Japon - Rapport annuel 2021

carte Japon rapport annuel amnesty

Japon
Chef du gouvernement : Fumio Kishida (a remplacé Yoshihide Suga en octobre)

Cette année encore, des membres de minorités ethniques et des personnes LGBTI ont subi une stigmatisation et une discrimination. Les lois permettant la détention pour une durée indéterminée de personnes étrangères sans papiers sont restées en vigueur. Des détenu·e·s ont été privés du droit de recevoir des soins médicaux adaptés.

Contexte

Le Japon a accueilli les Jeux olympiques d’été 2020 avec un an de retard, dans un contexte d’augmentation du nombre de cas de COVID-19 et d’hostilité de l’opinion publique. Le 3 septembre, Yoshihide Suga a annoncé démissionner de ses fonctions de Premier ministre, sur fond d’impopularité du gouvernement liée à sa gestion de la pandémie.

Discrimination

La discrimination exercée de longue date contre la minorité coréenne a perduré, tout particulièrement à l’égard des membres de cette minorité qui étaient considérés comme alignés sur la Corée du Nord. En juillet, la Cour suprême a rejeté un recours en indemnisation formé par un établissement scolaire lié à Pyongyang et plusieurs de ses élèves diplômés ; ce recours portait sur la décision du gouvernement d’exclure les établissements scolaires coréens liés à Pyongyang d’un programme de subventions pour les frais de scolarité destiné aux établissements d’enseignement secondaire. Quatre recours portant sur cette même question avaient déjà été rejetés par d’autres juridictions.

Droits des lesbiennes, des gays et des personnes bisexuelles, transgenres ou intersexes

En mai, à l’issue d’âpres négociations entre la majorité et l’opposition, une disposition indiquant que la « discrimination basée sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre est inacceptable » a été ajoutée dans la proposition de loi soumise par le parti au pouvoir, le Parti libéral-démocrate (PLD), en vue de sensibiliser le public aux questions relatives à l’orientation sexuelle et à l’identité de genre. Cependant, lors du processus d’approbation interne, au sein du PLD, de la proposition de loi soutenue par différents partis, des parlementaires conservateurs du PLD ont fait de nombreuses remarques discriminatoires. Ces remarques ayant suscité un véritable tollé, un cadre du PLD a annoncé que le parti n’allait pas soumettre ce texte à la Diète (le Parlement japonais). Le texte était toujours en suspens à la fin de l’année.

Le gouvernement n’a pris aucune mesure en vue de la reconnaissance juridique du mariage entre personnes de même sexe. Cependant, en mars, le tribunal de district de Sapporo a jugé, à l’issue d’un procès intenté par trois couples homosexuels, que l’absence de reconnaissance par le gouvernement du mariage entre personnes de même sexe était inconstitutionnelle. Les plaignant·e·s faisaient partie des 13 couples qui avaient engagé des poursuites similaires à l’occasion de la Saint-Valentin en 20192. À la fin de l’année, 141 municipalités avaient publié des arrêtés ou directives reconnaissant les unions entre personnes de même sexe.

Les pressions exercées par la société civile se sont intensifiées pour que soient supprimées, dans la Loi sur les troubles de l’identité de genre, les conditions portant atteinte aux droits reconnus par les normes juridiques internationales et pourtant imposées aux personnes voulant changer de genre à l’état civil. Au titre de cette loi, toute personne souhaitant changer de genre à l’état civil devait ne pas être mariée et ne pas avoir d’enfant mineur, être âgée d’au moins 20 ans et être stérilisée ou dans l’incapacité, d’une autre façon, de se reproduire. Elle était également obligée de subir une intervention chirurgicale pour que ses organes génitaux ressemblent le plus possible à ceux du nouveau genre juridiquement adopté, et devait passer un examen psychiatrique pour l’établissement d’un diagnostic.

Droits des personnes réfugiées ou migrantes

Les autorités ont continué de soumettre les personnes demandeuses d’asile ou migrantes en situation irrégulière à une détention de durée indéterminée et à des mauvais traitements, notamment à travers la privation de soins médicaux adéquats, dans les centres de détention des services de l’immigration. En mars, une Sri-Lankaise âgée de 33 ans, Ratnayake Liyanage Wishma Sandamali, est morte pendant sa détention par les services de l’immigration. Le rapport d’enquête transmis en août par l’agence gouvernementale des services de l’immigration a admis que des dysfonctionnements avaient été relevés dans le système de soins médicaux.

Les autorités ont continué d’utiliser la Loi relative au contrôle de l’immigration et à la reconnaissance du statut de réfugié pour détenir des personnes étrangères sans papiers, y compris des personnes demandeuses d’asile ou migrantes en situation irrégulière, jusqu’à leur expulsion du pays. En février, le gouvernement a soumis un projet de modification de cette loi. Le projet maintenait le recours à la détention par défaut, et les modifications proposées ne prévoyaient pas de durées de détention maximales et continuaient de priver les personnes concernées d’une procédure régulière en ne permettant pas que les décisions de placement en détention fassent l’objet d’un réexamen judiciaire. De plus, malgré un très faible taux annuel d’acceptation des demandes d’asile, qui se situait sous la barre de 1 % depuis 2012, ce texte comprenait des dispositions permettant aux autorités d’expulser les demandeurs et demandeuses d’asile détenus après une procédure d’appel restreinte. Le gouvernement a retiré ce projet de loi en mai en raison d’une levée de boucliers au Japon et de pressions internationales.

En septembre, la haute cour de Tokyo a jugé que la décision ordonnant l’expulsion de deux hommes sri-lankais le lendemain du rejet de leur demande d’asile était inconstitutionnelle. Elle a fait valoir que fondamentalement, les responsables des services de l’immigration avaient ainsi privé ces hommes du droit à un recours, et elle a ordonné à l’État à leur verser une indemnité de 600 000 yens (environ 5 300 dollars des États-Unis).

Peine de mort

Yasutaka Fujishiro, Mitsunori Onogawa et Tomoaki Takanezawa, trois hommes qui avaient été condamnés à mort, ont été pendus le 21 décembre. Il s’agissait des premières exécutions depuis 2019. Tous trois avaient été déclarés coupables de meurtre. Yasutaka Fujishiro souffrait d’un trouble de la personnalité. Au moment de leur exécution, Mitsunori Onogawa et Tomoaki Takanezawa attendaient les réponses à leurs demandes de nouveau procès3.
Iwao Hakamada, qui a été déclaré coupable de meurtre en 1968 et qui a passé 47 ans dans le quartier des condamnés à mort et subi de longues périodes de détention à l’isolement, demeurait en liberté provisoire dans l’attente d’un nouveau procès à la suite d’une décision rendue en 2020 par la Cour suprême. Cette affaire et son premier procès ont mis en évidence des motifs de préoccupation persistants portant sur l’utilisation par la police de la torture afin d’obtenir des « aveux ».

« Japon. Le gouvernement doit adopter une loi prévoyant la tolérance zéro pour les discriminations contre les personnes LGBTI », 1er juin

« Japon. La première décision judiciaire sur l’égalité devant le mariage marque un grand pas en avant vers l’égalité », 17 mars

« Japon. Les odieuses exécutions anéantissent les espoirs de progrès avec le nouveau Premier ministre », 21 décembre

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