Émirats arabes unis - Rapport annuel 2022

Émirats arabes unis
Chef de l’État : Mohammed ben Zayed al Nahyane (a remplacé Khalifa ben Zayed al Nahyane en mai)
Chef du gouvernement : Mohammed ben Rachid al Maktoum

Les Émirats arabes unis ont mis en application de nouvelles lois restreignant fortement la liberté d’expression et de réunion. Les autorités ont maintenu en détention arbitraire des dizaines de victimes de procès collectifs au-delà de la fin de leur peine et soumis un défenseur des droits humains et un dissident à des mauvais traitements sur une longue période. Le gouvernement a réaffirmé sa position contre la reconnaissance des droits des personnes réfugiées.

Contexte

En mai, à la suite du décès du président Khalifa ben Zayed al Nahyane, son frère Mohammed ben Zayed a été nommé pour sa succession par le Conseil suprême fédéral, composé des dirigeants des sept émirats du pays.

Les Émirats arabes unis ont continué de participer à la coalition militaire qui commettait régulièrement de graves violations du droit international au Yémen (voir Yémen).

Liberté d’expression, d’association et de réunion

Le gouvernement a exercé un contrôle sur les différentes formes d’expression, notamment en censurant des contenus jugés immoraux dans les médias ou au cinéma. Au moins 26 prisonniers émiriens se trouvaient encore derrière les barreaux pour avoir émis pacifiquement des critiques politiques.

En janvier, le parquet a annoncé avoir convoqué « un certain nombre » de personnes qui avaient diffusé sur Internet des vidéos faisant simplement état de tirs de roquettes de la milice yéménite des Houthis contre les Émirats arabes unis. Il a souligné que la couverture de ce type d’événements sur les réseaux sociaux était contraire aux lois du pays.

En juin, le Bureau de réglementation des médias a interdit le film d’animation américain Buzz l’Éclair, car un baiser y était échangé entre deux personnes de même sexe.

Également en juin, le journal Al Roeya, détenu par une entreprise appartenant au vice-premier ministre Mansour ben Zayed al Nahyane, a licencié presque tous ses journalistes et réviseur·se·s après la publication d’un article relatant les réactions de la population émirienne à la hausse des prix de l’énergie. Ce titre de presse écrite a ensuite cessé sa parution, son site Internet étant seulement tenu et alimenté par une équipe réduite ne diffusant que des informations économiques.
En août, le Bureau de réglementation des médias et l’Autorité de régulation des télécommunications et du gouvernement numérique ont ordonné à Netflix de retirer les contenus évoquant des relations homosexuelles de sa plate-forme aux Émirats arabes unis, sous peine de poursuites.

Le nouveau Code des infractions et des sanctions, entré en vigueur le 2 janvier, a réduit certaines peines. Il conservait cependant des dispositions excessivement larges incriminant la liberté d’expression et de réunion, et en comportait une nouvelle qui rendait passible de sanctions la transmission d’informations gouvernementales sans autorisation. L’article 178 interdisait en effet de transmettre « sans licence » toute « information » officielle à une « organisation », ce qui revenait à ériger en infraction la plupart des transmissions d’informations gouvernementales. L’article 184 ramenait à cinq ans la peine maximale encourue par « quiconque se [rendait] coupable de moquerie, d’insulte ou d’atteinte à l’égard du prestige ou de la réputation de l’État » ou de « ses dirigeants fondateurs », qui allait auparavant de 10 à 25 ans d’emprisonnement. L’article 210 allégeait quant à lui la peine applicable pour la participation à des rassemblements publics « susceptibles de nuire à la sécurité publique », la ramenant de 15 ans à trois ans maximum.

L’article 26 de la nouvelle Loi relative à la lutte contre les rumeurs et la cybercriminalité, qui est aussi entrée en vigueur le 2 janvier, prévoyait jusqu’à trois ans d’emprisonnement pour toute personne qui utiliserait Internet pour inciter à manifester sans autorisation du gouvernement.

