Benin - Rapport annuel 2020

carte Benin rapport annuel amnesty

République du Bénin
Chef de l’État et du gouvernement : Patrice Athanase Guillaume Talon

Le droit à la liberté d’expression et le droit de réunion pacifique ont été indûment restreints ; des journalistes et des soignant·e·s ont fait l’objet de poursuites injustifiées, d’actes de harcèlement et de manœuvres d’intimidation. La police a eu recours à une force excessive lors de manifestations et dans le cadre de l’application des restrictions destinées à protéger la santé publique. La discrimination à l’égard des femmes et des minorités perdurait, et des personnes LGBTI ont subi des actes de harcèlement et des violences.

Contexte de la situation des droits humains au Benin

Les tensions entre le gouvernement et les partis d’opposition qui avaient émergé à la suite des élections législatives contestées de 2019 n’ont pas disparu. La Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (la Cour africaine) a demandé au Bénin de suspendre les élections municipales prévues en mai, en attendant qu’elle statue sur une affaire dont elle avait été saisie par opposant politique Sébastien Ajavon et qui portait notamment sur l’exclusion de l’Union sociale libérale de ces élections. Quelques jours plus tard, les autorités ont retiré aux individus et aux ONG la possibilité de déposer des plaintes directement auprès de la Cour africaine, et les élections municipales ont eu lieu à la date prévue.

En décembre, la Cour africaine a ordonné au Bénin de prendre toutes les mesures nécessaires pour abroger la Loi portant amnistie des faits criminels, délictuels et contraventionnels commis lors des élections législatives d’avril 2019.

Face à la pandémie de COVID-19, l’État a instauré des restrictions en matière de droits humains et a libéré 411 détenu·e·s.

Liberté d’expression

Les autorités ont continué à placer en détention et à poursuivre des journalistes en vertu de certaines dispositions de la Loi de 2018 portant Code du numérique, qui restreignait indûment le droit à la liberté d’expression.

Le 3 janvier, Aristide Fassinou Hounkpèvi, rédacteur du journal en ligne L’Autre Figaro, a été arrêté par des agents de l’Office central de répression de la cybercriminalité. Il a été inculpé de « harcèlement par le biais de moyens de communication électroniques » en raison de commentaires qu’il avait publiés sur les réseaux sociaux au sujet de l’éventuelle nomination du ministre des Affaires étrangères au poste d’ambassadeur du Bénin en France. Il a été libéré le 9 janvier mais un complément d’enquête a été demandé.

Le journaliste Ignace Sossou a été libéré de la prison de Cotonou en juin, après que la cour d’appel de la ville a ramené sa peine à 12 mois d’emprisonnement, dont six avec sursis ; il avait été condamné pour « harcèlement par le biais de moyens de communication électroniques » après avoir publié sur Twitter une citation du procureur de la République.

En juillet, la Haute Autorité de l’audiovisuel et de la communication a ordonné la fermeture des médias en ligne non reconnus par l’État. Cette décision a été perçue par certains dans le milieu professionnel comme un moyen de réduire les médias d’opposition au silence.

Le 10 novembre, l’opposant politique Loth Houénou a été condamné à deux ans d’emprisonnement et à une amende de 200 000 francs CFA (370 dollars des États-Unis) pour « harcèlement par le biais de moyens de communication électroniques ». Il avait été arrêté le 26 juin, après avoir publié sur les réseaux sociaux des enregistrements audio hostiles au président de la République et à plusieurs institutions.

Liberté de réunion

Les autorités se sont appuyées sur les restrictions instaurées en vue de limiter la propagation du COVID-19 pour empêcher des opposant·e·s politiques d’organiser des réunions et des rassemblements. En revanche, les manifestations orchestrées par des sympathisant·e·s du gouvernement se sont déroulées sans entrave.

En août, la police a empêché l’opposant politique Frédéric Aïvo de tenir une réunion au motif que celle-ci n’était pas autorisée.

