Communiqué de presse

Kosovo. Amnesty International condamne l’usage excessif de la force par la police

Amnesty International condamne la force excessive avec laquelle la police kosovare a réprimé une manifestation organisée dans la capitale Priština lundi 22 octobre. L’organisation demande aux autorités de mener rapidement une enquête approfondie, effective et impartiale sur toutes les allégations faisant état d’un recours excessif à la force par les policiers kosovars. Si des preuves suffisantes démontrent que des policiers ont employé une force excessive s’apparentant à des actes de torture ou d’autres mauvais traitements, ces policiers doivent faire l’objet de sanctions disciplinaires et, le cas échéant, de poursuites judiciaires.

La manifestation non autorisée avait été organisée lundi devant le Parlement par le parti Vetëvendosje (Autodétermination), afin de protester contre la rencontre entre le Premier ministre kosovar Hashim Thaçi et son homologue serbe Ivica Da ?i ? qui se tenait au Parlement ce jour-là.

Lorsque les policiers ont mis en place un cordon de sécurité pour empêcher la foule d’approcher le bâtiment, certains manifestants ont lancé de la peinture blanche et des tomates en direction des forces de l’ordre. Les policiers ont alors commencé à tirer du gaz lacrymogène pour disperser les manifestants, qui se sont de nouveau rassemblés un peu plus loin. Les policiers ont continué à essayer de disperser la foule à l’aide de gaz lacrymogène et de gaz poivre, et on procédé à des interpellations jusqu’à 18 heures.

D’après les récits de témoins et les informations relayées par les médias, Amnesty International a pu constater qu’un recours excessif à la force avait été employé à l’encontre des manifestants. Certains manifestants ont été plaqués au sol et ont reçu des coups de matraque ou des coups de pied, et un homme âgé à été frappé à la tête avec une matraque. Bien qu’ils n’aient opposé aucune résistance à leur arrestation, les manifestants ont été bousculés et malmenés par les policiers. Des personnes qui étaient assises pacifiquement au sol devant les lignes de police ont également reçu des coups de matraque. D’autres participants auraient été brutalisés même après avoir été maîtrisés et menottés par les policiers.

Plus de 63 personnes ont été appréhendées. L’une d’entre elles a affirmé que des passants et de simples spectateurs avaient également été interpellés, dont des personnes âgées, après avoir demandé à la police ce qui se passait.

Amnesty International est particulièrement préoccupée par l’état de santé d’une ressortissante allemande qui se trouvait par hasard sur le lieu de la manifestation et qui est toujours dans le coma à l’hôpital de Priština. Les circonstances exactes dans lesquelles elle a perdu connaissance n’ont pas encore pu être déterminées.

De nombreuses personnes ont été relâchées mardi soir et ont affirmé avoir subi des mauvais traitements pendant leur détention. Misim Sadriu, 41 ans, a déclaré qu’il avait été conduit dans un bureau du poste de police, puis qu’il aurait été frappé à la tête par un agent de la police spéciale et qu’il aurait saigné de l’oreille. D’autres policiers seraient alors entrés dans le bureau et l’auraient également roué de coups. Les policiers lui ont dit qu’ils le frappaient car il avait été filmé en train d’insulter les forces de l’ordre pendant la manifestation.

Amnesty International a exprimé à plusieurs reprises, la dernière fois en janvier 2012, ses préoccupations concernant la force excessive utilisée par la police kosovare à l’encontre des membres de Vetëvendosje.
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En 2011, le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) a publié un rapport à la suite d’une visite effectuée en juin 2010 au Kosovo, au cours de laquelle il s’était entretenu avec des membres de Vetëvendosje incarcérés au commissariat de Pristina. Dans ce document, le CPT expose ses préoccupations concernant les mauvais traitements infligés à ces personnes lors de leur arrestation.

Le CPT avait alors émis les recommandations suivantes : « Les autorités concernées doivent redoubler d’efforts pour lutter contre les mauvais traitements infligés par les forces de police. Il convient de rappeler une fois de plus à l’ensemble des policiers du Kosovo (y compris aux agents de la brigade criminelle) que les mauvais traitements sous toutes leurs formes à l’égard des détenus sont inacceptables et seront sévèrement sanctionnés. De même, il conviendrait de leur rappeler qu’au moment de procéder à une interpellation, il ne faut pas employer plus de force qu’il n’est strictement nécessaire et que, dès lors que les personnes interpellées sont maîtrisées, rien ne saurait justifier de les brutaliser. »

D’après les normes internationales relatives au maintien de l’ordre, le recours à la force doit être conforme à la législation nationale ainsi qu’à la législation et aux normes internationales relatives aux droits humains, notamment au Code de conduite des Nations unies pour les responsables de l’application des lois et aux Principes de base des Nations unies sur le recours à la force et l’utilisation des armes à feu par les responsables de l’application des lois, qui disposent que « les responsables de l’application des lois doivent s’efforcer de disperser les rassemblements illégaux mais non violents sans recourir à la force et, lorsque cela n’est pas possible, limiter l’emploi de la force au minimum nécessaire. »

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