Détention arbitraire

Des dizaines de personnes ont été placées ou maintenues en détention arbitrairedans le pays. Les autorités ont refusé de libérer au moins 41 prisonniers qui avaient fini de purger leur peine au cours de l’année, portant à 48 le nombre total de personnes dans cette situation en comptant celles qui y étaient déjà les années précédentes. Ces 41 prisonniers faisaient partie des accusés du procès collectif de 94 Émiriens qui s’est déroulé en 2012-2013. Le gouvernement a affirmé que ces détentions s’inscrivaient dans le cadre des « conseils » pour les personnes ayant « adopté des pensées extrémistes », une procédure autorisée au titre de l’article 40 de la loi antiterroriste de 2014. Cette loi exigeait que le parquet obtienne une décision de justice pour toute détention de ce type, mais elle n’accordait pas aux personnes concernées le droit de contester leur incarcération.

Torture et autres mauvais traitements

En juillet, à l’issue de son premier examen consacré aux Émirats arabes unis, le Comité contre la torture [ONU] a exprimé sa préoccupation concernant les informations reçues qui décrivaient une pratique généralisée de la torture et d’autres mauvais traitements contre les défenseur·e·s des droits humains et les personnes accusées d’atteintes à la sécurité de l’État.

Les autorités ont maintenu le défenseur des droits humains Ahmed Mansoor à l’isolement tout au long de l’année, sans lit, matelas, ni oreiller, sans livres ni lunettes et sans aucun article d’hygiène personnelle. Un tel isolement prolongé, surtout associé à des traitements dégradants et inhumains, pouvait être qualifié de torture.

Les autorités ont privé Mohamed al Siddiq, emprisonné depuis 2012 pour avoir exercé son droit à la liberté d’expression, de tout contact téléphonique avec sa famille proche vivant à l’étranger.

Discrimination

Les personnes apatrides nées aux Émirats arabes unis, qui avaient des origines ancestrales en Afrique de l’Est, en Asie du Sud et dans la péninsule arabique, ne bénéficiaient toujours pas de la prise en charge par l’État accordée à celles disposant de la nationalité émirienne dans les domaines de la santé et de l’éducation. Ne pouvant accéder qu’aux établissements privés, elles devaient payer pour recevoir un enseignement et des soins de santé. Les personnes apatrides devaient en outre trouver des « parrains » pour obtenir un permis de séjour temporaire, en l’absence duquel elles étaient considérées comme des « résident·e·s illégaux », et elles ne pouvaient pas occuper des emplois dans le secteur public, mieux payés que ceux du secteur privé.

Droits des lesbiennes, des gays et des personnes bisexuelles, transgenres ou intersexes

En septembre, le gouvernement a ordonné à tous les établissements scolaires du pays de veiller à ce que les enseignant·e·s « s’abstiennent […] d’aborder l’identité de genre, l’homosexualité ou tout autre comportement inacceptable aux yeux de la société émirienne » dans les salles de classe. La loi rendait passibles de poursuites pénales les relations librement consenties entre adultes de même sexe.

Lutte contre la crise climatique

Le pays a augmenté sa production de pétrole. Cela allait à l’encontre des conclusions des Nations unies selon lesquelles les États devaient commencer à réduire cette production pour remplir leurs obligations découlant de l’Accord de Paris sur le climat, auquel les Émirats arabes unis étaient partie. Selon les données de la Banque mondiale, les Émirats arabes unis étaient parmi les cinq pays du monde émettant le plus de CO2 par habitant·e.

Droits des femmes et des filles

En juillet, le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes a constaté, dans ses observations finales, que la législation émirienne était discriminatoire envers les femmes en matière de transmission de la nationalité aux enfants et que le gouvernement maintenait des réserves à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes qui étaient incompatibles avec l’objet de ce traité.

Droits des personnes réfugiées ou migrantes

Les règlements ministériels modifiant la législation en matière d’immigration qui ont été adoptés en juillet ne reconnaissaient toujours pas le droit de demander l’asile.

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