soumises à des pressions croissantes liées à la saisie et à l’occupation illégales de leurs terres ancestrales par des exploitants forestiers, des éleveurs de bétail et d’autres personnes ayant des intérêts commerciaux sur ces terres. Les mesures de protection gouvernementales étaient en recul, voire inexistantes.

Cependant, la compagnie minière canadienne Pan American Silver a conclu en 2019 une transaction historique avec les membres d’une communauté indigène guatémaltèque, dans le cadre d’une action judiciaire portant sur une fusillade ayant eu lieu en 2013 à la mine d’argent Escobal. Cette transaction s’est accompagnée d’excuses présentées par l’entreprise, qui a aussi reconnu sa responsabilité ; c’était la première fois qu’une compagnie minière canadienne reconnaissait publiquement que des activités qu’elle menait à l’étranger avaient causé des atteintes aux droits humains.

Une action judiciaire du même type était en cours au Canada, mettant en cause l’entreprise Hudson Minerals ; les accusations portaient sur des attaques et des meurtres de membres d’une communauté indigène à proximité de la mine de nickel Fenix, au Guatemala.

Avec l’augmentation de la demande de véhicules électriques à l’échelle mondiale, les activités d’extraction du lithium étaient en pleine expansion dans le « triangle du lithium » sud-américain (Argentine, Bolivie et Chili), où se trouveraient plus de 70 % des réserves mondiales de ce métal. Or, il était préoccupant de constater que cette expansion ne s’accompagnait pas de mesures suffisantes de protection des droits des peuples autochtones à l’eau, à un environnement sain et à un consentement préalable, libre et éclairé.

Crise climatique

Dans toute la région, les conflits sociaux et environnementaux ont continué de représenter l’une des principales causes de mécontentement. Les habitant·e·s de la région, en particulier les jeunes, se sont partout massivement mobilisés afin de réclamer des mesures contre la crise climatique.

Des avancées ont été réalisées en vue de la mise en œuvre de l’Accord régional sur l’accès à l’information, la participation publique et l’accès à la justice à propos des questions environnementales en Amérique latine et dans les Caraïbes (Accord d’Escazú) – un traité régional sans précédent portant sur les droits relatifs à l’environnement. À la fin de l’année, 22 pays avaient signé cet accord, et cinq l’avaient ratifié ; 11 ratifications sont nécessaires pour que l’accord entre en vigueur.

Une série d’incendies dévastateurs a ravagé la forêt de Chiquitano en Bolivie et la forêt amazonienne au Brésil, causant une crise environnementale et relative aux droits humains. En Bolivie, les incendies se sont déclarés à la suite de la promulgation par le président du décret suprême n° 3973 du 10 juillet, qui autorise le défrichement pour des activités agricoles sur les terres privées et communales, ainsi que les brûlis contrôlés conformément à la règlementation en vigueur, dans les départements de Santa Cruz et du Beni. Le gouvernement bolivien n’a pas ouvert d’enquête sur le lien qui pourrait exister entre les incendies et ce décret, qui n’a pas été suspendu et qui continuait d’être appliqué à la fin de l’année.

Au Brésil, d’après les chiffres officiels, quelque 435 000 hectares ont été ravagés par les flammes en l’espace de huit mois, ce qui a eu de lourdes conséquences sur les moyens de subsistance et la santé de populations rurales et urbaines, en particulier des communautés autochtones et quilombolas (d’origine africaine) vivant dans la région. Le nombre de feux de forêt a augmenté de 30 % en 2019, avec 89 178 départs de feu détectés par satellite. À la fin de l’année, aucune politique cohérente n’avait été mise en place pour lutter contre la déforestation et les incendies, ni pour assurer la protection des populations concernées et leur garantir l’accès à des voies de recours. De plus, aucune enquête indépendante n’a été menée et aucun plan d’action exhaustif n’a été mis en place pour demander des comptes aux personnes soupçonnées d’être impliquées dans les incendies qui ont ravagé la forêt vierge amazonienne en 2019.

Personnes en mouvement

Les gouvernements des pays de la région ont continué de faire illégalement obstacle aux déplacements des personnes migrantes, demandeuses d’asile et réfugiées. La région a connu au moins trois principaux mouvements de personnes réfugiées : des Nicaraguayens fuyant au Costa Rica, des Vénézuéliens se dirigeant principalement vers les pays d’Amérique du Sud, et des ressortissants des pays du « triangle Nord » (Guatemala, Honduras et Salvador) traversant le Mexique pour rejoindre les États-Unis.

Au moins 70 000 Nicaraguayens et Nicaraguayennes ayant fui, à partir de 2018, la crise humanitaire dans leur pays vivaient au Costa Rica, de l’autre côté de la frontière. Le Costa Rica n’empêchait pas ces personnes d’entrer sur son territoire, mais il ne leur permettait pas d’accéder pleinement à la procédure d’asile et restreignait leur accès à d’autres droits ainsi qu’aux services de base.