Recours excessif à la force

En mars, la police a abattu Théophile Dieudonné Djaho, un étudiant, lors d’une manifestation contre l’arrestation de trois membres de la Fédération nationale des étudiants du Bénin à l’université d’Abomey-Calavi, à Calavi. Le président honoraire de l’ONG La Voix des étudiants a déposé un recours devant la Cour constitutionnelle contre le président de la République et le ministre de l’Intérieur et de la Sécurité publique pour violations des droits humains. Le gouvernement a annoncé l’ouverture d’une enquête.

Des vidéos diffusées sur les réseaux sociaux en avril ont montré des policiers en train de rouer de coups des personnes parce qu’elles ne portaient pas de masque.

En mai, Antonin Lokossi a été abattu par un garde forestier dans la ville de Toffo (département de l’Atlantique) alors qu’il ramassait du bois à brûler. Il était accompagné de deux personnes de son entourage, qui ont affirmé que les gardes forestiers avaient ouvert le feu alors que la victime et elles-mêmes n’étaient pas armées.

Droits des soignant·e·s

En mars, les syndicats du secteur de la santé ont fait part aux autorités de leur inquiétude quant au fait qu’ils étaient exclus des initiatives visant à gérer les effets de la maladie COVID-19 sur la santé et la sécurité de leurs membres. En juillet, ils ont fait une déclaration publique dénonçant le manque d’équipements de protection individuelle et les mauvaises conditions de travail.

Le 8 juin, la police a arrêté un soignant après qu’il a publié sur les réseaux sociaux un avertissement au sujet de l’apparition d’un foyer de COVID-19 au centre hospitalier départemental de l’Ouémé-Plateau. Inculpé de violation du secret professionnel, il a été condamné à six mois d’emprisonnement, dont cinq avec sursis, et à une amende. Il a été remis en liberté le 8 juillet.

Le 8 juillet également, Adolphe Houssou, porte-parole du Collectif des syndicats de la santé, a critiqué publiquement le fait que les pouvoirs publics n’aient pas pris toutes les mesures nécessaires pour protéger le personnel soignant du COVID-19. Le 25 juillet, il a fui le pays par crainte des représailles après que des policiers se sont rendus au ministère de la Santé pour demander son adresse.

Discrimination

En mars, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels [ONU] a publié ses observations finales concernant le dernier rapport périodique du Bénin. Le Comité s’est dit préoccupé par les fréquentes attaques contre des personnes atteintes d’albinisme, les homicides d’enfants considérés comme des « sorciers » et les coutumes locales qui privaient les femmes des droits à l’héritage et à la propriété.

Les personnes handicapées ont été exclues d’un concours de recrutement pour la fonction publique.

Violences fondées sur le genre

Les violences et le harcèlement sexuel à l’égard des femmes et des filles demeuraient généralisés. En mai, Angela Kpeidja, journaliste pour la chaîne de télévision nationale, a dénoncé publiquement le harcèlement sexuel et les autres violences qui avaient cours sur son lieu de travail. Les autorités ont suspendu le rédacteur en chef adjoint de la chaîne.

Droits des lesbiennes, des gays et des personnes bisexuelles, transgenres ou intersexes

En avril, des inconnus ont roué de coups une femme transgenre à Cotonou jusqu’à ce qu’elle s’évanouisse. Elle a repris connaissance au poste de police de Godomey, où des agents l’ont battue, insultée et menacée. Ils l’ont dénudée, prise en photo et renvoyée chez elle sans ses vêtements au bout de cinq jours de détention.

En juillet, une autre femme transgenre a été agressée par un groupe d’hommes qui l’ont pourchassée dans la rue, déshabillée et frappée. Plus tard dans la soirée, la police l’a arrêtée à son domicile sans raison valable, l’a emmenée au poste de Sodohomè (département du Zou) et a photographié son visage et ses parties génitales, avant de la placer dans une cellule avec des hommes. Elle a été libérée sans inculpation le lendemain.

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