L’année 2019 a été marquée par des manifestations ; dans ce cadre, selon le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme (HCDH), au moins 83 personnes ont perdu la vie pendant l’année, en février et entre mi-septembre et la fin du mois d’octobre, dont un grand nombre aux mains de la police. Amnesty International a pu vérifier l’authenticité de vidéos prouvant que des agents des forces de l’ordre avaient fait un usage excessif de la force contre des manifestant·e·s. Des journalistes ont été blessé·e·s ou tué·e·s.
Contexte politique en République d’Haïti
Des manifestations ont eu lieu tout au long de l’année en Haïti. Elles ont été déclenchées principalement par les allégations selon lesquelles de hauts représentants de l’État, notamment le président Jovenel Moïse, étaient impliqués dans le détournement de quelque deux milliards de dollars des États-Unis provenant d’un programme de vente de pétrole par le Venezuela à Haïti dans des conditions avantageuses.
En février, la Commission interaméricaine des droits de l’homme s’est dite préoccupée par la situation politique et économique dans le pays, par la montée de la violence, ainsi que par les problèmes d’approvisionnement en nourriture, en carburant et en eau potable, et d’accès aux soins médicaux. Elle a en conséquence décidé de créer une cellule chargée de surveiller la situation dans le pays.
En octobre, le mandat de la mission de maintien de la paix des Nations unies en Haïti a pris fin, et le Bureau intégré des Nations unies en Haïti a entamé ses activités.
Toujours en octobre, le secrétaire général des Nations unies s’est dit préoccupé par la crise politique ; il a engagé les parties en présence à entamer un dialogue et appelé la Police nationale d’Haïti à accomplir son devoir dans le respect des droits humains.
Recours excessif à la force
En février, au moins 41 personnes ont perdu la vie et 100 autres ont été blessées dans le contexte des manifestations, selon le HCDH.
Le HCDH a rassemblé des informations sur au moins 42 cas de décès et 86 cas de blessures intervenus dans le cadre des manifestations qui se sont déroulées de la mi-septembre à la fin du mois d’octobre ; selon les estimations, 19 des personnes décédées auraient été tuées par les forces de sécurité.
Durant cette même période, l’équipe de recherche et le Service de vérification numérique d’Amnesty International ont examiné plusieurs vidéos montrant la police utiliser des armes à létalité réduite sans discernement et de manière illégale ; on y voyait notamment des policiers lancer des gaz lacrymogènes en direction de manifestant·e·s pacifiques depuis un véhicule de police en mouvement, tirer des munitions à létalité réduite sur des contestataires à une distance très rapprochée, et frapper une personne.
Amnesty International a également pu apporter la confirmation que des policiers armés de fusils semi-automatiques avaient tiré à balles réelles pendant des manifestations, en violation des normes internationales relatives au maintien de l’ordre et aux droits humains.
En novembre, le Parlement européen a adopté une résolution d’urgence appelant les autorités haïtiennes à renoncer à l’usage illicite de la force contre les manifestants pacifiques.
Défenseures et défenseurs des droits humains et journalistes
En mai, le défenseur des droits humains Pierre Espérance, directeur exécutif du Réseau national de défense des droits humains (RNDDH), a signalé que plusieurs sources l’avaient informé de menaces de mort dirigées contre lui.
En septembre, le Comité pour la protection des journalistes a condamné le tir dont a été victime le journaliste Chery Dieu-Nalio, blessé lorsqu’un sénateur a tiré en l’air près du bâtiment du Sénat.
En octobre, le rapporteur spécial sur la liberté d’expression de la Commission interaméricaine des droits de l’homme s’est dit particulièrement préoccupé par les attaques et les assassinats visant des journalistes.
Droits économiques, sociaux et culturels
Selon la Banque mondiale, plus de 6 millions de Haïtiens et Haïtiennes vivaient en dessous du seuil de pauvreté, et plus de 2,5 millions étaient tombés en dessous du seuil d’extrême pauvreté, sur une population de 11 millions d’habitants.
À plusieurs reprises au cours de l’année, en particulier au cours des périodes de manifestations, des hôpitaux ont manqué de médicaments et de traitements de première nécessité, et des coupures d’eau et d’électricité ont eu lieu, selon les informations communiquées par les médias.