Des milliers de personnes victimes d’une expulsion forcée

Les habitants d’Otodo-Gbame, quartier en bordure de voie d’eau à Lagos, au Nigeria, sont victimes d’une expulsion forcée et leurs habitations sont détruites par des bulldozers, les forces de sécurité utilisant du gaz lacrymogène et des balles réelles pour dégager la zone, a déclaré Amnesty International.

Cette expulsion, en cours au moment de la rédaction du présent document, se déroule en violation directe d’une décision de justice rendue en janvier, qui l’interdit expressément. Les habitants n’ont reçu aucun préavis et ont donc été entièrement pris de court par l’opération.

« En ce moment, la situation est chaotique et dangereuse pour les milliers de personnes qui vivent dans le quartier d’Otodo-Gbame. Militaires et policiers sont déployés en nombre et utilisent du gaz lacrymogène et des balles réelles pour disperser les habitants. Quatre bulldozers démolissent le quartier sur leur passage  », a déclaré Morayo Adebayo, chercheur d’Amnesty International sur le Nigeria.

« Ces agissements brutaux et illégaux sont contraires à la dignité humaine et vont à l’encontre d’une décision de la haute cour, qui a interdit aux autorités de procéder à l’expulsion pourtant en cours et leur a enjoint de s’employer à trouver un règlement à l’amiable avec les habitants concernés. Les autorités de l’État de Lagos doivent prendre des mesures pour qu’une aide d’urgence soit fournie aux familles privées de logement ce matin, notamment un abri adéquat, de l’eau, de la nourriture et tous les soins médicaux dont elles pourraient avoir besoin.  »

Julius Oladele, qui vit à Otodo-Gbame avec sa femme et ses deux enfants, a été témoin de l’expulsion et a déclaré à Amnesty International :

« La quasi-totalité des maisons du quartier ont été démolies ; les seules restées debout sont celles construites sur l’eau. Ils n’ont permis à personne de prendre ses affaires. Ils sont en train de chasser les gens. Ma maison a été détruite ce matin, avant que j’aie le temps de revenir du travail. »

Amnesty International appelle les autorités à mettre fin immédiatement à l’expulsion en cours et à se conformer à la décision de justice leur interdisant de procéder à des expulsions forcées dans les quartiers situés en bordure de voies d’eau.

Complément d’information

Cela fait plus de 10 ans qu’Amnesty International recueille des informations sur les expulsions forcées dans l’État de Lagos. Ces expulsions ont lieu sans consultation préalable sérieuse, sans préavis suffisant et sans qu’aucune indemnisation ou solution de relogement ne soit proposée.

Les 9 et 10 novembre 2016, plus de 30 000 habitants du quartier d’Otodo Gbame ont été chassés par la force. Après cette expulsion forcée, les habitants ont reconstruit leurs habitations. Depuis lors, ils continuent à subir des attaques répétées d’acteurs privés et d’agents de sécurité qui cherchent à les chasser des terrains où ils sont établis.

L’expulsion d’aujourd’hui fait suite à la décision rendue le 26 janvier 2017 par la haute cour de l’État de Lagos dans l’affaire évoquée ci-dessus. Le juge a estimé que les expulsions forcées étaient inhumaines, cruelles et dégradantes, et qu’elles constituaient une violation de l’article 34 de la Constitution nigériane. La cour a ensuite enjoint aux parties de tenter de trouver un règlement à l’amiable. Le juge a déclaré : « ... l’expulsion/la menace d’expulsion forcée avec un court préavis et sans aucune solution de relogement immédiat ou possibilité suffisante de trouver une solution de relogement avant l’expulsion du logement actuel [est une mesure] totalement indigne et certainement inhumaine, cruelle et dégradante  ».

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