Guatemala - Rapport annuel 2021

carte Guatemala rapport annuel amnesty

République du Guatemala
Chef de l’État et du gouvernement : Alejandro Giammattei Falla

Les poursuites judiciaires ont de plus en plus été utilisées comme stratégie pour intimider des personnes travaillant dans le secteur de la justice. Une loi menaçant le droit de défendre les droits humains est entrée en vigueur. Le Guatemala était le pays d’Amérique latine ayant le plus faible taux de personnes présentant un schéma vaccinal anti-COVID-19 complet, et la lutte contre cette maladie était entachée d’accusations de corruption.

Contexte

La vice-présidente des États-Unis, Kamala Harris, s’est rendue au Guatemala en juin et a décidé avec le président guatémaltèque, Alejandro Giammattei, de s’attaquer aux causes profondes de la migration, en particulier aux inégalités, à la corruption et à la dégradation de l’état de droit. En juillet, la révocation du procureur spécial contre l’impunité a déclenché des manifestations dans l’ensemble du pays contre la corruption, les inégalités économiques et la gestion de la pandémie de COVID-19 par l’État.

Impunité

Des personnes travaillant dans le domaine de la justice et jouant un rôle important dans la lutte contre l’impunité dans des affaires de violations graves des droits humains et de corruption ont été démises de leurs fonctions ou empêchées de prendre leur poste et ont fait l’objet de menaces, de poursuites judiciaires et de campagnes de dénigrement.

En avril, la magistrate Gloria Porras, bien connue depuis quelques années pour sa défense des droits humains et sa participation à la lutte contre la corruption et qui avait été réélue à la Cour constitutionnelle, a quitté le pays quand le Congrès a bloqué sa cérémonie de prestation de serment et refusé de la laisser prendre ses fonctions.

En juin, quatre juges de tribunaux pénaux de haut risque à qui la Commission interaméricaine des droits de l’homme avait accordé des mesures conservatoires ont signalé au parquet qu’ils étaient la cible d’actes de harcèlement et de menaces. Un mois plus tard, la procureure générale a limogé le procureur spécial contre l’impunité, Juan Francisco Sandoval, qui a quitté le pays en raison de craintes pour sa sécurité. En octobre, elle a également muté la procureure spéciale chargée des droits humains, qui avait contribué à traduire en justice l’ancien chef d’État militaire Efraín Ríos Montt.

Défenseur·e·s des droits humains et recours excessif à la force

L’Unité de protection des défenseures et défenseurs des droits humains au Guatemala (UDEFEGUA) a recensé 839 attaques contre des défenseur·e·s des droits humains entre janvier et novembre. Le Guatemala était à nouveau au quatrième rang mondial des pays ayant enregistré le plus haut taux d’homicides de défenseur·e·s des droits fonciers et environnementaux par habitant·e, avec 13 homicides en 2020, selon l’ONG Global Witness.
Pourtant, à la fin de l’année, le pays n’avait pas encore ratifié l’Accord régional sur l’accès à l’information, la participation publique et l’accès à la justice à propos des questions environnementales en Amérique latine et dans les Caraïbes (Accord d’Escazú), qui comprenait des dispositions relatives à la protection des défenseur·e·s des droits humains liés à l’environnement.

En mai, les nouveaux membres de la Cour constitutionnelle ont rejeté les recours déposés par des organisations de la société civile contre une loi controversée sur les ONG, qui est entrée en vigueur le 21 juin. Au moins trois actions en inconstitutionnalité ont par la suite été intentées devant la Cour constitutionnelle concernant des éléments de la loi qui laissaient la porte ouverte à de graves violations des droits à la liberté d’expression et d’association. Ces actions visaient en particulier des dispositions rédigées en des termes vagues pouvant conduire à des attaques contre des ONG et notamment à leur fermeture. Ces recours étaient toujours en instance à la fin de l’année.

Le procès de Bernardo Caal Xol s’est poursuivi. Ce prisonnier d’opinion était incarcéré depuis janvier 2018 pour avoir défendu les droits des Mayas q’eqchis touchés par la construction du barrage hydroélectrique OXEC2. En août, la Cour suprême a rejeté un pourvoi en cassation formé par ses avocats pour demander sa libération. En octobre, la police a dispersé avec violence des manifestant·e·s pacifiques mayas q’eqchis qui se rassemblaient depuis trois semaines pour protester contre les opérations d’une compagnie minière sur leur territoire à El Estor, ainsi que d’autres manifestant·e·s et des journalistes. À la suite de ces événements, le président a décrété l’état d’urgence dans la commune.

Droits des personnes réfugiées ou migrantes

Cette année encore, des Guatémaltèques ont fui les violences, la pauvreté, les inégalités et les conséquences du changement climatique.

Des centaines de Guatémaltèques et d’autres personnes originaires d’Amérique centrale et d’Haïti ont été expulsés et renvoyés de force illégalement par les autorités mexicaines vers des zones reculées le long de la frontière, où ils ont été abandonnés sans véritable assistance.

Sous prétexte d’appliquer les protocoles de protection contre la pandémie de COVID-19, les forces de sécurité guatémaltèques ont roué de coups et aspergé de gaz lacrymogène une caravane composée de personnes migrantes et demandeuses d’asile qui tentait d’entrer dans le pays en janvier3.

Droit à la santé

Le Guatemala comptait à peine 25,7 % de personnes entièrement vaccinées contre le coronavirus 2019, se plaçant au dernier rang des pays d’Amérique latine dans ce domaine ; des actes de corruption ont été signalés dans le cadre de l’achat des vaccins et de la gestion de la pandémie.
Un programme détaillé de vaccination national a été publié, mais il ne comportait aucun protocole spécifique aux populations autochtones.

Violences faites aux femmes et aux filles

En mars, après une vingtaine d’années de lutte pour obtenir justice, la famille de María Isabel Veliz Franco, une adolescente de 15 ans tuée en 2001 et dont le corps présentait des signes de violence sexuelle, a vu un homme condamné à 30 ans de réclusion pour ce meurtre. Le Guatemala avait été condamné en 2014 par la Cour interaméricaine des droits de l’homme pour ne pas avoir enquêté avec la diligence requise sur la mort de la jeune fille et ne pas avoir empêché que ses droits soient bafoués.

Droits sexuels et reproductifs

En décembre, le Congrès a engagé des débats sur une initiative législative (5940) qui, si elle était adoptée, irait à l’encontre des droits des enfants et adolescent·e·s transgenres.

Droit à la vérité, à la justice et à des réparations

En mai, dans l’affaire dite du « Diario Militar », les forces de sécurité ont arrêté 11 militaires et policiers à la retraite soupçonnés d’avoir participé à des enlèvements, des disparitions forcées, des exécutions extrajudiciaires et d’autres crimes de droit international et violations des droits humains commis contre au moins 183 personnes considérées comme des opposant·e·s politiques entre 1983 et 1985. À la fin de l’année, huit d’entre eux au moins étaient toujours en détention dans l’attente de leur procès.

« Guatemala. Des organisations internationales demandent la fin du recours à des poursuites judiciaires contre des fonctionnaires de justice et des défenseur·e·s des droits humains », 8 juin

« Guatemala. Amnesty International remet 27 957 signatures pour réclamer la libération de Bernardo Caal Xol », 7 juillet

“Guatemala : La pandemia no puede ser un pretexto para negar protección internacional”, 30 mars

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