Communiqué de presse

États-Unis. La Cour suprême rend un arrêt sur Shell dans le delta du Niger qui limite l’accès à la justice dans les affaires de droits humains

Washington — Mercredi 17 avril, la Cour suprême a classé sans suite l’affaire très attendue de Kiobel c. Royal Dutch Petroleum Co, coup dur pour les victimes de violations des droits humains commises dans le delta du Niger. Cette décision restreint fortement la portée de la Loi sur les plaintes déposées par des étrangers, promulguée en 1789.

Elle réduit considérablement l’accès aux tribunaux américains pour toutes les victimes de violations des droits fondamentaux commises hors du territoire des États-Unis. Virage radical par rapport à la jurisprudence, cet arrêt rompt, selon Amnesty International, avec l’évolution vers un renforcement de l’obligation de rendre des comptes pour les graves violations.

La Cour s’est prononcée sur l’affaire Kiobel c. Royal Dutch Petroleum Co. La procédure avait été intentée par des membres du peuple ogoni, dans le delta du Niger, en lien avec les violations des droits humains commises contre eux et leurs familles au milieu des années 1990 par le gouvernement militaire au pouvoir au Nigeria à cette époque.

« L’arrêt de la Cour rendu le 17 avril a ruiné les espoirs des victimes du peuple ogoni, mais aussi ceux des innombrables victimes qui auraient pu bénéficier d’une loi permettant de réclamer justice pour les violations des droits humains restées impunies ailleurs dans le monde", a déploré Michael Bochenek, directeur d’Amnesty International chargé des questions relatives au droit international et à la stratégie politique. "C’est un revirement surprenant par rapport à l’évolution depuis des années vers la garantie que ceux qui commettent les pires abus ou s’en rendent complices ne sont pas au-dessus des lois, quel que soit le lieu où ils agissent. »

Les demandeurs estiment que Shell était complice de ces violations des droits humains – exécutions extrajudiciaires, torture, viols et crimes contre l’humanité notamment. Ils avaient espéré obtenir justice en intentant une action civile contre Shell au titre de la Loi sur les plaintes déposées par des étrangers.

La Cour suprême a jugé que cette loi ne s’appliquait pas à des faits se déroulant en dehors du territoire des États-Unis. Pourtant, c’est sur cette loi que s’appuient depuis 30 ans des victimes d’atteintes aux droits humains de par le monde pour obtenir réparation.

Michael Bochenek a déclaré : « Il est fondamental que les multinationales et les autres acteurs qui sont en mesure de mener leurs activités librement à l’international ne soient pas exclus du champ d’application de la loi. En fait, ils bénéficient souvent de la protection de lois qui s’appliquent de manière extraterritoriale. Mais lorsque les victimes de violations des droits humains tentent d’obtenir justice au-delà des frontières, elles se heurtent à des obstacles considérables. L’arrêt rendu ce jour ferme les portes des palais de justice à nombre d’entre elles."

« La Loi sur les plaintes déposées par des étrangers représentait jusqu’à présent un moyen de défense primordial contre les violations ; la possibilité qu’une affaire soit examinée devant les tribunaux américains au titre de cette loi signifiait que les États-Unis ne serviraient pas de refuge aux auteurs d’atteintes aux droits humains. La Cour suprême place dans les faits la loi de leur côté, rendant encore plus épineux le parcours déjà semé d’embûches des victimes qui réclament qu’ils soient tenus de rendre des comptes.  »

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