Chine - Rapport annuel 2022

République populaire de Chine
Chef de l’État : Xi Jinping
Chef du gouvernement : Li Keqiang

Les fortes restrictions liées à la pandémie de COVID-19 ont dans certains cas porté atteinte aux droits à la santé et à une nourriture suffisante. Le gouvernement a continué de museler les critiques à l’égard de sa politique et de ses actions, ainsi que les débats sur des sujets considérés comme sensibles, au moyen d’une censure de plus en plus systématique sur Internet. Des détracteurs et détractrices du régime, des défenseur·e·s des droits humains, des militant·e·s en faveur de la démocratie, ainsi que des dignitaires religieux et des fidèles, entre autres, ont été victimes d’arrestations et de détentions arbitraires. La répression systématique des minorités ethniques du Xinjiang et du Tibet s’est poursuivie. Les autorités ont tenté d’empêcher la publication d’un rapport du HCDH sur de possibles crimes contre l’humanité et autres crimes de droit international perpétrés au Xinjiang. Cette année encore, des femmes ont été victimes de violences sexuelles, de harcèlement et d’autres violations de leurs droits. Le gouvernement de Hong Kong a continué de réprimer le mouvement de lutte pour la démocratie. Des journalistes, des diffuseurs et des éditeurs figuraient parmi les personnes poursuivies et emprisonnées en vertu de la Loi sur la sécurité nationale et d’autres textes répressifs, tandis que les organisations de la société civile, tant à Hong Kong qu’à l’étranger, faisaient l’objet de poursuites pénales ou de harcèlement en rapport avec leurs activités légitimes. En dépit de quelques engagements positifs en matière de politique générale, concernant notamment l’utilisation accrue d’énergies renouvelables, les objectifs de la Chine en matière de réduction des émissions de CO2 ont été jugés « extrêmement insuffisants » et la production de charbon a augmenté.

Contexte

Les autorités ont maintenu leur politique « zéro COVID » pendant la majeure partie de l’année, ce qui a donné lieu à des confinements généralisés et à des quarantaines obligatoires. Les manifestations localisées contre ces sévères restrictions se sont intensifiées à la mi-novembre. Le mouvement de protestation s’est étendu à au moins 20 villes après l’incendie d’un immeuble d’habitation à Urumqi, capitale de la région autonome ouïghoure du Xinjiang, le 24 novembre, qui a fait au moins 10 morts. Les autorités ont nié le fait que la fermeture des portes avait empêché les habitant·e·s de s’échapper, mais ont annoncé un allègement des restrictions liées au COVID-19 à la suite de cet événement.

En mai, Michelle Bachelet, alors haute-commissaire des Nations unies aux droits de l’homme, a effectué une mission de six jours en Chine, dont deux au Xinjiang. En juin, 42 expert·e·s indépendants des droits humains de l’ONU ont appelé le gouvernement chinois à permettre aux procédures spéciales et aux mécanismes des Nations unies de se rendre sans entrave dans le pays, afin de pouvoir évaluer les allégations faisant état de graves violations des droits humains dans le pays, en particulier au Xinjiang, au Tibet et à Hong Kong. Le gouvernement a ratifié en août les conventions de l’OIT no 29 (travail forcé) et no 105 (abolition du travail forcé).
En octobre, le troisième mandat du président Xi Jinping en tant que secrétaire général du Parti communiste chinois (PCC) a été annoncé lors du 20e Congrès national du PCC, faisant craindre que la situation des droits humains continue de se dégrader après une décennie de répression croissante sous sa direction. La Chine a accueilli les Jeux olympiques d’hiver en février.

Droit à la santé

Des pénuries alimentaires et des retards dans les soins d’urgence, voire l’impossibilité d’accéder à de tels soins, ont été signalés dans les zones sous confinement. Un nombre inconnu de personnes sont mortes faute d’avoir été admises à l’hôpital. Dans les centres de quarantaine, où les personnes testées positives au COVID-19 avaient l’obligation de séjourner, les conditions étaient souvent mauvaises et insalubres. Parfois, les enfants étaient séparés de leurs parents en quarantaine.

Le 7 décembre, le gouvernement central a annoncé un allègement considérable des restrictions et, le 26 décembre, il a déclaré que la plupart des éléments de la politique « zéro COVID » seraient supprimés à compter du 8 janvier 2023. Par voie de conséquence, les infections par le COVID-19 et les décès liés au virus ont augmenté et, dans plusieurs villes, les hôpitaux ont été confrontés à des pressions extrêmes et à de graves pénuries de médicaments.

