Sénégal - Rapport annuel 2022

Sénégal - Rapport annuel 2022

République du Sénégal
Chef de l’État : Macky Sall
Chef du gouvernement : Amadou Ba (à partir de septembre)

Les droits à la liberté de réunion et d’expression ont été restreints. Cette année encore, des enfants ont été forcés à mendier. La vétusté de plusieurs établissements de santé a causé des incendies. Les autorités se sont engagées à réduire les émissions de gaz à effet de serre. Le changement climatique a continué d’entraîner une érosion côtière, qui a eu des répercussions sur les moyens de subsistance.

Contexte

L’opposition a remporté plusieurs municipalités lors des élections locales de janvier, mais la coalition au pouvoir a conservé sa majorité à l’issue des législatives de juillet.

En mars, l’armée sénégalaise a lancé l’opération Nord Bignona pour démanteler les bases rebelles du Mouvement des forces démocratiques de la Casamance (MFDC) à proximité de la frontière avec la Gambie, ainsi que pour lutter contre l’exploitation forestière illégale et le trafic de bois. Selon l’Agence nationale gambienne de gestion des catastrophes (NDMA), cette opération a contraint 691 ressortissant·e·s sénégalais à se réfugier en Gambie. Plus de 5 600 Gambiennes et Gambiens vivant près de la frontière ont également été déplacés de leurs villages respectifs. En août, le Sénégal a signé un accord de paix préliminaire avec une faction du MFDC, lequel prévoyait un désarmement du groupe rebelle et la possibilité pour les personnes réfugiées de rentrer chez elles.

Liberté de réunion

Le 31 mars, la Cour de justice de la CEDEAO a jugé que l’arrêté ministériel no 7580 du 20 juillet 2011, qui interdisait les « manifestations de nature politique » dans le centre de Dakar, la capitale, violait les droits à la liberté d’expression et de réunion pacifique. Elle a demandé aux autorités sénégalaises de l’abroger. En décembre, celles-ci refusaient toujours d’appliquer cette décision.

En juin, les autorités sénégalaises ont interdit plusieurs manifestations de l’opposition sur fond de tensions préélectorales. Le 17 juin, les forces de sécurité ont arrêté au moins trois dirigeants de l’opposition et en ont empêché d’autres de quitter leur domicile, afin d’éviter une manifestation interdite prévue ce jour-là à Dakar. Dethié Fall, représentant national de la liste d’opposition aux législatives, s’est vu infliger une peine de six mois de prison avec sursis pour « participation à une manifestation non autorisée ». Ahmed Aidara, maire de Guédiawaye, a été condamné à un mois de prison avec sursis pour « participation à un attroupement non armé ».

À Ziguinchor, le dirigeant de l’opposition Guy Marius Sagna a été arrêté par la police avec deux autres personnes le 18 juin, alors qu’il allait rendre visite à 33 manifestants appréhendés la veille. Ils ont tous été jugés pour « participation à une manifestation non autorisée » et « troubles à l’ordre public ». Guy Marius Sagna et deux autres militants, Cheikh Sourate Sagna et Amadou Tom Mbodj, ont été condamnés à un mois de prison avec sursis et à une amende de 50 000 francs CFA (environ 76 dollars des États-Unis). Les autres ont été mis hors de cause.

Liberté d’expression

Le 10 juin, le dirigeant de l’opposition Cheikh Abdou Mbacké Bara Dolly a été arrêté et inculpé d’« offense au chef de l’État » de « diffusion de fausses nouvelles » et de « diffamation », après un discours qu’il avait prononcé lors d’une manifestation de l’opposition. Il a été libéré à titre provisoire en juillet.

Le 3 août, Pape Ibra Gueye, un militant surnommé « Papito Kara », a été arrêté et incarcéré pour « le délit de diffusion de fausses nouvelles et celui d’effacement, de modification, de falsification et d’introduction de données informatiques » pour avoir détourné des unes de journaux. Cinq jours plus tard, un autre militant, Outhmane Diagne, a été placé en détention pour les mêmes motifs. Ces deux hommes étaient poursuivis pour avoir créé de fausses unes satiriques de quotidiens.
Pape Alé Niang a été arrêté le 6 novembre par la police, trois jours après avoir diffusé en direct sur Facebook une vidéo dans laquelle il commentait l’audience judiciaire du dirigeant de l’opposition Ousmane Sonko et rendait public un rapport d’enquête interne de la gendarmerie. Il a été inculpé de « recel et publication de documents militaires sans autorisation de la hiérarchie de nature à nuire à la défense nationale », d’« appel à la subversion » et de « diffusion de fausses nouvelles susceptibles de discréditer les institutions publiques ».

