Les autorités ont arrêté et poursuivi en justice des personnes ayant critiqué le gouvernement, au titre de dispositions de la législation réprimant pénalement les propos considérés comme insultants à l’égard du chef de l’État. Les membres de la minorité bidun (Arabes apatrides) étaient toujours en butte à la discrimination. Les tribunaux ont continué de prononcer des condamnations à mort ; aucune exécution n’a été signalée.
Contexte
En février, l’émir a suspendu le Parlement pendant un mois, déclarant avoir pris cette mesure pour calmer les tensions entre le gouvernement et le Parlement. Ces tensions portaient notamment sur une proposition de loi d’amnistie générale visant à gracier un groupe d’anciens parlementaires de l’opposition condamnés en raison de leur participation à une manifestation en 2011, ainsi que sur la condamnation, à l’issue d’un procès inéquitable, d’un groupe d’hommes poursuivis, entre autres, pour « espionnage au profit de l’Iran et du Hezbollah ». Le 8 novembre, l’émir a accordé une grâce ou une réduction de peine à 35 hommes, dont 11 anciens parlementaires.
Liberté d’expression et de réunion
Les autorités ont arrêté et poursuivi en justice des personnes ayant critiqué le gouvernement ou eu des activités militantes, au titre de dispositions de la Loi sur la cybercriminalité et du Code pénal, notamment pour des propos considérés comme insultants à l’égard de l’émir.
En avril, le gouvernement a approuvé des modifications du Code de procédure pénale empêchant désormais les autorités d’ordonner une détention provisoire dans les affaires liées à la liberté d’expression. Cependant, des personnes pouvaient toujours être poursuivies en justice et finalement emprisonnées pour avoir exprimé leurs opinions.
Fin juin, le poète Jamal al Sayer a publié sur son compte des tweets interpellant et critiquant l’émir au sujet des tensions entre le gouvernement et le Parlement. Le 5 juillet, des membres des services de la Sûreté de l’État en civil l’ont arrêté alors qu’il rentrait chez lui en voiture. Jamal al Sayer a été libéré neuf jours plus tard après avoir été inculpé d’« outrage à l’émir », de « diffusion de fausses nouvelles dans le but de porter atteinte à l’État » et d’« utilisation abusive de son téléphone ». Il a été acquitté le 9 novembre par un tribunal pénal.
Détention arbitraire
Au début du mois de novembre, dans la première affaire de ce type signalée en 2021, les services de la Sûreté de l’État ont arrêté arbitrairement 18 hommes, dont 10 Koweïtiens, qu’ils accusaient d’envoyer de l’argent au Hezbollah, au Liban1. Nombre d’entre eux ont été interrogés pendant plusieurs jours sans pouvoir consulter un avocat. Ces hommes étaient toujours détenus sans inculpation à la fin de l’année.
Droit à la santé
Jusqu’en avril, le Koweït a donné la priorité à ses citoyen·ne·s dans le cadre de sa campagne de vaccination gratuite anti-COVID-19, lancée en décembre 2020. Les personnes étrangères et les travailleuses et travailleurs migrants, qui représentaient jusqu’à 70 % de la population, ont été privés d’accès aux vaccins pendant le premier semestre de l’année, l’élargissement de la vaccination à l’ensemble de la population n’ayant été effective qu’à partir de juillet.
Discrimination
Les bidun
Les bidun (Arabes apatrides) n’avaient toujours pas accès à divers services publics.
Plusieurs propositions de loi relatives aux bidun ont été présentées au Parlement, mais aucune n’a été votée. En mai, cinq députés ont soumis une proposition de loi visant à accorder aux bidun les droits socioéconomiques de base, notamment l’accès à l’éducation, aux soins de santé et à l’emploi. En septembre, le président du Parlement a présenté un texte reprenant la proposition de loi qu’il avait soumise en 2019 et qui, s’il était adopté, conditionnerait l’accès des bidun aux services publics à l’abandon de leur demande de nationalité koweïtienne.
Droits des personnes migrantes
Une décision interdisant le renouvellement du visa des personnes migrantes âgées de plus de 60 ans et n’ayant pas de diplôme universitaire est entrée en vigueur le 1er janvier. En octobre, un organe législatif consultatif a annulé cette décision, qui aurait pu être utilisée pour expulser des milliers de gens, dont beaucoup vivaient au Koweït depuis plusieurs décennies. De nouvelles règles controversées ont ensuite été introduites. Elles permettaient le renouvellement des visas en échange du versement d’une somme annuelle conséquente, venant s’ajouter à la souscription obligatoire d’une assurance maladie privée. Les personnes de nationalité palestinienne, les enfants de mère koweïtienne et les personnes nées au Koweït étaient exemptées du versement de cette somme.
Pendant la pandémie de COVID-19, le Koweït a interdit l’entrée dans le pays aux personnes étrangères, y compris aux travailleuses et travailleurs migrants disposant d’un permis de travail valide. Cette interdiction a été levée le 1er août pour les personnes disposant d’un permis de séjour valide et pouvant apporter la preuve qu’elles avaient reçu deux doses de vaccin anti-COVID-19.
Dans une affaire où, exceptionnellement, une personne responsable de violences à l’encontre d’une travailleuse migrante avait dû répondre de ses actes, la Cour d’appel a annulé fin mai la condamnation à mort prononcée contre une employeuse koweïtienne accusée d’avoir tué sa domestique philippine, Jeanelyn Villavende, et a ramené sa peine à 15 ans d’emprisonnement. La Cour a par ailleurs confirmé la peine de quatre ans d’emprisonnement infligée au mari koweïtien de cette femme.
Droits des femmes
Début février, des femmes koweïtiennes ont lancé leur propre mouvement #MeToo contre le harcèlement sexuel, qu’elles ont baptisé Lan Asket (Je ne me tairai pas).
Au cours de l’année, au moins deux femmes ont été victimes d’homicide, dont une femme bidun tuée par son frère. Dans l’autre affaire, survenue en janvier, Farah Hamza Akbar a été enlevée et séquestrée brièvement par Fahad Subhi Mohieddin Mohammed, qui la harcelait. Elle a porté plainte, mais l’homme a été laissé en liberté, s’étant engagé par écrit à ne pas lui faire de mal ; un procès s’est ouvert pour enlèvement. Mi-avril, il l’a tuée. Il a été condamné à mort le 6 juillet pour assassinat et, le 26 juillet, il s’est également vu infliger une peine de 15 ans d’emprisonnement pour enlèvement. Il a fait appel de ces deux condamnations.
En mai, deux femmes, une Koweïtienne et une bidun, ont été arrêtées pour avoir installé dans la rue des panneaux portant les initiales de femmes victimes de la violence masculine et indiquant la façon dont celles-ci avaient été tuées. Ces deux femmes ont par la suite été relâchées.
Droits des lesbiennes, des gays et des personnes bisexuelles, transgenres ou intersexes
Une femme transgenre, Maha al Mutairi, a été déclarée coupable le 3 octobre par un tribunal pénal d’avoir violé la Loi de 2014 relative aux communications et l’article 198 du Code pénal, qui érigeait en infraction le fait d’« imiter l’autre sexe de quelque manière que ce soit ». Elle a été condamnée à deux ans d’emprisonnement assortis d’une amende pour son activité sur Internet en 2021. Elle a été incarcérée à la prison centrale de Koweït, une prison pour hommes. Elle a fait appel de sa condamnation.
Peine de mort
Les tribunaux ont continué de prononcer des condamnations à mort ; aucune exécution n’a été signalée.
« Koweït. Les autorités doivent libérer des personnes détenues arbitrairement », 14 décembre