Liberté d’expression et de réunion

Utilisée pour museler toute critique du gouvernement, la censure sur Internet est devenue de plus en plus systématique et perfectionnée, et s’intensifiait autour d’événements et d’anniversaires médiatisés.

La Chine s’était certes engagée, en tant qu’hôte des Jeux olympiques d’hiver, à garantir la liberté de la presse avant et pendant les Jeux et à permettre les manifestations pacifiques, mais elle n’a pas tenu ses promesses. Avant les Jeux, elle a mis en garde les athlètes contre « tout comportement ou discours » qui violerait les « lois et réglementations chinoises ». Des dissident·e·s de premier plan ont été censurés et ont vu leurs déplacements limités. Des journalistes accrédités pour les Jeux ont dénoncé l’ingérence répétée des autorités dans leur travail sur les préparatifs de l’événement et leurs entretiens avec les athlètes et la population locale, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des installations olympiques.

Les autorités ont redoublé d’efforts pour empêcher toute critique des mesures de confinement sur les réseaux sociaux, y compris les appels à l’aide lancés par des personnes confinées et les allégations de violations des droits humains dans les centres de quarantaine. Les pouvoirs publics ont instrumentalisé l’application mobile sur le statut sanitaire relatif au COVID-19 (obligatoire pour entrer dans les bâtiments publics et les magasins, prendre les transports en commun et voyager) pour restreindre indûment le droit de circuler librement et la liberté de réunion pacifique. Ainsi, en juin, lors de manifestations contre le gel des dépôts par les banques de la province du Henan, de nombreuses personnes ont signalé que l’application avait diffusé subitement une alerte rouge exigeant que les utilisateurs et utilisatrices se placent en quarantaine pendant 14 jours. Cinq fonctionnaires locaux ont ensuite fait l’objet de sanctions administratives pour cette manipulation.

En septembre, à l’approche du Congrès national du PCC, l’autorité chargée de réglementer le cyberespace en Chine a lancé une campagne de trois mois destinée à purger Internet des « rumeurs et fausses nouvelles », appelant les entreprises technologiques à renforcer considérablement le suivi, le traçage, les interdictions et les suspensions visant les titulaires de compte. De nouvelles tentatives destinées à bloquer les outils permettant de contourner la censure, comme les réseaux privés virtuels (VPN), ont aussi été signalées.

Le 13 octobre, pendant le Congrès national du PCC, la police a arrêté Peng Lifa après qu’il a déployé sur un pont de Pékin, la capitale, des banderoles critiquant la politique « zéro COVID » du gouvernement et qualifiant le président Xi Jinping de dictateur. Les images de son action de protestation ont fait le tour du monde, mais l’ensemble des vidéos et des mots-clés la concernant ont été supprimés des réseaux sociaux chinois. Selon certaines informations, les autorités auraient arrêté des personnes pour avoir fait circuler des images de cette action.

De nombreuses personnes ont été placées en détention pour avoir participé à des manifestations pacifiques contre les restrictions liées au COVID-19 à la suite de l’incendie fatal d’Urumqi, survenu en novembre. On ignorait combien étaient toujours détenues à la fin de l’année. Des vidéos diffusées en ligne ont montré des policiers en train de frapper des manifestant·e·s lors d’arrestations.

Toute évocation ou commémoration des victimes de la répression des manifestations de 1989 en faveur de la démocratie demeurait interdite. À la veille de l’anniversaire de la répression militaire du 4 juin contre les manifestant·e·s sur la place Tiananmen, une vidéo diffusée en direct par un célèbre influenceur a été interrompue, semble-t-il parce qu’il avait montré une crème glacée en forme de char.

Défenseur·e·s des droits humains

Les autorités ont continué d’emprisonner des défenseur·e·s des droits humains, notamment des journalistes citoyens et des avocat·e·s spécialistes des droits humains. Ces personnes étaient détenues dans des conditions épouvantables et soumises à des actes de torture et d’autres mauvais traitements.