Recours excessif à la force

Le 17 juin, à Ziguinchor et à Bignona, les forces de sécurité ont ouvert le feu sur des manifestant·e·s, tuant deux hommes : Idrissa Goudiaby, chauffeur de taxi, et Albert « Abdoulaye » Diatta. Le rapport de l’autopsie initiale d’Idrissa Goudiaby a fait état d’une mort violente par « choc hémorragique suite à une plaie pénétrante du cou causée par une arme blanche contondante et tranchante comme une hache ou un sabre ». Une deuxième autopsie, demandée par la famille et réalisée par trois spécialistes médicaux indépendants, a permis d’établir que le décès était dû à des blessures par balle, ce qui corroborait les déclarations des témoins.

Aucune information supplémentaire n’a été communiquée au sujet de l’enquête sur la mort de 14 personnes, dont 12 tuées par balle, lors des manifestations qui s’étaient tenues dans plusieurs villes du pays en mars 2021.

Torture et autres mauvais traitements

Lors des manifestations de juin, plus précisément le 16 et le 17, les forces de sécurité ont arrêté 11 hommes, les accusant d’« atteinte à la sûreté de l’État », entre autres. Le 29 juin, l’un d’entre eux, François Mancabou, un ancien militaire, a été transféré des geôles de la police à l’Hôpital principal de Dakar, grièvement blessé. Tombé dans le coma, il est décédé le 13 juillet. Sa famille a accusé la police d’avoir causé sa mort en le torturant en détention. La police a rejeté ces accusations et affirmé qu’il s’était blessé lui-même. Aucune enquête n’a été ouverte pour établir les causes de ces blessures mortelles survenues durant sa détention.

Droits des enfants

Le gouvernement a adopté un projet de loi visant à moderniser l’enseignement coranique, mais ce texte n’avait pas encore été soumis au vote du Parlement. Cette loi contribuerait à prévenir la mendicité forcée des enfants et à protéger les droits de ces derniers dans le système éducatif. Le projet de code de l’enfant n’avait pas encore été examiné par le gouvernement.

Droits des lesbiennes, des gays et des personnes bisexuelles, transgenres ou intersexes
En janvier, l’Assemblée nationale a rejeté une proposition de loi qui visait à réprimer pénalement toute orientation sexuelle LGBTI. Le Code pénal sénégalais considérait déjà les relations entre personnes de même sexe comme une infraction. L’examen de ce texte a été précédé d’un mois de campagne hostile aux personnes LGBTI menée par une coalition de groupes qui accusaient les autorités d’affaiblir les mœurs sociales. Les personnes LGBTI ont, cette année encore, été confrontées à diverses pratiques discriminatoires, au harcèlement et à des manœuvres d’intimidation en public.

Droit à la santé

Plusieurs accidents graves sont survenus en raison du mauvais entretien de certains établissements de santé. En mai, 11 nouveau-nés sont morts dans un incendie qui s’est déclaré à la maternité de l’hôpital de Tivaouane du fait de la vétusté du bâtiment. En août, la maternité de l’hôpital de Mbour a pris feu pour la même raison. Les bébés ont pu être secourus et il n’y a pas eu de victimes.

Lutte contre la crise climatique

Le changement climatique a continué de provoquer des sécheresses, des inondations pendant la saison des pluies et des pénuries d’eau. L’érosion causée par la hausse du niveau de la mer s’est traduite par un recul du trait de côte dans certains villages et quartiers de pêcheurs, comme celui de Guet Ndar, à Saint-Louis. Les moyens de subsistance s’en sont trouvés menacés et des habitant·e·s ont été contraints de déménager vers l’intérieur des terres. La construction d’une digue de protection côtière sur une partie de la Langue de Barbarie était en cours.

Toutes les infos

L’avortement est un droit. Parlementaires, changez la loi !

L’avortement est un droit humain et un soin de santé essentiel pour toute personne pouvant être enceinte. Ceci sonne comme une évidence ? Et bien, ce n’est pourtant pas encore une réalité en (…)

2024 - Amnesty International Belgique N° BCE 0418 308 144 - Crédits - Charte vie privée
Made by Spade + Nursit