Irlande |Rapport annuel 2019

Irlande droits humains

Irlande
Chef de l’État : Michael D. Higgins
Chef du gouvernement : Leo Varadkar

La nouvelle loi irlandaise élargissant l’accès à l’avortement est entrée en vigueur, mais des restrictions continuaient de s’appliquer et les professionnels de la santé étaient toujours passibles de poursuites dans certains cas. Le problème de l’accès au logement et du respect des droits en la matière suscitait une préoccupation croissante. La Loi sur le financement des formations politiques portait atteinte à la liberté d’expression des associations de la société civile.

DROITS SEXUELS ET REPRODUCTIFS

La Loi de 2018 sur la santé (Réglementation de l’interruption volontaire de grossesse) est entrée en vigueur le 1er janvier. Elle élargissait les conditions d’accès aux services d’interruption de grossesse. Il était désormais possible de recourir gratuitement à l’avortement dans les établissements de santé classiques. Auparavant, l’interruption de grossesse ne pouvait être légalement envisagée que lorsqu’il existait « un risque réel et substantiel » pour la vie de la personne enceinte.

La nouvelle loi comportait cependant des lacunes importantes, telles que le délai de trois jours imposé avant de pouvoir accéder au service, le seuil de gravité fixé concernant la menace pour la santé de la personne enceinte (« préjudice grave »), ou l’absence de disposition permettant d’envisager une interruption de grossesse en cas d’anomalies graves présentées par le fœtus (et non pas seulement lorsque ces anomalies sont susceptibles d’entraîner la mort) ; en outre, le personnel médical restait passible de poursuites pénales en cas d’avortement pratiqué pour des motifs autres que ceux prévus par la loi.
À la fin de l’année, seules 10 maternités sur 19 proposaient l’ensemble des services d’interruption de grossesse. Le refus, pour des raisons de conscience, de certains professionnels de la santé de pratiquer l’interruption de grossesse était susceptible de constituer un obstacle à la mise en place de ces services dans certains établissements.

PERSONNES RÉFUGIÉES OU DEMANDEUSES D’ASILE

Des voix de plus en plus nombreuses se sont élevées en faveur de la mise en place d’une solution alternative à l’hébergement fourni dans le cadre du système de « prise en charge directe », qui accueillait quelque 6 082 demandeurs et demandeuses d’asile. Paru au mois de décembre, le rapport d’une commission parlementaire concluait que ce système de logement « partagé et institutionnalisé ne respect[ait] pas pleinement les droits à la vie privée et à la dignité des personnes placées dans ces centres ». Toujours au mois de décembre, le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale (CERD) [ONU] a déploré, en substance, les conditions de vie inappropriées qui régnaient dans les centres de prise en charge directe, ainsi que les conséquences notables qu’elles avaient sur la santé mentale et la vie de famille des demandeurs et demandeuses d’asile. Le CERD a par ailleurs critiqué les conditions de vie indignes qui régnaient dans les structures destinées à l’hébergement d’urgence des nouveaux demandeurs d’asile en raison de la saturation de ces structures, ainsi que le fait qu’elles n’offraient ni les services ni l’assistance nécessaires.

En partenariat avec le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés et plusieurs groupes de la société civile, le gouvernement a commencé en mars à mettre en place un programme de parrainage citoyen, en complément du programme classique de réinstallation géré par l’État. Officiellement lancé en novembre, ce programme permettait aux particuliers et aux associations locales d’apporter directement leur soutien à des familles de réfugiés, au moment de leur arrivée et tout au long de leur intégration. Vingt-cinq personnes avaient été prises en charge au titre de ce programme à la fin de l’année.

DROIT AU LOGEMENT

Le nombre de sans-abris était en augmentation, en grande partie en raison de la raréfaction de logements à louer à un prix abordable dans le parc privé. En septembre, l’Irlande comptait officiellement 10 397 personnes sans-abri (dont 3 873 mineur·e·s), soit une augmentation de 278 % par rapport à décembre 2014.

Selon les conclusions, parues en juillet, d’une étude demandée par le gouvernement sur le programme pour le logement des gens du voyage (Travellers), ces derniers étaient surreprésentés parmi les personnes sans abri. Cette étude dénonçait l’attitude persistante de certains représentants locaux des pouvoirs publics, qui ne mettaient pas à la disposition des Travellers toutes les structures nécessaires. Toujours selon cette étude, le recours croissant des foyers modestes à des locations dans le secteur privé jouait au détriment des Travellers, dans la mesure où ceux-ci se heurtaient à des obstacles pour obtenir et conserver des logements de ce type.

TRAVAILLEUSES ET TRAVAILLEURS DU SEXE

Les travailleuses et travailleurs du sexe risquaient toujours de faire l’objet de poursuites pénales pour « tenue de maison close ». Dans une affaire récente, deux jeunes migrantes, dont l’une était enceinte, ont été condamnées à neuf mois d’emprisonnement pour « tenue de maison close », la police ayant découvert qu’elles travaillaient ensemble dans un même appartement.

IMPUNITÉ

Le gouvernement a présenté ses excuses aux personnes qui avaient été victimes de sévices sexuels dans des établissements scolaires avant 1992. En juillet, un ancien juge de la Haute Cour nommé par l’État en tant qu’expert indépendant a estimé que l’État avait fait une interprétation erronée de la décision prononcée à son encontre en 2014 par la Cour européenne des droits de l’homme dans le cadre de l’affaire O’Keefe c. Irlande, en n’accordant des réparations aux victimes que si leur agresseur avait déjà fait l’objet d’une plainte.

En avril, la commission d’enquête indépendante sur les « foyers mères-bébés » gérés par des ordres religieux entre 1922 et 1998 a indiqué dans son cinquième rapport intermédiaire que, dans l’immense majorité des cas, l’emplacement des sépultures des enfants décédés dans sept de ces institutions était inconnu et qu’aucune trace de leur inhumation ne figurait dans les archives. Elle a également confirmé les informations parues dans la presse en 2014, selon lesquelles des centaines d’enfants auraient été sommairement inhumés dans des fosses destinées à recueillir les eaux usées dans le foyer situé à Tuam (comté de Galway).

LIBERTÉ D’EXPRESSION

Les conséquences de la Loi électorale de 1997, qui réglementait le financement des formations politiques, sur les associations de la société civile restaient préoccupantes. Cette loi, telle que modifiée en 2001, interdisait tout don provenant de l’étranger, ainsi que les dons supérieurs à 2 500 euros de la part de donateurs irlandais, à des organisations « tierces » à des « fins politiques », dont la législation ne fournissait qu’une définition vague.

RESPONSABILITÉ DES ENTREPRISES

La proposition de loi relative au contrôle de l’activité économique avec les territoires occupés a été examinée par le Sénat (la chambre haute du Parlement) pour revenir en seconde lecture devant l’Assemblée (la chambre basse) au mois de janvier, avant d’être finalement bloquée par le gouvernement. S’il était adopté, ce texte de portée historique interdirait le commerce de marchandises et de services avec, notamment, les colonies israéliennes illégalement établies dans les territoires palestiniens occupés.

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