Yu Wensheng, avocat spécialisé dans les droits humains, a été libéré le 1er mars après avoir purgé une peine de quatre ans de prison pour « subversion de l’État », semble-t-il pour avoir critiqué le président. Il a déclaré avoir été aspergé de gaz poivre, forcé à rester assis sur une chaise métallique jusqu’à ce qu’il perde pratiquement connaissance et privé partiellement de nourriture lors de sa détention provisoire1.

En janvier, la journaliste citoyenne Zhang Zhan, condamnée à quatre ans de prison en décembre 2020 pour avoir « cherché à provoquer des conflits et troublé l’ordre public » parce qu’elle avait diffusé des informations sur l’épidémie de COVID-19, a mis un terme à sa grève de la faim pour empêcher les autorités de continuer à l’alimenter de force. On ignorait si cette femme, dont l’état de santé s’était dégradé lors de sa grève de la faim, bénéficiait des soins médicaux dont elle avait besoin.

En avril, des informations ont fait état d’une forte dégradation de l’état de santé de Huang Qi, fondateur et directeur de 64 Tianwang, un site Internet sur les droits humains basé au Sichuan. Cet homme, qui purgeait une peine de 12 ans d’emprisonnement pour ses activités d’information sur la situation des droits humains, ne bénéficiait apparemment pas des soins médicaux dont il avait besoin et n’avait pas accès au compte bancaire sur lequel des ami·e·s et des membres de sa famille avaient déposé de l’argent pour qu’il puisse se procurer des médicaments et d’autres articles. Il n’était pas autorisé à avoir le moindre contact avec sa famille depuis 2020.

Un grand nombre de juristes se trouvaient toujours derrière les barreaux ou faisaient l’objet d’une surveillance stricte. Parmi eux figuraient Xu Zhiyong, universitaire, et Ding Jiaxi, avocat spécialisé dans la défense des droits humains, qui ont été jugés en secreten juin après avoir été inculpés de « subversion de l’État » en octobre 2021. Ces deux hommes étaient des membres de premier plan du Mouvement des nouveaux citoyens, un réseau de militant·e·s mis sur pied pour promouvoir la transparence des pouvoirs publics et dénoncer la corruption. Aucun d’eux n’a pu consulter d’avocat·e dans les mois qui ont précédé leur procès.

En avril, le Groupe de travail sur la détention arbitraire [ONU] a appelé les autorités chinoises à libérer immédiatement Wang Jianbing, défenseur des droits du travail. Cet homme avait été arrêté à Guangzhou en septembre 2021, aux côtés de la militante du mouvement #MeToo Sophia Huang Xueqin. Tous deux inculpés d’« incitation à la subversion de l’État » pour avoir participé à des réunions privées au domicile de Wang Jiabing, où ils débattaient de la réduction de l’espace accordé à la société civile, ils ont été détenus au secret et soumis à des mauvais traitements après leur arrestation.

Liberté de religion et de conviction

Cette année encore, des personnes ont été harcelées et emprisonnées pour avoir pratiqué leur religion ou agi selon leurs convictions. Des dignitaires religieux et des fidèles, dont des personnes appartenant à des églises clandestines, des imams ouïghours, des moines bouddhistes tibétains et des membres du Fa Lun Gong, figuraient parmi les personnes arrêtées et détenues arbitrairement en 2022.

Régions autonomes

La répression systématique des minorités ethniques du Xinjiang et du Tibet s’est poursuivie, sous couvert de « lutte contre le séparatisme, l’extrémisme et le terrorisme ». L’accès à ces deux régions était extrêmement restreint, ce qui rendait presque impossibles le recueil et la diffusion d’informations sur les droits humains. Du fait de la surveillance omniprésente, les personnes vivant dans ces régions ne pouvaient pas fournir de renseignements sur les violations des droits humains.

Xinjiang

Le gouvernement a continué de mettre en œuvre des politiques lourdes de conséquences qui limitaient fortement les libertés des Ouïghour·e·s, des Kazakh·e·s et des membres d’autres minorités ethniques majoritairement musulmanes au Xinjiang, menaçant de faire disparaître leur identité religieuse et culturelle.

