Guinée. Les forces de sécurité ont recouru à une « force excessive » lors des manifestations liées à l’élection présidentielle

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

ÉFAI

25 octobre 2010

Amnesty International appelle les autorités guinéennes à enquêter sur les informations selon lesquelles la police a recouru à une force excessive pour réprimer les manifestations organisées la semaine dernière dans la capitale Conakry. Le bilan fait état d’un mort, d’une soixantaine de blessés et de plus de 100 arrestations.

Les forces gouvernementales sont intervenues lors de manifestations organisées par les membres de partis politiques rivaux, après l’annonce du report, pour la troisième fois, du second tour de l’élection présidentielle ce vendredi 22 octobre 2010. Les forces de sécurité ont fait feu sans discrimination sur des civils non armés, ont frappé des manifestants et saccagé des habitations.

« Cette réponse impitoyable et inconsidérée aux manifestations est le dernier épisode des violences imputables aux forces de sécurité guinéennes, dont la cruauté demeure généralement impunie, a indiqué Gaëtan Mootoo, chercheur d’Amnesty International sur la Guinée.

« Les autorités doivent enquêter sur les informations faisant état d’actes de torture et de mauvais traitements imputables aux forces de sécurité guinéennes et inculper toutes les personnes arrêtées, ou les libérer, tout en veillant à ce que les brutalités policières ne fassent pas d’autre victime, alors que l’incertitude plane toujours quant au scrutin. »

Amnesty International croit savoir qu’au moins 15 personnes ont été blessées par les tirs des forces de sécurité. Il a été confirmé que l’une d’entre elles, Ibrahim Khalil Bangourah, est morte des suites de ses blessures.

L’ancien Premier ministre Cellou Dalein Diallo, qui a obtenu 43 % des votes lors du premier tour de l’élection présidentielle en juin, doit affronter lors du second tour le leader de l’opposition Alpha Condé, qui a remporté 18 % des suffrages.

Cependant, le dernier tour de cette élection, censée être le premier scrutin démocratique après 52 ans de régime autoritaire, a été reporté à trois reprises, en raison de « difficultés techniques », selon la commission électorale guinéenne. Il s’agit vraisemblablement du manque de bureaux de vote.

Cette dernière annulation a provoqué deux journées d’affrontements entre les partisans de Cellou Dalein Diallo et d’Alpha Condé, bien que le calme semblait être revenu dimanche 24 octobre. Les partisans rivaux ont en effet respecté l’interdiction de manifester imposée par le gouvernement.

Des témoins ont raconté à Amnesty International que les policiers avaient déshabillé et roué de coups plusieurs manifestants lors des affrontements à Conakry.

« J’étais assis et je mangeais avec ma famille lorsque des membres des forces de sécurité sont arrivés dans la cour. Ils ont envoyé valser les assiettes, nous ont frappés et ont conduit trois d’entre nous au poste de police », a ainsi expliqué une personne arrêtée puis libérée.

Le défenseur des droits humains reconnu Aliou Barry, président de l’Observatoire national de défense des droits de l’homme, a été roué de coups après avoir tenté de dénoncer les violences infligées à d’autres manifestants samedi 23 octobre.

Amnesty International appelle de ses vœux la refonte des forces de sécurité guinéennes depuis des années, notamment depuis le massacre du « Lundi sanglant », le 28 septembre 2009. Ce jour-là et les jours suivants, les forces de sécurité ont tué plus de 150 personnes et violé plus de 40 femmes pendant et après les manifestations contre la décision du chef de l’État, Dadis Camara, de se présenter à l’élection présidentielle.

Plus de 1 500 personnes ont été blessées et beaucoup ont disparu ou ont été arrêtées. De nombreux auteurs du massacre ont conservé leur position d’autorité, à l’abri des poursuites.

Depuis 2004, des armes ou des formations ont été fournies aux forces de sécurité guinéennes par l’Afrique du Sud, l’Allemagne, la Chine, les États-Unis, la France, le Mali, le Maroc et le Nigeria.

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