La situation d’urgence humanitaire sans précédent au Venezuela a contraint près de 4,8 millions de femmes, d’hommes et d’enfants à fuir le pays. Certains gouvernements de la région ont mis en place des mécanismes destinés à régulariser la situation de ces personnes au regard de la législation relative à l’immigration, mais d’autres, comme le Pérou, ont imposé de nouvelles règles pour l’entrée sur leur territoire, qui ont en pratique fermé la porte aux Vénézuélien·ne·s demandant une protection internationale. La plupart des États ne disposaient pas de système d’examen des demandes d’asile efficace et opérationnel, et certains ont réagi à l’urgence en imposant des obstacles qui restreignaient l’accès à la procédure d’asile.

Des personnes ont cette année encore fui le Guatemala, le Honduras et le Salvador, où elles étaient confrontées à une violence généralisée, à des menaces, à des manœuvres d’extorsion, au recrutement dans des gangs, et aux violences sexuelles et liées au genre. La discrimination, le harcèlement et la violence dans ces pays ont également conduit de nombreuses personnes LGBTI à rechercher une protection à l’étranger. Selon le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), à la fin de l’année, on dénombrait dans le monde quelque 387 000 personnes réfugiées ou demandeuses d’asile originaires du Guatemala, du Honduras et du Salvador. De plus, des milliers de personnes ont été déplacées à l’intérieur de leur pays ou renvoyées dans leur pays, principalement depuis le Mexique et les États-Unis. Un grand nombre d’entre elles ont subi, en violation du droit international, un renvoi forcé alors qu’elles risquaient d’être victimes de graves violations des droits humains à leur retour dans leur pays.

Aux États-Unis, le gouvernement de Donald Trump a promu des mesures visant à limiter le nombre de demandeurs et demandeuses d’asile arrivant aux États-Unis depuis le Mexique. Ces mesures comprenaient, entre autres, les renvois forcés illégaux à la frontière (push-backs) ; l’application de la politique « Rester au Mexique », qui a conduit au renvoi forcé de plusieurs dizaines de milliers de personnes demandeuses d’asile au Mexique, où elles devaient attendre le résultat de l’examen de leur demande ; et la signature d’« accords de coopération en matière d’asile » avec le Guatemala, le Honduras et le Salvador (également appelés « accords avec des pays tiers sûrs ») visant à contraindre les personnes à demander l’asile dans ces pays plutôt qu’aux États-Unis.

Les autorités des États-Unis ont continué de détenir des personnes demandeuses d’asile de façon arbitraire et pour une durée indéterminée, en violation des normes et du droit internationaux. Certaines étaient détenues depuis plusieurs années dans des centres où elles n’avaient pas accès à des services de santé adéquats. Le gouvernement de Donald Trump a également continué, en toute illégalité, de placer des enfants en détention. Sous la pression des États-Unis, le gouvernement mexicain a déployé à la frontière mexico-américaine plusieurs milliers de soldats, en violation de ses obligations internationales. Le Mexique a également cette année encore placé des enfants dans des centres de rétention qui, d’après certaines informations, étaient surpeuplés et n’offraient pas les services de santé de base. Trois personnes au moins, dont un enfant, sont mortes alors qu’elles étaient détenues par les services mexicains de l’immigration.

Les politiques pratiquées par plusieurs gouvernements et les déclarations des plus hautes autorités concernant la crise des réfugiés sans précédent dans la région se situaient dans la même ligne que les tentatives concertées, durant l’année, de faire reculer la protection des droits humains dans différents domaines et de favoriser les divisions. Cependant, elles ont aussi donné lieu à de formidables démonstrations de solidarité et de refus collectifs de laisser anéantir les avancées obtenues de haute lutte en matière de droits humains.

En première ligne de ces mouvements de résistance se trouvaient de jeunes femmes et de jeunes hommes revendiquant, pour l’avenir, la dignité sociale et la sécurité environnementale ; des femmes et des filles dénonçant les forces qui fondent et perpétuent la discrimination et les violences liées au genre ; des personnes LGBTI remettant en cause les préjugés et le harcèlement ; des familles et des communautés s’élevant résolument face au mur dressé devant elles pour réclamer justice ; ainsi que des peuples autochtones et des défenseur·e·s de l’environnement bravant d’immenses dangers pour attirer l’attention sur l’urgence climatique et y mettre fin. La diversité et la résilience des mouvements de la société civile exigeant, dans les rues des villes et des villages de toute la région, le respect des droits humains, ont représenté l’un des traits les plus marquants de l’année 2019 dans les Amériques, et sont une source d’inspiration pour les combats à venir.

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