Communiqué de presse

Annulation d’une peine de mort dans une affaire de stupéfiants à Singapour : une décision qui fera date

La substitution en peine de détention à perpétuité de la peine capitale qui avait été prononcée contre un homme déclaré coupable de trafic de drogue à Singapour est une avancée historique, mais cette décision doit s’accompagner de la poursuite des réformes, a déclaré Amnesty International le 14 novembre.

Yong Vui Kong, un Malaisien âgé de 25 ans, se trouve dans le couloir de la mort à Singapour depuis son arrestation pour infraction à la législation sur les stupéfiants, il y a six ans. Le 14 novembre, une haute cour a réduit sa condamnation à mort en peine de réclusion à perpétuité assortie de 15 coups de badine.

« Il s’agit d’une décision historique, a déclaré Roseann Rife, directrice de la recherche sur l’Asie de l’Est à Amnesty International, et c’est probablement la première fois qu’une personne condamnée à mort au titre des dispositions draconiennes de la législation singapourienne en matière de stupéfiants voit sa peine réduite. »

Aux termes de la législation en vigueur lorsque Yong Vui Kong a été condamné, le fait qu’il détenait au moment de son arrestation 47 g d’héroïne était constitutif de trafic de stupéfiants, une infraction entraînant obligatoirement l’application de la peine de mort, ce qui est contraire au droit international.

Le Parlement de Singapour a adopté le 14 novembre 2012 des modifications à la législation et supprimé l’imposition obligatoire de la peine capitale dans certaines affaires de meurtre et de trafic de stupéfiants.

« Yong Vui Kong n’aurait jamais dû passer six ans de détention dans le quartier des condamnés à mort pour une infraction n’entraînant pas la mort et qui, aux termes du droit international, ne doit pas être punie de la peine capitale. Il faut par ailleurs lui épargner les 15 coups de badine, car cette sanction est une peine cruelle, inhumaine et dégradante. »

Yong Vui Kong est l’un des 34 prisonniers dont le cas devait être réexaminé à la suite de la modification de la législation. Quatre seulement ont vu pour l’instant leur peine réduite cette année. Yong Vui Kong est le premier qui avait été condamné dans une affaire de drogue.

«  Il faut maintenant que les autorités singapouriennes donnent suite à la décision de ce 14 novembre et ouvrent un véritable débat sur la peine de mort, en vue de son abolition, a poursuivi Roseann Rife. Nous espérons que d’autres substitutions de peine vont intervenir et que le moratoire sur les exécutions décidé en 2012 va être prolongé indéfiniment. Singapour doit en finir une bonne fois pour toutes avec l’imposition obligatoire de la peine de mort pour les infractions à la législation sur les stupéfiants. »

Complément d’information

Aux termes de la loi modifiée, les tribunaux de Singapour peuvent désormais ne pas imposer la peine de mort dans certains cas. Les personnes accusées d’homicide peuvent maintenant échapper à la peine capitale si elles parviennent à prouver qu’elles n’avaient pas l’intention de donner la mort.

Dans les affaires de stupéfiants, la peine capitale n’est plus obligatoirement prononcée si le prévenu n’est impliqué que dans le transport, l’expédition ou la livraison d’une substance illicite, ou s’il a simplement proposé ses services pour de tels actes. La peine de mort ne doit en outre pas être prononcée contre les personnes dont il est établi qu’elles souffrent d’une « anomalie de l’esprit [...] telle qu’elle entraîne le défaut de responsabilité mentale pour leurs actes et omissions ».

Si ces restrictions à l’imposition obligatoire de la peine de mort constituent une avancée dont on peut se réjouir, il reste que les mesures proposées ne sont pas conformes au droit international relatif aux droits humains et aux normes en la matière. Le recours à la fustigation en tant que peine de substitution et l’inclusion de personnes souffrant d’un handicap mental parmi celles contre qui la peine capitale peut être prononcée sont particulièrement inquiétants. En outre, seuls peuvent être épargnés les prévenus pour lesquels le parquet a constaté qu’ils avaient apporté une aide substantielle à l’Office central des stupéfiants dans ses opérations de lutte contre le trafic de drogue.

Il faut par ailleurs que le jugement du 14 novembre suscite l’ouverture d’un débat en Malaisie, où la peine de mort est toujours en vigueur et est notamment imposée obligatoirement pour les infractions à la législation sur les stupéfiants. Le gouvernement malaisien a annoncé en 2012 qu’il allait examiner la possibilité de remplacer la peine capitale obligatoire par des peines d’emprisonnement, mais uniquement pour les atteintes à la législation sur les stupéfiants et dans certaines circonstances.

Amnesty International s’oppose en toutes circonstances et sans aucune exception à la peine capitale car elle constitue le châtiment le plus cruel, inhumain et dégradant qui soit, ainsi qu’une violation du droit à la vie.

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