Lors de leur visite dans la région, en mai, la haute-commissaire des Nations unies aux droits de l’homme et son équipe n’ont pas été autorisées à rencontrer des personnes détenues ni leurs familles, et ont été en permanence accompagnées par des représentant·e·s de l’État. N’ayant pas pu constater, lors de sa mission sur place, les graves violations des droits humains commises dans le pays, le HCDH a publié en août un rapport attendu de longue date qui confirmait les conclusions antérieures d’Amnesty International et d’autres acteurs, selon lesquelles la détention arbitraire et discriminatoire de Ouïghour·e·s et d’autres personnes au Xinjiang pouvait, du fait de son ampleur, constituer un crime de droit international, et plus précisément un crime contre l’humanité. Il a également recueilli des allégations faisant état d’actes de torture et d’autres mauvais traitements, de violences sexuelles ou fondées sur le genre, de travail forcé et de disparitions forcées, entre autres graves violations des droits humains.

Le gouvernement chinois a tenté d’empêcher la publication de ce rapport, notamment en incitant d’autres États à faire pression contre sa parution. En dépit des conclusions du rapport et des appels lancés par des dizaines d’expert·e·s indépendants des Nations unies pour que le Conseil des droits de l’homme [ONU] tienne une session extraordinaire sur la Chine, celui-ci a voté, le 6 octobre, contre une résolution proposant l’organisation d’un débat sur le Xinjiang à sa prochaine session.

En novembre, le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale [ONU] a appelé le gouvernement chinois à enquêter immédiatement sur toutes les allégations de violations des droits humains perpétrées au Xinjiang et à libérer toutes les personnes privées arbitrairement de liberté dans la région. Bien que les autorités aient affirmé que les camps d’internement dits « de formation » ou « d’éducation » avaient été fermés, des milliers de femmes et d’hommes étaient semble-t-il toujours détenus arbitrairement dans ce type de camps, dans des prisons ou dans d’autres lieux, où des pratiques telles que l’endoctrinement politique, la torture physique et psychologique et d’autres formes de mauvais traitements étaient couramment signalées.
Les autorités chinoises ont continué de prendre pour cible les Ouïghour·e·s et les autres habitant·e·s du Xinjiang qui séjournaient à l’étranger et à faire pression sur d’autres gouvernements pour qu’ils renvoient en Chine des Ouïghour·e·s installés à l’étranger.

En juin, elles ont informé la famille de Zulyar Yasin, étudiant ouïghour de 25 ans, qu’il serait condamné à une peine pouvant aller jusqu’à cinq ans de prison pour « séparatisme ». Ce jeune homme, qui avait passé deux ans en Turquie pour étudier la finance à l’université d’Istanbul, avait été arrêté en décembre 2021. Son procès devait s’ouvrir le 28 juin, mais il a été reporté à deux reprises en raison des confinements liés à la pandémie de COVID-19, avant que la date soit finalement fixée à début 2023.

Quatre Ouïghour·e·s risquaient d’être expulsés d’Arabie saoudite vers la Chine, où ils seraient exposés à de graves violations des droits humains. Les autorités saoudiennes ont arrêté Buheliqiemu Abula et sa fille de 13 ans le 31 mars. L’ancien mari de Buheliqiemu Abula, Nuermaimaiti Ruze, et le dignitaire religieux Aimidoula Waili étaient quant à eux détenus sans inculpation depuis novembre 2020. Aimidoula Waili avait déjà été emprisonné en Chine de 2013 à 2016 et avait indiqué à Amnesty International avoir été torturé à plusieurs reprises en détention.

Idris Hasan, concepteur informatique ouïghour arrêté au Maroc en juillet 2021, était toujours détenu et risquait d’être renvoyé de force en Chine. Interpol a pourtant annulé la « notice rouge » qui constituait le fondement de son arrestation, et le Comité contre la torture [ONU] et d’autres procédures spéciales des Nations unies ont demandé aux autorités marocaines de ne pas l’extrader.

Tibet

Les Tibétain·e·s étaient toujours en butte à la discrimination et leurs droits à la liberté de religion et de conviction, d’expression, d’association et de réunion pacifique restaient soumis à des restrictions. Les manifestations contre la répression exercée par le gouvernement chinois se sont néanmoins poursuivies.

En septembre, le tribunal populaire intermédiaire de Garzê (Ganzi), au Sichuan, a condamné six écrivains et militant·e·s tibétains à des peines d’emprisonnement allant de quatre à 14 ans pour « incitation au séparatisme » et « menace à la sécurité de l’État ». Gangkye Drupa Kyab, Seynam, Gangbu Yudrum, Tsering Dolma et Samdup avaient été arrêtés en mars ou en avril 2021. Pema Rinchen avait été arrêté fin 2020 et est resté en détention au secret jusqu’à son procès. Ces six personnes avaient déjà été emprisonnées arbitrairement par le passé en raison de leurs écrits ou de leur participation à des manifestations contre les autorités chinoises, et plusieurs souffraient de problèmes de santé découlant des coups reçus, des mauvaises conditions de détention et des autres mauvais traitements subis à l’époque.

