La crise provoquée par la pandémie de COVID-19 a aggravé les inégalités structurelles, affectant en particulier les droits des personnes déjà marginalisées. La Loi d’urgence menaçait les droits à la liberté d’expression et de manifestation pacifique. Les conditions médiocres qui régnaient dans les prisons ont continué de se détériorer. Les violences faites aux femmes ont augmenté. L’impunité demeurait un motif de préoccupation, et des éléments attestant de la rétention d’informations capitales au sujet de violations des droits humains commises par le passé ont été divulgués.
Droits économiques, sociaux et culturels
Les mesures prises pour lutter contre la pandémie de COVID-19 ont entravé l’accès des groupes marginalisés aux droits économiques et sociaux. Le confinement a eu des répercussions négatives sur l’activité économique, ce qui a accentué les inégalités structurelles préexistantes. Selon l’université de la République, en avril, plus de 100 000 personnes étaient passées sous le seuil de pauvreté, soit une hausse de 35 % par rapport à décembre 2019. Les médias ont indiqué que, en août, plus de 40 000 personnes avaient besoin des banques alimentaires pour se nourrir. Les travailleuses et travailleurs du sexe, les employé·e·s de maison et les personnes migrantes ou réfugiées rencontraient des difficultés pour se loger.
Liberté d’expression et de réunion
Adoptée au mois de juillet, la Loi d’urgence incluait des dispositions à la formulation imprécise qui restreignaient la liberté d’expression et de réunion et risquaient de rendre illégaux les mouvements sociaux et les manifestations.
Garanties procédurales et détention
La Loi d’urgence suscitait un certain nombre d’inquiétudes, notamment en ce qui concerne le principe de présomption d’innocence pour les policiers et les dispositions élargissant le recours à la détention provisoire. Ce texte supprimait également des garanties d’équité des procès et prévoyait des peines d’emprisonnement plus lourdes pour certaines infractions. Ces nouvelles dispositions risquaient d’accroître le nombre de personnes détenues dans un système carcéral déjà caractérisé par une surpopulation et des conditions d’hygiène déplorables. D’après les chiffres communiqués par le parquet, on dénombrait en novembre 13 077 adultes incarcérés, dont près de 20 % étaient en attente de jugement. Avec 370 détenu·e·s pour 100 000 habitant·e·s, l’Uruguay affichait l’un des taux d’incarcération les plus élevés de la région.
Impunité
Le gouvernement a fait part de son intention de rechercher les personnes victimes de disparition forcée sous le régime militaro-civil (1973-1985). En février, le parquet a engagé des poursuites pénales contre quatre militaires à la retraite pour des actes de torture commis en 1972. Le 24 mai, la Commission interaméricaine des droits de l’homme a porté trois affaires devant la Cour interaméricaine des droits de l’homme, dont l’une concernait trois jeunes filles victimes de disparition forcée en 1974.
Le procès-verbal d’un procès tenu en 2006 devant un tribunal militaire de l’honneur a été rendu public au mois d’août ; il a révélé que l’armée avait torturé et exécuté des détenu·e·s uruguayens en Argentine dans les années 1970, et confirmé que des éléments de preuve avaient été dissimulés.
Violences faites aux femmes et aux filles
Le confinement instauré en réponse à la pandémie de COVID-19 s’est traduit par une augmentation des violences domestiques visant les femmes et les filles. Selon le ministère de l’Intérieur, 33 004 plaintes ont été enregistrées entre janvier et octobre, soit 203 de plus que sur la même période en 2019. Aucun véritable mécanisme visant à prévenir les violences faites aux femmes ne figurait parmi les mesures prises pour lutter contre la pandémie.
Droits sexuels et reproductifs
Bien qu’on ne dispose pas de statistiques officielles pour 2020, le taux de grossesses chez les mineures demeurait un problème dans le pays et ne faisait pas l’objet d’une attention suffisante. La plupart des grossesses survenant avant l’âge de 15 ans découlaient de situations d’atteintes et d’exploitation sexuelles. Selon le Comité national pour l’éradication de l’exploitation sexuelle des enfants et des adolescent·e·s, le nombre de cas signalés d’exploitation sexuelle commerciale d’enfants et d’adolescent·e·s a augmenté de 41 % en 2020.
Les difficultés d’accès aux services de santé sexuelle et reproductive et, en particulier, d’interruption de grossesse, se sont accrues pendant le confinement. L’avortement était légal en Uruguay, mais il était difficile d’y avoir recours du fait, d’une part, du refus de professionnel·le·s de santé de prodiguer ce service en raison de leurs convictions religieuses et, d’autre part, d’un accès limité aux établissements de santé dans les zones rurales.