Moldavie - Rapport annuel 2021

carte Moldavie rapport annuel amnesty

République de Moldova
Cheffe de l’État : Maia Sandu
Cheffe du gouvernement : Natalia Gavrilița (a remplacé Aureliu Ciocoi en août)

La torture et les autres mauvais traitements persistaient dans le pays. L’impunité pour les graves violations commises dans le passé par des organes chargés de l’application des lois demeurait généralisée. Des préoccupations perduraient en matière d’équité des procès. Le contrôle judiciaire des mesures de surveillance et des placements en détention provisoire était insuffisant, selon certaines sources. La lutte contre la violence domestique a peu progressé. Dans la région séparatiste de la Transnistrie, des personnes ayant critiqué les autorités de facto ont fait l’objet de poursuites, et des inquiétudes ont émergé en ce qui concerne le respect du droit à l’éducation.

Contexte

Le bras de fer opposant la présidente au Parlement après la démission du Premier ministre a pris fin en juillet avec des élections législatives anticipées, qui ont débouché sur la formation du premier gouvernement sans coalition depuis 2009.

En septembre, le Parlement a voté en faveur de la nomination d’une nouvelle défenseure nationale des droits, alors que certains milieux s’inquiétaient de ce que cette personne avait été la conseillère juridique de Maia Sandu lors de l’élection présidentielle de 2020, ce qui pouvait donner lieu à un conflit d’intérêts.

La pandémie de COVID-19 a continué d’avoir une incidence négative sur l’économie et sur le niveau de vie de nombreuses personnes, même si des économistes du gouvernement prévoyaient un retour à la croissance pour la fin de l’année. La vaccination anti-COVID-19 a été mise à disposition de la population largement et gratuitement, avec la possibilité de choisir entre plusieurs vaccins, et les autorités en ont fait la promotion lors de campagnes de vaccination intensives dans la capitale, Chisinau, et ailleurs dans le pays. Les vaccins gratuits fournis par des pays occidentaux ont été accueillis avec peu d’enthousiasme dans la région séparatiste de la Transnistrie, où de nombreux habitant·e·s ont préféré le vaccin russe Sputnik ou refusé la vaccination.

Torture et autres mauvais traitements

Aucun progrès visible n’a été fait pour lutter contre la pratique de la torture et d’autres mauvais traitements. La surpopulation, l’insalubrité et d’autres conditions de détention inadaptées ont régulièrement été signalées dans des établissements pénitentiaires destinés aux adultes, aux mineur·e·s ou aux personnes de tous âges.

La défenseure nationale des droits de l’enfant a fait état des conséquences négatives de la pandémie de COVID-19 sur les conditions de détention des mineur·e·s, en particulier pour ceux issus de familles socialement défavorisées. Les plaintes concernant le manque d’accès aux diagnostics et aux soins médicaux étaient fréquentes et le personnel médical des prisons continuait de dépendre de l’administration pénitentiaire au lieu de relever des autorités de santé.

Le 5 février, une émeute dans un établissement pénitentiaire à Brănești a mis en lumière le problème de la hiérarchie informelle et de la violence entre détenu·e·s, que les autorités négligeaient de façon chronique.

Impunité

L’impunité pour de graves violations des droits humains commises dans le passé par des membres des forces de l’ordre, notamment le recours généralisé à la torture et à d’autres mauvais traitements contre des manifestant·e·s pacifiques en 2009, restait généralisée.

Aucune avancée ne semblait avoir eu lieu dans l’affaire de l’enlèvement et du renvoi forcé de sept personnes originaires de Turquie par les services de sécurité moldaves en 2018 depuis l’enquête limitée menée en 2020 et l’unique condamnation à une peine non privative de liberté prononcée la même année. En mars, le Comité des ministres du Conseil de l’Europe a examiné la mise en œuvre de la décision de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) dans cette affaire (Ozdil et autres c. République de Moldova). Il a « réaffirm[é] fermement » la nécessité de garantir le contrôle et l’obligation de rendre des comptes des services de sécurité, et « regrett[é] que les autorités n’aient pas répondu à l’appel du Comité ». En octobre, la Moldavie lui a présenté son plan d’action actualisé quant à l’arrêt de la CEDH, dans lequel elle s’engageait à réexaminer des décisions judiciaires passées et à adopter des dispositions législatives pour améliorer l’obligation de rendre des comptes concernant ses services de sécurité.