Le moine tibétain Rinchen Tsultrim était toujours privé de tout contact avec sa famille et de toute possibilité de consulter un·e avocat·e, bien que ses proches aient demandé à maintes reprises à lui rendre visite depuis son placement en détention, en août 2019. Il avait été condamné à quatre ans et demi de prison en novembre 2020, à l’issue d’un procès inéquitable.

Peine de mort

La Chine demeurait le pays au monde qui procédait au plus grand nombre d’exécutions. Les statistiques sur les exécutions et la peine de mort y demeuraient cependant classées « secret d’État ». La peine capitale était toujours applicable pour 46 infractions, dont des infractions n’entraînant pas la mort qui ne relevaient pas de la catégorie des « crimes les plus graves » au regard du droit international et des normes connexes.

Droits des femmes

Le 30 octobre, le corps législatif suprême du pays a adopté une version modifiée de la Loi relative à la protection des droits et des intérêts des femmes. Ce texte, qui devait entrer en vigueur le 1er janvier 2023, contenait de nouvelles dispositions visant à renforcer la protection des femmes sur le lieu de travail, notamment en obligeant les employeurs à éliminer la discrimination fondée sur le genre dans les processus de recrutement et à prévenir le harcèlement sexuel dans le cadre professionnel.

Les violences faites aux femmes, y compris les violences sexuelles et le harcèlement sexuel, demeuraient courantes, et les autorités censuraient les débats publics à ce sujet.

Elles ont ainsi rapidement censuré les discussions sur des faits survenus en juin et enregistrés par des caméras de vidéosurveillance, à savoir l’agression physique de plusieurs femmes par un groupe d’hommes dans un restaurant de Tangshan (province du Hebei), et ont empêché les réseaux sociaux de diffuser les images. Vingt-huit personnes ont été condamnées à des peines d’emprisonnement pour leur rôle dans cette agression. Mao Huibin, un journaliste qui avait publié ces images et un article sur les faits, a été arrêté en juillet et encourait jusqu’à cinq ans d’emprisonnement pour avoir « cherché à provoquer des conflits et troublé l’ordre public ».

En août, le tribunal populaire du district de Haidian a débouté Zhou Xiaoxuan de son appel d’une décision de justice rejetant sa demande d’excuses et de dommages et intérêts de la part du célèbre présentateur de la télévision publique Zhu Jun, qui avait eu des gestes déplacés à son égard et l’avait embrassée de force alors qu’elle effectuait un stage sur la chaîne, en 2014. Du fait de sa prise de position publique contre le harcèlement sexuel, Zhou Xiaoxuan est devenue la cible d’un harcèlement en ligne et de la censure de l’État.

En janvier, une vidéo montrant une femme dans un état de santé mentale et physique déplorable, enchaînée dans une remise à Xuzhou (province du Jiangsu), est devenue virale, suscitant un tollé dans l’opinion publique chinoise. Au moins quatre militant·e·s ont été arrêtés pour avoir enquêté sur cette affaire et l’avoir médiatisée, ainsi que pour avoir soutenu la femme concernée, qu’ils pensaient être victime de traite des êtres humains, ce que les autorités ont nié dans un premier temps. Dans cette affaire, la militante Wu Yi a été jugée en secret pour avoir « cherché à provoquer des conflits et troublé l’ordre public », mais on ignorait à quelle peine elle avait été condamnée et où elle se trouvait. En février, selon les médias, 17 fonctionnaires locaux avaient été sanctionnés ou faisaient l’objet d’une enquête en rapport avec l’affaire. Le ministère de la Sécurité publique a annoncé en mars une campagne d’un an visant à enquêter sur la traite des femmes et des enfants.

Droits des lesbiennes, des gays et des personnes bisexuelles, transgenres ou intersexes

Le militantisme en faveur des personnes LGBTI, tant en ligne que hors ligne, était fortement restreint. Des dizaines de comptes de groupes LGBTI sur les réseaux sociaux étaient toujours fermés, du fait de la censure omniprésente. Les autorités ont également censuré des émissions de télévision et des films, dont elles ont supprimé les contenus en rapport avec les personnes LGBTI.

