Des groupes armés se sont livrés à des exactions des droits humains, notamment des homicides et des enlèvements, dans le contexte du conflit armé. Les forces de sécurité ont quant à elles procédé à des exécutions extrajudiciaires et commis des actes de torture. L’impunité demeurait généralisée. Le droit à l’éducation était restreint, de même que la liberté d’expression et de réunion.
Contexte de la situation des droits humains au Burkina Faso
Le conflit armé s’est poursuivi, en particulier dans tout le nord et l’est du pays. En janvier, la Loi portant institution de volontaires pour la défense de la patrie a été adoptée. Elle autorisait le recrutement de « volontaires » locaux pour l’appui aux opérations militaires.
L’état d’urgence a été maintenu dans sept des 13 régions du pays, ce qui conférait aux autorités des pouvoirs étendus s’agissant des arrestations, de la détention et des restrictions relatives à la liberté de circulation.
En mars, les pouvoirs publics ont instauré un couvre-feu national pour tenter de limiter la propagation du COVID-19. Par ailleurs, ils ont libéré 1 207 prisonnières et prisonniers afin de réduire la surpopulation carcérale et d’atténuer le risque d’infection.
Le Code électoral a été modifié en septembre, à l’approche de l’élection présidentielle. Il disposait désormais que, s’agissant des bureaux de vote fermés à titre exceptionnel pour des raisons de sécurité, les résultats du scrutin reposeraient sur le nombre de voix comptabilisées dans les bureaux ouverts. En novembre, le président Roch Marc Christian Kaboré a été réélu pour un deuxième mandat.
Exactions perpétrées par des groupes armés
Des affrontements entre groupes armés ont éclaté régulièrement et la population civile a subi des attaques, souvent sous-tendues par des considérations ethniques et susceptibles de s’apparenter à des crimes de guerre.
Depuis le début de l’année, le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM) maintenait un blocus de la ville de Djibo, dans la province du Soum (région du Centre-Nord), restreignant l’accès et la circulation des personnes sur 37 kilomètres.
En mars, les koglweogo, un groupe armé d’« autodéfense », ont effectué des raids dans trois villages du département de Barga (région du Nord), tuant au moins 43 habitant·e·s et détruisant des bâtiments. Le même mois, au moins 10 civil·e·s qui se trouvaient à la mosquée dans le village de Cissé (région du Sahel) ont été emmenés et tués par des hommes armés non identifiés, selon les médias.
En mai et en août, au moins 45 personnes ont trouvé la mort lorsque des assaillants non identifiés ont fait feu sans discrimination sur des marchés au bétail dans la ville de Kompienbiga et le village de Namoungou (région de l’Est).
En juillet, le maire de Pensa et 10 autres personnes ont été tués ; entre les villes de Barsalogho et de Pensa (région du Centre-Nord), leur convoi est tombé dans une embuscade tendue, semble-t-il, par des membres du GSIM. Un mois plus tard, Souhaib Cissé, leader de la communauté musulmane de la province du Soum, a été enlevé par des hommes armés alors qu’il rentrait chez lui, à Djibo. Son corps a été retrouvé quatre jours plus tard à la périphérie de la ville.
Droit à l’éducation
Le droit à l’éducation était fortement restreint du fait des attaques armées lancées par le GSIM et l’État islamique au Grand Sahara (EIGS) contre des établissements primaires et secondaires. Des élèves, des étudiant·e·s et des enseignant·e·s étaient fréquemment menacés de violences. Le ministère de l’Éducation nationale, de l’Alphabétisation et de la Promotion des langues nationales a indiqué que 222 professionnel·le·s de l’éducation avaient été « victimes d’attaques terroristes » entre janvier et avril. Selon l’UNICEF, environ 3 000 établissements scolaires étaient fermés en avril pour des raisons de sécurité.
Exécutions extrajudiciaires
Le 9 avril, à Djibo, 31 personnes ont été arrêtées et exécutées par des membres du Groupement des forces antiterroristes (GFAT) lors d’une opération. Bien que les autorités aient annoncé l’ouverture d’une enquête sur ces homicides, qui pourraient constituer des crimes de guerre, aucune autre information n’avait été rendue publique à ce sujet.