Droit à un procès équitable

Des préoccupations perduraient en matière d’équité des procès.

Le réexamen des 38 affaires pénales dont le procureur général avait reconnu qu’elles étaient fondées sur des considérations politiques, auquel il s’était engagé en 2020, n’a pas progressé. Aucune des condamnations prononcées dans ces affaires n’avait été annulée et les poursuites engagées n’avaient pas été abandonnées. Le principal accusé de l’affaire la plus médiatisée, Veaceslav Platon, remis en liberté en 2020 dans l’attente d’un complément d’enquête et d’un nouveau procès, a quitté la Moldavie en juillet. Le procureur général a été accusé par beaucoup de gens d’être responsable de son départ, mais il a balayé ces critiques en les qualifiant d’« ingérence politique » dans son travail. La gestion de ces dossiers à la lumière des soupçons persistants de justice sélective a mis une nouvelle fois en évidence les faiblesses du système judiciaire pénal, sa vulnérabilité face aux ingérences politiques et la nécessité de le réformer.

Droit au respect de la vie privée

Des ONG et des avocat·e·s ont continué de déplorer que l’examen judiciaire des demandes de mise sur écoute de communications privées et de placement en détention provisoire de personnes poursuivies pénalement émanant des forces de l’ordre ne soit pas suffisamment approfondi, si bien que ces demandes étaient presque toujours acceptées. Les garanties prévues dans la législation nationale, telles que l’information obligatoire des personnes mises sur écoute, n’étaient pas respectées.

Lors d’une conférence de presse qui s’est tenue le 4 octobre, le procureur général a accusé un ancien collègue et plusieurs ONG de comploter en vue de le faire tomber et affirmé avoir vu le contenu de leurs communications téléphoniques. Il a été arrêté le lendemain pour plusieurs chefs d’inculpation, dont celui d’abus de pouvoir.

Violences fondées sur le genre

Le 14 octobre, le Parlement a approuvé la ratification de la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (Convention d’Istanbul), signée par la Moldavie en 2017. Peu de progrès tangibles ont été réalisés, toutefois, dans la lutte contre la violence domestique, qui touchait principalement les femmes.

Transnistrie

Liberté d’expression

Les personnes critiques à l’égard des autorités de facto s’exposaient à des poursuites pénales.
En juillet, un retraité, Mikhail Yermuraki, a été reconnu coupable d’« outrage au président » et condamné à une amende équivalant à 600 dollars des États-Unis. Il a été relaxé des deux autres chefs d’inculpation qui avaient été retenus contre lui, « déni du rôle positif des forces russes de maintien de la paix » et « incitation à la haine nationale, raciale et religieuse ».

Le même mois, le militant Gennadiy Chorba a été condamné à trois ans et trois mois d’emprisonnement, pour la même accusation d’outrage au président et pour des faits d’« extrémisme » en lien avec un piquet de grève pacifique auquel il avait participé un an auparavant. Les autorités de facto l’ont accusé d’avoir incité des personnes à manifester et d’avoir tenu des propos désobligeants à l’égard du personnel médical pendant la pandémie.

Droit à l’éducation

En août, les autorités de facto de Transnistrie ont refusé de renouveler l’enregistrement du Lycée théorique Lucian Blaga, seul établissement d’enseignement en langue roumaine de la capitale régionale, Tiraspol, et ont suspendu les activités de l’établissement pendant au moins trois mois. Les raisons de cette décision n’ont pas été précisées. Les autorités de facto ont finalement annulé la suspension au cours du même mois, après l’intervention de l’OSCE et d’autres partenaires internationaux.

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