En juillet, l’université Tsinghua, à Pékin, a envoyé des lettres officielles d’avertissement à deux étudiantes pour avoir « distribué du matériel promotionnel non autorisé ». Des caméras de surveillance les avaient filmées en train de placer des drapeaux arc-en-ciel sur le campus. En novembre, la Commission municipale de l’éducation de Pékin a approuvé la mesure prise par l’université. Les autorités ont censuré les discussions en ligne à propos de cette affaire.

Lutte contre la crise climatique

En 2021, dans le cadre de sa contribution déterminée au niveau national (CDN), la Chine s’était engagée à réduire son intensité carbone de plus de 65 % à l’horizon 2030 par rapport au niveau de 2005, afin d’atteindre son pic d’émissions de CO2 d’ici 2030 et de parvenir à la neutralité carbone « avant 2060 ». En novembre, Climate Action Tracker, une organisation fournissant des analyses scientifiques mondiales, a estimé que les objectifs, politiques et mesures de la Chine étaient « extrêmement insuffisants », car ils ne permettraient pas de contenir le réchauffement en dessous de 1,5 °C.

En mars, le gouvernement a publié un nouveau document de politique générale sur l’initiative « La Ceinture et la Route », un projet d’infrastructure concernant 72 pays. Ce document réaffirmait qu’aucune nouvelle centrale électrique à charbon ne serait construite dans le cadre de cette initiative et que les projets de production électrique basés sur le charbon qui étaient déjà en cours se poursuivraient « avec précaution ».

De nouveaux objectifs nationaux en matière d’énergies renouvelables ont été fixés en 2022 : ils visaient à accroître la production d’électricité provenant de sources renouvelables d’environ 35 % d’ici 2025 par rapport au niveau de 2020. Cependant, la production nationale de charbon a augmenté, bien que les autorités se soient engagées à contrôler la consommation de ce combustible jusqu’en 2025 et à la réduire progressivement ensuite.

Région administrative spéciale de Hong Kong

Les autorités de Hong Kong ont poursuivi leur répression contre les militant·e·s prodémocratie, les journalistes et les défenseur·e·s des droits humains, entre autres. La Loi de 2020 sur la sécurité nationale et d’autres lois répressives ont été fréquemment utilisées contre des personnes exerçant leurs droits à la liberté d’expression, de réunion pacifique et d’association. Le Comité des droits de l’homme [ONU] a exhorté le gouvernement de Hong Kong à abroger la Loi sur la sécurité nationale et les dispositions relatives à la sédition qui figuraient dans l’Ordonnance sur les crimes et, en attendant, à s’abstenir de les appliquer.

En juillet, John Lee, ancien chef de la sécurité de Hong Kong ayant supervisé la répression policière des manifestations de 2019 et la mise en œuvre de la Loi sur la sécurité publique, est devenu chef de l’exécutif de Hong Kong ; il avait été choisi par le gouvernement central de Pékin comme candidat unique aux élections de mai.

Liberté d’expression et de réunion

Au cours de l’année, 11 personnes au moins ont été condamnées à des peines d’emprisonnement en vertu de lois relatives à la sédition qui dataient de l’époque coloniale, pour le seul fait d’avoir exercé pacifiquement leur droit à la liberté d’expression.

En septembre, cinq orthophonistes ont été condamnés à 19 mois d’emprisonnement chacun après avoir été déclarés coupables de sédition ; ils avaient publié des livres pour enfants évoquant un certain nombre de sujets, dont la répression des manifestations de 2019 en faveur de la démocratie.

En octobre, Edmund Wan (surnommé Giggs), présentateur de radio et commentateur spécialisé dans les affaires publiques, a été condamné à 32 mois de prison pour « sédition » et « blanchiment d’argent » ; il avait critiqué le gouvernement et collecté des fonds pour payer les frais de scolarité de jeunes militant·e·s de Hong Kong qui avaient fui à Taiwan après les manifestations de 2019. Giggs, qui était resté détenu pendant 19 mois avant sa condamnation, a été libéré le 18 novembre, mais a dû remettre aux autorités la somme qu’il avait réunie.