Torture et autres mauvais traitements
Le 11 mai, des gendarmes, accompagnés de « volontaires », ont arrêté au moins 25 personnes sur un marché de la ville de Kpentchangou (région de l’Est) et les ont placées en détention. Le lendemain matin, 12 ont été retrouvées mortes dans leurs cellules au poste de gendarmerie de Tanwalbougou. La gendarmerie a nié toute responsabilité dans ces décès. Cependant, selon les survivants, libérés en juin, ces 12 hommes sont morts après avoir été sévèrement battus par des gendarmes. Les autorités ont affirmé qu’elles diligenteraient une enquête, mais aucune information à ce sujet n’avait été communiquée publiquement à la fin de l’année.
Violences fondées sur le genre
Selon le HCR, l’organisme des Nations unies chargé des personnes réfugiées, les violences fondées sur le genre, y compris les viols, les mariages précoces ou forcés, ainsi que la prostitution et les autres formes d’exploitation et d’atteintes sexuelles, se sont multipliées en raison du conflit. Il était difficile pour les victimes d’obtenir de l’aide car les services prodiguant des soins de santé sexuelle et reproductive étaient souvent perturbés par le conflit, voire inexistants.
Personnes réfugiées ou déplacées
En août, selon le HCR, on dénombrait un million de personnes déplacées à l’intérieur du pays en raison du conflit. Les camps pour personnes déplacées ou réfugiées étaient la cible d’attaques lancées par les différentes parties au conflit.
En mai, des militaires ont roué de coups 32 personnes réfugiées dans le camp de Mentao (région du Sahel). Cela faisait suite à une attaque contre l’armée le jour même, qui avait causé la mort d’un soldat, et dont les auteurs se seraient réfugiés dans le camp. Le HCR a appelé les autorités à enquêter sur ces faits et celles-ci ont répondu que des hommes armés se trouvaient dans le camp.
En octobre, 25 personnes déplacées ont été tuées dans une embuscade tendue par un groupe armé près de la ville de Pissila (région du Centre-Nord). Les survivant·e·s ont indiqué que les assaillants avaient exécuté les hommes après les avoir séparés des femmes et des enfants, qui avaient ensuite été relâchés.
Droit à la vérité, à la justice et à des réparations
En février, le commandant des koglweogo dans la province du Namentenga (région du Centre-Nord), Boureima Nadbanka, a obtenu du tribunal de grande instance de Kaya une remise en liberté provisoire. Cet homme avait été arrêté en décembre 2019 dans le cadre d’une enquête sur les homicides illégaux de 50 personnes et les disparitions forcées de 66 autres. Les faits s’étaient déroulés dans le village de Yirgou (province du Sanmatenga) en janvier 2019. La procédure engagée à l’encontre de Boureima Nadbanka n’avait pas connu de développement significatif à la fin de l’année.
Liberté d’expression et de réunion
En janvier, une voiture appartenant à Yacouba Ladji Bama, journaliste d’investigation et rédacteur au Courrier confidentiel, a été incendiée devant le domicile de cet homme. Selon des syndicats de journalistes, cette attaque avait pour but de le dissuader de continuer à dévoiler des affaires de fraude et de corruption.
Le même mois, le conseil municipal de Ouagadougou a interdit arbitrairement un sit-in devant le Palais de justice, organisé par le Collectif contre l’impunité et la stigmatisation des communautés (CISC). Le CISC dénonçait le fait que les autorités ne rendent pas justice s’agissant des 50 personnes tuées par les koglweogo à Yirgou en janvier 2019 (voir, ci-avant, Droit à la vérité, à la justice et à des réparations).
En août, les autorités ont empêché des partisans du président destitué Blaise Compaoré de manifester, leur refusant l’entrée à la Maison du peuple, à Ouagadougou, où devait se tenir leur rassemblement, sans aucune justification officielle.
Droit à la santé
Droits des travailleuses et travailleurs
En mars, le Syndicat national des travailleurs de la santé humaine et animale (SYNTSHA) s’est dit préoccupé par l’impréparation du pays face à la pandémie de COVID-19 et a appelé les pouvoirs publics à protéger davantage les professionnel·le·s de la santé en première ligne. Le SYNTSHA a régulièrement dénoncé le manque d’investissements dans les infrastructures et le non-respect par l’État de l’accord de 2017 visant à améliorer les conditions de travail du personnel soignant.