Équateur - Rapport annuel 2020

carte Équateur rapport annuel amnesty

République de l’Équateur
Chef de l’État et du gouvernement : Lenín Boltaire Moreno Garcés

Il n’existait toujours pas dans le pays de mécanisme adéquat de protection de la vie et de l’intégrité physique des défenseur·e·s des droits humains. Les autorités n’ont pas fait le nécessaire pour que des enquêtes efficaces soient menées sur les menaces et les attaques subies par ces personnes, et particulièrement par celles qui défendaient les droits des peuples autochtones, leurs territoires et l’environnement. Les conséquences de la pandémie de COVID-19 sur les droits des peuples autochtones ont été exacerbées par l’exclusion et la discrimination dont ces peuples n’ont cessé de faire l’objet.

Contexte de la situation des droits humains en Équateur

L’Équateur a signalé son premier cas de COVID-19 en février et, le 11 mars, la ministre de la Santé publique a décrété l’état d’urgence sanitaire. Pour faire face à la pandémie, des mesures de quarantaine et de confinement obligatoire, entre autres mesures économiques et sociales, ont été instaurées par décret suprême, puis par des lois. Le 7 avril, des organisations de défense des droits humains équatoriennes ont attiré l’attention sur la gravité de la situation humanitaire dans la ville de Guayaquil à la suite de la diffusion d’images montrant des cadavres abandonnés dans la rue, des hôpitaux en déliquescence et des morgues débordées. Au 31 décembre, le ministère de la Santé publique faisait état de 212 512 cas confirmés de COVID-19 et 9 473 morts, auxquels venaient s’ajouter 4 561 décès « probablement » liés au virus.

Défenseures et défenseurs des droits humains

Les autorités n’avaient toujours pas élaboré ni mis en œuvre de politique nationale de protection des défenseur·e·s des droits humains, incluant notamment un protocole pour enquêter sur les infractions commises contre ces personnes. À la fin de l’année, personne n’avait été traduit en justice pour les menaces et les attaques ayant visé Patricia Gualinga, Nema Grefa, Salomé Aranda et Margoth Escobar, membres du Collectif des femmes amazoniennes. Il était à craindre que les informations judiciaires portant sur ces attaques ne soient classées sans suite1.

L’Équateur a ratifié en mai l’Accord régional sur l’accès à l’information, la participation publique et l’accès à la justice à propos des questions environnementales en Amérique latine et dans les Caraïbes (Accord d’Escazú).

Le 16 décembre, une juge a conclu que la procédure judiciaire engagée contre le défenseur des droits humains Ola Bini pour « accès non autorisé à un système informatique » devait se poursuivre et entrer dans la phase préliminaire au procès.

Droits des peuples autochtones

Les peuples autochtones d’Amazonie équatorienne étaient très menacés dans le contexte de la pandémie car ils manquaient d’accès à l’eau potable, à la nourriture, aux fournitures médicales, aux services de santé et aux tests de détection du coronavirus, à cause des inégalités, de l’exclusion et de la discrimination dont ils faisaient l’objet de longue date.

Au 7 décembre, des organisations autochtones et de défense des droits humains avaient recensé 3 257 cas confirmés de COVID-19 chez les peuples autochtones de l’Amazonie équatorienne ; à cette date, 50 membres de ces ethnies étaient morts de cette maladie et 54 autres après en avoir présenté des symptômes.

En août, le gouvernement a publié un protocole pour prévenir et prendre en charge les cas de COVID-19 au sein des peuples indigènes, afroéquatorien et montubio. Des organisations de défense des droits des peuples autochtones et des droits humains en Amazonie ont déclaré que ce protocole n’avait pas fait l’objet d’une consultation en bonne et due forme des populations indigènes et ne correspondait pas à leurs demandes. Ces organisations ont en outre signalé que les peuples autochtones avaient été exclus des Comités des opérations urgentes chargés de l’application de ce protocole2.

Le 7 avril, un déversement de pétrole en Amazonie a pollué les rivières Coca et Napo. Cette catastrophe écologique a eu des conséquences sur l’environnement, l’eau, la nourriture et les moyens de subsistance d’environ 120 000 personnes, dont 27 000 autochtones. Le 29 avril, un groupe d’organisations de défense des droits des peuples autochtones et des droits humains a engagé une action en protection constitutionnelle et demandé des mesures conservatoires au nom des personnes touchées par le déversement de pétrole. Le 1er septembre, un juge a rejeté la requête et refusé les mesures conservatoires au motif que les organisations requérantes n’avaient pas prouvé l’existence d’une violation de droits. Les organisations requérantes ont affirmé que l’examen du dossier avait été entaché d’irrégularités et que le juge n’avait pas respecté les garanties d’une procédure régulière.

Droits sexuels et reproductifs

En août, l’Assemblée nationale a adopté un nouveau code de la santé améliorant l’accès aux soins en matière de sexualité et de procréation. En septembre, le président a mis son veto à ce code, qui sera réexaminé dans son intégralité par l’Assemblée nationale en septembre 2021. L’avortement restait considéré comme une infraction dans la plupart des cas, ce qui entravait l’accès aux soins de santé.

Répression de la dissidence

Les enquêtes sur les allégations d’atteintes aux droits humains commises en Équateur lors des manifestations d’octobre 2019 n’avaient toujours pas abouti à la fin de l’année. En juin, le ministère de la Défense a pris l’arrêté ministériel 179, qui autorisait les forces armées à recourir à la force meurtrière à l’encontre des manifestant·e·s, en violation du droit international relatif aux droits humains et des normes en la matière. Le Tribunal constitutionnel a suspendu l’application de cet arrêté en juillet, en attendant de se prononcer sur sa constitutionnalité.

Droits économiques, sociaux et culturels

En 2020, environ 25 % de la population équatorienne vivait en dessous du seuil national de pauvreté. Le gouvernement a annoncé en mai une série de mesures visant à réduire les dépenses publiques, soulevant des inquiétudes quant aux conséquences négatives que cela pourrait avoir sur les droits économiques et sociaux, notamment pour les personnes et les groupes défavorisés, qui pourraient être touchés de manière disproportionnée. Il était à craindre que ces mesures n’accentuent les inégalités existantes et le manque d’accès aux droits.

1« Équateur. Il est urgent d’adopter une politique publique pour protéger les défenseur·e·s des droits humains, qui sont en danger » (nouvelle, 12 mars)
2Le COVID-19 menace la vie des peuples autochtones (AMR 28/2643/2020)

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