Des personnes inculpées en vertu de la Loi sur la sécurité nationale, parmi lesquelles des militant·e·s politiques, des journalistes et des défenseur·e·s des droits humains, étaient maintenues en détention provisoire de manière prolongée. Au 31 octobre, au moins 230 personnes avaient été arrêtées en vertu de cette loi depuis sa promulgation en 2020.

L’espace accordé aux manifestations pacifiques demeurait extrêmement restreint et les personnes qui participaient à des manifestations ou encourageaient d’autres à le faire risquaient des poursuites. En janvier, Chow Hang-tung a été déclarée coupable d’avoir « incité d’autres personnes à participer à un rassemblement non autorisé » et condamnée à 15 mois d’emprisonnement après avoir publié sur les réseaux sociaux, en 2021, un message qui encourageait à commémorer la répression de Tiananmen en 1989. En décembre, elle a remporté son appel contre cette condamnation, mais elle demeurait en prison en attendant d’être jugée pour des charges similaires en vertu de la Loi sur la sécurité nationale, pour lesquelles elle encourait une peine maximale de 10 ans de prison.

Liberté d’association

Les autorités ont continué d’ériger en infraction ou d’empêcher par d’autres moyens les activités légitimes de la société civile. La législation répressive, notamment la Loi sur la sécurité nationale et l’Ordonnance sur les associations, qui conféraient à la police le pouvoir excessif de refuser ou d’annuler l’immatriculation d’une association, voire d’interdire purement et simplement celle-ci, a eu des effets dissuasifs sur les organisations de la société civile. Depuis la promulgation de la Loi sur la sécurité nationale en juillet 2020, plus d’une centaine d’organisations de la société civile ont été contraintes de fermer ou de quitter le pays.

Des restrictions ont aussi été imposées à des groupes plus modestes et plus informels. En juin, la police aurait remis des lettres à au moins cinq représentant·e·s de petits groupes de la société civile, dont des groupes Facebook informels et des réseaux religieux, pour leur ordonner de s’immatriculer sous peine de violer l’Ordonnance relative aux associations.

Cinq anciens membres du conseil d’administration du Fonds d’aide humanitaire 612, créé pour aider les manifestant·e·s de 2019 à régler leurs frais de justice et d’autres dépenses et fermé en 2021, ont été arrêtés en mai, et son ancien secrétaire en novembre, pour « collusion avec des forces étrangères », en vertu de la Loi sur la sécurité nationale. Ils encouraient jusqu’à 10 ans d’emprisonnement. En décembre, ces six personnes ont été déclarées coupables de ne pas avoir immatriculé l’organisation au titre de l’Ordonnance sur les associations. Elles ont été condamnées à des amendes allant de 2 500 à 4 000 dollars de Hong Kong chacune (entre 321 et 513 dollars des États-Unis environ).

Les attaques contre des groupes basés hors de Hong Kong se sont également multipliées. En mars, la police de la sécurité nationale a adressé un courrier au directeur de Hong Kong Watch, accusant cette organisation britannique de se livrer à des activités « compromettant la sécurité nationale » en « faisant pression sur des pays étrangers pour qu’ils imposent des sanctions », entre « autres activités hostiles ». L’organisation était accusée d’avoir enfreint l’article 29 de la Loi sur la sécurité nationale, qui rendait passible de poursuites la « collusion avec des forces étrangères » et prévoyait une compétence extraterritoriale. La police a également bloqué le site Internet de Hong Kong Watch sur le territoire hongkongais.

Les organisations de la société civile se censuraient pour pouvoir mener leurs activités et collecter des fonds. Des plateformes locales de paiement et de financement participatif ont suspendu les comptes de collecte de fonds de deux groupes. L’une de ces plateformes a indiqué à un des groupes qu’elle avait pris cette mesure en raison des « risques excessifs » que comportait l’hébergement de son compte. Dans une autre affaire, trois militants qui avaient engagé une action en justice contre la police de Hong Kong pour des mauvais traitements subis lors d’une manifestation pour les droits fonciers en 2014 ont signalé que leur compte sur une plateforme internationale de financement participatif avait été supprimé parce que l’entreprise estimait qu’il était trop risqué de l’héberger.

Droits des personnes LGBTI

Malgré la création, en 2014, d’un groupe de travail interministériel sur la reconnaissance du genre à l’état civil et une consultation menée en 2017, le gouvernement de Hong Kong n’a pas avancé sur l’élaboration d’une loi en la matière

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